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08/01/2004 | FRANCE | N°JURITEXT000006944474

France | France, Cour d'appel de colmar, 08 janvier 2004, JURITEXT000006944474


Deuxième chambre civile Section A CC/MM Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A 00/00778 MINUTE N° 04-001 Copie exécutoire aux avocats : Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS SCP G. ET T. CAHN - D.S. BERGMANN - L. RENAUD Me CHEVALLIER-GASCHY Le 8-01-2004 Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR ARRET DU 08 Janvier 2004 Décision déférée à la Cour :

Jugement du 03 Décembre 1999 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE STRASBOURG APPELANTS et demandeur : 1 - Monsieur Michel X..., né le 1er mai 1927 à ACHENHEIM demeurant 6 chemin des Ecolier

s, à 67204 ACHENHEIM et intervenantes volontaires : 2 - Madame Marie...

Deuxième chambre civile Section A CC/MM Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A 00/00778 MINUTE N° 04-001 Copie exécutoire aux avocats : Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS SCP G. ET T. CAHN - D.S. BERGMANN - L. RENAUD Me CHEVALLIER-GASCHY Le 8-01-2004 Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR ARRET DU 08 Janvier 2004 Décision déférée à la Cour :

Jugement du 03 Décembre 1999 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE STRASBOURG APPELANTS et demandeur : 1 - Monsieur Michel X..., né le 1er mai 1927 à ACHENHEIM demeurant 6 chemin des Ecoliers, à 67204 ACHENHEIM et intervenantes volontaires : 2 - Madame Marie-Anne Y..., née X... le 24 juillet 1925 à OBERSCHAEFFOLSHEIM, demeurant 18 rue de la Mairie 67203 OBERSCHAEFFOLSHEIM 3 - Madame Marie Yvonne Z..., née X... le 20 août 1953 à Strasbourg, demeurant 5a chemin des Ecoliers 67204 ACHENHEIM représentés par Maîtres LAISSUE-STRAVOPODIS et BOUDET, avocats à COLMAR plaidant : Maître DIETRICH, avocat à STRASBOURG INTIMÉS et défenderesses : Les héritières de feu M. Eugène A... décédé 1 - Madame A..., née B... Marie C... le 14 novembre 1928, demeurant 9a rue de la Montée, à 67204 ACHENHEIM 2 - Madame Chantal D..., née A... le 20 mai 1950 demeurant 6 rue de la Montée, à 67204 ACHENHEIM représentées par la SCP G. et T. CAHN - D.S. BERGMANN - L. RENAUD, avocats à COLMAR et Mis en cause : 1 - Monsieur Michel A..., demeurant 9a rue de la Montée, à 67204 ACHENHEIM, non représenté, assigné à domicile le 25 juillet 2000 et réassigné à domicile le 18 juin 2001 2 - Madame Irène E..., née A... demeurant 11 rue des Roses, à 67810 HOTZHEIM ad 2 représentée par Maîtres HEICHELBECH, RICHARD-FRICK et CHEVALLIER-GASCHY, avocats à COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Novembre 2003, en audience publique,

devant la Cour composée de :

M. Marc SAMSON, Président de Chambre,

M. Christian CUENOT, Conseiller

M. Philippe ALLARD, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, présent lors des débats : Mme F...,

ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par M. Marc SAMSON, président

- signé par M. Marc SAMSON, président et Mme Nathalie F...,

greffier présent au prononcé.

Attendu que se plaignant en fait d'une captation de l'héritage de leur soeur, Marie Madeleine X..., Messieurs G... et Michel X... ont assigné les époux Eugène A... ainsi que leur fille, Chantal D..., pour obtenir le retour des biens de la défunte dans son patrimoine successoral ;

qu'ils ont critiqué une vente du 18 décembre 1992 ainsi que la souscription d'une assurance-vie le 22 décembre 1992 pour défaut d'aléa ;

qu'ils ont demandé le retour de deux sommes de 214.256,24 F et de 100.000 F, sans préciser nettement le fondement de leur demande de ce chef ;

Attendu que G... X... est décédé en cours de procédure, et que ses héritiers ont poursuivi l'instance ;

Attendu que Monsieur Eugène A... est également décédé, et que l'instance a été reprise contre l'ensemble de ses ayants-droit, dont

son épouse et sa fille déjà présentes dans la procédure, son autre fils Michel A... et sa fille Irène A... épouse E... ; .../... Attendu que par jugement du 3 décembre 1999, le Tribunal de grande instance de STRASBOURG a débouté les consorts X... de l'ensemble de leurs demandes, et les a condamnés à payer aux défendeurs une compensation de 15.000 F sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

Attendu que les consorts X... ont relevé appel de ce jugement le 10 février 2000, dans des conditions de recevabilité qui n'ont pas été contestées, en l'absence de justification de sa signification ;

Attendu qu'au soutien de leur recours, les consorts X... reprennent généralement les moyens et les demandes déjà soumis au premier juge ; qu'ils critiquent à nouveau la vente du 18 décembre 1992 et le contrat d'assurance du 22 décembre 1992 pour défaut d'aléa, en soulignant l'état de Marie-Madeleine X... veuve A..., atteinte d'un cancer dont elle est décédée le 27 janvier 1993 ;

qu'ils demandent la restitution de la somme de 100.000 F, en contestant la qualification de donation pour ce qui était en réalité un retrait effectué par les intimés, et en faisant valoir qu'ils ont payé des droits successoraux sur ce montant ;

qu'ils indiquent qu'une somme de 214.256 F a disparu des comptes des époux A... entre le décès du mari le 9 décembre 1992 et le décès de la femme le 27 janvier 1993, et qu'ils en sollicitent à nouveau la restitution ;

qu'ils concluent en définitive à l'annulation du contrat de vente du 18 décembre 1992, à l'annulation de l'assurance-vie souscrite le 22 décembre 1992, et à la condamnation solidaire des héritiers de Monsieur Eugène A... à restituer les sommes de 214.256,24 F et

100.000 F ;

qu'ils réclament enfin des compensations pour leur obligation de plaider ;

Attendu que Madame Marie C... A... née B... et Madame Chantal D... née A... concluent à la confirmation du jugement entrepris, en contestant notamment l'intérêt de l'action des consorts X..., qui ne sont pas héritiers réservataires de Marie-Madeleine X... née A... ;

qu'ils indiquent à nouveau que les époux G... A... souhaitaient gratifier Eugène A..., et qu'ils voulaient en particulier que le bien immobilier venant de la famille A... reste dans cette lignée ; .../...

qu'ils demandent une compensation de 3.811,23 ä sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

Attendu qu'Irène E... née A... s'associe aux conclusions des autres intimés, tandis que Michel A..., régulièrement assigné, ne comparaît pas ;

Attendu que cette Cour rappelle que G... A... est décédé le 9 décembre 1992, en laissant pour lui succéder son épouse, Marie-Madeleine X..., ainsi que ses trois frères, Eugène, Marcel et Arthur A... ;

Attendu que le 15 janvier 1992, Monsieur G... A... avait souscrit un placement en assurance-vie d'un montant de 30.000 F au profit de son épouse, ou à défaut de son frère Eugène ;

Attendu que le 18 novembre 1992, G... A... ainsi que son épouse avaient donné tous deux une procuration générale à leur nièce, Chantal D... née A..., sur l'ensemble de leurs comptes ouverts auprès du Crédit Mutuel ;

Attendu que Marie-Madeleine X... était hospitalisée pour le traitement d'une tumeur cancéreuse lorsque son époux est décédé ;

qu'elle est sortie de l'hôpital le 14 décembre 1992, et qu'elle a disposé d'une partie de ses biens le 18 décembre ;

Attendu que selon acte reçu par Maître DREYER le 18 décembre 1992, elle a déclaré exercer sur l'immeuble d'habitation commun un droit de prélèvement qui lui avait été conféré par contrat de mariage ;

que ce bien immobilier avait été apporté en communauté par G... A...;

Attendu que par acte reçu le même jour par le même officier ministériel, elle a vendu à Eugène A... le bien immobilier en cause, constitué par la maison des époux A... à ACHENHEIM et par ses dépendances ; .../...

Attendu que le prix de 550.000 F a été défalqué de 110.000 F correspondant à un droit d'usage et d'habitation réservé à la venderesse, de 40.000 F pour des soins consentis aux époux A..., et de 140.000 F pour prix d'une obligation de soin contractée en faveur de Marie-Madeleine X... veuve A... ;

Attendu que l'acquéreur n'a réglé effectivement qu'une somme de 260.000 F, mais qu'il est constant et reconnu qu'une somme de 100.000 F lui a été restituée le même jour ;

que le solde de 160.000 F a servi à souscrire un contrat PREDICA en faveur d'Eugène A... et de sa fille, Chantal D... née A... ;

Attendu que les consorts X... tentent de faire annuler cette vente immobilière en raison d'un défaut d'aléa ;

Attendu que la Cour observe qu'en la forme, l'acte en cause n'est pas essentiellement aléatoire ;

qu'il stipule une obligation de soin en faveur de la venderesse, mais que l'analyse de la clause qui spécifie les modalités de cette obligation montre qu'elle est toute théorique, et qu'elle ne contient guère plus en pratique qu'une obligation de reconnaissance ;

Attendu que le défaut d'aléa peut être invoqué lorsqu'il prive de

cause un contrat aléatoire ;

qu'en l'espèce, si l'on fait abstraction de l'impalpable obligation de soin contractée apparemment par l'acquéreur, il reste une cause nominale dans la fraction du prix de vente stipulé payable au comptant ;

Attendu qu'en réalité, la vente en cause est un acte déséquilibré et simulé ;

que le prix peu important est partiellement dilué en d'irréelles contreparties, et que la fraction payable au comptant a été restituée pour partie immédiatement à l'acquéreur, et pour le surplus convertie en une souscription d'assurance en sa faveur ; .../...

Attendu que le problème n'est donc pas véritablement celui d'un défaut d'aléa, mais celui de savoir dans quelle mesure Madame Marie-Madeleine X... a consenti effectivement à cet acte ;Madeleine X... a consenti effectivement à cet acte ;

Attendu que des éléments de réponse sont donnés par l'audition du notaire et par l'expertise médicale ordonnées par le premier juge ;

que le notaire a indiqué que Madame Marie-Madeleine X... était en pleine possession de ses facultés intellectuelles, et qu'elle voulait gratifier la famille de son mari, étant précisé que l'immeuble aliéné venait de la famille A... ;

que le médecin expert commis par le premier juge a recueilli une déclaration du docteur H..., médecin traitant de Madame A..., selon qui celle-ci était parfaitement consciente et saine d'esprit ; que l'expert mentionne qu'elle aurait demandé conseil au docteur H... pour régler ses affaires et prendre contact rapidement avec son notaire, et qu'elle lui aurait confié après les fêtes de fin d'année qu'elle avait tout réglé selon son désir ;

Attendu donc que rien n'indique que Marie-Madeleine X... veuve A... n'ait pas réellement consenti à cet acte simulé ;

Attendu que la simulation n'est pas une cause de nullité, et qu'elle amène seulement à rétablir la véritable qualification de l'acte ;

Attendu que dans le litige actuel, la requalification de l'acte ne présente aucun intérêt pour les héritiers de Marie-Madeleine X... veuve A..., puisque ce sont des collatéraux non réservataires ;

Attendu qu'il faut rappeler enfin que de son vivant, G... A... avait déjà pris des dispositions en faveur de son frère Eugène, et qu'il avait consenti une procuration au profit de sa nièce, Chantal D... ;

que les dispositions prises ultérieurement par son épouse sont donc dans la continuité de celles qu'il avait prises lui-même initialement ; .../...

Attendu que la vente du 18 décembre 1992 n'est donc pas annulable ;

Attendu qu'il est évidemment vain de chercher à remettre en cause pour défaut d'aléa la souscription d'une somme de 160.000 F par Madame X... veuve A... le 22 décembre 1992 ;

Attendu qu'il s'agit en effet d'un contrat de capitalisation, c'est-à-dire d'un placement financier ;

que ce contrat a bien une cause, et que d'ailleurs dans ce cas, le défaut d'aléa ne pourrait être invoqué en théorie que par l'assureur ;

Attendu que l'on ne voit pas sur quel fondement juridique les héritiers de Madame X... pourraient obtenir le remboursement de la somme de 100.000 F ;

qu'il s'agit en effet d'une partie du prix de vente qui a été restituée à l'acquéreur, dans le cadre des conventions simulées précédemment décrites ;

qu'il a déjà été indiqué que la simulation n'était pas une cause de

nullité des conventions ;

Attendu enfin que les consorts X... sollicitent la restitution d'une somme de 214.256,24 F sans alléguer non plus de fondement particulier ;

Attendu qu'il est exact que l'actif des comptes des époux G... A... a décru entre le décès du mari et celui de l'épouse ;

qu'il ne s'agit pas cependant d'une somme de plus de 214.000 F comme l'indiquent les consorts X... ;

Attendu cependant que rien n'indique que Madame Marie-Madeleine X... veuve A... n'ait pas disposé librement de cet argent ;

que les consorts X... ne sont pas héritiers réservataires, et qu'ils ne peuvent donc pas se plaindre de ce que Marie-Madeleine X... ait disposé de cet argent, fût-ce à titre gratuit ; .../...

Attendu qu'il faudrait savoir enfin qui précisément a bénéficié des transferts, et qu'il n'est pas possible de tourner la difficulté en demandant vaguement la condamnation solidaire de tous les héritiers de Monsieur Eugène A... ;

Attendu qu'au total, c'est à juste titre que l'action des consorts X... a été intégralement rejetée ;

Attendu que la Cour constate cependant que les consorts X... ont été taxés fiscalement sur la somme de 100.000 F restituée à Eugène A... ;

Attendu que dans ces conditions, l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du CPC au profit des consorts A... ;

que leurs demandes de ce chef sont rejetées, tant en première instance qu'en cause d'appel ; P A R C E I... M O T I F I...

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Reçoit l'appel des consorts X... contre le jugement du 3 décembre

1999 du Tribunal de grande instance de STRASBOURG ;

Au fond,

confirme le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés de l'intégralité de leurs demandes ;

L'infirme en ce qu'il a condamné les consorts X... à payer aux consorts A... une compensation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC,

et statuant à nouveau de ce chef,

Déboute les consorts A... de cette demande reconventionnelle ; .../...

rejette pareillement leur demande fondée sur l'application de l'article 700 du CPC en cause d'appel ;

condamne les consorts X... aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Et le présent arrêt a été signé par Monsieur le Président et le Greffier présent au prononcé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006944474
Date de la décision : 08/01/2004

Analyses

VENTE

La simulation n'est pas une cause de nullité, elle amène seulement à rétablir la véritable qualification de l'acte. N'étant pas démontré que le vendeur n'ait pas réellement consenti à cet acte simulé, la vente n'est donc pas annulable.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2004-01-08;juritext000006944474 ?
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