La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/03/2024 | FRANCE | N°24/00039

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 13 mars 2024, 24/00039


COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence







ORDONNANCE



STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES





du Mercredi 13 Mars 2024







N° RG 24/00039 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HN5G





Appelant

M. [M] [P]

né le 05 Juillet 1975 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 3]

hospitalisé à l'EPSM74

assisté de Me Mokrane OUAR, avocat désigné

d'office inscrit au barreau de CHAMBERY



Appelés à la cause

Etablissement EPSM 74

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

non comparant



UDAF DE LA HAUTE SAVOIE (curateur)

[Adresse 2]

[Localité 4]

...

COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence

ORDONNANCE

STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES

du Mercredi 13 Mars 2024

N° RG 24/00039 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HN5G

Appelant

M. [M] [P]

né le 05 Juillet 1975 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 3]

hospitalisé à l'EPSM74

assisté de Me Mokrane OUAR, avocat désigné d'office inscrit au barreau de CHAMBERY

Appelés à la cause

Etablissement EPSM 74

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

non comparant

UDAF DE LA HAUTE SAVOIE (curateur)

[Adresse 2]

[Localité 4]

non comparant

Partie Jointe :

Le Procureur Général - Cour d'Appel de CHAMBERY - Palais de Justice - 73018 CHAMBERY CEDEX - dossier communiqué et réquisitions écrites

*********

DEBATS :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du mercredi 13 mars 2024 à 10h devant Monsieur Cyril GUYAT, conseiller à la cour d'appel de Chambéry, délégué par ordonnance de Madame la première présidente, pour prendre les mesures prévues aux dispositions de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de prise en charge, assisté de Madame Sophie Messa, greffière

L'affaire a été mise en délibéré au 13 mars 2024 après-midi,

***

Le 27 février 2024, M. [M] [P] a été admis, par décision du même jour du directeur de l'EPSM 74, en soins psychiatriques sans consentement en raison d'un péril imminent.

Le certificat médical d'admission en date du 27 février 2024 mentionnait que le patient souffrait de schizophrénie, présentait une conduite inappropriée, une tendance à la fuite, des idées suicidaires, semblait ne pas comprendre quel était son état de santé, qu'il existait un péril imminent en raison de son état neuro-cognitif et de la nécessité d'un traitement adapté sous surveillance médicale spécialisée.

Le patient a indiqué qu'il ne souhaitait pas qu'on informe un membre de sa famille ou autre de son hospitalisation. Il a été visité par sa s'ur le 28 février 2024.

Le certificat médical des 24h du 28 février 2024 mentionnait que le patient souffrait d'une psychose chronique, avait déjà bénéficié d'hospitalisations et avait été réadmis la veille par les urgences de [Localité 6] pour troubles de comportement sur décompensation de sa pathologie. Au jour de l'examen il présentait des pensées désorganisées avec propos incohérents, décrivait des hallucinations intrapsychiques qui s'imposaient à lui et commentaient ses actes, disait avoir des moments d'envies suicidaires. Il était dans le déni de ses troubles et ne se montrait pas impliqué dans les soins. Son état clinique nécessitait une surveillance avec reprise des traitements et réévaluation en hospitalisation.

Le certificat médical des 72 heures du 1er mars 2024 indiquait que le patient, qui avait été hospitalisé à [Localité 6] en raison d'une dégradation importante de son état somatique et d'une majoration de ses angoisses et d'idées suicidaires, avait fugué de l'hôpital, verbalisant des souhaits d'euthanasie et des propos incohérents, ce qui avait nécessité son hospitalisation. Au jour de l'entretien, l'état clinique tant somatique que psychiatrique demeurait instable. Le patient verbalisait des hallucinations générant des angoisses et un sentiment d'insécurité. Sa critique de ses idées suicidaires restait très partielle. Il n'avait pas conscience de ses troubles, était méfiant et réticent aux soins. Il nécessitait toujours une surveillance rapprochée et l'adaptation de son traitement. Son état ne lui permettait pas de donner un consentement valide aux soins.

Le 1er mars 2024, le directeur de l'EPSM 74 maintenait la mesure de soins sans consentement de M. [M] [P] sous la forme d'une hospitalisation complète.

L'avis motivé du 4 mars 2024 retenait que l'état clinique du patient, tant somatique que psychiatrique, demeurait instable. Si le contact s'améliorait progressivement, il persistait une désorganisation psychique majeure, des hallucinations non critiquées générant des angoisses massives. Il n'était toujours pas conscient de ses troubles et nécessitait la poursuite d'une surveillance clinique rapprochée et l'adaptation de son traitement. Il n'était ainsi pas en capacité de donner un consentement valide aux soins.

Par ordonnance du 6 mars 2024, le juge des libertés de la détention du tribunal judiciaire de Bonneville a ordonné le maintien de la mesure d'hospitalisation complète de M. [M] [P].

Par courrier non motivé reçu au greffe de la cour d'appel le 7 mars 2024, M. [M] [P] a interjeté appel de cette ordonnance.

Les convocations et avis d'audience ont été adressées aux parties conformément aux dispositions de l'article R 3211-19 du code de la santé publique.

L'avis médical prévu par l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique a été communiqué au greffe le 8 mars 2024. Il mentionne que le patient est calme au sein du service, que des idées délirantes à thématique de persécution persistent, ainsi que des hallucinations psycho-sensorielles mettant en scène des hallucinations auditives. Son discours est étrange à caractère énigmatique, il persiste une ambivalence envers l'hospitalisation et les soins, qui restent au-delà de son consentement, de sorte que les soins psychiatriques sur décision du directeur doivent être maintenus à temps complet.

A l'audience publique du 13 mars 2024, M. [M] [P] a comparu.

Il a pu s'entretenir de manière confidentielle avec son conseil avant l'audience.

M. [M] [P] a indiqué qu'il avait fait appel en raison d'une 'compréhension non régulière de ses émotions. Je ne suis pas d'accord avec la décision. Je veux qu'on mette tous les éléments sauf qu'on me garde un coin secret, personnel de ma vie quelque part. (...) Je veux sortir de l'hôpital.

Questionné sur le fait de savoir s'il y avait à l'hôpital des choses biens et des choses moins bien pour lui, il a indiqué 'A l'hôpital il y a du bien et du mal'. Questionné sur le fait de savoir ce qui était bien, il a indiqué 'C'est tout ça... Voilà... Tout ce qui m'entoure.'

Il a indiqué ne pas avoir eu de contact avec son curateur à l'hôpital.

Son conseil a indiqué que son client était assez confus sur les motivations de son appel, confusion qui faisait écho à la désorganisation psychique relevée par les médecins, qu'il souhaitait poursuivre les soins, mais pas en milieu fermé.

Le directeur du centre hospitalier n'a pas comparu.

L'UDAF 74, désignée par ordonnance du 6 février 2023 du juge des tutelles de Bonneville en qualité de curateur de M. [M] [P], n'a pas comparu mais a transmis le 12 mars 2024 au greffe une note de situation dans laquelle elle indique notamment penser qu'une prise en charge médicale de la personne protégée lui serait bénéfique.

Le ministère public n'a pas comparu, mais il a requis le 8 mars 2024 la confirmation de la décision de maintien de la mesure d'hospitalisation complète. Ces réquisitions ont été portées à la connaissance de M. [M] [P] et de son conseil avant l'audience.

La décision a été mise en délibéré au 13 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel est recevable en ce qu'il a été formé dans les formes et délais requis.

En application de l'article L3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L3212-3 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L3211-2-1.

En application de l'article L 3212-1 du code de la santé publique, l'admission en établissement psychiatrique est prononcée lorsqu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical.

Il sera rappelé qu'il n'appartient pas au juge de se substituer à l'appréciation du médecin de la pathologie de la patiente et des risques que cette pathologie fait peser sur son intégrité.

En l'espèce, la procédure a été respectée.

Il résulte du dossier et de l'audience que le patient, qui bénéficie d'une curatelle aggravée, souffre d'une psychose chronique ; que le dernier avis médical mentionne la persistance de symptômes délirants et d'hallucinations et surtout qu'il persiste une ambivalence quant aux soins que son état nécessite, et que son état de santé ne permet pas de recueillir de sa part un consentement éclairé à ces soins.

Il résulte de ces éléments que les troubles du patient sont établis et rendent impossible son consentement éclairé aux soins qu'ils nécessitent, et que par ailleurs son état mental impose toujours des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, au regard de la nécessité de s'assurer que la levée de son hospitalisation sous contrainte pourra s'effectuer dans des conditions permettant une poursuite des soins que son état nécessite, ce afin d'éviter une nouvelle décompensation de sa pathologie.

En conséquence, l'ordonnance sera confirmée en toutes ses dispositions, les conditions cumulatives de l'article L 3212'1 du code de la santé publique étant caractérisées.

PAR CES MOTIFS,

Statuant après débats tenus en audience publique, par ordonnance contradictoire au siège de la Cour d'Appel de Chambéry,

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bonneville en date du 6 mars 2024 en toutes ses dispositions,

Laissons les dépens de l'instance à la charge du trésor public.

Disons que la notification de la présente ordonnance sera faite conformément aux dispositions de l'article R 3211-22 du Code de la santé publique.

Ainsi prononcé le 13 mars 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Cyril GUYAT, conseiller à la cour d'appel de Chambéry, délégué par Madame la première présidente et Mme Sophie MESSA, greffière.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 24/00039
Date de la décision : 13/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-13;24.00039 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award