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14/02/2023 | FRANCE | N°22/00090

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 14 février 2023, 22/00090


COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence











AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,



Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :



Dans la cause N° RG 22/00090 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HEAO débattue à notre audience publique du 03 Janvier 2023 - RG au f

ond n° 22/01721 - 1ère section





ENTRE





S.A.S. HOTEL [Adresse 3], dont le siège social est situé [Adresse 2]



Ayant pour avoca...

COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence

AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le QUATORZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :

Dans la cause N° RG 22/00090 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HEAO débattue à notre audience publique du 03 Janvier 2023 - RG au fond n° 22/01721 - 1ère section

ENTRE

S.A.S. HOTEL [Adresse 3], dont le siège social est situé [Adresse 2]

Ayant pour avocat postulant la SELARL BOLLONJEON, avocats au barreau de CHAMBERY et pour avocat plaidant la SCP KLEIN, avocat au barreau de Nice

Demanderesse en référé

ET

M. [N] [I], demeurant [Adresse 1] ITALIE

M. [F] [X], demeurant [Adresse 1] ITALIE

Ayant pour avocat postulant Me Christian FORQUIN, avocat au barreau de CHAMBERY et pour avocat plaidant Me Gilbert UGO, avocat au barreau de GRASSE.

Défendeurs en référé

'''

Exposé du litige

Vu le jugement rendu le 14 septembre 2022 par le tribunal judiciaire de Bonneville, qui, notamment :

- constate que le congé délivré le 3 mars 2020 est bien fondé sur un motif grave et légitime du non renouvellement du bail commercial sans indemnité d'éviction,

- déboute la SAS HOTEL [Adresse 3] de ses demandes de suspension des effets de la clause résolutoire et de délais de paiement,

- ordonne l'expulsion de la société HOTEL [Adresse 3] et celle de tout occupant de son chef du lot (lot n°B13) situé au sein de la résidence '[Adresse 3]', sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification de la décision,

- déclare nul et de nul effet le commandement de payer en date du 28 octobre 2020,

- prononce la nullité du commandement de payer du 12 janvier 2021,

- rejette la demande de la SA HOTEL [Adresse 3] d'adaptation du contrat

- condamne la SAS HOTEL [Adresse 3] à payer à monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] la somme de 14 264,28 euros au titre des loyers impayés au 31 décembre 2020, outre intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamne la SAS [Adresse 3] à payer à monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] une indemnité d'occupation égale à 3566 euros par trimestre à compter du 1er janvier 2021 et jusqu'à la libération effective des lieux loués,

-rejette les demandes de la SAS [Adresse 3] de réduction des loyers et de remboursement de travaux,

-rappelle que l'exécution provisoire est de droit;

Vu l'appel interjeté le 30 septembre 2022 par la SAS HOTEL [Adresse 3] ( n°DA 22/1751 et n°RG 22/1721) ;

Vu l'assignation délivrée le 2 novembre 2022 par la SAS [Adresse 3] à monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] devant la première présidente de la cour d'appel de Chambéry afin de voir dire que le jugement rendu le 14 septembre 2022 par le tribunal judiciaire de Bonneville n'est plus assorti de l'exécution provisoire de droit en l'état de l'arrêt du conseil d'Etat du 22 septembre 2022 qui a partiellement censuré la réforme de la procédure civile, et à défaut de voir arrêter l'exécution provisoire et à titre infiniment subsidiaire de voir ordonner la suspension de l'exécution provisoire attachée au jugement pendant une période limitée à 12 mois temps estimé nécessaire à l'instruction de l'appel de cette décision s'agissant de la mesure d'expulsion ;

Vu le renvoi ordonné à la demande des parties aux fins d'échange des conclusions et de communication des pièces lors de l'audience du 29 novembre 2022 ;

Vu l'audience du 3 janvier 2023 au cours de laquelle les parties ont soutenu leurs conclusions ;

Vu les conclusions notifiées par RPVA le 02 janvier 2023, aux quelles il est renvoyé pour de plus ample développement, aux termes desquelles la SAS [Adresse 3] conclut au rejet de l'exception de nullité de l'assignation soulevée par la SAS HOTEL [Adresse 3] et maintient l'intégralité de ses demandes faisant valoir que :

- la signification de l'assignation a été faite à domicile élu en application de l'article R.141-1 du code des procédures civiles d'exécution et qu'en tout état de cause, monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] ne peuvent se prévaloir d'un grief,

- le conseil d'Etat dans son arrêt du 22 septembre 2022 a annulé en son article 2 le I de l'article 55 du décret du 11 décembre 2019 et que les effets emportés par cet article, depuis le 2 janvier 2020 sont rétroactifs,

- qu'en s'opposant à la demande d'expulsion et en demandant la suspension des effets de la clause résolutoire, elle sollicitait nécessairement l'arrêt de l'exécution provisoire dont il n'est pas spécifié que la demande doit figurer dans le dispositif,

- qu'en toute hypothèse elle justifie de conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement au jugement dans la mesure où il a depuis été enregistré des réservations sur ce lot appartenant à monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] pour la saison hivernale 2022/2023,

-qu'il existe des moyens sérieux de réformation en ce que le refus de renouvellement sans indemnité d'éviction ne peut prospérer que dans la mesure où l'infraction a persisté au-delà du délai d'un mois et à condition que le bailleur puisse en apporter la preuve, qu'elle a réglé les loyers soit avant la délivrance du commandement de payer du 28 octobre 2020, soit dans le délai d'un mois des commandements,

- que monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] sont redevables de la somme de 6 023,57 euros tant au titre de la créance de réduction des loyers suite à la correction des surfaces induement perçues qu'au titre des travaux pris en charge par elle,

- qu'elle a dû faire face à des difficultés conjoncturelles comme le développement de l'hébergement collaboratif, la baisse de la fréquentation ayant entraîné une perte d'exploitation,

- qu'il conviendra de faire le compte entre les parties quant aux surfaces louées et les travaux pris en charge ;

Vu les conclusions notifiées par RPVA le 23 novembre 2022, aux quelles il est renvoyé pour de plus amples développements, aux termes desquelles monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] concluent à la nullité de l'assignation à domicile élu, subsidiairement à l'irrecevabilité des demandes, enfin à titre infiniment subsidiaire à leur rejet et sollicitent la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, faisant valoir que :

- l'assignation devait être signifiée à leur domicile,

- la SAS [Adresse 3] n'a fait valoir aucune observation concernant l'exécution provisoire en première instance,

- le conseil d'Etat n'a pas annulé les articles 514, 514-1 et 514-3 du code de procédure civile,

- la SAS [Adresse 3] ne présente aucun moyen sérieux de réformation ou d'annulation.

Sur ce

- Sur la nullité de l'assignation :

Aux termes de l'article 114 du code de procédure civile, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public ; la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public ;

En application de l'article 689 du code de procédure civile, les notifications sont faites au lieu où demeure le destinataire s'il s'agit d'une personne physique ; toutefois, lorsqu'elle est faite à personne, la notification est valable quel que soit le lieu où est elle est délivrée, y compris le lieu de travail ; la notification est aussi valablement faite au domicile élu lorsque la loi l'admet ou l'impose ;

Aux termes de l'article R.141-1 du code des procédures civiles d'exécution, la remise du titre exécutoire au commissaire de justice vaut pouvoir pour toute exécution pour laquelle il n'est pas exigé de pouvoir spécial ; elle emporte élection de domicile en son étude pour toutes les notifications relatives à cette exécution ;

En l'espèce, Monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] ont fait notifier à La SAS HOTEL [Adresse 3] le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bonneville le 14 septembre 2022 par acte d'huissier délivré le 19 septembre 2022 mentionnant expressément que Monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] faisaient élection de domicile à l'étude de l'huissier de justice ;

En conséquence, il convient de déclarer valablement délivrée l'assignation nous saisissant et de déclarer recevable la demande d'arrêt de l'exécution provisoire signifiée par assignation délivrée le 2 novembre 2022 à domicile élu ;

- Sur l'application du décret du 11 décembre 2019

L'article 3 du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 a modifié les dispositions du chapitre IV du titre XV du livre Ier du code de procédure civile relatives à l'exécution provisoire, nouvelles dispositions applicables aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020 aux termes du II de l'article 55 dudit décret ;

Si la décision du conseil d'Etat en date du 22 septembre 2022 a annulé le I de l'article 55 du décret du 11 décembre 2019, tout en dérogeant au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et en regardant comme définitifs les effets produits par les procédures et décisions affectées entre le 13 décembre 2019 et le 1er janvier 2020 par l'annulation du I de l'article 55, il n'en reste pas moins que le II de l'article 55 n'a pas été annulé ;

En outre, le conseil d'Etat n'a pas invalidé les articles 514-3, 514-4, 514-6 du code de procédure civile ;

En conséquence, l'article 3 du décret du 11 décembre 2019 est pleinement applicable à la présente instance ;

- Sur l'irrecevabilité de la demande :

La procédure de première instance ayant été introduite le 10 novembre 2020, la présente procédure est soumise aux dispositions relatives à l'exécution provisoire telles qu'elles résultent du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.

En application de l'article 514 nouveau du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Selon l'article 514-3 du même code, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

En application de l'alinéa 2 de cet article 514-3 du code de procédure civile, la demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

En l'espèce, le jugement frappé d'appel n'écarte pas l'exécution provisoire de droit et il n'est pas contesté que cette question n'a fait l'objet d'aucun débat en première instance ; il ne peut être retenu, contrairement à l'argumentation de la SAS HOTEL [Adresse 3] que le fait de s'opposer à une mesure d'expulsion constitue de manière implicite une demande de rejet de la mesure d'exécution provisoire ;

Pour être recevable dans sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire, la SAS HOTEL [Adresse 3] doit donc démontrer qu'il existe à la fois un moyen sérieux de réformation ou d'annulation et des conséquences manifestement excessives nées postérieurement à la décision de première instance ;

Aux termes de l'article L.145-17 du code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité d'éviction s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant ; toutefois, s'il s'agit soit de l'inexécution d'une obligation, soit de la cessation sans raison sérieuse et légitime de l'exploitation du fonds, compte tenu des dispositions de l'article L.145-8, l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser ;

L'article L.145-28 du code de commerce précise qu'aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue ;

Ainsi, ce moyen sérieux de réformation existe puisque le juge apprécie souverainement les motifs graves et légitimes de refus de renouvellement, qu'en absence de tels motifs, le bailleur est redevable d'une indemnité d'éviction et le locataire ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue ;

La SAS HOTEL [Adresse 3] justifie avoir exécuté la condamnation pécuniaire en faisant procéder le 17 octobre 2022 à un virement de 16 764.28 euros sur le compte de monsieur [I] ; en outre, il communique les règlements effectués antérieurement, dans le mois des différents commandements de payer délivrés ;

Au vu de cette possibilité d'indemnité d'éviction, c'est bien l'exécution provisoire du jugement qui va entraîner la perte d'exploitation, laquelle a des conséquences manifestement excessives dès lors que le bien donné en location est exploité et occupé postérieurement à la décision du tribunal judiciaire de Bonneville en date du 14 septembre 2022, comme l'atteste le justificatif de réservation ;

En conséquence, la SAS HOTEL [Adresse 3] satisfait aux exigences de l'article 514-3 alinéa 2 du code de procédure civile et il convient de suspendre l'exécution provisoire de la mesure d'expulsion ; toutes les autres condamnations sont exécutoires par provision et notamment le règlement de l'indemnité d'occupation de 3566 euros par trimestre ;

L'équité n'appelle pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

La présente décision étant rendue dans l'intérêt de la SAS HOTEL [Adresse 3], les dépens seront supportés par elle.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par décision contradictoire prononcée en matière de référé,

DEBOUTONS Monsieur [N] [I] et monsieur [F] [X] de leur demande en nullité de l'assignation délivrée le 2 novembre 2022 ;

DECLARONS recevable la demande en arrêt de l'exécution provisoire ;

ORDONNONS l'arrêt de l'exécution provisoire de la décision rendue par le tribunal judiciaire de Bonneville le 14 septembre 2022 s'agissant de la mesure d'expulsion de la société HOTEL [Adresse 3] et celle de tout occupant de son chef du lot (lot n°B13) situé au sein de la résidence '[Adresse 3]', sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

DEBOUTONS les parties de toutes leurs demandes ;

CONDAMNONS la SAS HOTEL [Adresse 3] aux dépens.

Ainsi prononcé publiquement, le 14 février 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Marie-France BAY-RENAUD, première présidente, et Ghislaine VINCENT, greffière.

La greffière La première présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 22/00090
Date de la décision : 14/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-14;22.00090 ?
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