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23/05/2024 | FRANCE | N°24/00066

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 23 mai 2024, 24/00066


COUR D'APPEL DE CHAMBERY

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Première Présidence







ORDONNANCE



STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES



du Jeudi 23 Mai 2024





N° RG 24/00066 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HPLV



Appelant

M. [I] [L]

né le 23 Octobre 2002 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 7]

hospitalisé à l[1]

assisté de Me Lisa LEGRAND, avocate désignée d'office inscrite au barreau d

e CHAMBERY



Appelés à la cause

Etablissement [8]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 6]

non comparant



M. [G] [L] tiers demandeur à l'admission (frère)

[Adresse 3]

[Localité 5]

n...

COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence

ORDONNANCE

STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES

du Jeudi 23 Mai 2024

N° RG 24/00066 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HPLV

Appelant

M. [I] [L]

né le 23 Octobre 2002 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 7]

hospitalisé à l[1]

assisté de Me Lisa LEGRAND, avocate désignée d'office inscrite au barreau de CHAMBERY

Appelés à la cause

Etablissement [8]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 6]

non comparant

M. [G] [L] tiers demandeur à l'admission (frère)

[Adresse 3]

[Localité 5]

non comparant

Partie Jointe :

Le Procureur Général - Cour d'Appel de CHAMBERY - Palais de Justice - 73018 CHAMBERY CEDEX - dossier communiqué et réquisitions écrites

*********

DEBATS :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du mercredi 22 mai 2024 à 10h devant Monsieur Cyril GUYAT, conseiller à la cour d'appel de Chambéry, délégué par ordonnance de Madame la première présidente, pour prendre les mesures prévues aux dispositions de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de prise en charge, assisté de Madame Sylvie DURAND, greffière lors des débats,

L'affaire a été mise en délibéré au jeudi 23 mai 2024 (mise à disposition par Madame Sophie MESSA, greffière)

***

Le 16 avril 2024, M. [I] [L] a été admis, par décision du même jour du directeur de l'[8], en soins psychiatriques sans consentement à la demande d'un tiers.

Les deux certificats médicaux d'admission du 16 avril 2024 faisaient état d'un patient présentant un état d'agitation majeure avec passage à l'acte hétéro agressif dans un contexte de rupture de traitement et de suivi ; comportement du patient était agité désorganiser avec une tension interne, des hurlements et des propos insultants. Il existait un risque de passage à l'acte hétéro agressif ainsi que de fugue. Le patient n'avait pas conscience de ses troubles et sa désorganisation psychique rendait le consentement aux soins impossible.

Par ordonnance du 24 avril 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bonneville a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète sous contrainte de M. [I] [L].

Par courrier du 9 mai 2024, le patient a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bonneville d'une demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte.

L'avis motivé du docteur [E] du 13 mai 2024 mentionnait que le patient était connu de la psychiatrie depuis l'adolescence pour des troubles du comportement avec impulsivité et agressivité, associés à des consommations de toxiques ; que la symptomatologie complexe et l'agressivité avaient nécessité plusieurs hospitalisations antérieures mais que son état clinique avait été stabilisé sous traitement, permettant une insertion socioprofessionnelle ; que le patient a été réhospitalisé à la suite de nouveaux troubles du comportement avec agitation, agressivité dans un contexte de rupture de soins de consommations de toxiques, hospitalisation intervenue au décours d'une situation dans laquelle il semble avoir été lui-même victime de coups de couteau ; qu'avec la reprise du traitement, son état clinique va en s'améliorant, avec restauration du contact et amélioration du sommeil, mais qu'il persiste une tendance à la provocation ludique et des difficultés dans la distance relationnelle ; que le traitement nécessite des ajustements progressifs du fait des effets secondaires ; qu'il est noté une critique limitée de ses difficultés ; que son amélioration clinique est partielle et récente, ce qui limite sa capacité à donner un consentement valide aux soins dans la durée.

Par ordonnance du 15 mai 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bonneville a maintenu l'hospitalisation complète sous contrainte du patient.

Par courrier motivé daté du 15 mai 2024 et réceptionné à la cour d'appel le 16 mai 2024, M. [I] [L] a interjeté appel de cette ordonnance.

Les convocations et avis d'audience ont été adressées aux parties conformément aux dispositions de l'article R 3211-19 du code de la santé publique.

L'avis médical prévu par l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique a été communiqué au greffe le 17 mai 2024. Il mentionne que l'état clinique demeure fragile avec une persistance de moments de tension et de provocation et des fluctuations thymiques. L'adhésion aux soins est limitée. L'amélioration clinique reste partielle et récente, avec une conscience des troubles limitée, ce qui entrave sa capacité à donner un consentement valide aux soins dans la durée, de sorte que les soins psychiatriques restent justifiés et doivent être maintenus à temps complet.

A l'audience publique du 22 mai 2024, M. [I] [L] a comparu. Il a expliqué qu'il était un peu sédaté ; qu'il avait subi des coups de couteau et à la tête, qu'il avait pu s'échapper, qu'il avait été un peu hétéroagressif à l'hôpital et que c'est pour cela qu'il avait été hospitalisé à l'USIP à la demande de son frère. Il a indiqué que sa place n'était pas à l'USIP, que les personnes qui y étaient avec lui avaient des troubles différents des siens qui lui portaient préjudice : 'être avec des personnes un peu foufou rend foufou'. Il a expliqué qu'il ne demandait pas à retourner dehors et faire n'importe quoi, qu'il souhaitait être suivi au CMP avec son infirmière et son médecin et suivre ses soins, que l'USIP n'était pas un endroit adéquat pour ses soins, que ça le poussait dans ses retranchements et que c'était dur à vivre de devoir se contenir d'une telle façon. Il a précisé ne pas avoir envie d'une injection retard.

Il a indiqué qu'il était exact qu'il était en rupture de soins et qu'il avait consommé des stupéfiants avant son hospitalisation, tout en précisant ne pas penser qu'un joint et une bière puissent poser des difficultés.

Il a indiqué avoir pu voir son frère et ses parents en visite, avoir eu deux visites depuis son hospitalisation ; que les médecins ont évoqué un changement de service, pour qu'il puisse aller dans un parc, aller à la cafétéria, un élargissement du cadre, mais qu'il n'y avait pas de place, de sorte qu'il restait à l'USIP.

Son conseil Maître [U] a indiqué que M. [L] n'avait pas de difficultés s'agissant du fait d'être soigné, mais des difficultés avec l'USIP ; qu'il consentait aux soins, de sorte qu'une mainlevée pouvait être ordonnée avec mise en place d'un programme de soins ; que le traitement qui doit lui être administré était connu, et que sa réhospitalisation était dûe à une rupture de traitement.

Le directeur de l[1] n'a pas comparu.

M. [G] [L], frère du patient et tiers ayant sollicité l'hospitalisation, n'a pas comparu.

Le ministère public n'a pas comparu, mais il a requis le 17 mai 2024 par écrit la confirmation de la décision de maintien de la mesure d'hospitalisation complète. Ces réquisitions ont été communiquées au conseil du patient et au patient avant l'audience.

La décision a été mise en délibéré au 23 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel est recevable en ce qu'il a été formé dans les formes et délais requis.

En application de l'article L3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L3211-2-1.

Le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission notamment lorsqu'il a été saisi d'une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu'elle remplit les conditions prévues au présent alinéa, la personne chargée, à l'égard d'un majeur protégé, d'une mesure de protection juridique à la personne peut faire une demande de soins pour celui-ci.

La forme et le contenu de cette demande sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

La décision d'admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du présent article sont réunies.

Il sera rappelé qu'il n'appartient pas au juge de se substituer à l'appréciation du médecin de la pathologie du patient et des risques que cette pathologie fait peser sur son intégrité.

En l'espèce, la procédure a été respectée.

Il résulte des pièces de la procédure que M. [I] [L] est connu de la psychiatrie depuis l'adolescence pour des troubles du comportement avec impulsivité et agressivité, associés à des consommations de toxiques ; que la symptomatologie complexe et l'agressivité avaient nécessité plusieurs hospitalisations antérieures mais que son état clinique avait été stabilisé sous traitement, permettant une insertion socioprofessionnelle ; que le patient a été réhospitalisé à la suite de nouveaux troubles du comportement avec agitation, agressivité dans un contexte de rupture de soins de consommations de toxiques.

Les certificats médicaux font état d'une amélioration de son état clinique depuis son hospitalisation et la remise en place d'un traitement, mais également, après un mois d'hospitalisation, de la fragilité de cet état clinique, avec une persistance de moments de tension et de provocation et des fluctuations thymiques. Il est par ailleurs relevé que l'adhésion aux soins reste limitée, comme la conscience de ses troubles, ce qui entrave sa capacité à donner un consentement valide aux soins dans la durée.

Il résulte de ces éléments que les troubles mentaux de M. [I] [L] rendent impossible son consentement à des soins en hospitalisation complète, alors que son état mental impose des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant cette hospitalisation complète. L'hospitalisation complète apparaît en effet nécessaire afin notamment de continuer à améliorer son état clinique, de s'assurer d'une adhésion aux soins et d'une conscience de ses difficultés suffisantes dans le but d'éviter à sa sortie une rechute rapide (notamment dans le cadre d'une nouvelle rupture de traitement accompagnée de consommation de toxiques).

En conséquence, l'ordonnance sera confirmée en toutes ses dispositions, les conditions cumulatives de l'article L 3212'1 du code de la santé publique étant caractérisées.

PAR CES MOTIFS,

Statuant après débats tenus en audience publique et par ordonnance contradictoire, au siège de la cour d'appel de Chambéry,

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bonneville en date du 15 mai 2024 en toutes ses dispositions,

Laissons les dépens de l'instance à la charge du trésor public.

Disons que la notification de la présente ordonnance sera faite conformément aux dispositions de l'article R 3211-22 du Code de la santé publique.

Ainsi prononcé le 23 mai 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Cyril GUYAT, conseiller à la cour d'appel de Chambéry, délégué par Madame la première présidente et Mme Sophie MESSA, greffière.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 24/00066
Date de la décision : 23/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;24.00066 ?
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