COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 04 Juillet 2024
N° RG 22/00628 - N° Portalis DBVY-V-B7G-G623
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THONON-LES-BAINS en date du 18 Février 2022, RG 17/00905
Appelants
Mme [K] [N] [D] [V]-[A] épouse [V]-[O]
née le 18 Mai 1960 à [Localité 15], demeurant [Adresse 13]
Mme [I] [N] [T] [V]-[A]
née le 13 Octobre 1963 à [Localité 15], demeurant [Adresse 7]
M. [X] [Z] [V]-[O]
né le 15 Novembre 1952 à [Localité 15], demeurant [Adresse 13]
M. [B] [V]-[O]
né le 04 Juillet 1987 à [Localité 14], demeurant [Adresse 13]
Représentés par Me Emmanuel LEVANTI de la SELARL LEVANTI, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
Intimée
Mme [S] [V]-[A]
née le 07 Septembre 1954 à [Localité 11], demeurant [Adresse 13]
Représentée par la SELARL CHRISTINAZ PESSEY-MAGNIFIQUE, avocat au barreau de BONNEVILLE
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue le 05 mars 2024 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière présente à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré ,
Et lors du délibéré, par :
- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente
- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [S] [V]-[A] est propriétaire d'une parcelle sise lieudit [Localité 12] à [Localité 11] cadastrée section A n°[Cadastre 3] (anciennement cadastrée n°[Cadastre 2]).
Après acte de donation-partage reçu le 23 octobre 1998 par Maître [F], notaire à [Localité 11], M. [U], Mmes [K] et [I] [V]-[A] étaient, quant à eux, respectivement usufruitier (pour [U]), nue-propriétaire (pour [K]) de fonds riverains cadastrés section A n°[Cadastre 9], [Cadastre 4] et [Cadastre 6] ainsi que propriétaire (pour [I]) des fonds n°[Cadastre 1] et [Cadastre 5].
Un litige existe entre ces différentes parties du fait d'un passage sur la parcelle n°[Cadastre 3].
Aussi, par acte du 8 juin 2017, Mme [S] [V]-[A], propriétaire de cette dernière parcelle, a fait assigner M. [U] ainsi que Mmes [K] et [I] [V]-[A] devant le tribunal de grande instance sur le fondement de l'article 544 du code civil aux fins de leur faire défense de cheminer sur celle-ci.
M. [U] [V]-[A] est décédé le 28 octobre 2017 de sorte que son usufruit s'est éteint, Mme [K] [V]-[A] devenant de ce fait pleinement propriétaire des parcelles n°[Cadastre 9], [Cadastre 4] et [Cadastre 6].
Ayant ultérieurement pris connaissance du fait que Mme [K] [V]-[A] avait changé de régime matrimonial pour adopter celui de la communauté universelle avec son époux et qu'ils avaient, ensemble, suivant acte de donation-partage en date du 18 décembre 2018, fait donation à leur fils de la nue-propriété des parcelles cadastrées section A n° [Cadastre 9], [Cadastre 4] et [Cadastre 6], Mme [S] [V]-[A] a, par acte du 7 mai 2020, fait assigner MM. [X] et [B] [V]-[O] en leurs qualités d'usufruitier et de nu-propriétaire desdites parcelles.
Une jonction entre les deux instances est intervenue par ordonnance du 14 mai 2020.
Par jugement du 18 février 2022, le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains a :
- prononcé l'interdiction à l'égard de Mme [K] [V]-[A], de M. [X] [V]-[O], de M. [B] [V]-[O] et de Mme [I] [V]-[A] ainsi que de toute personne de leur chef d'emprunter, en véhicule ou à pied, la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 3] pour se rendre ou sortir de leurs propriétés correspondant aux parcelles n°[Cadastre 1], [Cadastre 5], [Cadastre 9], [Cadastre 6] et [Cadastre 4],
- dit qu'il n'y a pas lieu de prévoir une sanction pécuniaire en cas de manquement,
- débouté Mme [S] [V]-[A] de sa demande de dommages et intérêts au titre des voies de fait,
- débouté Mme [S] [V]-[A] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- débouté Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] de leurs demandes,
- condamné in solidum Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] à payer la somme de 2 000 euros à Mme [S] [V]-[A] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] aux dépens de l'instance,
- ordonne l'exécution provisoire.
Par acte du 13 avril 2022, Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] ont interjeté appel de la décision.
Saisie par les appelants aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire, Mme la première présidente de la cour d'appel de Chambéry a, par ordonnance du 11 octobre 2022, fait droit à leur demande.
Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 5 janvier 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] demandent à la cour de :
- réformer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,
Statuant à nouveau,
Vu les articles 682 et 685 du code civil,
Vu l'acte de partage du 14 juin 1933,
A titre principal,
- dire et juger que les parcelles n°[Cadastre 9] et [Cadastre 8] des appelantes sont au bénéfice d'une servitude de passage conventionnelle grevant la parcelle n°[Cadastre 3] de Mme [S] [V]-[A],
A titre subsidiaire,
- constater que les bâtiments compte tenu de la pente importante existante à cet endroit ne peuvent être raisonnablement et utilement desservis selon une autre voie que celle passant sur la propriété de Mme [S] [V]-[A],
- fixer l'assiette d'un passage permettant la desservitude de la ferme et du mazot des concluantes,
- dire et juger techniquement enclavés les bâtiments sis sur les parcelles des défenderesses,
En conséquence,
- dire et juger que les parcelles sises à [Localité 11] au lieudit [Localité 12] cadastrées section A n°[Cadastre 6], [Cadastre 9], [Cadastre 4] d'une part, et n°[Cadastre 5] et [Cadastre 1] d'autre part, seront desservies par le chemin existant passant sur la parcelle cadastrée même lieudit section A n°[Cadastre 3],
- débouter Mme [S] [V]-[A] de ses demandes et de son appel incident,
- condamner Mme [S] [V]-[A] à leur payer une somme de 6 000 euros selon les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
En réplique, dans ses conclusions adressées par voie électronique le 28 décembre 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, Mme [S] [V]-[A] demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
prononcé l'interdiction à l'égard de Mme [K] [V]-[A], de M. [X] [V]-[O], de M. [B] [V]-[O] et de Mme [I] [V]-[A] ainsi que de toute personne de leur chef d'emprunter, en véhicule ou à pied, la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 3] pour se rendre ou sortir de leurs propriétés correspondants aux parcelles n°[Cadastre 1], [Cadastre 5], [Cadastre 9], [Cadastre 6] et [Cadastre 4],
débouté Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] de leurs demandes,
condamné in solidum Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné in solidum Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] au paiement des entiers dépens de l'instance,
Y ajoutant,
- préciser et en tant que de besoin déclarer que le fonds cadastré section A n°[Cadastre 3] n'est grevé d'aucune servitude au profit des parcelles cadastrées section A n°[Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6],
- condamner in solidum Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] à lui payer la somme de 6 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel, outre les entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la Selarl Christinaz & Pessey-Magnifique, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Réformer le jugement entrepris pour le surplus et statuant à nouveau,
- condamner in solidum Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des voies de faits commises depuis le 1er octobre 2016 et des nuisances en résultant,
- condamner in solidum Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O], M. [B] [V]-[O] et Mme [I] [V]-[A] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et dilatoire.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 janvier 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'existence d'une servitude conventionnelle au profit des parcelles cadastrées section A n°[Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6]
Conformément à l'article 1134 du code civil, recodifié à droit constant aux articles 1103 et 1104 du code civil à compter du 1er octobre 2016, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
En l'espèce, il s'avère constant que l'ensemble des parcelles visées dans l'exposé des faits ont historiquement appartenu au même auteur ([M] [V]-[A], décédé le 31 décembre 1925), dont deux des héritiers ([G] (père de [U]) et [L] (père de [S])) sont les auteurs respectifs des appelants et de l'intimée.
Mme [S] [V]-[A], propriétaire de la parcelle n°[Cadastre 3], conteste que ce fonds soit débiteur d'une quelconque servitude et expose avoir toléré, en raison de liens familiaux l'unissant à ses cousins, un mode de desserte au moyen d'un passage sur sa parcelle jusqu'au 30 mars 2016, date à compter de laquelle elle a, au moyen de lettres recommandées adressées par la voie de son conseil, informé ses voisins de sa décision de mettre un terme à cette tolérance au 1er octobre suivant.
Pour démontrer l'existence d'une servitude au profit de leurs fonds, les appelants se fondent en premier lieu sur l'acte de partage des héritiers de leur auteur commun ([M]), en date du 14 juin 1933, lequel fixerait la reconnaissance d'une servitude de passage au bénéfice des parcelles nouvellement cadastrées section A n°[Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6].
Le détail de l'acte de partage susvisé, portant sur sept lots distincts et plusieurs dizaines de parcelles ayant appartenu de son vivant à [M] [V]-[A], mentionne effectivement en son antépénultième page (page 32/34) que les sept copartageants 'se devront mutuellement le droit de passage pour les parties des parcelles qui se trouveraient enclavées et à ce titre de servitude dite de destination de père de famille'.
Pour autant, s'agissant du 'droit de passage' visé à l'acte, force est de constater que la rédaction de cette clause, d'ordre général et portant sur plusieurs dizaines de parcelles en partage, n'offre aucune information précise pour déterminer les fonds susceptibles de revêtir la qualité de dominants et identifier les solutions de désenclavement sur ceux qui seraient débiteurs de droits réels. En ce sens, ladite mention, mise en exergue par les appelants, apparaît constitutive de droits indéterminables en leur consistance, faute d'identification certaine des fonds servants et de ceux potentiellement dominants.
En outre, concernant la 'servitude dite de destination de père de famille', il ne saurait être prétendu que la servitude revendiquée résulterait de la volonté de cet auteur commun ([M]), alors-même, d'une part, qu'aucun élément ne permet d'objectiver que le passage préexistait à son décès et, d'autre part, que l'instauration dudit droit entre les cohéritiers, dans l'acte de partage successoral de 1933, est par essence postérieur à la disparition du 'père de famille' ([M] étant décédé 31 décembre 1925).
Il échet par ailleurs de relever que l'acte de donation-partage du 23 octobre 1998, sur lequel les appelants se fondent en second lieu, ne concerne que la succession de [U] [V]-[A] (Mme [S] [V]-[A] n'étant aucunement partie à l'acte) et ne fait que mentionner, au titre du rappel des servitudes, la clause ci-dessus reproduite pour conclure unilatéralement que '[G] [V]-[A], attributaire lors de ce partage d'une maison cadastrée sous le n°[Cadastre 10], apparaissant à ce jour sous le n°[Cadastre 9], bénéficie d'un droit de passage' lequel n'est pas davantage explicité en sa consistance.
En revanche, la cour observe que cette donation-partage s'avère constitutive de servitude en ce que le donateur ([U] [V]-[A]) et les donataires (Mmes [I] et [K] [V]-[A] notamment) ont expressément prévu la constitution d'une servitude de passage en limite Nord des parcelles n°[Cadastre 9], [Cadastre 4], [Cadastre 6], [Cadastre 5] et [Cadastre 1], matérialisée dans un procès-verbal de bornage du 5 mars 1998, contradictoire entre eux, pour permettre la desserte des fonds des appelants par raccordement à la voie communale.
Aussi donc, s'il n'est pas contesté que la parcelle n°[Cadastre 3] appartenant à Mme [S] [V]-[A] est factuellement traversée par un chemin permettant la desserte des parcelles riveraines des appelants, force est de constater qu'il résulte de la lecture combinée des différents actes notariés versés aux débats que ce passage ne résulte d'aucun acte constitutif de servitude de sorte que l'usage actuel résulte manifestement d'une tolérance, laquelle s'avère révocable, sauf pour les appelants à démontrer l'état d'enclave de leurs fonds respectifs et la prescription de cette assiette.
Sur l'état d'enclave des parcelles cadastrées section A n°[Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6]
Conformément à l'article 682 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge pour lui de verser une indemnité proportionnée au dommage qu'il occasionne.
Pour la mise en 'uvre de l'article précité, l'enclave se définit par rapport à la voie publique et à la possibilité d'accès à celle-ci à partir des fonds enclavés. La voie publique correspond à tout passage accessible, route, chemin, chemin vicinal, sentier praticable, l'insuffisance du passage pouvant résulter de son impraticabilité. Toutefois, un simple souci de commodité ou de convenance ne peut caractériser l'insuffisance de l'issue sur la voie publique. En outre, l'état d'enclave s'apprécie quant à la possibilité d'accès au fonds, et non aux bâtiments implantés sur ce dernier, l'aménagement factuel d'une parcelle relevant de la libre appréciation de son propriétaire sous réserve du respect des prescriptions légales et réglementaires en vigueur.
L'assiette et le mode de servitude de passage pour cause d'enclave sont déterminés par trente ans d'usage continu. L'action en indemnité, dans le cas prévu par l'article 682, est prescriptible, et le passage peut être continué, quoique l'action en indemnité ne soit plus recevable. En revanche, aux termes de l'article 691 du code civil, les servitudes continues non-apparentes et les servitudes discontinues, apparentes ou non, ne peuvent s'établir que par titre, la possession même immémoriale étant insuffisante pour les établir.
Il a été antérieurement rappelé que, suivant acte du 23 octobre 1998, les parcelles n°[Cadastre 9], [Cadastre 4] et [Cadastre 6], appartenant à Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O] et M. [B] [V]-[O], sont au bénéfice d'une servitude conventionnelle de passage sur les parcelles n°[Cadastre 1] et [Cadastre 5] appartenant à [I] [V]-[A].
Il est par ailleurs établi que les parcelles n°[Cadastre 1] et [Cadastre 5], formant un même tènement, bordent directement la voie communale.
L'existence d'un dénivelé important, au sein de chaque tènement, entre le Nord-Est et le Sud de chacune des parcelles n°[Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], n'est pas de nature à justifier l'état d'enclave allégué, aucune impossibilité technique n'étant démontrée par les appelants pour connecter la servitude conventionnelle créée par l'acte du 23 octobre 1998 à la voie communale. Chaque tènement étant ainsi raccordé à la voie publique, la cour ne peut que constater l'existence effective d'une desserte, et ce quand bien même des travaux pouvant s'avérer importants seraient à réaliser, au sein des parcelles des appelants, pour pondérer la pente donnant accès aux maisons d'habitation ou au mazot qui y sont implantés.
Dans ces conditions, et sans qu'il n'y ait lieu de statuer, en l'absence d'enclave, sur l'éventualité d'une prescription trentenaire concernant l'assiette du passage traversant la parcelle de Mme [S] [V]-[A], il y a lieu de confirmer la décision déférée ayant débouté Mme [I] [V]-[A], Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O] et M. [B] [V]-[O] de leurs demandes. Plus avant, l'interdiction de passage sur la parcelle n°[Cadastre 3] sera confirmée.
Sur la demande indemnitaire pour voies de fait
Il a d'ores et déjà été rappelé que l'accès aux parcelles des appelants au moyen d'un chemin existant au travers de la parcelle n°[Cadastre 3] résulte d'une tolérance historique s'étant prolongée au cours de nombreuses années.
Si Mme [S] [V]-[A] s'avère fondée à mettre fin à la tolérance initialement concédée dans le cadre d'une attente familiale, force est de constater que le préjudice allégué, résultant de la fréquence des passages après le 1er octobre 2016 (fin du délai de préavis) puis de la gène subséquemment occasionnée, n'est pas documentée de sorte que le premier juge a, à bon droit, débouté Mme [S] [V]-[A] de cette demande.
Sur la demande indemnitaire pour résistance abusive et dilatoire
Le droit d'agir ou de défendre ses droits en justice ne peut dégénérer en abus que s'il est exercé de mauvaise foi, avec malice ou en cas d'erreur grossière.
Le fait que Mme [I] [V]-[A], Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O] et M. [B] [V]-[O] aient été déboutés de leurs demandes ne suffit pas à les constituer de mauvaise foi ou à établir leur intention de nuire à leur voisine. Et dans les circonstances de l'espèce, il ne peut être considéré qu'ils ont fait preuve d'une légèreté blâmable ou que leur défense soit fondée sur l'unique volonté de différer la mise à exécution de la décision de première instance.
En conséquence, Mme [S] [V]-[A] est déboutée de sa demande de dommages et intérêts formulée de ces chefs.
Sur les autres demandes
Mme [I] [V]-[A], Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O] et M. [B] [V]-[O], qui succombent en leur appel, sont condamnés in solidum aux dépens dont distraction au profit de la Selarl Christinaz & Pessey-Magnifique s'agissant des frais dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.
Ils sont en outre, in solidum, condamnés à verser la somme de 2 500 euros à Mme [S] [V]-[A] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit que le fonds cadastré section A n°[Cadastre 3] n'est grevé d'aucune servitude au profit des parcelles cadastrées section A n°[Cadastre 9], [Cadastre 1], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6],
Condamne in solidum Mme [I] [V]-[A], Mme [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O] et M. [B] [V]-[O] aux dépens d'appel dont distraction au profit de la Selarl Christinaz & Pessey-Magnifique s'agissant des frais dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision,
Condamne in solidum Mme [I] [V]-[A], [K] [V]-[A], M. [X] [V]-[O] et M. [B] [V]-[O] à payer à Mme [S] [V]-[A] la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi prononcé publiquement le 04 juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente