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19/03/2024 | FRANCE | N°23/00069

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 19 mars 2024, 23/00069


COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence











AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,



Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :



Dans la cause N° RG 23/00069 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HLOY débattue à notre audience publique du 06 Février 2024 - RG au fo

nd n° 23/00772 - 1ere section





ENTRE





S.A.S. MIXCITE, dont le siège social est situé [Adresse 1]



Ayant pour avocat postulant ...

COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence

AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :

Dans la cause N° RG 23/00069 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HLOY débattue à notre audience publique du 06 Février 2024 - RG au fond n° 23/00772 - 1ere section

ENTRE

S.A.S. MIXCITE, dont le siège social est situé [Adresse 1]

Ayant pour avocat postulant la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocats au barreau de CHAMBERY et pour avocat plaidant la SCP DGD, avocat au barreau de BORDEAUX

Demanderesse en référé

ET

S.A.R.L. CLI, dont le siège social est situé [Adresse 2]

Ayant pour avocat postulant la SCP ARMAND - CHAT ET ASSOCIES, avocats au barreau de CHAMBERY et pour avocat plaidant Me Thibaut de BERNON, avocat au barreau de LYON

Défenderesse en référé

'''

Exposé du litige

Par protocole d'accord du 15 mars 2018, la Sas Mixcite et la Sas Lb Création Immobilière se sont entendues, en présence de la Sarl Cli, pour réaliser une opération de promotion immobilière sur des terrains situés sur la commune de Maxilly-Sur-Léman (Haute-Savoie).

Saisi par acte d'huissier du 06 novembre 2019 délivré par Monsieur [F] [X] pris en sa qualité de représentant légal de la Sarl Cli afin d'obtenir le réglement de la somme de 180 000 euros en paiement de l'apport de l'affaire et de la cession du permis de construire de l'opération ci-dessus visée, le tribunal judiciaire de Thonon-Les-Bains a, par jugement du 20 février 2023 :

- constaté l'intervention volontaire de la Sarl Cli,

- condamné la Sas Mixcite à payer à la Sarl Cli la somme de 98 000 euros,

- condamné la Sas Mixcite à payer à la Sarl Cli la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- rejeté les demandes formulées à l'encontre de la Sccv Maxilly Grand Large,

- rejeté la demande en dommages et intérêts de la Sarl Cli sur le fondement du manque à gagner,

- rejeté la demande en dommages et intérêts de la Sas Mixcite et de la Sccv Maxilly Grand Large,

- condamné la Sas Mixcite à payer à la Sarl Cli la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Sas Mixcite aux dépens, dont distraction au profit de Maître Damien Merotto,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

La Sas Mixcite a interjeté appel de cette décision le 15 mai 2023 (n° DA 23/00762 et n° RG 23/00772), émettant des critiques à l'encontre de l'ensemble des chefs de jugement.

Par acte d'huissier signifié le 06 novembre 2023, la Sas Mixcite a fait assigner la Sarl Cli devant madame la première présidente de la Cour d'appel de Chambéry statuant en référé afin de voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thonon-Les-Bains le 20 février 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience du 21 novembre 2023 et a fait l'objet de plusieurs renvois à la demande des parties aux fins d'échange des conclusions et communication des pièces.

Le dossier a été plaidé à l'audence du 06 février 2024.

La Sas Mixcite sollicite, conformément à ses dernières écritures notifiées le 30 janvier 2024 par voie électronique, de voir :

- arrêter l'exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thonon-Les-Bains,

à titre subsidiaire,

- l'autoriser à consigner la condamnation revêtue de l'exécution provisoire entre les mains de tel séquestre qu'il plaira,

à titre très subsidiaire,

- dire que l'exécution provisoire du jugement ne pourra intervenir que contre constitution par la Sarl Cli d'une garantie réelle ou personnelle à hauteur du montant des condamnations acquittées par la Sas Mixcite,

- dire qu'en cas de réformation partielle ou totale du jugement les sommes versées en vertu de l'exécution provisoire seront immédiatement restituées à la Sas Mixcite, sur présentation à première demande d'une copie exécutoire de l'arrêt réformatif,

- condamner la Sarl Cli à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens du référé.

Elle fait valoir que le recouvrement de la somme versée en exécution du jugement de première instance serait compliqué en cas de réformation du jugement par la cour d'appel. Elle indique que la Sarl Cli ne pouvait pas porter le projet immobilier seule au départ et qu'elle ignore tout de la situation financière de cette société dans la mesure où aucun document financier précisant ses liquidités et son patrimoine immobilier n'a été fourni. Elle ajoute que la Sarl Cli est détenue en totalité par des sociétés suisses ce qui rendrait le recouvrement éventuel d'autant plus compliqué.

La Sarl Cli, conformément à ses dernières écritures notifiées le 04 décembre 2023 par voie électronique, demande à la cour de :

- débouter la Sas Mixcite de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la Sas Mixcite à lui verser la somme de 50 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- condamner la Sas Mixcite à lui verser la somme de 50 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de l'instance liquidés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître François-Xavier Chapuis, Avocat au barreau de Chambéry.

Elle fait valoir que la Sas Mixcite est à l'origine de ses difficultés financières puisqu'elle ne lui a pas versé la somme lui revenant suite à la transmission du permis de construire. Elle ajoute qu'elle a fait réaliser plusieurs mesures d'exécution qui n'ont pas été fructueuses dans la mesure où les comptes bancaires de la demanderesse étaient vides alors que la Sas Mixcite a pourtant plusieurs projets immobiliers importants en cours.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées.

Sur ce

1. Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

L'article 55 II du décret du 11 décembre 2019 énonce que les dispositions de l'article 3 s'appliquent aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020. Ainsi, la demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire reste soumise aux dispositions anciennes du code de procédure civile lorsqu'elle a été engagée avant le 1er janvier 2020, ce qui est le cas en l'espèce.

Aux termes de l'ancien article 524 du code de procédure civile, ' lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants :

1° Si elle est interdite par la loi ;

2° Si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522.'

Les développements présents dans les écritures des parties et non repris à l'audience, relatifs aux moyens sérieux de réformation ou d'annulation de la décision de première instance, sont sans incidence sur l'arrêt de l'exécution provisoire dès lors que l'instance a été introduite devant le premier juge avant le 1er janvier 2020, date de l'entrée en vigueur du décret du 11 décembre 2019 ;

Il appartient dès lors à la Sas Mixcite de démontrer que l'exécution provisoire entraînerait des conséquences manifestement excessives à son égard.

Les conséquences manifestement excessives sont caractérisées lorsque les facultés du débiteur ne lui permettent pas d'exécuter le jugement sans encourir de graves conséquences, susceptibles de rompre de manière irréversible son équilibre financier.

Il appartient au premier président de prendre en compte les risques générées par la mise à exécution de la décision rendue en fonction de la situation personnelle et financière du débiteur ainsi que des facultés de remboursement du créancier si la décision devait être infirmée ;

Cependant, l'arrêt de l'exécution provisoire ne peut pas être prononcée au seul motif que les sommes versées en exécution du jugement de première instance seront difficiles à recouvrer en cas d'infirmation du jugement.

En l'espèce, la Sas Mixcite fonde l'intégralité de son argumentation sur les difficultés qu'aurait la Sarl Cli à rembourser les sommes versées en exécution du jugement de première instance en cas de réformation, concluant que la défenderesse ne verse aux débats aucun élément permettant d'apprécier sa capacité de remboursement.

Conformément à l'article 9 du code de procédure civile, il appartient à la partie qui formule une demande de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention. En l'espèce, la sas Mixcite ne prouve ni le risque de non restitution qu'elle allègue, procédant uniquement par affirmations non étayées, ni les conséquences manifestement excessives résultant de la non restitution de cette somme ;

Ainsi, si la Sarl Cli reconnaît effectivement ses difficultés économiques au sein de ses écritures et oralement lors de l'audience, la Sas Mixcite n'indique pas en quoi le paiement de l'obligation mise à sa charge suite au jugement de première instance est de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives pour elle lors du paiement ou en cas de non recouvrement des sommes suite à un arrêt d'infirmation. En effet, celle-ci ne verse pas d'éléments concernant sa situation financière et ne démontre pas le caractère manifestement excessif des conséquences que pourrait entraîner pour elle l'exécution provisoire ordonnée.

La demande d'arrêt de l'exécution provisoire sera par conséquent rejetée.

2. Sur la demande de consignation à titre subsidiaire

Aux termes de l'article 521 alinéa 1er du code de procédure civile, 'la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.'

En l'espèce, la condamnation de la Sas Mixcite porte sur le paiement d'une somme d'argent autre que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions. L'article 521 du code de procédure civile est dès lors applicable.

S'il appartient effectivement au premier président d'apprécier souverainement la nécessité d'aménager l'exécution provisoire ordonnée par le juge de première instance, il incombe cependant aux parties de produire les éléments probants justifiant ledit aménagement.

Il résulte des pièces communiquées que les comptes bancaires des deux parties présentent des soldes débiteurs en France, que les mesures d'exécution entreprises par la Sarl Cli contre la Sas Mixcité ont toutes été infructueuses et que les intérêts de la Sarl Cli sont en partie situés à l'étranger ;

En conséquence, la consignation permettra de garantir l'exécution de la décision de première instance et de l'arrêt à venir, qu'il soit confirmatif ou infirmatif ;

Quand la loi permet une consignation sans en indiquer le lieu, les juridictions ne peuvent autoriser de consignations auprès d'organismes autres que la Caisse des dépôts et consignations, par application des articles 2-14° de l'ordonnance du 3 juillet 1816 et L. 518-19 du code monétaire et financier.

3. Sur la demande de condamnation pour résistance abusive

Aux termes de l'article 956 du code de procédure civile, 'dans tous les cas d'urgence, le premier président peut ordonner en référé, en cas d'appel, toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.'

Il convient de rappeler que le juge statuant en référé n'a pas le pouvoir d'accorder des dommages et intérêts, celui-ci statuant au provisoire et ne pouvant dès lors qu'octroyer des sommes provisionnelles.

La Sarl Cli sollicite la condamnation de la Sas Mixcite à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Ainsi, elle ne sollicite pas l'octroi d'une provision, de sorte que la demande échappe à la compétence du premier président statuant en référé et ne peut-être accueillie par lui. En outre, il convient de constater qu'elle ne motive et ne démontre pas le caractère urgent ou non sérieusement contestable de sa demande.

La demande sera par conséquent rejetée.

4. Sur les autres demandes

L'équité n'appelle pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Les dépens resteront à la charge de la Sas Mixcite qui devra exécuter la présente décision en consignant les fonds. En outre, la constitution d'avocat n'étant pas obligatoire devant le premier président statuant en matière de référé, la distraction des dépens ne peut être ordonnée.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par décision contradictoire et en matière de référé,

DEBOUTONS la Sas Mixcite de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

AUTORISONS la Sas Mixcite à consigner la somme de 113 000 euros entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance ;

DISONS que la Sas Cli pourra poursuivre l'exécution provisoire de la totalité des causes du jugement de première instance à défaut de consignation dans le délai prescrit ;

DEBOUTONS les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTONS les parties de toutes autres demandes ;

CONDAMNONS la Sas Mixcite à supporter la charge des dépens de l'instance.

Ainsi prononcé publiquement, le 19 mars 2024, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Marie-France BAY-RENAUD, première présidente, et Ghislaine VINCENT, greffière.

La greffière La première présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 23/00069
Date de la décision : 19/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-19;23.00069 ?
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