COUR D'APPEL
DE CHAMBERY
Première Présidence
AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le VINGT SEPT AOUT DEUX MILLE VINGT QUATRE,
Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :
Dans la cause N° RG 24/00036 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HQDX débattue à notre audience publique du 16 Juillet 2024 - RG au fond n° 24/00601 - 1ère section
ENTRE
M. [V] [S]
Demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me Jessica RATTIER, avocat au barreau de CHAMBERY
Demandeur en référé
ET
S.A.S. SAVOIE ACQUA CONCEPT, agissant poursuites et diligences de son représentant légalement en exercice, domicilié en cette qualité audit siège social situé [Adresse 1]
Représentée par la SELARL CABINET ALCALEX, avocats au barreau de CHAMBERY
S.A. AXA FRANCE IARD, dont le siège social est situé [Adresse 3]
Représentée par le CABINET RIBES ET ASSOCIES, avocats au barreau de BONNEVILLE
S.A.R.L. BREZAULT LOIC, dont le siège social est situé [Adresse 4]
Représentée par la SCP BESSAULT MADJERI SAINT ANDRE, avocats au barreau de CHAMBERY
Défenderesses en référé
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Exposé du litige
Suivant devis accepté le 21 décembre 2020, M. [V] [S] a confié à la société SAVOIE ACQUA CONCEPT la construction d'une piscine ainsi que divers aménagements dont une pergola, pour un montant de 193 636,80 euros TTC.
La société SAVOIE ACQUA CONCEPT a établi le 12 mai 2023 une facture finale d'un montant de 193 636.80 euros, dont un solde dû de 40 636, 80 euros, après déduction des acomptes versés d'un montant global de 153 000 euros. En l'absence de réglement, il a adressé à M. [V] [S], le 17 novembre 2023, une mise en demeure de payer le solde.
Suivant exploits d'huissiers des 22 et 28 novembre 2023, M. [V] [S] a fait assigner la société SAVOIE ACQUA CONCEPT et la société AXA FRANCE IARD devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Chambéry.
Suivant exploits d'huissier du 26 janvier 2024, la société SAVOIE ACQUA CONCEPT a fait assigner, devant ce même juge, la société BREZAULT LOÎC, en qualité de sous-traitante ayant installé la pergola fournie par la société ART HOME ALU.
Les deux affaires ont fait l'objet d'une jonction à l'audience du 13 février 2024.
Par ordonnance du 16 avril 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Chambéry a :
- ordonné une expertise et désigné pour y procéder M. [E] [F],
- condamné M. [V] [S] à payer à la SASU SAVOIE ACQUA CONCEPT une somme de 20.000 € (vingt mille euros) à titre provisionnel à valoir sur le solde des travaux,
- débouté M. [V] [S] et la SASU SAVOIE ACQUA CONCEPT de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté M. [V] [S] de sa demande au titre des honoraires de Maître [P], commissaire de justice,
- dit que M. [V] [S] et la SASU SAVOIE ACQUA CONCEPT conservent la charge des dépens, partagés par moitié.
M. [V] [S] a interjeté appel de cette décision le 30 avril 2024 (n° DA 24/00594 et n° RG 24/00601) émettant des critiques à l'encontre des chefs de l'ordonnance le condamnant à payer diverses sommes d'argent à la société SAVOIE ACQUA CONCEPT.
Par actes signifiés le 28 mai et le 03 juin 2024, M. [V] [S] a fait assigner la SAS SAVOIE ACQUA CONCEPT, la SA AXA FRANCE IARD et la SARL BREZAULT LOIC devant madame la première présidente de la cour d'appel de Chambéry statuant en référé sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile afin de voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu par le juge des référés du tribunal judiciaire de Chambéry le 16 avril 2024.
L'affaire a fait l'objet d'un renvoi à la demande des parties aux fins de communication des pièces et échange des conclusions.
A l'audience du 16 juillet 2024, M. [V] [S] demande à la Cour, conformément à ses écritures notifiées par voie électronique le 11 juillet 2024, de :
- à titre principal, ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance du 16 avril 2024 rendue par la présidente du tribunal judiciaire de Chambéry ;
- à titre subsidiaire, l'autoriser à consigner la somme de 20 000 euros auprès de la Caisse des dépôts et consignations ;
- en tout état de cause, condamner la société SAVOIE ACQUA CONCEPT, ou qui mieux le devra, à verser à M. [V] [S] la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, il énonce que le constat d'huissier et le rapport d'expertise produits aux débats font état de divers désordres et malfaçons. Il précise que la pergola ne respecte pas les normes de construction et que la mise en conformité de celle-ci implique son démontage dont le coût avoisine le montant de sa condamnation par le juge des référés. Il communique un devis de démontage de la Pergola pour 19 850 euros HT et de fourniture et d'installation d'une nouvelle pergola pour un montant de 129 105.60 euros HT, ainsi qu'un rapport réalisé par un expert honoraire.
Il ajoute que la société SAVOIE ACQUA CONCEPT risque de ne pas restituer le montant de la condamnation en cas de réformation de la décision de première instance car plusieurs avis internet témoignent de ce que ladite société ne répond plus à ses clients une fois le montant des travaux payé en dépit des désordres et des malfaçons. Il estime par ailleurs qu'il existe un risque qu'une procédure de liquidation judiciaire soit ouverte à l'égard de la société SAVOIE ACQUA CONCEPT.
La société SAVOIE ACQUA CONCEPT demande à la Cour, conformément à ses écritures notifiées par voie électonique le 15 juillet 2024, de :
- juger qu'il n'existe en l'espèce aucun moyen sérieux d'annulation ou de réformation, ni même que l'exécution attachée à la décision déférée risque d'entrainer des conséquences manifestement excessives, justifiant de l'arrêt de l'exécution provisoire attachée à la décision déférée ;
- rejeter dès lors la demande présentée par M. [V] [S] visant à voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance du 16 avril 2024 rendue par madame la présidente du tribunal judiciaire de Chambéry, statuant en référé, ou encore à voir autoriser M. [V] [S] à consigner la somme de 20 000 euros auprès de la Caisse des dépôts et consignations ;
- rejeter la demande présentée par M. [V] [S] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
- le débouter en conséquence de l'intégralité de ses moyens fins et prétentions ;
- le condamner en revanche à payer à la société SAVOIE ACQUA CONCEPT une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- le condamner aux entiers dépens de la présente instance, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, elle énonce que M. [V] [S] bénéficie de la garantie de parfait achèvement et qu'il ne peut dès lors refuser de payer le montant des travaux réalisés. Elle précise que celui-ci s'est d'ailleurs opposé à la reprise des travaux.
Elle ajoute que le faible nombre d'avis internet négatifs est contredit par le nombre important d'avis internet positifs. Elle indique par ailleurs que la société SAVOIE ACQUA CONCEPT est une filiale de la holding ALEXIS BOTTURA ce qui constitue une garantie de restitution du montant de la condamnation dans l'éventualité d'une réformation de l'ordonnance du 16 juin 2024.
La société AXA FRANCE IARD demande à la Cour, conformément à ses écritures notifiées par voie électronique le 24 juin 2024, de :
- juger mal fondée l'assignation en arrêt de l'exécution provisoire délivrée à la
companie AXA FRANCE IARD ;
- condamner M. [V] [S], ou qui mieux le devra, à payer à la société AXA FRANCE IARD une indémnité de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
- condamner M. [V] [S] aux dépens.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que son assignation devant madame la première présidente de la cour d'appel de Chambéry est abusive. Elle indique ne pas s'être opposée à la demande d'expertise en première instance et avoir conclu à la confirmation de l'ordonnance de référé en appel. Elle ajoute qu'elle n'est pas concernée par la condamnation provisionnelle et précise qu'aucune demande n'est dirigée contre elle dans le cadre de la procédure d'appel ou de la présente procédure.
La société BREZAULT LOÏC demande à la Cour, conformément à ses écritures notifiées par voie électronique le 24 juin 2024, de
- constater l'absence de demande présentée à l'encontre de la société BREZAULT LOÏC
- condamner M. [S], ou qui mieux le devra, à lui payer la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que son assignation devant madame la première présidente de la cour d'appel de Chambéry est abusive en ce qu'elle a conclu à la confirmation de l'ordonnance de référé en appel, qu'elle est étrangère au litige opposant M. [V] [S] à la société SAVOIE ACQUA CONCEPT et qu'aucune demande n'est dirigée contre elle dans le cadre de la procédure d'appel ou de la présente procédure.
Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions, arguments et moyens des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées.
Sur ce
Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire
La procédure de première instance ayant été introduite après le 1er janvier 2020, la présente procédure est soumise aux dispositions relatives à l'exécution provisoire telles qu'elles résultent du décret n'° 2019-1333 du 11 décembre 2019.
En application de l'article 514 nouveau du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
En application de l'article 514-3 du code de procédure civile, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
Ainsi, il appartient à M. [V] [S] de justifier de ce que l'exécution provisoire entraînerait des conséquences manifestement excessives et qu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation ; les deux conditions sont cumulatives ;
En l'espèce, il n'est pas contesté que les facultés financières de M. [V] [S] lui permettent d'exécuter la décision de première instance sans encourir de graves conséquences ; en outre, il n'est ni soutenu ni démontré que l'absence de restitution des sommes en cas de réformation de la décision de première instance serait de nature à compromettre de manière irréversible son équilibre financier ;
De surcroit, la société SAVOIE ACQUA CONCEPT soutient avoir les moyens financiers de procéder au remboursement des sommes versées en cas de réformation ; il lui est donc rappelé que l'exécution provisoire du jugement de première instance qui pourrait être infirmé en appel se fait aux risques et périls de celui qui la poursuit ;
En conséquence, il convient de rejeter la demande de M. [V] [S] tendant à la suspension de l'exécution provisoire.
Sur la demande de consignation
En application de l'article 521 du code de procédure civile, la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.
M. [V] [S] sollicite la consignation de la somme due au titre de l'exécution provisoire auprès de la caisse des dépôts en application de ce texte ;
Or la condamnation pécuniaire de 20 000 euros a été prononcée à titre provisionnel par l'ordonnance rendue par la présidente du tribunal judiciaire de Chambéry ; en conséquence, la demande de consignation de cette provision excède les pouvoirs du premier président et est sans fondement juridique. Il convient de débouter M. [V] [S] de cette demande.
Sur les autres demandes
M. [V] [S], partie succombante, sera condamné à supporter la charge des dépens de l'instance conformément à l'article 696 du code de procédure civile, les dépens relatifs à une instance de référé ne pouvant être réservés pour être tranchés avec l'instance au fond.
L'équité n'appelle pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, contradictoirement et en matière de référé.
DEBOUTONS M. [V] [S] de l'ensemble de ses demandes ;
DEBOUTONS les parties des demandes fondées l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNONS M. [V] [S] à supporter la charge des dépens de l'instance.
Ainsi prononcé publiquement, le 27 août 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Marie-France BAY-RENAUD, première présidente, et Ghislaine VINCENT, greffière.
La greffière La première présidente