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02/07/2024 | FRANCE | N°21/02389

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 02 juillet 2024, 21/02389


HP/SL





COUR D'APPEL de CHAMBÉRY





Chambre civile - Première section



Arrêt du Mardi 02 Juillet 2024





N° RG 21/02389 - N° Portalis DBVY-V-B7F-G3X3



Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THONON LES BAINS en date du 25 Octobre 2021





Appelant



Syndicat des copropriétaires [Adresse 7], agissant poursuites et diligences de son syndic, la SAS IMMOBILIER DU VAL, dont le siège social est situé [Adresse 4]



Représen

té par Me Christian FORQUIN, avocat postulant au barreau de CHAMBERY

Représenté par la SELARL CABINET MEROTTO, avocats plaidants au barreau de THONON-LES-BAINS









Intimées...

HP/SL

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile - Première section

Arrêt du Mardi 02 Juillet 2024

N° RG 21/02389 - N° Portalis DBVY-V-B7F-G3X3

Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THONON LES BAINS en date du 25 Octobre 2021

Appelant

Syndicat des copropriétaires [Adresse 7], agissant poursuites et diligences de son syndic, la SAS IMMOBILIER DU VAL, dont le siège social est situé [Adresse 4]

Représenté par Me Christian FORQUIN, avocat postulant au barreau de CHAMBERY

Représenté par la SELARL CABINET MEROTTO, avocats plaidants au barreau de THONON-LES-BAINS

Intimées

S.A.R.L. CABINET TRON ASSURANCES, dont le siège social est situé [Adresse 1]

Représentée par Me Clarisse DORMEVAL, avocat postulant au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SELAS Burguburu Blamoutier Charvet Gardel & Associés, avocats plaidants au barreau de PARIS

S.A. GENERALI IARD, dont le siège social est situé demeurant [Adresse 2]

Représentée par la SCP GIRARD-MADOUX ET ASSOCIES, avocats postulants au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SELARL CABINET LAURENT FAVET, avocats plaidants au barreau de GRENOBLE

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Date de l'ordonnance de clôture : 04 Mars 2024

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 26 mars 2024

Date de mise à disposition : 02 juillet 2024

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Composition de la cour :

- Mme Hélène PIRAT, Présidente,

- Mme Myriam REAIDY, Conseillère,

- M. Guillaume SAUVAGE, Conseiller,

avec l'assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Faits et procédure

La résidence [Adresse 6], un ancien hôtel situé [Adresse 3] à [Localité 5], a fait l'objet de travaux de rénovation pour être transformé en 36 appartements.

Le syndic de copropriété de l'ensemble immobilier [Adresse 7] a souscrit, par l'intermédiaire de la société Cabinet Tron Assurances, courtier en assurance, un contrat d'assurance auprès de la société Generali Iard, à effet au 1 er janvier 2018.

Le 11 janvier 2018, lors de l'exécution des travaux de reprise d'étanchéité des parties communes de la copropriété par la société HA Bâtiment, un incendie s'est déclaré occasionnant notamment des dommages dans plusieurs appartements. Le syndic de copropriété a déclaré le sinistre auprès de la société Generali Iard qui lui a opposé un refus de garantie.

Par actes d'huissier des 27 et 30 décembre 2019, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] a assigné la société Cabinet Tron Assurances et la société Generali Iard devant le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains notamment aux fins d'engager leur responsabilité contractuelle.

Par jugement du 25 octobre 2021, le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains, devenu le tribunal judiciaire, a :

- Prononcé la mise hors de cause de la société Cabinet Tron Assurances ;

- Débouté le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 7] de ses demandes formées à l'encontre de la société Genérali Iard ;

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 7] aux dépens, dont distraction au profit de la société Agis, avocats.

Au visa principalement des motifs suivants :

Au jour de la souscription du contrat, les parties communes et certaines parties privatives n'avaient pas été réceptionnées, or la société Generali Iard n'avait pas connaissance de la situation de l'immeuble qui était encore en cours de construction ;

Le syndicat des copropriétaires n'apporte pas la preuve d'un élément intentionnel de l'assureur tendant à vouloir tromper le syndic par défaut d'information précontractuelle, dès lors le dol n'est pas constitué ;

En application des dispositions générales du contrat d'assurance souscrit par le syndic de copropriété pour le compte du syndicat des copropriétaires, le sinistre (incendie) survenu le 11 janvier 2018 relève de la clause d'exclusion de garantie qui prévoit que ne sont pas garantis les bâtiments en cours de construction (non encore réceptionnés) et leur contenu ;

La société Cabinet Tron Assurances, en qualité de courtier, ne peut être poursuivie pour dol dans l'exécution du contrat, celle-ci n'y étant pas partie.

Par déclaration au greffe du 13 décembre 2021, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 7] a interjeté appel de la décision en toutes ses dispositions.

Prétentions et moyens des parties

Par dernières écritures du 16 février 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 7] sollicite l'infirmation des chefs critiqués de la décision et demande à la cour de :

- Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thonon les Bains le 25 octobre 2021 ;

Et statuant à nouveau,

- Condamner in solidum la société Cabinet Tron Assurances et la société Generali Iard à lui verser, la somme de 218 070,94 euros TTC (158 070,94 euros + 60 000 euros) sauf à parfaire au titre des préjudices matériels subis, outre intérêts capitalisés au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et ce jusqu'à parfait paiement ;

- Condamner in solidum la société Cabinet Tron Assurances et la société Generali Iard à lui verser la somme de 15 000 euros à parfaire pour résistance abusive, outre intérêts capitalisés au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et ce jusqu'à parfait paiement ;

- Condamner in solidum la société Cabinet Tron Assurances et la société Generali Iard à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouter la société Cabinet Tron Assurances et la société Generali Iard de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner in solidum la société Cabinet Tron Assurances et la société Generali Iard aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Forquin, avocat.

Au soutien de ses prétentions, le syndicat des copropriétaires fait valoir notamment que :

' la clause d'exclusion invoquée par la société Generali Iard n'était pas suffisamment visible et n'était pas reproduite dans les conditions particulières du contrat ;

' cette clause d'exclusion nécessite d'être interprétée et est inapplicable à la situation de l'espèce ;

' cette clause comporte deux sens de sorte qu'il faut faire application de la notion de l'effet utile et logique, en recherchant la commune intention des parties au contrat, la sienne étant à l'évidence d'être assuré comme il l'était précédemment ;

' la société Cabinet Tron Assurances était tenue d'une obligation de renseignement et aurait dû a minima se renseigner sur la situation juridique de l'immeuble.

Par dernières écritures du 12 février 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Cabinet Tron Assurances demande à la cour de :

- Confirmer purement et simplement le jugement rendu le 25 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Thonon Les Bains en ce qu'il a débouté le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] de ses demandes dirigées à son encontre ;

Et se faisant,

- Statuer ce que de droit sur la demande tendant à voir dire et juger que la société Generali Iard doit sa garantie au Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] ;

Constatant que l'action diligentée à l'encontre d'un intermédiaire d'assurance ne peut qu'être subsidiaire,

- Débouter purement et simplement le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] de toutes ses demandes, fins et prétentions dirigées à son encontre ;

- La mettre purement et simplement hors de cause ;

- Condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens avec pour ceux d'appel application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Dormeval, avocate.

Au soutien de ses prétentions, la société Cabinet Tron Assurances expose notamment que:

' le syndicat des copropriétaires ne rapporte pas la preuve d'un défaut d'information ;

' elle ignorait qu'une partie de l'ouvrage n'avait pas été réceptionnée ;

' l'obligation de conseil qui pèse sur elle n'est qu'une obligation de moyen et il appartient à l'assuré de lire son contrat.

Par dernières écritures du 4 mars 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Generali Iard demande à la cour de :

A titre principal,

- Confirmer le jugement entrepris en ce que le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 7] a été débouté de l'ensemble de ses demandes à son encontre ;

- Condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à lui payer la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner le même aux entiers dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel étant distraits au profit de la société Girard Madoux, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire,

- Débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 7] de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre en réparation de son préjudice matériel ;

- Déclarer irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande formée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 7] en paiement d'une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

En tout état de cause,

- Déclarer non fondée la demande formée du syndicat des copropriétaires à son encontre en paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- Condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner le même aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la société d'avocats Girard Madoux, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la société Generali Iard fait notamment valoir que :

' la clause d'exclusion de garantie a un caractère formel et limité ;

' la clause d'exclusion figure en caractères apparents ;

' la clause de renvoi dans les conditions particulières selon laquelle l'assuré reconnaît avoir reçu un exemplaire des conditions générales est valable ;

' le syndicat des copropriétaires ne justifie pas que l'immeuble assuré était réceptionné au moment du sinistre ;

' les conditions particulières ne s'opposent pas aux conditions générales du contrat d'assurance.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.

Une ordonnance en date du 4 mars 2024 a clôturé l'instruction de la procédure. L'affaire a été plaidée à l'audience du 26 mars 2024.

MOTIFS ET DÉCISION

Suite à l'incendie survenu le 11 janvier 2018, ayant causé d'importants dégâts à l'ensemble immobilier [Adresse 6], le syndicat des copropriétaires s'est vu refuser la garantie de la société Generali Iard auprès de laquelle il venait de souscrire, par l'intermédiaire de la société Cabinet Tron Assurances, un contrat multirisques dont les conditions particulières datent du 17 janvier 2018 mais avec effet rétroactif au 1er janvier 2018.

Ce contrat composé de conditions générales et de conditions particulières contient une clause d'exclusion de garantie s'agissant du risque incendie pour les bâtiments en cours de construction (non encore réceptionnés) opposée au syndicat des copropriétaires par la société Generali Iard.

Il convient donc de déterminer en premier lieu si cette clause d'exclusion présente toutes les conditions d'opposabilité, en second lieu de rechercher si le bâtiment assuré était ou non en cours de construction, avant éventuellement d'envisager le montant de l'indemnisation due par l'assurance ou en cas de clause valablement opposable, d'envisager la responsabilité de la société Cabinet Tron Assurances pour un manquement à son devoir d'information.

I - Sur la garantie de la société Generali Iard

En matière de charge de la preuve, il appartient à l'assuré d'établir l'existence du sinistre, objet du contrat, donc de prouver que les circonstances et les conséquences rentrent dans le champ de la garantie et, le cas échéant, que la ou les conditions de cette garantie sont réunies. En revanche, l'assureur qui invoque une exclusion de garantie est tenu de démontrer la réunion des conditions de fait de cette exclusion (1e Civ.oct.1980, n 79-17.075 : 1e Civ,. 2 oct. .1980, n 79-15.003). Il doit aussi, pour que une telle clause d'exclusion, soit opposable à l'assuré, démontrer qu'elle a été « portée à la connaissance de l'assuré au moment de son adhésion à la police ou, à tout le moins, antérieurement à la réalisation du sinistre » (Civ. 2 , 24 mai 2006, n 04-18.680) et qu'elle a été acceptée par lui (Civ. 2 , 24 novembre 2011, n 10-17.785 ; Civ. 2 , 10 septembre 2015, n 14-23.706).

La clause d'exclusion litigieuse est la suivante, dans le sous-paragraphe des exclusions, intitulé 'exclusions communes aux garanties de vos biens' : '5. Les bâtiments* en cours de construction (non encore réceptionnés) et leur contenu' l'étoile renvoyant au glossaire dans lequel se trouve la définition du mot 'bâtiment'.

A - Sur la validité et l'opposabilité de la clause d'exclusion

Sur son caractère apparent

Aux termes de l'article L 112-4 dernier alinéa du code des assurances, 'les clauses des polices édictant des exclusions de garantie ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents'. La jurisprudence constante de la cour de cassation souligne la nécessité de ce caractère très apparent de la clause (2e civ., 26 avril 2007, n 06-13.379 ; 2e civ. 8 octobre 2009, n 08-14.482 ).

En l'espèce, le sommaire des conditions générales fait apparaître le paragraphe 'exclusions' page 31, avec deux sous-paragraphes 'exclusions communes à toutes les garanties' et 'exclusions communes aux garanties de vos biens'. Par ailleurs, à la page 31, regroupant toutes les exclusions, les deux sous-paragraphes comportent chacun un titre en majuscules, caractère gras et le cadre contenant les exclusions est grisé pour le mettre en évidence. En outre, chaque exclusion est précédée d'une numérotation, avec renvoi à la ligne.

Ainsi, la typographie utilisée répond aux exigences légales et le syndicat des copropriétaires ne peut valablement soutenir que la clause litigieuse n'était pas très apparente.

Sur son caractère formel et limité

Aux termes de l'article L 113-1 sus mentionné dispose que « les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Toutefois, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ».

Pour être formelle et limitée, une clause d'exclusion doit se référer à des faits, circonstances ou obligations définies avec précision de telle sorte que l'assuré puisse connaître exactement l'étendue de sa garantie (1e Civ., 20 juillet 1994, n 92-16.078 ; 1e Civ., 13 novembre 2002, n99-15.808 ). La portée ou l'étendue de l'exclusion doit être nette, précise, sans incertitude pour que l'assuré sache dans quels cas et condition il n'est pas garanti ( 1è Civ. 8 oct. 1974 : Bull. Civ. I, n 253). En lisant la clause, l'assuré doit être en mesure de percevoir que, dans telle situation où il se trouverait placé, une exclusion s'appliquerait. Enfin, une clause d'exclusion de garantie ne peut être considérée comme étant formelle et limitée dès lors qu'elle doit être interprétée (1e Civ., 22 mai 2001, pourvoi n 99-10.849, Bull civil 2001, I, n 140 ).

Contrairement à ce que soutient le syndicat des copropriétaires, le terme 'réception' est dépourvu d'ambiguité, puisqu'il s'agit d'une notion juridique visée notamment aux articles 1792 et suivants du code civil, ainsi qu'aux articles 1642-1 et 1646-1 du même code en cas de vente en l'état futur d'achèvement ce qui était le cas en l'espèce. Ce terme vient préciser la notion de bâtiment en cours de construction.

Ainsi, la clause litigieuse se réfère à une notion précise et est dénuée d'ambiguïté de sorte qu'elle n'a pas à être interprétée. Cette clause est donc formelle et limitée : son application résulte de la réception ou non du bâtiment assuré et les notion de livraison, d'achèvement ou encore de de prise de possession qui ne sont pas visées, ne peuvent interférer sur le critère précise de la réception, d'autant que le syndicat des copropriétaires reconnaît lui-même dans ses écritures qu''en droit de la construction, il existe trois notions distinctes caractérisant la fin des travaux, l'achèvement, la réception, la livraison. Chacun de ces termes renvoie à une réalité juridique totalement différente'. Et encore en opposition à la thèse du syndicat de copriété, ce dernier n'est pas seulement concerné par la livraison puisque les actions en responsabilité fondées sur les articles 1792 du code civil et suivants se transmettent entre le promoteur, premier maître de l'ouvrage, aux propriétaires successifs, devenus après lui maîtres de l'ouvrage et il importe peu que la réception soit un acte concernant le premier maître de l'ouvrage et les constructeurs.

Sur la connaissance de la clause d'exclusion par l'assuré et son acceptation,

La preuve de la connaissance de la clause d'exclusion et de son acceptation peut résulter de l'insertion dans un document signé par l'assuré d'une clause de renvoi à des documents non signés, à la condition que ces documents soient suffisamment identifiés, que l'assuré soit informé qu'ils font partie du contrat et qu'ils lui aient été remis avant sa conclusion. La pratique de la clause de renvoi est d'ailleurs validée par une jurisprudence constante (Civ. 1 , 17 novembre 1998, bull I n 316 ; Civ. 2 , 3 mars 2011, n 10-11.826).

En l'espèce, il est indiqué dans les conditions particulères 'le contrat se compose des présentes dispositions particulières et des document référencés ci-dessous dont vous reconnaissez avoir eu un exempliaire : dispositions générales modèmes GA 6B11K'.

Cette mention qui figure dans les conditions particulières dont il n'est pas contesté qu'elles ont été signées par le représentant du syndicat de copropriété et par laquelle ce dernier reconnaît avoir reçu un exemplaire du contrat, composé desdites conditions particulières et de conditions générales désignées par leur référence, établit que ces conditions générales, bien que non signées, ont été portées à la connaissance de l'assuré et lui sont, par conséquent, opposables.

B - Sur son application à l'espèce

Contrairement à ce que soutient le syndicat des copropriétaires, cette clause doit recevoir application en l'espèce. En effet, le bâtiment n'est pas entièrement réceptionné au moment où le sinistre s'est déclenché.

Certes, le syndicat des copropriétaires fait valoir que le promoteur avait adressé la déclaration d'achèvement des travaux, sans toutefois la produire aux débats ; certes, il soutient que des lots étaient habités. Mais comme déjà indiqué ci-dessus, ces notions ne correspondent pas avec la notion de réception définie à l'article 1792-6 du code civil.

S'agissant de l'absence de réception de l'ouvrage, le premier juge a pertinement motivé cette absence, qu'il s'agisse d'une réception formelle ou d'une réception tacite, en retenant qu'aux termes du constat d'huissier du 6 février 2018 que le lot 35 ne possédait pas de sanitaires, que concernant le lot 22, ses sols étaient bruts, les cloisons et le doublage des murs n'étaient pas réalisés, en tout état de cause, il servait de lieu de stockage de matériel. Les compteurs électriques des deux lots n'étaient pas raccordés. De même, des VMC des communs n'étaient pas branchées, la charpente sous la toiture n'était pas terminée.

Il convient d'ajouter qu'il n'est versé aux débats :

- que 10 procès-verbaux de livraison sur 36 lots et que le procès-verbal de réception du lot de travaux 13 concernant le société HA Bâtiment en date du 17 janvier 2017 avec réserves. Le syndicat de copropriété ne précise pas s'il s'agissait d'une réception par lots de travaux, ce qui semble être le cas, mais dès lors, tous les procès-verbaux de réception de lots de travaux devraient être fournis, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

- que le rapport Sarectec diligenté à l'initiative de la société Générali indique 'le bâtiment est toujours en cours de travaux', '30 appartements ont été réceptionnés, trois sont occupés mais non réceptionnés et trois sont encore en travaux et ne sont donc pas réceptionnés', 'les parties communes de l'immeuble ne sont pas réceptionnées'.

Ainsi, à défaut de réception du bâtiment, celui-ci étant encore en cours de construction, la clause d'exclusion figurant au contrat d'assurance a vocation à s'appliquer de sorte que c'est à bon droit que le premier juge a dit que la société Générali Iard n'avait à garantir les conséquences du sinistre survenu le 11 janvier 2018 et qu'il a débouté le syndicat de copropriété de ses demandes formées à l'encontre de la société Générali Iard.

II - Sur la responsabilité de la société Cabinet Tron Assurances

Le syndicat de copropriété de l'ensemble immobilier [Adresse 7] recherche la responsabilité délictuelle de son courtier, estimant que ce dernier aurait dû demander au syndic qui le représentait dans quel état se trouvait l'immeuble.

Il est certain que le « courtier commerçant indépendant et professionnel de l'assurance a, à l'égard de son client, une obligation de conseil et d'exacte information» ( Cass. 1re civ., 6 nov. 1984, n 83-14.020, Bull. civ. I, no 291). La charge de la preuve de l'exécution de l'obligation de conseil appartient au courtier d'assurance (Cass. 1ère civ., 17 oct. 2018, n°16-28.388).

En l'espèce, les conditions particulières visent les déclarations de l'assuré par rapport au bâtiment et il est mentionné 'le bâtiment n'est pas en cours de rénovation' et il a été indiqué qu'il avait été construit en 2014 sans préciser qu'il était toujours en cours de construction. La société Tron Assurances démontre avoir interrogé l'assuré sur la situation de l'ouvrage qui devait être assuré. Par ailleurs, il y a lieu aussi d'ajouter que le syndicat des copropriétaires n'avait plus d'assurance, celle-ci ayant été résiliée au 31 décembre 2017 comme l'atteste la pièce 1 de la société Cabinet Tron Assurances, ce qui rendait nécessaire la souscription d'une nouvelle assurance.

Au vu de ces éléments, alors que le syndicat des copropriétaires était représenté par son syndic, professionnel de l'immobilier, la société cabinet Tron Assurances démontre avoir satisfait à son obligation de conseil et de renseignement et il n'est pas établi l'existence d'une faute de sa part consistant à un manquement à son devoir de conseil et d'information.

Le jugement sera confirmé sur le rejet des prétentions du syndicat de copropriété de l'ensemble immobilier [Adresse 7] vis à vis de la société Cabinet Tron assurances pour d'autres motifs, l'action devant le premier juge ayant été fondé sur le dol.

III - Sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive et sur les mesures accessoires

La résistance abusive des intimées n'est pas démontrée, les prétentions du syndicat de copropriété à leur égard étant déboutées.

Succombant, le syndicat des copropriétaires sera condamné aux dépens, distraits au profit de Me Dormeval et de la SCP Girard-Madoux, sur leur affirmation de droit et il sera débouté de sa demande d'indemnité procédurale.

L'équité commande de condamner le syndicat des copropriétaires à payer à chacune des intimées une indemnité procédurale de 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute le syndicat de copropriété de l'ensemble immobilier [Adresse 7] de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive et de sa demande d'indemnité procédurale,

Condamne le syndicat de copropriété de l'ensemble immobilier [Adresse 7] aux dépens d'appel, distraits au profit de Me Dormeval et de la SCP Girard-Madoux, sur leur affirmation de droits,

Condamne le syndicat de copropriété de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à payer une indemnité procédurale de 1 500 euros, d'une part à la société Générali Iard, d'autre part à la société Cabinet Tron Assurances.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, La Présidente,

Copie délivrée le 02 juillet 2024

à

Me Christian FORQUIN

Me Clarisse DORMEVAL

Me Marie GIRARD-MADOUX

Copie exécutoire délivrée le 02 juillet 2024

à

Me Clarisse DORMEVAL

Me Marie GIRARD-MADOUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/02389
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;21.02389 ?
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