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30/04/2024 | FRANCE | N°24/00060

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 30 avril 2024, 24/00060


COUR D'APPEL DE CHAMBERY

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Première Présidence







ORDONNANCE



STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES



du Mardi 30 Avril 2024







N° RG 24/00060 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HO5Y





Appelant

M. [W] [G]

né le 25 Octobre 1990 à [Localité 9]

[Adresse 6]

Appt 15

[Localité 3]

actuellement hospitalisé au CHS [8]

assisté de Me Christophe GUI

LLAND, avocat désigné d'office inscrit au barreau de CHAMBERY



Appelés à la cause

CENTRE HOSPITALIER [8]

[Adresse 5]

[Localité 2]

non comparant



M. [P] [G] tiers demandeur à l'admission (frère)

...

COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence

ORDONNANCE

STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES

du Mardi 30 Avril 2024

N° RG 24/00060 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HO5Y

Appelant

M. [W] [G]

né le 25 Octobre 1990 à [Localité 9]

[Adresse 6]

Appt 15

[Localité 3]

actuellement hospitalisé au CHS [8]

assisté de Me Christophe GUILLAND, avocat désigné d'office inscrit au barreau de CHAMBERY

Appelés à la cause

CENTRE HOSPITALIER [8]

[Adresse 5]

[Localité 2]

non comparant

M. [P] [G] tiers demandeur à l'admission (frère)

[Adresse 4]

[Localité 1]

non comparant

Partie Jointe :

Le Procureur Général - Cour d'Appel de CHAMBERY - Palais de Justice - 73018 CHAMBERY CEDEX - dossier communiqué et réquisitions écrites

*********

DEBATS :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du mardi 30 avril 2024 à 10h devant Madame Isabelle CHUILON, conseillère à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par ordonnance de Madame la première présidente, pour prendre les mesures prévues aux dispositions de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de prise en charge, assistée de Madame Sophie Messa, greffière

L'affaire a été mise en délibéré au mardi 30 avril 2024 après-midi,

****

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE, DES PRETENTIONS ET MOYENS :

M. [W] [G] a été admis en soins psychiatriques sans consentement, sous la forme d'une hospitalisation complète à la demande d'un tiers (son frère), sur décision du directeur du Centre hospitalier [8] du 7 avril 2024.

Cette décision a été prise sur la base :

- d'un certificat médical du Docteur [S] [N], exerçant au Centre hospitalier de [Localité 7] (service d'accueil des urgences), faisant état, en date du 7 avril 2024 à 14h56 des éléments suivants:'délire paranoïaque, à type d'hallucinations, voit des personnes qui ne sont pas là, tape les murs, crie, avec acutisation du délire chronique.'.

- d'un certificat médical du Docteur [F] [A], exerçant au Centre hospitalier de [Localité 7] (service d'accueil des urgences), faisant état, en date du 7 avril 2024 à 17h43 des éléments suivants :'activité hallucinatoire avec éléments persécutoires. Quelques moments auto agressifs.'.

Le certificat médical de 24 heures du Docteur [B] [Z], psychiatre au CHS [8], mentionnait en date du 8 avril 2024 à 14h00 :' M. [G] avait quitté la semaine dernière le service contre avis médical. Il réintègre notre service suite à des troubles du comportement (agitation psychomotrice au domicile et alcoolisation). Ces éléments apparaissent toujours sous-tendus par un délire de persécution systématisé autour de la famille de M. [I]. Ces éléments délirants sont alimentés par des hallucinations acoustico-verbales envahissantes. M. adhère totalement à ses idées ne permettant aucune autocritique.'

Le certificat médical de 72 heures du Docteur [Y] [L] [X], psychiatre au CHS [8], indiquait le 10 avril 2024 à 10h11 : 'Le patient connu depuis plusieurs années, avait bénéficié d'une hospitalisation au centre de psychiatrie d'[O] [V], à sa demande, le 20 mars 2024, suite à un retentissement anxieux majeur lié à des idées délirantes de persécution au sujet de ses voisins. Il ne critiquait pas les symptômes psychotiques présentés mais parvenait à demander des soins. Il a été transféré, en soins libres au CHS, service Maurienne le 28 mars 2024 mais est sorti le lendemain avant d'avoir vu un médecin.

Il n'a pas repris son traitement de façon assidue et a repris des consommations de toxiques, aggravant les symptômes psychotiques et leur retentissement. Il a présenté des troubles du comportement à son domicile ayant nécessité l'intervention des services de secours (pompiers) pour une admission aux urgences et une admission en soins sans consentement au CHS [8] le 7 avril 2024.

À son arrivée dans le service, il présentait la symptomatologie décrite ci-dessus, avec une adhésion totale au délire et une altération de son discernement ne lui permettant pas de consentir aux soins.

Suite à une altercation au sujet du cadre de soins, il a présenté une tension psychique importante associée à une opposition aux soins et une menace de fugue. Il a été admis dans une chambre de soins obligés le 9 avril 2024 afin de prévenir le risque de fugue et de mise en danger.

Ce jour, il est assez calme et coopérant, ce qui nous permet de lever la mesure d'isolement en CSO mais son adhésion aux soins reste précaire ainsi il est nécessaire de poursuivre les soins dans un cadre défini.'.

Par décision du 10 avril 2024, le directeur du Centre hospitalier [8] a ordonné la poursuite des soins psychiatriques de M. [W] [G] pour une durée d'un mois sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par avis motivé du 12 avril 2024, rédigé par le Docteur [E], psychiatre au CHS [8], en vue de la saisine du JLD, il était indiqué : ' Le patient a été admis en SDT dans un contexte de décompensation psychotique avec crise d'agitation sur mal observance du traitement et reprise de toxiques. Une tentative de fugue au cours de l'hospitalisation a nécessité un passage en chambre d'isolement. La remise en place du traitement a permis d'améliorer la symptomatologie'.

Par requête du 15 avril 2024, le directeur du CHS [8] a saisi le juge des libertés et de la détention de Chambéry sur le fondement de l'article L.3211-12-1 du code de la santé publique.

Par ordonnance du 16 avril 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Chambéry a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète de M. [W] [G] au sein du Centre Hospitalier Spécialisé de Bassens au-delà du 12ème jour.

M. [W] [G] a adressé le 23 avril 2024 un courrier au greffe de la Cour d'Appel, précisant vouloir relever appel à l'encontre de cette décision, aux motifs que les certificats médicaux étaient incomplets et insuffisamment circonstanciés, démentant formellement avoir eu la moindre hallucination visuelle, et qu'il était très bien suivi à l'extérieur, se disant, par ailleurs, 'détenteur d'un consentement suffisamment éclairé'. Il ne mettait pas en doute son hospitalisation mais seulement le caractère obligatoire de celle-ci, souhaitant une hospitalisation volontaire.

Suivant réquisitions écrites du 24 avril 2024, le Procureur général près la Cour d'appel de Chambéry s'est prononcé en faveur d'une confirmation de la décision du juge des libertés et de la détention de Chambéry du 16 avril 2024.

Un certificat de situation du 26 avril 2024, rédigé par le Docteur [H] [M], psychiatre au CHS [8] mentionne : '[U] admis pour trouble du comportement avec risque auto et hétéro agressif dans un contexte de consommation abusive de substances psychoactives. Vu en entretien, il est calme, coopérant, l'humeur est neutre et les propos cohérents. Ce jour, son état est stable. L'hospitalisation complète doit se poursuivre pour mettre en place un projet de soins et consolider son état d'abstinence'.

Lors de l'audience publique du 30 avril 2024, M. [W] [G] a sollicité la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète dont il fait l'objet sans son consentement indiquant contester, non le principe d'une hospitalisation, mais son caractère contraint, souhaitant évoluer vers un régime d'hospitalisation libre. Il a reconnu des épisodes d'alcoolisation avec des 'interprétations auditives', niant, en revanche, avoir eu des hallucinations visuelles et expliquant son comportement agressif par sa colère face à l'injustice d'être, de nouveau, hospitalisé malgré les efforts fournis. Par ailleurs, il s'est dit non opposé à la mise en place d'un programme de soins.

Son avocat, Maître [T] [R], a été entendu en ses observations. Il a soulevé, en premier lieu, une irrégularité de procédure, déposant, à cette fin, des conclusions écrites. Il a exposé que le JLD avait été saisi tardivement, à 9 jours, soit hors délai, de sorte que la mainlevée de la mesure devait être prononcée d'office. Par ailleurs, il a précisé que les fugues du patient étaient liées au fait que l'hospitalisation lui était imposée, alors même qu'il consentait, par ailleurs, aux soins administrés.

Le parquet général n'a pas comparu, mais ses réquisitions écrites ont été mises à la disposition des parties avant l'audience et portées à la connaissance de la personne hospitalisée lors du débat contradictoire.

Le directeur d'établissement et le tiers demandeur n'ont point comparu, bien que régulièrement avisés.

L'affaire a été mise en délibéré au 30 avril 2024 après-midi.

MOTIFS DE LA DECISION :

La personne hospitalisée ayant régulièrement relevé appel, dans les délais et les formes prescrits par les articles R.3211-18 et R.3211-19 du code de la santé publique, celui-ci est recevable.

L'office du juge des libertés et de la détention (et du premier président de la Cour d'appel ou de son délégué) consiste à opérer un contrôle de la régularité de l'hospitalisation complète sous contrainte, puis de son bien-fondé.

Il peut relever d'office tout moyen d'irrégularité à condition de respecter le principe du contradictoire.

En raison de la règle de purge des nullités, le premier président de la Cour d'appel ou son délégué ne saurait apprécier la régularité des procédures antérieures ayant donné lieu à un contrôle du juge des libertés et de la détention à travers une décision définitive.

L'appréciation du bien-fondé de la mesure doit s'effectuer au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, dont le juge ne saurait dénaturer le contenu, son contrôle supposant un examen des motifs évoqués, mais ne lui permettant pas de se prononcer sur l'opportunité de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte et de substituer son avis à l'évaluation faite, par le corps médical, des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Il résulte de l'article L.3212-1 du code de la santé publique que :

'I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

II.-Le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission :

1° Soit lorsqu'il a été saisi d'une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu'elle remplit les conditions prévues au présent alinéa, la personne chargée, à l'égard d'un majeur protégé, d'une mesure de protection juridique à la personne peut faire une demande de soins pour celui-ci.

La forme et le contenu de cette demande sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

La décision d'admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du présent article sont réunies.

Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement accueillant le malade ; il constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il doit être confirmé par un certificat d'un second médecin qui peut exercer dans l'établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni du directeur de l'établissement mentionné à l'article L.3222-1 qui prononce la décision d'admission, ni de la personne ayant demandé les soins ou de la personne faisant l'objet de ces soins ;

2° Soit lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l'établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement ni avec la personne malade.

Dans ce cas, le directeur de l'établissement d'accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.

Lorsque l'admission a été prononcée en application du présent 2°, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts'.

L'article L.3212-3 du code de la santé publique prévoit que :

'En cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.

Préalablement à l'admission, le directeur de l'établissement d'accueil vérifie que la demande de soins a été établie conformément au 1° du II de l'article L. 3212-1 et s'assure de l'identité de la personne malade et de celle qui demande les soins. Si la demande est formulée pour un majeur protégé par son tuteur ou curateur, celui-ci doit fournir à l'appui de sa demande un extrait de jugement de mise sous tutelle ou curatelle'.

Suivant les dispositions de l'article L.3211-12-1 du code de la santé publique :

'I.-L'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement lorsque l'hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre ou par le représentant de l'Etat dans le département lorsqu'elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l'article L. 3214-3 du présent code ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure :

1° Avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de l'admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l'article L. 3214-3 du même code. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette admission ;

2° Avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l'article L. 3212-4 ou du III de l'article L. 3213-3. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette décision ;

3° Avant l'expiration d'un délai de six mois à compter soit de toute décision judiciaire prononçant l'hospitalisation en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale, soit de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application du présent I ou des articles L.3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision. Toute décision du juge des libertés et de la détention prise avant l'expiration de ce délai en application du 2° du présent I ou de l'un des mêmes articles L.3211-12, L.3213-3, L.3213-8 ou L.3213-9-1, ou toute nouvelle décision judiciaire prononçant l'hospitalisation en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale fait courir à nouveau ce délai. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi quinze jours au moins avant l'expiration du délai de six mois prévu au présent 3°'.

'II.-La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l'avis motivé d'un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète'.

'III.-Le juge des libertés et de la détention ordonne, s'il y a lieu, la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète.

Lorsqu'il ordonne cette mainlevée, il peut, au vu des éléments du dossier et par décision motivée, décider que la mainlevée prend effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures, afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application du II de l'article L. 3211-2-1. Dès l'établissement de ce programme ou à l'issue du délai mentionné à la première phrase du présent alinéa, la mesure d'hospitalisation complète prend fin'.

'V.-Lorsque le juge des libertés et de la détention n'a pas statué avant l'expiration du délai de douze jours prévu aux 1° et 2° du I ou du délai de six mois prévu au 3° du même I, la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète est acquise à l'issue de chacun de ces délais.

Si le juge des libertés et de la détention est saisi après l'expiration du délai de huit jours prévu aux 1° et 2° du I ou du délai de quinze jours prévu au 3° du même I, il constate sans débat que la mainlevée de l'hospitalisation complète est acquise, à moins qu'il ne soit justifié de circonstances exceptionnelles à l'origine de la saisine tardive et que le débat puisse avoir lieu dans le respect des droits de la défense'.

L'article R.3211-25 du code de la santé publique prévoit, au titre des dispositions particulières à la procédure de contrôle des mesures d'hospitalisation complète sans consentement que : 'Le premier alinéa de l'article 641 et le second alinéa de l'article 642 du code de procédure civile ne sont pas applicables à la computation des délais dans lesquels le juge doit être saisi et doit statuer'.

L'article 641 1er alinéa du code de procédure civile dispose que: 'Lorsqu'un délai est exprimé en jours, celui de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir ne compte pas'.

Suivant l'article 642 second alinéa du code de procédure civile :'Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant'.

Il se déduit, dès lors, de ces dispositions, que le point de départ des délais dans lesquels le juge des libertés et de la détention doit être saisi et doit statuer est le jour même de l'admission en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète, lequel doit être comptabilisé dans la computation des délais, quelle que soit l'heure à laquelle ladite admission est intervenue.

En l'espèce, il apparaît que le juge des libertés et de la détention de Chambéry a été saisi le lundi 15 avril 2024 par le directeur du CHS [8] alors que M. [G] [W] a été admis en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète à la demande d'un tiers le dimanche 7 avril 2024, de sorte que le délai de 8 jours, prescrit par l'article L.3211-12-1 I 1° , était expiré, sans qu'il ne soit fait état, par ailleurs, en procédure de circonstances exceptionnelles à l'origine de cette saisine tardive.

Dans ces conditions, à défaut de saisine du juge des libertés et de la détention dans le délai de 8 jours imparti, il ne peut être, à ce stade, que procédé au constat de la mainlevée de plein droit de la mesure d'hospitalisation complète sans consentement de M. [W] [G], l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Chambéry du 16 avril 2024 devant, dès lors, être infirmée.

Pour autant, il convient de prévoir que cette mainlevée ne prendra effet que dans un délai de 24 heures à compter de la notification de la présente décision par le greffe, le temps de permettre au CHS [8] de définir un programme de soins adapté à ses besoins.

Il s'avère, en effet, que M. [W] [G], connu depuis plusieurs années pour des symptômes psychotiques, a été hospitalisé sans son consentement le 7 avril 2024, en raison d'une nouvelle décompensation avec délire paranoïaque, associée à des hallucinations envahissantes auxquelles il adhérait totalement, et de troubles du comportement/gestes auto-agressifs, dans un contexte d'alcoolisation.

Si, depuis son admission, le corps médical observe une amélioration, voire une stabilisation, sur le plan clinique, en ce qu'il est, désormais, calme et coopérant avec des propos cohérents, il apparait que son adhésion aux soins reste fragile, étant précisé qu'à l'issue de sa dernière hospitalisation 'libre' en milieu psychiatrique courant mars 2024, son état psychique s'était rapidement dégradé lors du retour à domicile, en raison, notamment, d'une mauvaise observance thérapeutique et de la reprise d'une consommation de toxiques, sans compter que, dans le cadre de la présente mesure, son placement à l'isolement a été nécessaire provisoirement à la suite notamment d'une menace de fugue.

Compte tenu de ces éléments et de la personnalité de M. [W] [G] (souffrant, en sus de ses troubles psychiques, d'une problématique d'addiction), nécessitant d'être encadrée, l'établissement d'un programme de soins, ainsi qu'il est indiqué dans le dernier certificat de situation du 26 avril 2024, est préconisé, dans le but de favoriser une consolidation de son état de santé.

PAR CES MOTIFS,

Nous, Isabelle Chuilon, conseillère à la Cour d'appel de Chambéry, déléguée par ordonnance de Mme la Première Présidente, statuant par ordonance le 30 avril 2024, après débats en audience publique, au siège de ladite Cour d'appel, assistée de Sophie Messa, greffière,

Déclarons recevable l'appel de M. [W] [G],

Infirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Chambéry en date du 16 avril 2024,

Constatons la mainlevée de plein droit de la mesure d'hospitalisation complète sans consentement de M. [W] [G] du fait d'une saisine tardive du juge des libertés et de la détention,

Disons que cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de 24 heures, courant à compter de la notification par le greffe de la présente décision, aux fins de mise en place d'un programme de soins.

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

Disons que la notification de la présente ordonnance sera faite sans délai, par tout moyen permettant d'établir la réception, conformément aux dispositions de l'article R.3211-22 du code de la santé publique.

Ainsi prononcé le 30 avril 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Isabelle CHUILON, conseillère à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par Madame la première présidente et Mme Sophie MESSA, greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 24/00060
Date de la décision : 30/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-30;24.00060 ?
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