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20/06/2006 | FRANCE | N°06/01576

France | France, Cour d'appel de colmar, Premiere chambre civile - section a, 20 juin 2006, 06/01576


Le 20 JUIN 2006

COUR D'APPEL DE COLMARPREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRET DU 20 Juin 2006

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 06/01576
Décision déférée à la Cour : 10 Mars 2006 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR
APPELANTE :Madame Annette X... épouse Y......Représentée par Me Claus WIESEL, avocat à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 22 Mai 2006, en chambre du conseil, devant la Cour composée de :M. HOFFBECK, Président de Chambre, entendu en son rapportM. CUENOT, ConseillerM. ALLARD, Conseillerq

ui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Corinne ARMSPACH - SENGLE,
Ministère Pub...

Le 20 JUIN 2006

COUR D'APPEL DE COLMARPREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRET DU 20 Juin 2006

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 06/01576
Décision déférée à la Cour : 10 Mars 2006 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR
APPELANTE :Madame Annette X... épouse Y......Représentée par Me Claus WIESEL, avocat à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 22 Mai 2006, en chambre du conseil, devant la Cour composée de :M. HOFFBECK, Président de Chambre, entendu en son rapportM. CUENOT, ConseillerM. ALLARD, Conseillerqui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Corinne ARMSPACH - SENGLE,
Ministère Public :représenté lors des débats par Monsieur François JURDEY, avocat général, qui a fait connaître son avis et dont les réquisitions écrites ont été communiquées aux parties.
ARRET :- Contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.- signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Christiane MUNCH, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Par requête déposée au greffe le 9 novembre 2005, Madame Annette X... épouse Y... a déclaré se trouver en état d'insolvabilité notoire et a demandé l'ouverture à son bénéfice d'une procédure de liquidation judiciaire civile.
Par un jugement du 10 mars 2006, la Chambre civile du Tribunal de Grande Instance de COLMAR a rejeté la demande, en retenant :
- qu'alors que son mari, ingénieur, a fait l'objet d'une procédure de faillite lorsque le couple vivait en Allemagne et n'a plus d'emploi, Madame Y... continue à travailler en Allemagne où le couple a toujours ses comptes bancaires ;- qu'en l'espèce, la débitrice ne justifie d'aucun revenu en France ;- qu'en outre, la totalité de ses dettes correspond à des dettes contractées en Allemagne, où elle s'était portée caution de son mari ;- que la condition de domiciliation n'est pas acquise, dans la mesure où la débitrice ne justifie pas avoir en France le lieu de ses principaux intérêts.
Selon une déclaration enregistrée au greffe le 22 mars 2006, Madame Y... a interjeté appel de ce jugement.
Par des conclusions déposées le 2 mai 2006, elle a repris devant la Cour ses prétentions initiales.
Au soutien de son appel, elle a fait valoir :
- qu'elle vivait effectivement avec son mari en Allemagne et que, sur les recommandations d'un conseiller fiscal, Monsieur Y... avait investi des sommes importantes dans les nouveaux Länder de l'Allemagne de l'Est, elle-même signant les engagements de son mari comme garant ou codébitrice ;- que les investissements réalisés se sont révélés catastrophiques et le couple, qui vivait essentiellement du salaire d'ingénieur de Monsieur Y..., s'est vu dans l'impossibilité de faire face à ses engagements ;- que Monsieur Y... a sollicité l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire en Allemagne ;- que les créanciers poursuivants ne s'étant adressés qu'à Monsieur Y..., la procédure n'a été ouverte qu'à son encontre devant le tribunal de FRIBOURG ;- que dans le cadre de cette procédure, l'ensemble du patrimoine des consorts Y... a été réalisé, notamment l'immeuble d'habitation qui a été vendu aux enchères ;- que les consorts Y... ont donc été contraints de déménager, étant précisé qu'ils auraient difficilement trouvé à se loger en Allemagne ;- que le contrat de bail, avec effet au 1er mars 2004, relatif à la location d'un appartement à WOLFGANTZEN (Haut-Rhin), est produit en annexe ;- que les consorts Y... s'acquittent de l'impôt sur le revenu en France, de la taxe d'habitation, de la taxe d'assainissement, de factures de consommation d'eaux, de frais de téléphone, d'électricité et de gaz ;- qu'il est ainsi démontré de l'effectivité du domicile en France, et le premier juge ne pouvait ajouter des conditions supplémentaires à la loi, qui résulteraient de la perception de revenus en France ou de l'ouverture d'un compte bancaire ;- qu'il importe peu que les dettes à l'origine de l'insolvabilité notoire aient pu être contractées par son mari en Allemagne ;- que les premières mesures de poursuite à l'encontre de Madame Y... ne sont intervenues qu'au mois de juin 2005, soit plus d'un an après son déménagement en Alsace ;- que la concluante avait d'abord pris attache avec le tribunal de Fribourg pour déposer un dossier comme l'avait fait son mari en 2003 ; qu'il lui a été répondu que les tribunaux allemands n'avaient plus compétence dans la mesure où elle était domiciliée en France ;- que Madame Y... sollicitera une attestation du greffier du tribunal de Fribourg confirmant ce point ;- que sur le fond, l'insolvabilité notoire de la concluante est établie.
Monsieur le Procureur Général a conclu à la confirmation du jugement entrepris.

SUR CE, LA COUR
Vu le dossier de la procédure, les pièces régulièrement versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles la Cour se réfère pour plus ample exposé des faits et moyens ;
Attendu qu'aux termes de l'article L.670-1 du Code de Commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005, applicable à la présente procédure, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire peut être prononcé à l'égard des personnes physiques (et à leur succession) domiciliées dans les départements du Rhin et de la Moselle, et qui ne sont ni commerçants, ni artisans, ni agriculteurs, ni des personnes exerçant toute autre activité professionnelle indépendante, lorsqu'elles sont de bonne foi et en état d'insolvabilité notoire ;
Attendu cependant que, avant d'examiner si les conditions de fond liées à la domiciliation dans les départements du Rhin et de la Moselle, à la bonne foi et à l'insolvabilité notoire sont réunies, et le demandeur étant de nationalité allemande, il convient de vérifier la conformité de la procédure aux dispositions de l'article 3 du Règlement CE no 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, aux termes desquelles seules les juridictions de l'Etat membre sur lequel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir une procédure d'insolvabilité ;
Attendu qu'il est stipulé dans le préambule du Règlement CE que le centre des intérêts principaux "devrait correspondre au lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts et qui est donc vérifiable par les tiers" ;
Attendu ainsi que, pour une personne physique, ce lieu se trouve normalement être le domicile, où la personne manifeste une intention réelle de s'établir et fixe de façon ouverte le centre de ses intérêts ;
Attendu que, s'il est constant que Madame Y... dispose d'une résidence en France depuis le 1er mars 2004 et qu'elle y paye ses impôts, cela ne suffit pas à démontrer qu'elle y a effectivement fixé le centre de ses intérêts principaux ;
Attendu de même que, si le fait de travailler en Allemagne n'est pas exclusif d'une domiciliation en France, c'est à la condition que la fixation des intérêts à une adresse donnée corresponde à une réalité vérifiable ;
Attendu en l'occurrence que les six factures de gaz, d'électricité ou de téléphone produites, relatives au surplus à des consommations tout à fait minimes ou inexistantes (une facture de gaz indique une consommation nulle et une facture France Telecom mentionne l'absence de toute communication), ne sont pas suffisantes à prouver que l'intéressé séjourne réellement et de façon durable à WOLFGANTZEN (Haut-Rhin) ;
Attendu en outre que Madame Y... ne conteste pas sérieusement que la procédure de faillite civile ouverte à l'encontre de son mari à FRIBOURG (Allemagne) n'est pas terminée ;
Attendu que, contrairement à ce qu'elle annonçait dans ses conclusions écrites, elle ne justifie aucunement qu'elle se serait heurtée au refus de la juridiction allemande d'étendre à son égard la procédure collective déjà ouverte à l'encontre de son mari ;
Attendu enfin que, en annexe à sa déclaration d'insolvabilité notoire, Madame Y... a indiqué qu'elle était propriétaire d'un immeuble situé en Allemagne ;
Attendu dans ces conditions qu'il n'est pas suffisamment établi l'intention réelle de Madame Y... de s'installer en France et d'y fixer le centre de ses intérêts principaux ;
Attendu en conséquence que, sans qu'il soit nécessaire de rechercher si les conditions de fond de la mise en faillite de droit local sont réunies, il convient de rejeter l'appel et de confirmer le jugement entrepris ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Constate que ni la régularité formelle, ni la recevabilité de l'appel ne sont contestées ;
Au fond :
Rejette l'appel et confirme le jugement entrepris ;
Condamne Madame Y... aux dépens ;
Le Greffier : Le Président :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Premiere chambre civile - section a
Numéro d'arrêt : 06/01576
Date de la décision : 20/06/2006
Type d'affaire : Civile

Analyses

COMMUNAUTE EUROPEENNE - Règlement n° 1346/2000 du 29 mai 2000

Si le fait de travailler à l'étranger n'est pas exclusif d'une domiciliation en France, c'est à la condition que la fixation des intérêts à une adresse donnée corresponde à une réalité vérifiable. En application de l'article 3 du règlement CE nº 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, dès lors que la débitrice n'apporte pas d'éléménts suffisants à prouver son intention réelle de s'installer en France et d'y fixer le centre de ses intérêts principaux, les juridictions françaises ne sont pas compétentes pour ouvrir une procédure d'insolvabilité au bénéfice de la débitrice


Références :

règlement CE nº 1346/2000 du 29 mai 2000, article 3

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Colmar, 10 mars 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2006-06-20;06.01576 ?
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