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19/03/2024 | FRANCE | N°24/00007

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 19 mars 2024, 24/00007


COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence











AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,



Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :



Dans la cause N° RG 24/00007 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HNB2 débattue à notre audience publique du 13 Février 2024 - RG au fo

nd n° 23/01735 - 1ère section





ENTRE





S.C.I. LES JONCHERES 4, dont le siège social est situé [Adresse 1]



représentée par la S...

COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence

AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :

Dans la cause N° RG 24/00007 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HNB2 débattue à notre audience publique du 13 Février 2024 - RG au fond n° 23/01735 - 1ère section

ENTRE

S.C.I. LES JONCHERES 4, dont le siège social est situé [Adresse 1]

représentée par la SARL JUDIXA, avocats au barreau d'ANNECY

Demanderesse en référé

ET

S.A.S. SNC INTERNATIONAL, dont le siège social est situé [Adresse 2]

Ayant pour avocat postulant la SELARL BOLLONJEON, avocats au barreau de CHAMBERY et pour avocat plaidant RTA - AVOCATS, avocats au barreau de THONON-LES-BAINS

Défenderesse en référé

'''

Exposé du litige

Par acte sous seing privé du 21 octobre 2013, la Sci Les Jonchères IV a donné à bail commercial des locaux industriels situés à [Localité 3] (Haute-Savoie), [Adresse 4], à la Sarl Bcm 74 pour une durée de neuf années.

Par acte d'huissier signifié le 30 avril 2019, la Sci Les Jonchères IV a notifié un congé à la Sarl Bcm 74 sans offre de renouvellement du bail commercial prenant effet le 31 octobre 2019 à l'issue de la deuxième période triennale du bail.

Saisi par acte d'huissier du 19 novembre 2020 délivré par la Sarl Bcm 74 à la Sci Les Jonchères IV, le juge des référés du tribunal judiciaire d'Annecy a, par ordonnance du 25 janvier 2021, ordonné une mesure d'expertise afin de déterminer l'indemnité d'éviction et a désigné Monsieur [T] [Z] pour réaliser la mission fixée au dispositif de l'ordonnance.

Par décision de l'associé unique de la Sarl Bcm 74 du 31 mars 2021 déposée au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce d'Annecy le 08 mai 2021, la Sarl Bcm 74 a été dissoute et absorbée par la Sas Snc International.

Monsieur [T] [Z] a établi son rapport d'expertise le 11 août 2021.

Saisi par acte d'huissier du 28 octobre 2021 délivré par la Sas Snc International à la Sci Les Jonchères IV, le tribunal judiciaire d'Annecy a, par jugement du 22 novembre 2023 :

- condamné la Sci Les Jonchères IV à payer à la Sas Snc International, venant aux droits de la Sarl Bcm 74, au titre de l'indemnité d'éviction les sommes suivantes:

* 120 000 euros au titre de l'indemnité d'éviction principale (droit au bail),

* 10 500 euros au titre de l'indemnité de remploi,

* 9 961,2 euros TTC au titre des frais de réinstallation,

* 15 360 euros TTC au titre du double loyer,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la Sci Les Jonchères IV aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

- condamné la Sci Les Jonchères IV à verser à la Sas Snc International la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La Sas Snc International a interjeté appel de cette décision le 12 décembre 2023 (n° DA 23/01736 et n° RG 23/01735), émettant des critiques à l'encontre du chef de jugement qui fixe les sommes dues par la Sci Les Jonchères IV au titre de l'indemnité d'éviction.

Par acte d'huissier signifié le 19 janvier 2024, la Sci Les Jonchères IV a fait assigner la Sas Snc International venant aux droits de la Sarl Bcm 74 devant madame la première présidente de la Cour d'appel de Chambéry statuant en référé sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile afin de voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy le 22 novembre 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience du 13 février 2024.

La Sci Les Jonchères IV demande, conformément à ses écritures notifiées par RPVA le 12 février 2024, à la Cour de :

à titre principal,

- arrêter l'exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy le 22 novembre 2023,

à titre subsidiaire,

- limiter l'exécution provisoire à la somme de 78 311,08 euros qui sera à verser par la Sci Les Jonchères IV à la Sas Snc International,

- juger n'avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Sas Snc International aux dépens.

Elle fait valoir que sa demande est recevable en ce que les conséquences manifestement excessives sont nées postérieurement à la décision, que même si les difficultés économiques de Snc International étaient connues avant le jugement de première instance, il est désormais établi qu'elles sont définitives, ce qui implique un risque de ne pas pouvoir recouvrer la somme versée en cas de réformation de la décision. Elle précise que c'est une convention d'abandon de compte courant d'associé qui a permis de redresser la situation économique de la Sas Snc International, et elle craint que le paiement de la somme due au titre du jugement de première instance aille à l'associé qui a renoncé à sa créance au bénéfice de la société. Elle précise que la Sas Snc International a des résultats catastrophiques depuis quatre années.

Elle ajoute qu'il y a une chance de réformation de la décision à l'issue de la procédure d'appel dans la mesure où elle demande une diminution d'environ 80000 euros du montant de l'indemnité d'éviction puisque l'expert judicaire s'est placé au mauvais moment pour le calcul de cette indemnité et a retenu une valeur de l'immeuble non conforme au prix du marché.

A défaut d'arrêt de l'exécution provisoire, dès lors qu'elle ne conteste pas devoir la somme de 78 311,03 euros, elle souhaite voir l'exécution provisoire limitée à ce montant

La Sas Snc International, conformément à ses conclusions notifiées par voie électronique le 09 février 2024, demande à la Cour de :

- juger la Sci Les Jonchères IV irrecevable en sa demande à défaut d'avoir fait valoir ses observations sur l'exécution provisoire en première instance,

- juger que la Sci Les Jonchères IV ne rapporte pas la preuve de moyens sérieux d'annulation ou de réformation du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy le 22 novembre 2023 ni la preuve de conséquences manifestement excessives en cas d'exécution provisoire,

- débouter la Sci Les Jonchères IV de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire,

- condamner la Sci Les Jonchères IV à lui payer une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Elle fait valoir qu'elle a la qualité d'appelante dans le dossier pendant devant la cour d'appel et qu'elle demande une augmentation de l'indemnité d'éviction qui a été décidée par le tribunal judiciaire d'Annecy. Elle estime que s'il y a des moyens sérieux de réformation, c'est dans le sens d'une augmentation de l'indemnité et non pas d'une diminution.

Elle soulève l'irrecevabilité de la Sci Les Jonchères IV en ce qu'elle n'a jamais contesté l'exécution provisoire attachée de droit au jugement durant la procédure en première instance et que ses propres difficultés financières n'ont jamais été niées.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens.

Sur ce

1. Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

L'article 55 II du décret du 11 décembre 2019 énonce que les dispositions de l'article 3 s'appliquent aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020. Ainsi, la demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire n'est soumise aux dispositions nouvelles du code de procédure civile que lorsqu'elle a été engagée après le 1er janvier 2020, ce qui est le cas en l'espèce.

Aux termes de l'article 514-3 du code de procédure civile, 'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

En cas d'opposition, le juge qui a rendu la décision peut, d'office ou à la demande d'une partie, arrêter l'exécution provisoire de droit lorsqu'elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.'

Il ressort du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy le 22 novembre 2023 que l'exécution provisoire n'a pas été discutée en première instance.

Par conséquent, la présente procédure répond aux conditions de l'alinéa 2 de l'article 514-3 du code de procédure civile, la Sci Les Jonchères IV devant prouver cumulativement l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et l'existence de conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Il résulte des pièces du dossier que la mauvaise santé économique de la Sas Snc International, préexistait à la décision rendue le 22 novembre 2023 par le tribunal judiciaire d'Annecy. En effet, les comptes sociaux de la Sas Snc International pour les années 2020, 2021 et 2022 produits aux débats par la Sci Les Jonchères IV (pièces 24, 25 et 26) démontrent que les difficultés économiques de la Sas Snc International alléguées par la demanderesse étaient antérieures au jugement rendu le 22 novembre 2023. En outre, si la Sci Les Jonchères IV fait valoir à l'audience que la certitude des difficultés économiques de la Sas Snc International a été révélée postérieurement au jugement, force est de constater que la convention d'abandon du compte courant d'associés sur laquelle elle se fonde a été dressée le 24 mars 2023 (pièce 12 de la défenderesse), l'ordonnance de clôture étant intervenue en première instance le 04 mai 2023 (pièce 5 de la défenderesse).

Dès lors, conformément à l'alinéa 2 de l'article 514-3 du code de procédure civile, les demandes de la Sci Les Jonchères IV sont irrecevables dans la mesure où les conséquences manifestement excessives qu'elle fait valoir ne sont pas postérieures au jugement de première instance.

Au demeurant, s'agissant du moyen sérieux d'annulation ou de réformation, il convient de relever que l'objet de la procédure d'appel est le montant de l'indemnité d'éviction, le débat des parties se cristallisant notamment autour de la fixation de la valeur du droit au bail, de sorte que le principe même de l'indemnité n'est pas discuté. Or, si la Sci Les Jonchères IV allègue que l'expert a commis des erreurs dans l'évaluation du droit au bail en tenant compte de la valeur locative en 2021 et non en 2019 et produit un rapport d'expertise dressé le 28 juin 2019 par la Sarl Carteron Expertises (pièce 2 de la demanderesse), force est de constater que le juge de première instance a bel et bien tenu compte de ces éléments dans sa motivation et a détaillé, au sein de sa décision, les raisons qui l'avaient conduit à retenir une valeur locative de 85,56 euros/m². Les moyens de réformation allégués par la Sci Les Jonchères IV n'apparaissent dès lors pas sérieux.

2. Sur les autres demandes

La Sci Les Jonchères IV ayant vu ses prétentions rejetées, celle-ci sera condamnée à supporter la charge des dépens de l'instance conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

En outre, l'équité commande d'allouer une indemnité de 1 500 euros à la Sas Snc International sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par décision contradictoire et en matière de référé,

DECLARONS irrecevables les demandes formulées par la Sci Les Jonchères IV,

CONDAMNONS la Sci Les Jonchères IV à verser à la Sas Snc International une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS la Sci Les Jonchères IV à supporter la charge des dépens de l'instance.

Ainsi prononcé publiquement, le 19 mars 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Marie-France BAY-RENAUD, première présidente, et Ghislaine VINCENT, greffière.

La greffière La première présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 24/00007
Date de la décision : 19/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-19;24.00007 ?
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