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13/02/2003 | FRANCE | N°99/02211

France | France, Cour d'appel de colmar, 13 février 2003, 99/02211


Deuxième chambre civile Section A MS/MM R.G. N° : 2 A 99/02211 Minute N° 2 M 2003-0160 Copie exécutoire aux avocats : Me François-Xavier HEICHELBECH Me Claude LEVY Le 13-02-03 Le Greffier, RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS X... D'APPEL DE COLMAR ARRET DU 13 FEVRIER 2003 COMPOSITION DE LA X... LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE M. Marc SAMSON, Président de Chambre, M. Christian CUENOT, Conseiller, M. Philippe ALLARD, Conseiller, assesseur, Greffier présent aux débats et au prononcé : Nathalie NEFF, DEBATS en audience publique du 19 Décembre 2002 ARRET CONTRADICTOIRE du 13

Février 2003 prononcé publiquement par le Président. NATUR...

Deuxième chambre civile Section A MS/MM R.G. N° : 2 A 99/02211 Minute N° 2 M 2003-0160 Copie exécutoire aux avocats : Me François-Xavier HEICHELBECH Me Claude LEVY Le 13-02-03 Le Greffier, RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS X... D'APPEL DE COLMAR ARRET DU 13 FEVRIER 2003 COMPOSITION DE LA X... LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE M. Marc SAMSON, Président de Chambre, M. Christian CUENOT, Conseiller, M. Philippe ALLARD, Conseiller, assesseur, Greffier présent aux débats et au prononcé : Nathalie NEFF, DEBATS en audience publique du 19 Décembre 2002 ARRET CONTRADICTOIRE du 13 Février 2003 prononcé publiquement par le Président. NATURE DE L'AFFAIRE : 502 - Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix APPELANTE et demanderesse INTIMÉE SUR INCIDENT : SA SCREG EST, prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social 2 rue Virginie Mauvais 54015 NANCY CEDEX représentée Maîtres HEICHELBECH, RICHARD-FRICK et CHEVALLIER-GASCHY, avocats à COLMAR Plaidant :

Maître PELLETIER, avocat à REIMS

INTIMÉE et défenderesse APPELANTE SUR INCIDENT : SCI SAINT MARC, représentée par son gérant ayant son siège social Immeuble Lutterbach - 4 rue de la Montagne 68100 MULHOUSE représentée par Maître Claude LEVY, avocat à COLMAR

Le 15 octobre 1997, la société SCREG-EST a saisi le Tribunal de Grande Instance de MULHOUSE d'une demande tendant à la condamnation de la SCI SAINT-MARC à lui payer 598.658,40 F au titre de travaux de VRD.

Elle exposait qu'elle avait exécuté ces travaux en qualité de sous-traitante d'une société ARSA-INGENIERIE, actuellement en liquidation judiciaire et qui ne lui avait pas payé ses prestations bien qu'elle même eût perçu de la SCI la totalité du prix convenu entre elles.

Elle invoquait les dispositions de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, et la faute délictuelle commise à son égard par la SCI SAINT-MARC, qui ne l'avait pas agréée comme sous-traitante, alors qu'elle avait parfaite connaissance de son intervention sur les chantiers.

Par jugement du 15 février 1999 le tribunal a très partiellement fait droit à sa demande en condamnant la SCI SAINT-MARC à lui payer 8.000 F à titre de dommages et intérêts.

Le tribunal a admis que la SCI connaissait nécessairement l'intervention de la SA SCREG sur ses chantiers, mais qu'il résultait des pièces produites que la première créance de la SCREG n'était exigible qu'à compter du 30 décembre 1996, et que la SCI SAINT-MARC ayant intégralement réglé la société ARSA-INGENIERIE le 3 janvier 1997, l'action directe n'avait pu être exercée à temps, en sorte que la chance pour la SCREG d'être payée par la SCI SAINT-MARC était minime.

La SA SCREG EST a interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la X... le 27 avril 1999.

Elle rappelle que la SCI SAINT-MARC savait dès l'origine que les travaux de construction clés en main d'un bâtiment commercial, et de rénovation de magasins, qu'elle avait commandés le 12 septembre

1996 à la société ARSA-INGENIERIE, bureau d'études et de maîtrise d'oeuvre, seraient exécutés par des sous-traitants.

Elle souligne une confusion évidente entre l'action directe du sous-traitant, et l'exercice de l'action en responsabilité qui appartient à celui-ci contre le maître de l'ouvrage qui, comme en l'espèce, par son fait, le prive de cette action. .../...

Elle demande en conséquence à la X... de faire droit à ses prétentions initiales, et de rejeter l'appel incident de la SCI SAINT-MARC.

La SCI SAINT-MARC demande pour sa part à la X... d'écarter des débats des pièces non communiquées, de déclarer l'appel de la SCREG irrecevable et mal fondé, et, par voie d'appel incident, de rejeter intégralement les prétentions de la SCREG EST.

Elle relève qei celle-ci a commis une négligence fautive en n'ayant pas veillé à se faire agréer comme sous-traitant, et que cette faute exclut tout droit à indemnisation.

Elle rappelle qu'elle même n'a commis aucune faute dès lors qu'elle n'a pas eu connaissance du sous-traité, et que la demande de paiement direct ne peut prospérer dès lors qu'à la date de réception de la mise en demeure, elle ne devait plus rien à la société ARSA-INGENIERIE.

SUR QUOI, LA X...,

Vu les pièces et les écrits des parties auxquels il est renvoyé pour l'exposé du détail de leur argumentation ;

Attendu, en la forme, que l'appel a été interjeté suivant les formalités légales, que la date de signification du jugement ne résulte pas du dossier, qu'aucun motif n'est développé au soutien de l'irrecevabilité de l'appel soulevée par la SCI SAINT-MARC dans un articulat de pure forme ;

Attendu que la pièce dont la SCI SAINT-MARC demande le retrait pour

défaut de communication constitue le n° 23 de ses propres annexes en sorte qu'il n'y a pas lieu de donner suite ;

Attendu quant au fond, que la SCI SAINT-MARC, maître de l'ouvrage, a, le 13 septembre 1996, chargé la Sàrl ARSA-INGENIERIE de la réalisation clés en main d'un bâtiment à usage commercial à BOURTZWILLER et de la rénovation de deux magasins à ILLZACH et LUTTERBACH, pour le montant de 4.100.000 F HT, payable en quatre fractions jusqu'au 20 décembre 1996 ;.../...

que la société ARSA-INGENIERIE a sous-traité à la SA SCREG EST les travaux de gros-oeuvre impliqués par ces trois opérations ;

que la SCI SAINT-MARC avait, au 3 janvier 1997, payé à la Sàrl ARSA-INGENIERIE la totalité du montant convenu le 13 septembre précédent ;

que les certificats de paiement émis par la Sàrl ARSA-INGENIERIE montrent que la SCREG EST avait alors déjà exécuté les travaux qui lui avaient été commandés ;

que néanmoins la société ARSA-INGENIERIE lui faisait connaître le 28 mars 1997 qu'elle ne pourrait honorer le billet à ordre qu'elle avait accepté pour paiement de ces travaux, à raison de la défaillance d'un client ;

que le 3 juin suivant, la société ARSA-INGENIERIE déposait son bilan ;

que devant cette situation la SA SCREG EST demandait règlement des situations à la SCI SAINT-MARC, qui refusait de les acquitter au motif qu'elle avait déjà intégralement payé la Sàrl ARSA ;

que la SCREG EST lui demandait alors paiement au titre de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 qui impose au maître de l'ouvrage qui a connaissance de la présence d'un sous-traitant sur le chantier, de mettre en demeure l'entrepreneur principal de s'acquitter des obligations qui lui incombent, soit faire agréer le sous-traitant par

le maître de l'ouvrage, et, sauf délégation du paiement, garantir celui-ci par un cautionnement ;

que tel a été le motif de l'assignation devant le tribunal, la SCI SAINT-MARC n'ayant pas donné suite à cette demande ;

Attendu que la X... se réfère aux motifs du jugement quant au fait que la SCI SAINT-MARC connaissait nécessairement l'intervention de la SA SCREG EST sur les chantiers en cause, au vu notamment des énonciations de l'acte d'engagement de la Sàrl ARSA-INGENIERIE et des comptes rendus de chantier diffusés ;

Attendu que la loi du 31 décembre 1975 ne fait aucune obligation au sous-traitant de prendre l'initiative de se déclarer auprès du maître de l'ouvrage ;

qu'il est jugé avec constance que son abstention sur ce point ne constitue pas une faute ; .../...

Attendu par contre que le manquement de la SCI SAINT-MARC à son obligation de mise en demeure de la société ARSA-INGENIERIE de garantir le paiement de son sous-traitant, qui lui était imposée par l'article 14-1de la loi sus-visée dès lors qu'elle avait connaissance de l'intervention de la SA SCREG EST, a pour conséquence l'impossibilité où se trouve cette dernière de se faire payer ses prestations ;

que la mesure du préjudice qui résulte de cette faute doit en conséquence être recherchée dans le prix de ces travaux, et non dans la perte d'une chance de mettre en oeuvre l'action directe ;

que celle-ci relève en effet de la sphère des relations contractuelles, alors que la responsabilité encourue en l'espèce par la SCI SAINT-MARC est de nature délictuelle;

Attendu qu'il est assez évident que la SCI SAINT-MARC a été victime de l'utilisation de ses fonds, par la société ARSA-INGENIERIE, à d'autres fins que le paiement des travaux qu'elle avait commandés ;

que cette circonstance n'est cependant pas de nature à l'affranchir des conséquences de sa faute, ce fait ne constituant pas pour elle le fait d'un tiers ;

qu'à cet égard la X... ne peut manquer de relever qu'elle avait contracté avec la société ARSA-INGENIERIE sur des bases juridiques peu claires, l'expression clés en mains désignant la vente d'un immeuble achevé, et non un marché de travaux ;

que le contrat en cause s'apparente en réalité à celui de promotion immobilière, qui laisse en principe le paiement des entreprises à la charge du maître de l'ouvrage, lequel, en outre, est responsable en tant que mandant des fautes de son mandataire ;

Attendu qu'en tout état de cause c'est à tort que le tribunal a limité à 8.000 F le montant du préjudice subi par la SA SCREG EST ;

qu'il sera en conséquence fait droit à l'appel principal, pour l'équivalent en euros de 598.658,40 F soit 91.264,88 ä, l'appel incident étant, pour sa part, rejeté. .../... P A R C E S M O T I F S La X..., statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

reçoit les appels en la forme ;

faisant droit quant au fond à l'appel principal ;

infirme le jugement entrepris ;

et statuant à nouveau :

condamne la SCI SAINT-MARC à verser à la SA SCREG EST 91.264,88 ä (quatre vingt onze mille deux cent soixante quatre euros et quatre vingt huit cents) avec les intérêts de droit à compter du 15 octobre 1997 ;

rejette l'appel incident ;

condamne la SCI SAINT-MARC en tous les frais et dépens et à verser à la SA SCREG EST 2.000 ä (deux mille euros) par application de

l'article 700 du NCPC ;

Et, le présent arrêt a été signé par Monsieur le Président et le Greffier présent au prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Numéro d'arrêt : 99/02211
Date de la décision : 13/02/2003

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE

Dès lors que le maître d'ouvrage a connaissance de la présence d'un sous-traitant sur le chantier, il doit, conformément aux dispositions de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, mettre en demeure l'entrepreneur principal de s'acquitter des obligations qui lui incombent à savoir, faire agréer le sous-traitant par le maître de l'ouvrage et, sauf délégation de paiement, garantir celui-ci par un cautionnement. Un manquement à cette obligation peut être préjudiciable au sous-traitant qui se trouve dans l'impossibilité de se faire payer ses prestations alors que le maître d'ouvrage a déjà réglé la totalité des travaux à l'entrepreneur.Par ailleurs la loi du 31 décembre 1975 ne fait aucune obligation au sous-traitant de prendre l'initiative de se déclarer auprès du maître de l'ouvrage. La mesure du préjudice qui résulte du manquement du maître de l'ouvrage doit en conséquences être recherchée dans le prix des travaux du sous-traitant, et non dans la perte d'une chance de mettre en oeuvre l'action directe: celle-ci relève en effet de la sphère des relations contractuelles, alors que la responsabilité encourue en l'espèce par le maître de l'ouvrage est de nature délictuelle


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2003-02-13;99.02211 ?
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