AL/EC MINUTE No 06/0278 Copie exécutoire à - La SCP G etamp; T CAHN - D.S. BERGMANN - Me François-Xavier HEICHELBECH - Me SPIESER Le Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION B X... DU 29 Mars 2006 Numéro d'inscription au répertoire général : 3 B 03/05153 Décision déférée à la Cour :
Jugement rendu le 13 Octobre 2003 par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE RIBEAUVILLE APPELANTES : COMMUNE DE LIEPVRE Mairie 68660 LIEPVRE Représentée par la SCP CAHN -. BERGMANN, avocats à la Cour COMMUNE DE RORSCHWIHR Mairie 68590 RORSCHWIHR Représentée par Me Valérie SPIESER, avocat à la Cour Plaidant : Me SONNENMOSER, avocat à STRASBOURG INTIME : Monsieur Gérard Y... Vieux Z... de Bergheim 67600 SELESTAT Représenté par Me François-Xavier HEICHELBECH, avocat à la Cour COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 08 Février 2006, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. LEIBER, Président
Mme SCHIRER, Conseiller
M. STEINITZ, Conseiller
qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : M. DOLLE X... :
- Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- signé par M. Adrien LEIBER, président et M. François DOLLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. Gérard Y..., adjudicataire de deux lots de chasse sur les bans des communes de LIEPVRE et de RORSCHWIHR pour la période du 2 février 1997 au 1er février 2006, a sollicité une réduction des loyers à la suite de l'application de la loi du 26 juillet 2000 dont l'article 24
est venu interdire l'exercice de la chasse à tir une journée par semaine, soit du mercredit 6 heures au jeudi 6 heures.
Par jugement du 13 octobre 2003 le Tribunal d'instance de RIBEAUVILLE a réduit de 1/7ème les loyers des deux lots de chasse à compter du 1er février 2001, en fixant le loyer du lot de chasse no 3 de la commune de RORSCHWIHR à la somme annuelle de 6 533,53 ç et celui du lot de chasse no 1 de la commune de LIEPVRE à la somme annuelle de 20 907,29 ç.
Par déclarations enregistrées au greffe de la Cour respectivement le 12 novembre 2003 et le 10 décembre 2003 les communes de LIEPVRE et de RORSCHWIHR ont interjeté appel de ce jugement.
Les deux procédures d'appel ont été jointes par ordonnance du Conseiller de la Mise en Etat du 14 avril 2004.
Selon conclusions récapitulatives du 3 mars 2005 la commune de RORSCHWIHR fait observer que sur la question en litige l'Institut du Droit Local a émis successivement deux avis divergents qui ne sauraient lier la Cour.
Elle soutient que l'interdiction de chasser le mercredi, issue de la loi du 26 juillet 2000, n'a pas porté atteinte à la substance de la chose louée (territoire de chasse) et n'a pas affecté sa valeur économique (quantités de gibier),
- qu'elle ne diminue pas sensiblement l'exercice du droit de chasse qui est en tout état de cause limité par les lois et règlements en vigueur, notamment quant aux périodes d'ouverture et de fermeture de la chasse,
- que l'intervention de la loi du 26 juillet 2000 ne peut pas être assimilée à un cas fortuit imprévisible et irrésistible,
- qu'en conséquence les dispositions de l'article 1722 du Code Civil ne sauraient trouver application et qu'il n'y a donc pas lieu à réduction du loyer.
Elle conclut à l'infirmation du jugement, au débouté de M. Y... de ses demandes et à sa condamnation aux entiers dépens de première instance et d'appel, augmentés de deux indemnités de 800 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Selon conclusions récapitulatives du 31 août 2005 la commune de LIEPVRE invoque la même argumentation pour conclure également à l'infirmation du jugement, au rejet de la demande de M. Y... et à sa condamnation aux entiers dépens et au paiement d'une somme de 1 000 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile
M. Gérard Y..., reprenant la motivation du jugement et se référant à la doctrine dominante et à diverses décisions judiciaires non frappées d'appel, soutient que l'article 1722 du Code civil est indiscutablement applicable aux baux de chasse et que l'intervention d'une nouvelle loi restreignant l'exercice de la chasse présente les caractéristiques d'un cas fortuit et affecte l'activité pour laquelle le bail a été conclu ; que cette perte de jouissance justifie la réduction du loyer telle que prononcée.
Il conclut au rejet des appels, à la confirmation du jugement et à la condamnation des deux communes appelantes à lui payer, chacune, une indemnité de 1 500 ç en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Vu l'ordonnance de clôture du 3 janvier 2006.
Vu le dossier de la procédure et les documents annexes versés aux débats.
Attendu qu'en l'absence de dispositions spécifiques dans les deux baux de chasse et dans le cahier des charges communales du HAUT-RHIN, la demande de réduction de loyer ne peut être fondée que sur les dispositions générales de l'article 1722 du Code civil invoquées par M. Y...
Attendu que l'intervention de la loi du 26 juillet 2000 en ce qu'elle
interdisait l'exercice de la chasse un jour par semaine, du mercredi 6 heures au jeudi 6 heures, constitue bien un cas fortuit, s'agissant d'un événement extérieur aux parties, irrésistible (sauf à se mettre en infraction à la loi) et imprévisible à la date des adjudications en 1997.
Mais attendu que l'application de l'article 1722 du Code civil suppose qu'il y ait perte totale ou partielle de la chose louée, à laquelle la jurisprudence assimile l'impossibilité d'utiliser les lieux loués conformément à leur destination essentielle.
Attendu qu'en l'espèce qu'il ne s'agit ni d'une modification de la contenance ou des caractéristiques des territoires de chasse loués, ni d'une diminution du gibier susceptible d'être prélevé.
Attendu que l'article 24 de la loi du 26 juillet 2000, abrogé depuis lors, ne privait pas totalement les locataires de la jouissance de leurs lots puisque, même le mercredi, ils pouvaient procéder à leur entretien, le cas échéant à l'agraignage ou à l'affouragement, voire utiliser les postes d'affût pour localiser ou recenser le gibier, la seule interdiction portant sur le tir une journée par semaine.
Attendu que les opérations de battues et de tir étant en tout état de cause réglementées et les chasseurs ne procédant évidemment pas à des tirs journaliers sous peine de voir le gibier s'enfuir vers d'autres territoires, la limitation introduite par la loi du 26 juillet 2000 n'était pas de nature à diminuer la valeur locative des lots de chasse.
Attendu que M. Y... doit donc être débouté de ses demandes en réduction des loyers.
Attendu qu'au vu des circonstances de la cause il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
RECOIT les appels formés par les communes de LIEPVRE et de RORSCHWIHR ;
INFIRME le jugement rendu le 13 octobre 2003 par le Tribunal d'instance de RIBEAUVILLE, et statuant à nouveau ;
DEBOUTE M. Gérard Y... de ses fins et conclusions ;
LE CONDAMNE aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
REJETTE les demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le Greffier,
Le Président,