MR/SL
COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
Chambre civile - Première section
Arrêt du Mardi 03 Septembre 2024
N° RG 21/02463 - N° Portalis DBVY-V-B7F-G355
Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THONON LES BAINS en date du 16 Novembre 2021
Appelante
S.C.I. COMPOS, dont le siège social est situé [Adresse 1]
Représentée par la SAS MERMET & ASSOCIES, avocats au barreau de THONON-LES-BAINS
Intimée
S.A.R.L. LE RESTAURANT D'[Localité 3], dont le siège social est situé [Adresse 2]
Représentée par la SARL KORUS AVOCATS D'AFFAIRES, avocats au barreau de THONON-LES-BAINS
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Date de l'ordonnance de clôture : 18 Mars 2024
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 02 avril 2024
Date de mise à disposition : 03 septembre 2024
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Composition de la cour :
- Mme Hélène PIRAT, Présidente,
- Mme Myriam REAIDY, Conseillère,
- Madame Inès REAL DEL SARTE, Magistrate honoraire,
avec l'assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,
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Faits et procédure
Par acte authentique du 15 mai 1985, M. et Mme [Y], aux droits desquels se trouve la société Compos (SCI), ont donné à bail, à effet au 15 mai 1985, à M. et Mme [F], aux droits desquels se trouve la société Le Restaurant d'[Localité 3], un bâtiment à usage d'habitation dans lequel devait être exploité un fonds de commerce de café-restaurant-hôtel-épicerie-mercerie-journaux.
Le bail a été renouvelé les 27 mars et 6 avril 1995 et 19 janvier 2006, pour se terminer le 18 janvier 2015.
Par acte extrajudiciaire du 4 juillet 2014, la société Compos a donné congé à la société Le Restaurant d'[Localité 3] pour le 18 janvier 2015 et offert le renouvellement du bail pour une durée de neuf années, à compter du 19 janvier 2015, moyennant le prix de 120 000 euros HT/an et prise en charge de la taxe foncière par la preneuse.
La société le Restaurant d'[Localité 3] a accepté le principe du renouvellement du bail et contesté le loyer réclamé par la société Compos.
Par jugement du 12 avril 2016, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains, a notamment constaté l'accord des parties sur un renouvellement du bail au 19 janvier 2015 pour une durée de neuf années, ordonné une mesure d'expertise afin de permettre de déterminer la valeur locative du local loué et désigné pour y procéder M. [P] [I], et fixé le montant du loyer provisionnel au montant du loyer du bail échu.
Par jugement du 8 novembre 2016, le président du tribunal, saisi d'une requête en omission de statuer, a complété le jugement précité en indiquant qu'il convenait de lire dans le dispositif de cette décision : « il résulte tant des termes du bail expiré que des conditions objectives d'exploitation des lieux loués que les locaux loués sont à usage monovalent ».
L'expert a déposé son rapport le 15 novembre 2016.
La société Le Restaurant d'[Localité 3] a interjeté appel à l'encontre des deux décisions.
Par arrêt du 3 juillet 2018, la cour d'appel de Chambéry a ordonné un complément d'expertise et a désigné M. [P] [I] pour y procéder.
L'expert a déposé son rapport le 15 mars 2019.
Par arrêt du 15 décembre 2020, la cour d'appel de Chambéry a :
- Infirmé les jugements des 12 avril et 8 novembre 2016 en ce qu'ils avaient dit que les locaux objets du bail étaient à usage monovalent,
Et, statuant sur ce seul point,
- Dit que ces locaux étaient à usage polyvalent,
- Renvoyé l'affaire devant le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains,
- Condamné la société Compos à payer à la société à la société Le Restaurant d'[Localité 3] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'affaire a été réinscrite au rôle du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains le 10 janvier 2017 à l'initiative de la société Compos.
Par jugement du 16 novembre 2021, le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains, devenu le tribunal judiciaire, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, a :
- Rejeté l'exception de péremption d'instance soulevée par la société Le Restaurant d'[Localité 3] ;
- Fixé à la somme de 25 971 ,88 euros le montant du loyer annuel, hors charges et hors taxes dû par la société le Restaurant d'[Localité 3] dans le cadre du contrat de bail renouvelé le 19 janvier 2015 conclu avec la société Compos et portant sur un local commercial situé sur la commune dYvoire, chef-lieu ;
- Condamné la société Compos à payer à la société le Restaurant d'[Localité 3] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté la société Compos de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société Compos aux dépens de l'instance.
Au visa principalement des motifs suivants :
Le fait que la décision de la cour d'appel ait une influence essentielle sur les moyens soulevés par les parties devant le juge de première instance et en conséquence sur la décision de ce juge démontre l'existence d'un lien de dépendance direct et nécessaire entre la procédure d'appel et la procédure de première instance ;
Le délai de péremption de la seconde procédure a donc été interrompu par les diligences accomplies par les parties dans le cadre de la première ;
Les éléments versés aux débats ne permettent pas de démontrer une augmentation notable de la fréquentation touristique au cours du bail échu et en conséquence une modification notable du seul facteur local de commercialité susceptible d'influencer favorablement l'activité du preneur, entre la date d'entrée en vigueur du bail échu et la date d'effet du renouvellement du bail ;
L'augmentation du prix du bail renouvelé par rapport au prix du bail échu ne peut donc excéder la variation de l'indice des loyers commerciaux entre la date d'entrée en vigueur du bail échu et la date d'effet du renouvellement du bail.
Par déclaration au greffe du 21 décembre 2021, la société Compos a interjeté appel de la décision en ce qu'il a :
- Fixé à la somme de 25 971 ,88 euros le montant du loyer annuel, hors charges et hors taxes dû par la société le Restaurant d'[Localité 3] dans le cadre du contrat de bail renouvelé le 19 janvier 2015 conclu avec la société Compos et portant sur un local commercial situé sur la commune dYvoire, chef-lieu ;
- Condamné la société Compos à payer à la société le Restaurant d'[Localité 3] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société Compos aux dépens de l'instance.
Prétentions et moyens des parties
Par dernières écritures du 29 février 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Compos sollicite l'infirmation des seuls chefs critiqués de la décision et demande à la cour de :
- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté l'exception de péremption de l'instance soulevée par la société le Restaurant d'[Localité 3] ;
Réformant pour le surplus,
- Ecarter la règle du plafonnement et fixer que le loyer du bail renouvelé à la valeur locative soit, conformément à l'avis de l'expert, à la somme de 69 000 euros HT par année, ledit loyer étant payable à raison de 5 750 euros HT et hors charges par mois entre le 1er et le 5 de chaque mois, avec intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2015, date de l'assignation de fixation du loyer, les intérêts étant calculés sur la différence entre le loyer du bail expiré et le loyer du bail renouvelé ;
- Condamner la société le Restaurant d'[Localité 3] au paiement des sommes précitées ;
- Débouter la société le Restaurant d'[Localité 3] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
- La condamner à lui payer une indemnité de 5 000 euros sur le même fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel dans lesquels sera inclus le coût des deux expertises judiciaires.
Au soutien de son argumentation, la société Compos fait valoir :
' que les jugements du 12 avril et rectificatif du 8 novembre 2016, qui constituent une décision globale mixte, au fond et avant-dire droit, forment un tout indivisible, de sorte que la procédure pendant en appel avait un lien de dépendance direct et nécessaire avec l'instance restée pendante devant le juge des loyers, et que les actes effectuées par les parties dans la procédure d'appel ont interrompu la péremption d'instance encourue devant le premier juge ;
' que les facteurs locaux de commercialité ont significativement évolué, avec la création de parkings permettant l'accueil des visiteurs, que si le nombre de restaurants a augmenté, le développement de leur chiffre d'affaires démontre une fréquentation touristique accrue ;
' que les caractéristiques des locaux ont également été modifiées, en ce que des travaux représentant plus de trois années de loyer ont été réalisés en 2009 et 2010, et que la terrasse du deuxième étage, utilisée pour desservir les chambres d'hôtel, a été utilisée, postérieurement à 1995 et à l'abandon de l'hôtellerie, pour accueillir des clients du restaurant.
Par dernières écritures du 15 mars 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société le Restaurant d'[Localité 3] sollicite de la cour de :
- Infirmer la décision du premier juge en ce qu'il a rejeté l'exception de péremption d'instance qu'elle a soulevée ;
Et statuant à nouveau,
- Prononcer la péremption de la présente instance ;
Subsidiairement,
- Confirmer la décision du premier juge en ce qu'il a fixé le loyer du bail renouvelé à compter du 19 janvier 2015 à la somme annuelle hors taxes et hors charges de 25 971,88 euros,
Plus subsidiairement,
- Lisser l'augmentation du loyer déplafonné fixé à la somme annuelle hors taxes et hors charges de 69 000 euros qui sera payé progressivement par augmentation de 10% ;
En tout état de cause,
- Condamner la société Compos à lui payer une indemnité de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la société Compos aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, la société le Restaurant d'[Localité 3] fait notamment valoir :
' que l'appel des jugements du 12 avril et du 8 novembre 2016 a été joint par le 6 janvier 2017, et qu'une radiation de l'instance a été prononcée le 10 janvier 2017, celle-ci ayant été reprise par mémoire du 3 mai 2021 de la société le Restaurant d'[Localité 3], soit après le délai de péremption de deux ans ;
' que le déplafonnement pour cause de déspécialisation partielle n'est applicable qu'en cas d'adjonction d'une activité, et non en cas d'abandon d'une partie de celles prévues initialement, et que l'installation de stores sur la terrasse du deuxième étage ne peut constituer une modification des locaux ;
' que la hausse de son chiffre d'affaire ne démontre pas une augmentation de la fréquentation touristique du village d'[Localité 3], et que seul son savoir-faire, issu de ses efforts et de la qualité de la cuisine servie, qui lui permet d'être référencée comme meilleur restaurant gastronomique de la Haute-Savoie, lui a permis de résister à la concurrence accrue sur le secteur.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.
Une ordonnance en date du 18 mars 2024 a clôturé l'instruction de la procédure. L'affaire a été plaidée à l'audience du 2 avril 2024.
MOTIFS ET DECISION
I- Sur la péremption d'instance
L'article 386 du code de procédure civile dispose 'L'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.' L'article 388 du même code précise 'La péremption doit, à peine d'irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen ; elle est de droit. Le juge peut la constater d'office, après avoir invité les parties à présenter leurs observations.'
Il est en outre admis qu'en présence d'une décision de nature mixte, l'ensemble des dispositions définitives et avant-dire droit forment un tout indivisible, de sorte que l'instance entière échappe à la péremption (2e Civ. 4 mars 1987, pourvoi n°85-14-815) et que la péremption doit être écartée lorsque des actes interruptifs sont réalisés par une partie dans une autre procédure en lien de dépendance direct et nécessaire (2e Civ. 11 juillet 2013, pourvoi n°12-15.994).
C'est à l'issue d'une analyse pertinente, exhaustive et exempte d'insuffisance que le premier juge a retenu que :
- le régime juridique de la fixation du bail renouvelé diffère selon la qualification des locaux commerciaux retenue, locaux monovalents, ou polyvalents,
- que l'appel interjeté sur les jugements des 12 avril 2016 et 8 novembre 2016, qui ont retenu une monovalence des locaux commerciaux loués et ordonné une expertise devant servir à déterminer la valeur locative, était en lien de dépendance direct et nécessaire avec l'instance en fixation du loyer commercial restée pendante devant le juge des loyers commerciaux de Thonon-les-Bains,
- que les diligences nécessaires accomplies dans la procédure devant la cour d'appel de Chambéry ont interrompu la péremption de l'instance pendante devant le tribunal de Thonon-les-Bains, laquelle était liée indissociablement à la décision d'appel sur le caractère monovalent ou poloyvalent des locaux loués,
- qu'enfin, il convient de rajouter, de façon superfétatoire, que la décision du premier juge du 10 janvier 2017, de radiation à la demande des parties, était en réalité un retrait du rôle et ne sanctionnait pas une carence des parties dans les diligences à accomplir au cours de l'instance en cours.
Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception de péremption d'instance.
II- Sur la fixation du loyer du bail renouvelé
L'arrêt de la cour d'appel du 15 décembre 2020 a déterminé que les locaux exploités par la société le restaurant d'[Localité 3] sont à usage polyvalent, de sorte que l'article R145-10 ne s'applique pas et que le prix du bail doit être fixé en référence aux articles L145-33, L145-34 et R145-6 du code de commerce.
L'article L145-33 du code de commerce dispose 'Le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative. A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :
1° les caractéristiques du local considéré ;
2° la destination des lieux ;
3° les obligations respectives des parties ;
4° les facteurs locaux de commercialité ;
5° les prix couramment pratiqués dans le voisinage. (...)'
L'article R145-6 du même code précise : 'Les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est située, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire.'
L'article L145-34 prévoit enfin que le prix du bail renouvelé est en principe fixé au montant du loyer révisé selon le taux de variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou celui des activités tertiaires, à moins qu'il ne soit démontré une modification notable des éléments 1 à 4 de l'article L145-33, ce qui justifie la fixation du prix du bail renouvelé à la valeur locative.
C'est à l'issue d'une analyse exhaustive et exempte d'insuffisance que le premier juge a retenu que :
- les travaux réalisés au cours du bail échu au 18 janvier 2006 n'ont pas modifié les caractéristiques du local, le preneur n'ayant réalisé que des travaux de remplacement de la chaudière et du ballon d'eau chaude, pour 7 720,80 euros, et le bailleur ayant réalisé des travaux relevant de l'article 606 du code civil, soit de l'entretien du clos et du couvert,
- les travaux réalisés en 2011 par le locataire, qui a entièrement rénové l'intérieur et installé une cuisine professionnelle, ne peuvent être pris en compte au titre du présent bail,
- il convient d'ajouter que la restauration a toujours été inclue dans les affectations du bail, de sorte qu'il n'y a pas eu de changement d'affectation avec l'abandon d'une partie des activités mentionnées au contrat de bail, et qu'aucune preuve sur la date exacte de cette réorientation de l'activité du locataire n'est versée aux débats,
- seule la preuve d'une augmentation du tourisme dans la cité médiévale d'[Localité 3] est en mesure de constituer une amélioration notable des facteurs de commercialité, l'augmentation de 16% de la population dans une ville de moins d'un millier d'habitant ne paraissant pas de nature à constituer une clientèle régulière pour un restaurant gastronomique proposant une carte avec des prix plus élevés qu'un restaurant classique (menu à 57 euros minimum).
S'agissant du critère de l'augmentation de la fréquentation touristique, M. [I], expert judiciaire désigné a retenu, sur les informations 'communiquées par la mairie', mais non annexées dans son rapport, une évolution de 800 000 visiteurs en 2006 à 1 000 000 en 2011. L'appelante fonde également son argumentation sur l'aménagement de parkings situés en dehors de la ville et permettant l'accès aux piétons (le centre médiéval étant interdit à la circulation) et sur la desserte de la ville par le port via la compagnie générale de navigation sur le lac Léman.
Sur ce point, M. [I] a retenu que sur les trois lignes desservies, les usagers de la N3 sont à 95% des 'pendulaires', des salariés travaillant en Suisse et logeant en France, à 70% pour la N2 et à 60% sur la N1, ce qui relativise la fréquentation touristique par l'intermédiaire des bateaux de la CGN. Il est en outre difficile de déterminer si les navettes lacustres amènent un supplément de touristes ou s'il s'agit simplement d'une modification de leur mode de déplacement.
Il est certain que le parking des remparts, parking privé de 200 places, a été ouvert en 2009, et que les parkings municipaux ont été réorganisés pour accueillir les visiteurs, avec gratuité à partir de 19 heures.
Toutefois, si la fréquentation du village médiéval est estimée à 600 000 personnes en 2006 dans l'extrait de l'enquête sur la région touristique, thèse de M. [Z] [U] versée aux débats, la provenance de ce chiffre n'est pas précisée.
L'appelante ne précise d'ailleurs pas davantage l'origine des chiffres qu'elle retient en page 25, puisqu'elle indique 'la fréquentation du village d'[Localité 3] est passée de 600 000 visiteurs par an en 2005 à 720 000 en 2015", alors que ces chiffres ne correspondent pas non plus à ceux communiqués par la mairie, dont on ignore ce qu'ils comptabilisent exactement (nombre de véhicules ayant payé un stationnement, visiteurs du jardin des 5 sens, appels ou renseignements pris auprès de l'office de tourisme, comptage manuel à l'entrée de la ville médiévale, etc).
A l'inverse, le document 'zoom territoire, (édition 2017, chiffres disponibles au 8 décembre 2017) du pays du léman, vallée verte, les brasses', met en évidence une légère décrue de la fréquentation touristique estivale (2 197 000 personnes au cours de l'été 2006 et 2 108 200 au cours de l'été 2015), et un nombre de visiteurs du jardin des 5 sens à [Localité 3] (labyrinthe aménagé extérieur payant) à 34 975 entrées en 2016. Ce nombre était de 36 869 visiteurs en 2015, selon le même 'zoom territoire' 2017, édité avec les chiffres disponibles au 2 mai 2017, ce qui met en évidence une tendance à la diminution et non à l'augmentation, ce qui est encore illustré par les chiffres clés du tourisme en Savoie Mont Blanc édition 2015, qui énonce une fréquentation touristique du jardin des 5 sens de 40 240 personnes en 2014. Les trois documents précités émanant de Savoie Mont Blanc tourisme permettent en conséquent une comparaison valide de la fréquentation touristique, puisque la même source de données et le même étalon est utilisé : entre 2014 et 2016, la tendance est donc à la baisse (de 40 240 à 34 975 visiteurs), et le bilan du labyrinthe le jardin des 5 sens montre également une baisse du chiffre d'affaires net entre 2013 et 2014 (de 474 783 à 450 714 euros).
En l'absence d'éléments sur les chiffres retenus par l'expert, et alors que, dans un courriel adressé par un employé de la commune du 30 avril 2018, il est indiqué 'la mairie d'[Localité 3] considère que depuis une décennie la fréquentation touristique du site correspond à un million de visiteurs bon an/mal an', aucune augmentation significative de la fréquentation touristique d'[Localité 3] n'est mise en évidence de façon certaine, celle-ci ne pouvant pas se déduire de l'augmentation de la fréquentation des parkings, qui ont été aménagés sur la période, ou de la fréquentation de la CGN. Les chiffres clés du tourisme en Savoie retiennent ainsi en page 49 une 'orientation à la baisse de la fréquentation touristique en Haute-Savoie (-14% de nuitées entre 1998 et 2014)', celles-ci étant passées de 35,5 millions de nuitées en 2006 à 33,6 millions en 2014.
Il n'est enfin pas possible de retenir l'augmentation du chiffre d'affaire de la société le Restaurant d'[Localité 3] ou de certains de ses concurrents comme preuve de l'augmentation de la fréquentation touristique, ces éléments démontrant à la fois le savoir-faire commercial de ces sociétés et leur aptitude à attirer de la clientèle au regard de la qualité des mets servis, malgré un contexte devenu plus concurrentiel avec l'implantation de nouveaux commerces sur la période.
La décision du premier juge sera également confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de déplafonnement du loyer pour le bail courant à compter du 19 janvier 2015.
III- Sur les demandes accessoires
Succombant en son appel, la société Compos supportera les dépens de l'instance, ainsi qu'une indemnité procédurale que l'équité commande de fixer à la somme de 1 500 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société Compos aux dépens de l'instance d'appel, qui comprendront le coût des deux expertises judiciaires réalisées par M. [I],
Condamne la société Compos à payer à la société le Restaurant d'[Localité 3] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, La Présidente,
Copie délivrée le 03 septembre 2024
à
la SAS MERMET & ASSOCIES
la SARL KORUS AVOCATS D'AFFAIRES
Copie exécutoire délivrée le 03 septembre 2024
à
la SARL KORUS AVOCATS D'AFFAIRES