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04/07/2024 | FRANCE | N°22/01228

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 04 juillet 2024, 22/01228


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY







2ème Chambre



Arrêt du Jeudi 04 Juillet 2024



N° RG 22/01228 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HA72



Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 13 Avril 2022, RG 22/00231



Appelante



S.A. DIAC dont le siège social est sis [Adresse 3] prise en la personne de son représentant légal



Représentée par Me Guillaume PUIG, avocat au barreau de CHAMBERY





Intimé


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né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]



sans avocat constitué



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COMPOSITION DE LA COUR :



Lors de l'audience publique ...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 04 Juillet 2024

N° RG 22/01228 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HA72

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 13 Avril 2022, RG 22/00231

Appelante

S.A. DIAC dont le siège social est sis [Adresse 3] prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Guillaume PUIG, avocat au barreau de CHAMBERY

Intimé

M. [G] [T]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]

sans avocat constitué

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 30 avril 2024 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière présente à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré ,

Et lors du délibéré, par :

- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre préalable, acceptée électroniquement le 21 mars 2018, la SA DIAC a consenti à M. [G] [T] un contrat de crédit accessoire à la vente d'un véhicule, par l'intermédiaire d'un concessionnaire, de 17 858,88 euros remboursable en 72 échéances au taux d'intérêt nominal fixe de 3,24 % (TEG de 3,990 %°.

Par courriers des 16 mars et 9 avril 2020, a sollicité de l'emprunteur la régularisation des échéances impayées. Puis, faute de régularisation, par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 juin 2020, la société DIAC a mis en demeure M. [T] de procéder au paiement de la somme de 623,74 euros dans le délai de huit jours, sous peine de déchéance du terme.

L'appréhension du véhicule financé a été autorisée par le juge de l'exécution par ordonnance du 6 août 2020, signifiée à M. [T] le 8 septembre 2020. La société DIAC a également fait signifier à M. [T] un procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation le 9 novembre 2020. Le 23 février 2021, l'huissier a finalement établi un procès-verbal de détournement, le véhicule n'ayant pu être appréhendé.

Le 6 mai 2021, la société DIAC a de nouveau mis M. [T] en demeure d'avoir à lui payer les sommes dues pour 12 010,02 euros. Cette mise en demeure est restée sans effet.

C'est dans ces conditions que, par acte délivré le 4 février 2022, la SA DIAC a fait assigner M. [T] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville pour obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 12 231,10 euros outre intérêts contractuels.

A l'audience, le juge des contentieux de la protection a soulevé d'office les moyens tirés de :

- la forclusion,

- la nullité du contrat en raison d'un déblocage prématuré des fonds,

- la déchéance du droit aux intérêts notamment en raison de l'absence de lisibilité de l'offre, de l'absence de consultation FICP, de l'absence de fiche pré-contractuelle, de l'absence de vérification de la solvabilité,

- l'absence de déchéance du terme régulière faute de mise en demeure préalable.

M. [G] [T] n'a pas comparu.

Par jugement réputé contradictoire du 13 avril 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville a :

débouté la SA DIAC de l'ensemble de ses demandes,

condamné la SA DIAC aux dépens.

Par déclaration du 1er juillet 2022, la SA DIAC a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions notifiées le 3 octobre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société DIAC demande en dernier lieu à la cour de :

Au visa des articles 1103, 1104, 1366 et 1367 du code civil,

L'article L.312-39 du code de la consommation,

L'article 514 du code de procédure civile,

réformer le jugement déféré,

condamner M. [T] à lui payer la somme de 12 231,10 euros, outre intérêts de retard au taux contractuel à compter du 14 juin 2020 jusqu'au règlement définitif, selon décompte arrêté au 7 décembre 2021, se décomposant comme suit :

- échéances impayées : 3 586,68 euros

- avoir sur représentation impayé : - 896,67 euros

- règlements du débiteur : 2 911,87 euros

- indemnité sur échéances impayées : 239,10 euros

- capital restant dû : 10 715,26 euros

- indemnité sur capital au 7 décembre 2021 : 857,22 euros

- intérêts de retard au 7 décembre 2021 : 641,38 euros

- intérêts de retard postérieurs au taux contractuel

jusqu'au règlement définitif : mémoire

- total : 12 231,10 euros

ordonner la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

condamner M. [T] à lui payer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M. [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de Me Guillaume Puig, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La déclaration d'appel a été signifiée à M. [G] [T] le 29 septembre 2022 (dépôt à l'étude), lequel n'a pas constitué avocat. Les conclusions de l'appelant lui ont été signifiées le 5 octobre 2022 (dépôt à l'étude).

L'affaire a été clôturée à la date du 26 février 2024 et renvoyée à l'audience du 30 avril 2024, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 4 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour rejeter les demandes de la société DIAC, le tribunal a jugé que l'existence même du contrat de prêt n'est pas établie, faute pour la demanderesse de rapporter la preuve de la fiabilité de la signature électronique du contrat de crédit litigieux dans les conditions fixées par le décret du 28 septembre 2017, renvoyant aux articles 26, 28 et 29 du règlement UE n°910/2014 du 23 juillet 2014.

La société DIAC soutient rapporter la preuve de l'existence du contrat au moyen d'attestations, établies par la société Docusign, du déroulé des opérations de signature électronique lesquelles sont complétées par les justificatifs personnels fournis par l'emprunteur (copie de carte nationale d'identité, copie de bulletin de salaire, justificatif de domicile), et par le versement des fonds à l'emprunteur et les prélèvements effectués pour le remboursement du prêt sans protestation de sa part.

En application de l'article 1366 du code civil, l'écrit électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité.

L'article 1367 du même code dispose que la signature nécessaire à la perfection d'un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l'authenticité à l'acte.

Lorsqu'elle est électronique, elle consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

L'article 1er du décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017 prévoit ainsi que, la fiabilité d'un procédé de signature électronique est présumée, jusqu'à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en 'uvre une signature électronique qualifiée.

Est une signature électronique qualifiée une signature électronique avancée, conforme à l'article 26 du règlement UE n°910/2014 du 23 juillet 2014 et créée à l'aide d'un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l'article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l'article 28 de ce règlement.

L'article 26 du règlement UE n°910/2014 du 23 juillet 2014 énonce les exigences relatives à une signature électronique avancée. Les articles 28 et 29 du règlement renvoient à des annexes fixant les exigences que doivent respecter les certificats qualifiés de signature électronique et les dispositifs de création de signature électronique qualifiés.

En l'espèce, la société DIAC produit aux débats :

- le contrat de crédit signé électroniquement par M. [T] le 21 mars 2018, le tableau d'amortissement, une fiche de conseil en assurance et la souscription de l'assurance facultative,

- la fiche d'informations précontractuelles normalisées en matière de crédit aux consommateurs,

- la fiche de dialogue concernant l'emprunteur avec les justificatifs de revenus, charges et d'identité,

- une preuve de consultation du FICP à la date du 21 mars 2018,

- l'enveloppe de preuve « Protect&Sign » de la société Docusign, concernant le déroulé des opérations de signature électronique du 21 mars 2018, lequel reprend les mentions personnalisées de M. [T] ainsi que celles de la société DIAC avec horodatage et référence individualisée pour chacun des documents signés électroniquement par l'emprunteur,

- un certificat de conformité, pour la société Docusign, au règlement UE n°910/2014 du 24 juillet 2017, établie pour la période du 24 juillet 2017 au 23 juillet 2019 par l'organisme LSTI.

L'examen de ces pièces permet d'identifier le signataire comme étant M. [T], dont l'identité et les coordonnées résultent des renseignements fournis à la banque par l'emprunteur lui-même.

La fiabilité de la signature électronique est donc établie, et le contrat est présumé valable.

Par ailleurs, la société DIAC produit aux débats le procès-verbal de livraison du véhicule, signé le 6 avril 2018, manuscritement, par M. [T], et par le vendeur professionnel, à savoir Renault Vallée de l'Arve.

Il résulte enfin des éléments comptables versés par la banque que M. [T] a volontairement exécuté le contrat en ce que des échéances ont été, dans un premier temps, payées par carte bancaire puis prélevées sur son compte personnel sans aucune difficulté jusqu'au mois de février 2020 inclus, le premier incident de payer non-régularisé datant de moins de deux ans avant la date de l'assignation du 4 février 2022.

Le contrat a donc été exécuté de part et d'autre et son existence n'est pas contestable. Le jugement déféré ne peut donc qu'être infirmé en toutes ses dispositions.

La déchéance du terme a été prononcée conformément aux clauses contractuelles à la date du 2 juillet 2020.

Aussi, au regard des éléments sus-visés et du décompte versé aux débats, la créance de la société DIAC s'établit comme suit :

- échéances impayées 2 690,01 euros

- indemnités sur impayés 239,10 euros

- capital restant dû à la déchéance du terme 10 715,26 euros

- à déduire règlements - 2 911,87 euros

- principal 10 732,50 euros

- indemnité de 8% du capital dû 857,22 euros

- intérêts de retard au 2 juillet 2020 641,38 euros

- total dû 12 231,10 euros

M. [T] sera donc condamné à payer à la société DIAC la somme de 12 231,10 euros outre intérêts au taux contractuel de 3,24 % sur la somme de 10 732,50 euros, et intérêts au taux légal sur la somme de 857,22 euros, à compter du 2 juillet 2020.

En application de l'article L. 312-38 du code de la consommation, aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.

Il est de jurisprudence constante que ces dispositions font obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts prévue par l'article 1343-2 du code civil. La société DIAC sera donc déboutée de cette demande.

M. [T], qui succombe à l'instance, est condamné aux dépens, de première instance et d'appel, avec, pour ces derniers, distraction au profit de Me Guillaume Puig, s'agissant des frais dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

M. [T] est en outre condamné à verser à la société DIAC la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville le 13 avril 2022,

Statuant à nouveau,

Condamne M. [G] [T] à payer à la société DIAC la somme de 12 231,10 euros outre intérêts au taux contractuel de 3,24 % sur la somme de 10 732,50 euros, et intérêts au taux légal sur la somme de 857,22 euros, à compter du 2 juillet 2020,

Déboute la société DIAC de sa demande de capitalisation des intérêts,

Condamne M. [G] [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec, pour ces derniers, application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Guillaume Puig,

Condamne M. [G] [T] à payer à la société DIAC la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 04 juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/01228
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;22.01228 ?
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