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11/05/2023 | FRANCE | N°23/00013

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 11 mai 2023, 23/00013


COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence











AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le ONZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,



Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :



Dans la cause N° RG 23/00013 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HFXL débattue à notre audience publique du 21 Mars 2023 - RG au fond n°23/0

0069 -1ere section





ENTRE





S.A.S. FRANS BONHOMME, dont le siège social est situé [Adresse 3]



Ayant pour avocat postulant la S...

COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence

AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le ONZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :

Dans la cause N° RG 23/00013 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HFXL débattue à notre audience publique du 21 Mars 2023 - RG au fond n°23/00069 -1ere section

ENTRE

S.A.S. FRANS BONHOMME, dont le siège social est situé [Adresse 3]

Ayant pour avocat postulant la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocats au barreau de CHAMBERY et pour avocat plaidant la SELARL THEMA, avocat au barreau de PARIS

Demanderesse en référé

ET

S.C.I. CRIDO, dont le siège social est situé [Adresse 1]

Représentée par la SELARL ADAMO-ROSSI SYLVIE, avocats au barreau de CHAMBERY

Défenderesse en référé

'''

Exposé du litige :

Par acte notarié en date du 24 décembre 2014, la SCI CRIDO a donné à bail commercial à la SAS DISTRIBUTION DE MATERIAUX POUR LES TRAVAUX PUBLICS, aux droits de laquelle vient la SAS FRANS BONHOMME, des locaux situés [Adresse 2], à destination de commerce de gros de bois et de matériaux de construction pour neuf années et six mois à compter du 24 décembre 2014, moyennant un loyer annuel de 70 000 euros HT.

Suivant ordonnance rendue le 10 janvier 2023, le juge des référés du tribunal de Chambéry, saisi par la SCI CRIDO, a notamment :

- Rejeté l'exception de nullité de l'assignation,

- Constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au contrat de bail

- Débouté la SAS FRANS BONHOMME de sa demande de suspension des effets de la clause résolutoire et de délais de paiement,

- Ordonné l'expulsion de la SAS FRANS BONHOMME

- Condamné la SAS FRANS BONHOMME à payer à titre provisionnel à la SCI CRIDO la somme de 11 369,44 euros (onze mille trois cent soixante-neuf euros et quarante-quatre centimes) par mois à titre d'indemnité d'occupation à compter du 1er octobre 2022 et jusqu'à libération complète des lieux.

- Condamné la SAS FRANS BONHOMME à payer à la SCI CRIDO une provision de 2 716,51 euros (deux mille sept cent seize euros et cinquante et un centime) à valoir sur le montant des sommes impayées au titre des causes du commandement de payer.

La SAS FRANS BONHOMME a fait appel de cette ordonnance le 12 janvier 2023 (n°DA 23/00066 et n° RG 23/00069) puis, le 13 janvier 2023, a fait assigner la SCI CRIDO en référé devant la première présidente de la Cour d'appel de Chambéry afin de voir arrêter l'exécution provisoire de l'ordonnance de référé du 10 janvier 2023 en application des articles 514-3 et suivants du code de procédure civile et de voir condamner la défenderesse à la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

L'affaire a fait l'objet d'un renvoi à la demande des parties aux fins de communication de pièces et d'échange des conclusions.

A l'audience du 21 mars 2023, la SAS FRANS BONHOMME soutient les termes de son assignation à laquelle il est renvoyé pour de plus amples développements.

Elle soutient qu'il existe des moyens sérieux d'annulation ou de réformation du jugement de première instance en ce que l'assignation ayant saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Chambéry est nulle en raison du défaut d'objet de la demande tendant au constat de la résolution du bail ; que le juge des référés ne peut prononcer en cas d'urgence que des mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend, qu'il a constaté l'acquisition de la clause résolutoire alors que la SCI CRIDO ne peut se prévaloir de la clause résolutoire visée au bail que si le manquement du locataire porte sur les obligations contractuelles prévues par la clause, que cette clause résolutoire vise le non-respect de « l'un quelconque de ses engagements » et non les majorations

de retard et ou les intérêts dus sur les retards de règlements des loyers alors que c'est précisément sur ces éléments que les impayés portent et que le juge des référés ne peut se fonder sur la clause pénale prévoyant les majorations de retard pour constater l'acquisition de la clause résolutoire.

Elle ajoute qu'il existe aussi des conséquences manifestement excessives en ce que le juge des référés a ordonné l'expulsion de la société FRANS BONHOMME alors que le stock important de marchandises pourrait être détérioré en cas de déplacement ; que les salariés du site se retrouveraient au chômage, que cela engendrerait une perte de chiffre d'affaires, du fonds de commerce et de clientèle ; qu'en cas d'infirmation de la décision de première instance la société bailleresse se retrouverait dans l'obligation de remettre le locataire en l'état ou de l'indemniser ce qui correspond à une somme exorbitante que la SCI CRIDO ne démontre pas pouvoir assumer alors qu'il lui incombe de le justifier.

La SCI CRIDO conclut au débouté de la société demanderesse et sollicite sa condamnation à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient les termes de leurs conclusions notifiées par RPVA le 23 février 2023 auxquelles il est renvoyé pour de plus amples développements.

Elle fait valoir l'absence de moyens sérieux d'annulation du jugement en ce que l'assignation de première instance était recevable puisqu'elle demandait le constat de la résolution automatique du bail en application de la clause résolutoire et non simplement le constat de la résolution du bail, que la formulation « constater » constitue une prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile lorsqu'elle porte sur l'acquisition d'une clause résolutoire, que la clause résolutoire prévoyait qu'elle serait acquise en cas de manquements à un quelconque de ses engagements stipulés aux présents, que le contrat contient une clause de retard de paiement, que la SAS FRANS BONHOMME se voit reprocher de multiples retards de paiement, que la clause résolutoire est donc acquise.

Elle ajoute que l'exécution provisoire ne risque pas d'entraîner des conséquences manifestement excessives en ce que la SAS FRANS BONHOMME est un leader de la distribution qui se développe même à l'international, que l'expulsion du local n'est pas constitutive d'un arrêt définitif de l'activité commerciale de la SAS FRANS BONHOMME.

L'affaire a été mise en délibéré au 18 avril 2023, date reportée au motif que la pièce n°30 produite dans les pièces ne correspondait pas à celle visée dans les conclusions de la SAS FRANS BONHOMME. La pièce a été communiquée aux parties par RPVA le 10 mai 2023 et n'a suscité aucune observation.

SUR CE :

Selon l'article 55-1 du décret du 11 décembre 2019, l'instance visant à arrêter ou aménager l'exécution provisoire est soumise aux dispositions relatives à

l'exécution provisoire telles qu'elles résultent du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, lorsqu'elle a été engagée après le 1er janvier 2020, ce qui est le cas en l'espèce, puisque la procédure de première instance a été introduite le 28 septembre 2022.

En application de l'article 514 nouveau du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Selon l'article 514-3 du même code : « En cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. ».

Il est rappelé que les deux conditions tenant à l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et aux conséquences manifestement excessives résultant de l'exécution de la décision sont cumulatives.

Le moyen sérieux de réformation est celui qui présente des chances raisonnables de succès, sans qu'il appartienne au premier président de se livrer à un examen approfondi de l'ensemble des moyens et arguments avancés par les parties et soumis à l'examen, au fond, de la cour d'appel.

Aux termes de l'article L.145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. L'article précise que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Suivant commandement délivré le 8 août 2022, la SCI CRIDO a mis en demeure la SAS FRANS BONHOMME de régler le loyer du troisième trimestre 2022 (23 902,06 euros), outre les majorations de retard de paiement du troisième trimestre ( 2390,21 euros), ainsi que les intérêts de retard et le coût de l'acte, pour un montant global de 26 618,57 euros, dans un délai de huit jours et a indiqué qu'à défaut de satisfaire au commandement et dans le délai d'un mois expiré, le demandeur entendra si bon lui semble, se prévaloir des dispositions de la clause résolutoire insérée au bail ;

Or, la SAS FRANS BONHOMME justifie avoir procédé au règlement du troisième trimestre le 26 juillet 2022 par virement d'une somme de 23 902,06 euros, c'est à dire avant la délivrance du commandement de payer ;

La clause résolutoire stipule qu'il est convenu qu'en cas de non-exécution par le preneur de l'un quelconque de ses engagements stipulé au contrat de bail comme le non respect de la clause de destination, ou en cas de non paiement à son échéance de l'un quelconque des termes du loyer convenu, ou des charges et impôts récupérables par le bailleur, le bail sera résilié de plein droit un mois après une sommation d'exécuter ou un commandement de payer ;

Il n'est pas contesté que la SAS FRANS BONHOMME n'a pas réglé dans le délai d'un mois du commandement la somme de 2390,21 euros due en exécution de la clause de retard de paiement aux termes de laquelle le bailleur bénéficie de plein droit d'une majoration forfaire de dix pour cent de la somme due et d'un intéret de retard égal au taux d'intérêt légal en vigueur majoré de cinq mois ;

Or cette clause pourrait recevoir la qualification de clause pénale, réductible uniquement par le juge du fond et l'application de la clause résolutoire au seul non paiement de l'indemnité de retard de paiement constitue un moyen sérieux de réformation ;

Par ailleurs, le juge est toujours susceptible d'accorder des délais de paiement suspensif des effets de la clause résolutoire ;

Sans qu'il n'y ait lieu de préjuger des chances de succès de l'appel, il est avéré que la SAS FRANS BONHOMME démontre l'existence d'un moyen sérieux d'infirmation, étant rappelé que le caractère sérieux de ce moyen ne signifie pas pour autant qu'il sera jugé comme pertinent par la formation collégiale de la cour d'appel.

En ce qui concerne l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu'il appartient au premier président de prendre en compte les risques concrets générés par la mise à exécution de la décision rendue.

En l'espèce, l'ordonnance de référé rendue le 10 janvier 2023 autorise l'expulsion de la SAS FRANS BONHOMME, mettant ainsi fin à l'activité de la société dans ces locaux et entraînant le déménagement de l'ensemble des matériaux ; en outre l'exécution de la décision pourrait avoir des conséquences irréversibles dans le cas où la SCI CRIDO redonnerait ces locaux en location à un autre preneur, ce qui générerait un nouveau contentieux ;

Ainsi, en présence de moyens sérieux de réformation et d'un risque de conséquences manifestement excessives, il convient de faire droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire.

Il convient de laisser les dépens à la charge de la SAS FRANS BONHOMME, le décision intervenant dans ses intérêts.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par décision contradictoire et en matière de référé,

ORDONNONS l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance de référé rendue le 10 janvier 2023 par la présidente du tribunal judiciaire de Chambéry ;

RAPPELONS que la SAS FRANS BONHOMME est tenue au paiement des loyers et charges tels que prévus au bail liant les parties et que ces dernières sont tenues à toutes les obligations de celui-ci;

DEBOUTONS les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile;

LAISSONS les dépens à la charge de la SAS FRANS BONHOMME.

Ainsi prononcé publiquement, le 11 mai 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Marie-France BAY-RENAUD, première présidente, et Ghislaine VINCENT, greffière.

La greffière La première présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 23/00013
Date de la décision : 11/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-11;23.00013 ?
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