COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 09 Février 2023
N° RG 21/00985 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GWIY
Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection d'ANNEMASSE en date du 12 Février 2021, RG 1120000675
Appelant
M. [J] [U]
né le 14 Janvier 1970 à AMBILLY (74100), demeurant [Adresse 3]
Représenté par Me Frédéric PERRIER de la SCP CABINET DENARIE BUTTIN PERRIER GAUDIN, avocat au barreau de CHAMBERY
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/001405 du 03/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CHAMBERY)
Intimée
S.A. CDC HABITAT SOCIAL, dont le siège social est sis [Adresse 1] prise en la personne de son représentant légal
Représentée par Me Clarisse DORMEVAL, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELAS CHAMBEL & ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de BONNEVILLE
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, le 06 décembre 2022 par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, qui a rendu compte des plaidoiries
- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 7 avril 2006 prenant effet le 30 mai 2006, la société CDC habitat social, venant aux droits de la société SCIC habitat Rhône Alpes par fusion absorption, a donné en location à M. [J] [U] et Mme [T] [L], un logement sis à [Adresse 2].
Selon avenants des 8 décembre 2006 et 29 janvier 2007, M. [U] est devenu seul titulaire de ce bail.
Par actes sous seing privé des 7 avril 2006 et 8 juin 2010, la société bailleresse a également donné en location à M. [U] deux garages situés à la même adresse.
Le montant total du loyer pour l'ensemble des biens loués s'élevait à 771,78 euros par mois.
Par acte délivré le 5 mars 2020, la société bailleresse a fait signifier à M. [U] un commandement de payer pour un total de 1.672,32 euros, correspondant à des loyers impayés pour 1.533,54 euros.
Malgré plusieurs versements de la part de M. [U], la dette locative n'a pas été entièrement soldée.
C'est dans ces conditions que, par acte délivré le 31 août 2020, la société CDC habitat social a fait assigner M. [U] devant le tribunal de proximité d'Annemasse aux fins notamment de voir prononcer la résiliation des contrats de location du logement et des deux garages, d'autoriser son expulsion et de le condamner en paiement de plusieurs sommes.
Comparant en personne devant le tribunal, M. [U] n'a pas contesté l'existence de la dette de loyers, mais fait valoir une situation personnelle et financière difficile.
Par jugement contradictoire du 12 février 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Annemasse a :
déclaré la demande de la société CDC habitat social tendant au prononcé de la résiliation des baux recevable en la forme,
prononcé la résiliation des baux conclus entre la société CDC habitat social d'une part et M. [U] d'autre part, portant sur un logement et deux garages sis [Adresse 4], à la date de la décision,
déclaré M. [U] occupant sans droit ni titre des locaux d'habitation et des deux garages depuis cette date,
ordonné à M. [U] de libérer les locaux d'habitation et les deux garages de sa personne, de ses biens et de toute occupation de son chef à compter de la signification du jugement,
ordonné qu'à défaut pour lui d'avoir libéré les lieux dans les conditions précitées, il soit procédé à l'expulsion de M. [U] et à celle de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique si besoin est, à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la signification d'un commandement d'avoir à quitter les lieux, en application des dispositions des articles L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,
dit que le sort des biens mobiliers trouvés dans les lieux sera régi par les dispositions prévues par les articles L.433-1 et suivants et R.433-1 à R.433-6 du code des procédures civiles d'exécution,
condamné M. [U] à payer à la société CDC habitat social la somme de 7.202,20 euros au titre des loyers et charges impayés du logement et des deux garages dus au 9 décembre 2020, échéance de novembre 2020 incluse,
dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
condamné M. [U] à payer à la société CDC habitat social les loyers et charges impayés du logement et des deux garages dus pour le mois de décembre 2020 et jusqu'au 11 février 2021 inclus,
condamné M. [U] à payer à la société CDC habitat social une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au montant du loyer courant majoré des charges et taxes normalement exigible pour le logement et les deux garages, soit la somme mensuelle de 771.78 euros, à compter de la présente décision jusqu'au départ effectif des lieux matérialisé par la remise des clés en mains propres de la société bailleresse ou par l'expulsion,
dit que le jugement sera transmis par les soins du greffe au représentant de l'Etat dans le département,
condamné M. [U] à payer à la société CDC habitat social la somme de 150 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
rappelé que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire,
condamné M. [U] aux dépens lesquels comprendront les frais de commandement de payer du 05 mars 2020, les frais d'assignation et de notification au préfet et à la CCAPEX, à l'exclusion de tous autres frais engagés préalablement à la présente décision.
Par déclaration du 07 mai 2021, M. [J] [U] a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions notifiées le 6 août 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [U] demande en dernier lieu à la cour de:
Vu l'article L. 722-2 du code de la consommation,
infirmer la décision entreprise dans sa totalité,
juger qu'en raison de la saisine de la commission de surendettement de la Banque de France, M. [U] a interdiction de régler les créances nées antérieurement à la décision de recevabilité,
juger que la recevabilité de la demande par la commission de surendettement de la banque de France emporte suspension et interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre de M. [U],
En tout état de cause,
juger qu'il n'y a pas lieu à prononcer la résiliation des baux conclus entre la société CDC habitat social et M. [U], portant sur un logement et deux garages sis [Adresse 4] à la date du présent arrêt,
juger que M. [U] bénéficiera d'un délai de 24 mois pour honorer sa dette auprès de la société CDC habitat social sans que cela n'entraîne l'acquisition de la clause résolutoire,
condamner la société CDC habitat social à payer à M. [U] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées le 14 octobre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société CDC habitat social demande en dernier lieu à la cour de :
Vu l'article 909 du code de procédure civile,
Vu les articles 1709, 1728, 1224 et 1227 du code civil,
Vu l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
débouter M. [U] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
confirmer la décision entreprise en l'ensemble de ses dispositions, sauf à actualiser le montant des sommes dues par M. [U] à la société CDC habitat social,
condamner M. [U] à payer la somme de 14.333,07 euros, sauf à parfaire, au titre des arriérés de loyers et charges et indemnités d'occupation,
Y ajoutant,
condamner M. [U] à payer la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner M. [U] aux entiers dépens, distraits au profit de Me Dormeval, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'affaire a été clôturée à la date du 7 novembre 2022 et renvoyée à l'audience du 6 décembre 2022, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 9 février 2023.
MOTIFS ET DÉCISION
Sur la résiliation du bail et l'expulsion
Il est constant, et au demeurant non contesté par M. [U], que celui-ci n'a pas payé l'intégralité des loyers dus, malgré la signification du commandement de payer visant la clause résolutoire, en date du 5 mars 2020.
Les explications de M. [U] sur ses difficultés financières suite à un accident du travail n'ont pas pour effet de l'autoriser à suspendre le paiement de ses loyers, étant souligné qu'il ne justifie pas de ses revenus.
C'est donc par des motifs pertinents que la cour adopte expressément que le premier juge a prononcé la résiliation du bail.
Concernant l'expulsion, il résulte des pièces produites par le bailleur que le logement précédemment occupé par M. [U] a été libéré le 20 septembre 2021 selon procès-verbal de reprise des lieux établi par huissier (pièce n° 12 de l'intimée), de sorte que la mesure d'expulsion sollicitée et ordonnée par le tribunal est devenue sans objet.
Sur l'arriéré dû:
La société CDC habitat social a actualisé le montant des sommes dues par le locataire en ajoutant les loyers et charges impayés de décembre 2020 à février 2021, et l'indemnité d'occupation due de février 2021 au 20 septembre 2021.
M. [U] ne conteste pas le décompte produit par le bailleur dont l'examen révèle que les sommes réclamées pour 14.333,07 euros sont dues en totalité.
Il sera donc ajouté au jugement déféré et M. [U] sera condamné au paiement de cette somme.
Sur la procédure de surendettement
M. [U] soutient qu'il ne pourrait pas être condamné au paiement d'une quelconque somme dès lors que son dossier a été déclaré recevable par la commission de surendettement.
Toutefois, les articles L. 722-2 et L. 722-5 du code de la consommation n'interdisent pas au créancier d'obtenir un titre contre un débiteur en surendettement, seules les voies d'exécution étant suspendues et interdites.
Il sera ajouté que depuis le 19 août 2021, date de la décision de recevabilité de la commission de surendettement, des mesures ont nécessairement été adoptées dont l'appelant ne précise pas la nature. Le bailleur est en tout état de cause fondé à obtenir un titre contre son preneur.
Le moyen est donc inopérant.
Sur les délais de paiement
En application de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront un intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Force est de constater que M. [U] ne produit aucun document justifiant de ses revenus et charges, de sorte qu'il ne peut être fait droit à sa demande de délais de paiement qui n'est pas justifiée, celui-ci n'expliquant pas comment il pourra payer sa dette dans le délai de 24 mois. Cette demande est au demeurant en contradiction avec l'existence d'un dossier de surendettement dans le cadre duquel le paiement des dettes du débiteur a été ou sera organisé.
Sur les demandes accessoires
Aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties.
M. [U], qui succombe en son appel, en supportera les entiers dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Confirme le jugement rendu par le tribunal de proximité d'Annemasse sauf en ce qu'il a condamné M. [J] [U] à payer à la société CDC habitat social la somme de 7.202,20 euros au titre des loyers et charges impayés du logement et des deux garages dus au 9 décembre 2020, échéance de novembre 2020 incluse,
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,
Condamne M. [J] [U] à payer à la société CDC habitat social la somme de 14.333,07 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation dus pour le logement et les deux garages à la du 20 septembre 2021, date de libération effective des lieux,
Constate que l'expulsion de M. [J] [U] est devenue sans objet suite au procès-verbal de reprise des lieux du 20 septembre 2021,
Déboute M. [J] [U] de sa demande de délais de paiement,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties,
Condamne M. [J] [U] aux entiers dépens de l'appel, qui seront recouvrés dans les conditions prévues à l'article 42 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991.
Ainsi prononcé publiquement le 09 février 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente