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19/04/2023 | FRANCE | N°23/00033

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 19 avril 2023, 23/00033


COUR D'APPEL DE CHAMBERY

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Première Présidence







ORDONNANCE



STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES





du Mercredi 19 Avril 2023





RG : N° RG 23/00033 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HG74





Appelante

Mme [F] [H]

née le 24 Septembre 1976 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 4]

hospitalisée au Centre Hospitalier [5]

assistée de Me Jordan GOURM

AND, avocat désigné d'office inscrit au barreau de CHAMBERY



Appelée à la cause

CENTRE HOSPITALIER [5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

non comparant



M. [P] [R] (tiers demandeur à l'a...

COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence

ORDONNANCE

STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES

du Mercredi 19 Avril 2023

RG : N° RG 23/00033 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HG74

Appelante

Mme [F] [H]

née le 24 Septembre 1976 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 4]

hospitalisée au Centre Hospitalier [5]

assistée de Me Jordan GOURMAND, avocat désigné d'office inscrit au barreau de CHAMBERY

Appelée à la cause

CENTRE HOSPITALIER [5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

non comparant

M. [P] [R] (tiers demandeur à l'admission)

[Adresse 2]

[Localité 4]

non comparant

Partie Jointe :

Le Procureur Général - Cour d'Appel de CHAMBERY - Palais de Justice - 73018 CHAMBERY CEDEX - dossier communiqué et réquisitions écrites

*********

DEBATS :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du mercredi 19 avril 2023 devant Madame Elsa LAVERGNE, conseillère à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par ordonnance de Madame la première présidente, pour prendre les mesures prévues aux dispositions de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de prise en charge, assistée de Madame Sophie Messa, greffière

L'affaire a été mise en délibéré au mercredi 19 avril 2023 après-midi,

***

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE, DES PRETENTIONS ET MOYENS :

Mme [H] [F], née le 24 septembre 1976 à [Localité 6], a été admise en soins psychiatriques sur demande d'un tiers, en l'espèce son conjoint (partenaire de PACS) M. [P] [R], vu l'urgence, sous la forme d'une hospitalisation complète, par décision du 24 mars 2023, à 15h30, du directeur du Centre Hospitalier d'[5], au visa de l'article L3212-3 du code de la santé publique.

Le certificat médical d'admission du Docteur [C] [X], établi dans la matinée du 24 mars 2023, décrivait notamment une patiente présentant une « maladie psychiatrique chronique », exposée 'depuis deux semaines à la réapparition progressive d'une symptomatologie d'allure maniaque avec agitation psychomotrice, propos incohérents, une hostilité, des insomnies et troubles du comportement.'

Le certificat médical à 24 heures de son admission, établi le 25 mars 2023, par le Docteur [W] [T], psychiatre, a confirmé l'existence de troubles du comportement manifestés, à domicile sur cette patiente souffrant de troubles bipolaires, déniant le caractère pathologique de ceux-ci, et refusant l'hospitalisation.

Le certificat médical établi à 72 heures, par le Docteur [S] [O] a conforté la nécessité de la poursuite sous la forme d'une hospitalisation complète, au regard du contact médiocre avec hostilité et réticence de la patiente, expression revendicative contre l'hospitalisation et les soignants, une tendance à une rigidité de la pensée et une opposition aux soins.

Par décision du 27 mars 2023, le directeur de l'établissement a prolongé d'un mois la mesure de soins sans consentement, sous la forme d'une hospitalisation complète.

Le directeur d'établissement a saisi le 30 mars 2023 le juge des libertés de la détention du tribunal judiciaire d'Annecy, aux fins d'autorisation de la poursuite de l'hospitalisation au-delà de 12 jours, saisine accompagnée d'un nouveau certificat médical établi par le Docteur [O], le même jour, décrivant la persistance des troubles constatés sur Mme [H], avec des attitudes de provocation et de défiance envers l'équipe soignante « une pseudo intellectualisation des troubles, un rationalisme morbide » et une opposition aux soins.

Par ordonnance du 04 avril 2023, le juge des libertés et de la détention d'Annecy a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète de Mme [H] au sein des unités d'hospitalisation de psychiatrie adultes du centre hospitalier [5].

Mme [H] a interjeté appel de cette décision, par courrier enregistré au greffe de la cour d'appel en date du 13 avril 2023.

Par réquisitions écrites du 13 avril 2023, le procureur général près la cour d'appel de Chambéry a conclu à la confirmation de la décision attaquée.

Par avis motivé, actualisé au 17 avril 2023, le Docteur [O] s'est prononcée en faveur de la poursuite des soins sous contrainte, dans le cadre d'une hospitalisation à temps complet, la patiente, bien que plus accessible et moins hostile à l'entretien, exprimant toujours des éléments de persécution, et se montrant « très remontée contre son compagnon, signataire du tiers », présentant également des éléments de toute-puissance et de contrôle, tout en restant très ambivalente quant à son adhésion aux soins.

Au cours de l'audience tenue ce jour, Mme [H], comparante, a sollicité la poursuite des soins mais dans le cadre d'une hospitalisation libre, afin de maintenir une certaine distance avec son compagnon, à l'égard duquel elle exprime un vif ressenti, tout en maintenant un traitement adapté. Elle s'estime en capacité de poursuivre avec l'appui du psychiatre la suivant depuis l'année 2015, et ne formule pas d'observations particulières sur le déroulement actuel de l'hospitalisation complète.

Son avocat, entendu, ne formule pas d'observations sur la régularité de la procédure mais sollicite la levée de l'hospitalisation sous contrainte, compte tenu du contexte d'admission de Mme [H], de sa conscience de la nécessité de poursuivre les soins et sa capacité à y consentir librement.

Le compagnon de Mme [H], tiers demandeur, n'a pas comparu.

Le ministère public n'a pas comparu, mais ses réquisitions écrites ont été mises à la disposition des parties avant l'audience et portées à la connaissance de la personne hospitalisée lors du débat contradictoire.

Le directeur d'établissement n'a pas comparu, bien que régulièrement avisé.

L'affaire a été mise en délibéré au 19 avril 2023, dans l'après-midi.

MOTIFS DE LA DECISION :

Par déclaration transmise au greffe de la cour d'appel le 13 avril 2023, Mme [H] a fait appel de la décision du Juge des Libertés et de la Détention d'Annecy, en date du 4 avril 2023, soit dans les délais et les formes prescrites par les articles R3211-18 et R 3211-19 du code de la santé publique. Son appel est donc recevable.

L'office du juge des libertés et de la détention (et du premier président de la cour d'appel ou son délégué) consiste à opérer un contrôle de la régularité de l'hospitalisation complète sous contrainte, puis de son bien-fondé.

En l'espèce, la décision frappée d'appel a bien été rendue avant l'expiration d'un délai de douze jours prévu à l'article L3211-12-1 du code de la santé publique et le greffe de la Cour d'Appel a bien été destinataire de l'avis rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil de la personne admise en soins psychiatriques sans consentement se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète, conformément à l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique.

Il ressort, par ailleurs, des éléments de procédure que les pièces visées à l'article R.3211-12 du code de la santé publique ont été communiquées antérieurement aux débats et qu'elles sont motivées. Aucune irrégularité n'est en ce sens constatée.

Quant au bien fondé de la mesure, il résulte de l'article L.3212-1 du code de la santé publique qu'une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L.3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2 du I de l'article L.3211-2-1.

Le directeur de l'établissement peut prononcer la décision d'admission sur demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade. L'article L3212-3 du même code, prévoit qu'en cas d'urgence, s'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'établissement peut à titre exceptionnel prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement.

L'appréciation du bien-fondé de la mesure de l'hospitalisation complète sous contrainte doit s'effectuer au regard des certificats médicaux qui sont communiqués, dont le juge ne saurait dénaturer le contenu, son contrôle supposant un examen des motifs évoqués, mais ne lui permettant pas de se prononcer sur l'opportunité de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte et de substituer son avis à l'évaluation faite, par le corps médical, des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

En l'espèce, il résulte des certificats médicaux versés et des déclarations de Mme [H], au cours de l'audience, que celle-ci a fait l'objet d'une admission en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète, sur décision du directeur de l'établissement hospitalier, faisant suite à un signalement de son conjoint, et père de son fils, âgé de 12 ans, sur fond de troubles du comportement, manifestés au domicile, avec mises en danger, dans un contexte de mauvaise observance des traitements médicamenteux en cours.

Les certificats médicaux concordants, produits à échéance régulière, confortent la réapparition de troubles envahissants « dans le cadre d'une désorganisation psychotique et de l'humeur ». S'il n'est pas contesté que Mme [H] a repris les traitements, dans le cadre de cette hospitalisation, et adopte une attitude plus adaptée, perceptible à l'audience, son état n'apparait pas stabilisé, en témoigne le dernier avis motivé établi le 17 avril 2023, par le Docteur [S] [O], décrivant la persistance d'éléments de persécution, s'exprimant notamment par une méfiance et une certaine revendication à l'égard de l'hospitalisation, faisant écho à ses déclarations au cours de l'audience, ainsi que des éléments de « toute-puissance et de contrôle » qui interrogent, dans un contexte de vifs ressentis à l'égard de son compagnon, tiers demandeur.

Ainsi si Mme [H] reconnaît l'intérêt des soins, et ne dissimule pas les tensions persistantes à l'égard de son compagnon, ce qui interroge d'ailleurs sur les conditions de son retour à domicile, elle exprime toujours une symptomatologie inquiétante et reste ambivalente quant à la pleine adhésion aux soins, qu'elle s'estime en capacité de poursuivre librement, ce qui n'est pas conforté par les derniers éléments médicaux versés.

Son état , qui exige, de l'avis, étayé, de l'ensemble des psychiatres l'ayant examinée, la poursuite de soins sous contrainte, n'apparait pas suffisamment stabilisé, à ce stade, au point d'envisager une mainlevée de sa mesure d'hospitalisation complète.

Dès lors, Mme [H] relevant toujours d'une surveillance continue, il convient de confirmer la décision du Juge des Libertés et de la Détention d'Annecy, en date du 4 avril 2023, ayant autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète.

PAR CES MOTIFS,

Nous, Elsa LAVERGNE, conseillère à la cour d'appel de CHAMBERY, déléguée par ordonnance de Madame la première présidente, statuant après débats tenus en audience publique, par ordonnance contradictoire au siège de la Cour d'Appel de Chambéry, assistée de Sophie MESSA, greffière,

Déclarons recevable l'appel de Madame [F] [H],

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention d'Annecy en date du 4 avril 2023,

Laissons les dépens à la charge du trésor public,

Disons que la notification de la présente ordonnance sera faite conformément aux dispositions de l'article R 3211-22 du Code de la santé publique.

Ainsi prononcé le 19 avril 2023 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Elsa LAVERGNE, à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par Madame la première présidente et Madame Sophie MESSA, greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 23/00033
Date de la décision : 19/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-19;23.00033 ?
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