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07/02/2023 | FRANCE | N°20/01561

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 07 février 2023, 20/01561


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY





Chambre civile - Première section



Arrêt du Mardi 07 Février 2023





N° RG 20/01561 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GSPO



Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CHAMBERY en date du 16 Novembre 2020





Appelante



Mme [M] [Y] épouse [K]

née le 18 Juin 1947 à [Localité 9], demeurant [Adresse 10]



Représentée par Me Michel FILLARD, avocat au barreau de CHAMBERY









Intimé

s



M. [S] [Y]

né le 07 Avril 1941 à [Localité 6], demeurant [Adresse 5]



Représenté par Me Julien BETEMPS de la SELARL SELARL CORDEL BETEMPS, avocat au barreau de CHAMBERY





M. [L] [Y]

né le ...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile - Première section

Arrêt du Mardi 07 Février 2023

N° RG 20/01561 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GSPO

Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CHAMBERY en date du 16 Novembre 2020

Appelante

Mme [M] [Y] épouse [K]

née le 18 Juin 1947 à [Localité 9], demeurant [Adresse 10]

Représentée par Me Michel FILLARD, avocat au barreau de CHAMBERY

Intimés

M. [S] [Y]

né le 07 Avril 1941 à [Localité 6], demeurant [Adresse 5]

Représenté par Me Julien BETEMPS de la SELARL SELARL CORDEL BETEMPS, avocat au barreau de CHAMBERY

M. [L] [Y]

né le 18 Juin 1947 à [Localité 9], demeurant [Adresse 4]

Représenté par Me Richard DAMIAN, avocat postulant au barreau de CHAMBERY

Représenté par la SELARL ACTIVE AVOCATS, avocats plaidants au barreau de LYON

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Date de l'ordonnance de clôture : 07 Novembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 29 novembre 2022

Date de mise à disposition : 07 février 2023

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Composition de la cour :

Audience publique des débats, tenue en rapporteur, sans opposition des avocats, par Mme Hélène PIRAT, Présidente de Chambre, qui a entendu les plaidoiries, avec l'assistance de Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

- Mme Hélène PIRAT, Présidente,

- Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,

- Mme Claire STEYER, Vice-présidente placée,

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Faits et procédure

Mme [P] [X] veuve [Y], née le 28 mars 1923 à [Localité 9], en son vivant agricultrice retraitée, et veuve non remariée de M. [S] [O] [Y], décédé le 19 novembre 2000, est décédée à [Localité 6] le 10 décembre 2013, laissant pour recueillir sa succession ses trois enfants :

- [S] [Y],

- [M] [Y] épouse [K],

- [L] [Y], frère jumeau de cette dernière.

Préalablement à son décès, par acte authentique du 20 janvier 2011, reçu par Me [N], notaire à [Localité 7], Mme [P] [X] veuve [Y] avait établi un testament aux termes duquel la de-cujus a légué à titre préciputaire par parts égales entre eux à M. [S] [Y] et Mme [M] [Y] épouse [K], la quotité disponible de l'ensemble des biens dépendant de sa succession, révoquant par ailleurs, toutes autres dispositions de dernières volontés.

Par acte d'huissier du 31 mars 2016, M. [S] [Y] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Chambéry afin de voir ordonner une mesure d'expertise judiciaire en vue de l'évaluation des biens immobiliers relevant de la succession de Mme [P] [X] au contradictoire de sa s'ur et son frère.

Par ordonnance en date du 3 mai 2016, le juge des référés du tribunal a notamment ordonné une expertise judiciaire portant sur les biens immobiliers relevant de la succession de Mme [P] [X], et désigné M. [E] pour y procéder, lequel a déposé son rapport le 24 novembre 2016.

Par acte d'huissier des 17 et 18 mai 2017, M. [S] [Y] a fait assigner Mme [M] [Y] et M. [L] [Y] devant le tribunal de grande instance de Chambéry aux fins de partage de leurs intérêts patrimoniaux.

Par jugement en date du 16 novembre 2020, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal a :

Ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage des biens dépendant de la succession de Mme [P] [X] veuve [Y], décédée le 10 décembre 2013 à [Localité 6],

Désigné Me [V], notaire à [Localité 9], pour procéder à de telles opérations,

Commis pour surveiller ces opérations, le juge chargé du suivi des opérations de liquidation partage au sein du tribunal judiciaire de Chambéry,

Rappelé que les parties devront remettre au notaire commis toutes les pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

Dit qu'en cas de difficultés concernant lesdites opérations, il reviendra à la partie la plus diligente ou au notaire d'en saisir le juge,

Dit que le notaire désigné aura pour mission de procéder à la constitution de lots de meubles et de procéder à leur répartition entre les parties le cas échéant par tirage au sort dans les conditions de l'article 1363 du code de procédure civile, le juge commis pouvant procéder sur simple transmission d'un procès-verbal du notaire à la désignation d'un représentant d'un indivisaire défaillant,

Rappelé que les opérations de partage se poursuivront selon les dispositions des articles 1364 à 1376 du code de procédure civile et que le notaire dispose d'un délai d'un an à compter de sa désignation pour dresser un état liquidatif qui établit les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir,

Dit que le notaire commis aura accès aux fichiers Ficoba et Ficovie sans puisse lui être opposé un quelconque secret notamment professionnel ou bancaire,

Ordonné le versement à Me [V] par M. [S] [Y] de la somme de 2 000 euros à titre de provision sur la rémunération du notaire,

Dit que le notaire désigné dressera un état liquidatif et procédera à la répartition des fonds entre MM [S] et [L] [Y] et Mme [M] [Y],

Rappelé que les copartageants peuvent à tout moment abandonner les voies judiciaires et poursuivre le partage à l'amiable,

Dit qu'il appartiendra au notaire, en cas de partage amiable, d'informer le juge commis de la signature de l'acte et de lui en transmettre une copie afin que la procédure soit clôturée,

Dit qu'à défaut de partage amiable, et en cas de désaccord sur son projet d'état liquidatif, le notaire commis établira un procès-verbal de difficultés, reprenant les dires respectifs des parties, qui sera transmis au juge commis avec ce projet,

Rejeté la demande de Mme [M] [Y] tendant à voir déclarer nul le rapport d'expert rédigé par M. [E] et déposé le 24 novembre 2016,

Ordonné la licitation au plus offrant devant Me [J] [V] des biens immobiliers situés dans les communes de [Localité 9] et [Localité 8], composant la succession avec pour prix minimums les valeurs mentionnées par M. [E] en pages 10 à 13 de son rapport,

Dit que chacune des parties se verra attribuer dans le cadre des opérations de compte, liquidation et partage, la part du prix de vente des biens immobiliers correspondant à ses droits sur ces biens,

Rejeté la demande de M. [S] [Y] tendant à la condamnation de Mme [M] [Y] et de M. [L] [Y] à lui payer la somme de 3 812,38 euros au titre des frais de conservation des biens indivis,

Rejeté la demande de MM [L] et [S] [Y] tendant à voir juger que Mme [M] [Y] a commis un recel successoral,

Rejeté les demandes de MM [L] et [S] [Y] tendant à voir juger que Mme [M] [Y] est réputée accepter purement et simplement la succession de Mme [P] [X] et qu'elle ne pourra prétendre à aucune part sur les sommes recelées,

Condamné Mme [M] [Y] à rapporter la somme de 84 216 euros à la succession, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Rejeté la demande de Mme [M] [Y] tendant à voir ordonner la remise d'un jeu des clefs de la maison d'habitation à son profit, aux frais de MM [S] et [L] [Y],

Condamné Mme [M] [Y] à payer à M. [S] [Y] et [L] [Y], chacun, la somme de 1 800 euros au titre des frais irrépétibles,

Condamné Mme [M] [Y] aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire avec distraction au profit de Me Damian et Me Selini.

Mme [M] [Y] a interjeté appel de cette décision en qu'elle :

- a rejeté sa demande de nullité du rapport d'expertise,

- l'a condamnée à rapporter la somme de 84 216 euros à la succession avec intérêts,

- a rejeté sa demande de remise d'un jeu de clés de la maison d'habitation,

- l'a condamnée à verser une indemnité procédurale et aux dépens.

Prétentions des parties :

Aux termes de ses conclusions en date du 13 septembre 2021, régulièrement notifiées par voie électronique et auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, Mme [Y] demande à la cour de :

- Déclarer Mme [M] [Y] recevable et bien fondée en son appel à l'encontre de M. [S] [Y] et de M. [L] [Y], ses frères, celui-ci ayant été formulé dans les délais,

In limine litis,

- Déclarer recevable et bien fondée Mme [Y] en sa demande tendant à bénéficier d'une créance d'assistance d'un montant de 234 000,00 euros en ce qu'elle constitue l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire aux prétentions soumises au premier juge qu'elle prolonge et auxquelles elle se rattache, sachant qu'il n'existe aucune contradiction entre les demandes reconventionnelles et les demandes initiales qu'elle relève donc d'une défense visant à écarter les prétentions adverses,

- Déclarer recevable et bien fondée Mme [Y] en sa demande tendant à voir régler à l'indivision, une indemnité d'occupation de 667 euros par mois à compter du 04 avril 1994 et ce jusqu'à la remise des clefs à Mme [Y], en ce qu'elle constitue l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire aux prétentions soumises au premier juge qu'elle prolonge et auxquelles elle se rattache, sachant qu'il n'existe aucune contradiction entre ladite demande reconventionnelle et les demandes initiales et qu'elle relève donc d'une défense visant à écarter les prétentions adverses,

A titre principal,

- Confirmer la décision déférée en ce qu'elle a :

-

Rejeté la demande de MM [L] et [S] [Y], tendant à voir juger que Mme [Y] a commis un recel successoral,

-

Rejeté la demande de MM [L] et [S] [Y], tendant à voir juger que Mme [Y] est réputée accepter purement et simplement la succession de Mme [P] [X] et qu'elle ne pourra prétendre à aucune part sur les sommes recelées,

- Réformer le jugement déféré en ce qu'il a :

- Rejeté la demande de Mme [Y] tendant à voir déclarer nul le rapport d'expertise rédigé par M. [E] et déposé le 24 novembre 2016,

-

Condamné Mme [Y] à rapporter la somme de 84.216 euros à la succession, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

- Rejeté la demande de Mme [Y] tendant à voir ordonner la remise d'un jeu de clefs de la maison d'habitation à son profit, aux frais de MM [S] et [L] [Y],

- Condamné Mme [M] [Y] à payer à M. [S] [Y] la somme de 1.800 euros au titre des frais irrépétibles,

-

Condamné Mme [M] [Y] à payer à M. [L] [Y] la somme de 1.800 euros au titre des frais irrépétibles,

-

Condamné Mme [M] [Y] aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, et avec distraction au profit de Me Damian et Me El-hem Selini,

-

Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Statuant à nouveau,

- Déclarer nul et de nul effet le rapport rendu par M. [E], expert judiciaire, et déposé le 24 novembre 2016 en raison de l'absence de respect du contradictoire,

- Dire et juger n'y avoir lieu à rapport dans le cadre de la succession de feu Mme [I] [Y] en l'absence de preuve de l'intention libérale de cette dernière à l'égard de Mme [Y],

- Dire et juger à titre reconventionnel, que l'indivision successorale doit la somme de 234 000,00 euros à Mme [Y] au titre de sa créance d'assistance,

- Condamner, à titre reconventionnel, solidairement MM [S] et [L] [Y] à régler une indemnité d'occupation à l'indivision de 667 euros par mois à compter du 04 avril 2014 et ce jusqu'à la remise des clefs à Mme [Y],

- Condamner solidairement MM [S] et [L] [Y] à remettre à Mme [Y] les clefs de la maison de [Localité 9],

- Condamner solidairement MM [S] et [L] [Y] à régler à Mme [M] [Y] la somme de 5 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris ceux de l'expertise judiciaire dont distraction au profit de Me Michel Fillard en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, à titre subsidiaire dire qu'ils seront à la charge de l'indivision successorale.

Aux termes de ses conclusions en date du 22 juillet 2022, régulièrement notifiées par voie électronique, et auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [L] [Y] demande à la cour de :

In limine litis,

- Déclarer irrecevable la demande formulée par Mme [Y] tendant à bénéficier d'une créance d'assistance d'un montant de 234 000 euros,

- Déclarer irrecevable la demande formulée par Mme [Y] tendant à bénéficier d'une indemnité de jouissance privative portant sur la maison de [Localité 9].

A titre principal,

- Déclarer recevable 1'appel incident interjeté par M. [L] [Y] à l'encontre du jugement en date du 16 novembre 2020 ;

En conséquence,

- Réformer la décision déférée en ce qu'elle a :

-

Condamné Mme [M] [Y] à rapporter la somme de 84 216 euros à la succession, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision

-

Rejeté la demande de MM [L] et [S] [Y], tendant à voir juger que Mme [Y] a commis un recel de succession

Statuant à nouveau,

- Condamner Mme [Y] à rapporter à la succession de Mme [A] [X] la somme de 138 096 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la notification de ses premières conclusions devant le tribunal judiciaire,

- Condamner Mme [Y] un recel successoral à hauteur de 138 096 euros,

Par voie de conséquence,

- Dire et juger que Mme [Y] est réputée accepter purement et simplement la succession de Mme [A] [X],

- Dire et juger que Mme [Y] ne pourra prétendre à aucune part sur les sommes recelées,

A titre subsidiaire,

- Rejeter la demande de remise de clefs sous astreinte formulée par Mme [Y],

- Rejeter la demande de créance d'assistance formulée par Mme [Y],

- Rejeter la demande d'indemnité pour jouissance privative sollicitée par Mme [Y],

A titre infiniment subsidiaire,

- Dire et juger que l'indemnité de jouissance privative est due à l'ensemble des indivisaires,

En tout état de cause,

- Rejeter toutes plus amples demandes, fins et prétentions,

- Condamner Mme [Y] à verser à M. [L] [Y] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dire et juger que les dépens de l'instance seront employés en frais privilégiés de partage Mme [Y] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Damian, avocat sur son affirmation de droit,

- Rappeler que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Aux termes de ses conclusions en date du 30 septembre 2022, régulièrement notifiées par voie électronique et auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [S] [Y] demande à la cour de :

Vu les articles 564, 567 et 64 du code de procédure civile,

Vu les articles 778, 843 et 815-9 du code civil ;

In limine litis,

- Déclarer irrecevable la demande formulée par Mme [Y] tendant à bénéficier d'une créance d'assistance d'un montant de 234 000 euros,

- Déclarer irrecevable la demande formulée par Mme [Y] tendant à bénéficier d'une indemnité de jouissance privative portant sur la maison de [Localité 9],

A titre principal,

- Dire et juger recevables et bien fondés l'appel incident et les demandes de M. [S] [Y],

- Rejeter l'ensemble des demandes de Mme [Y],

- Réformer le jugement du 16 novembre 2020 en ce qu'il a :

- condamné Mme [Y] à rapporter la somme de 84 216 euros à la succession, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la présente,

- rejeté la demande de MM [L] et [S] [Y], tendant à voir juger que Mme [M] [Y] a commis un recel de succession,

Statuer à nouveau,

- Condamner Mme [Y] à rapporter à la succession de Mme [P] [I] [Y] la somme de 138 096 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la notification des premières conclusions de M. [Y] [S] devant le tribunal de grande instance de Chambéry

- Dire et juger que Mme [Y] accepte purement et simplement la succession de Mme [P] [I] [Y],

- Dire et juger que Mme [Y] ne pourra prétendre à aucune part sur les sommes recelées,

A titre subsidiaire,

- Rejeter la demande de créance d'assistance de Mme [Y],

- Rejeter la demande d'indemnité de jouissance privative sollicitée par Mme [Y],

En tout état de cause,

- Condamner Mme [Y] à verser à M. [S] [Y] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Mme [Y] aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Julien Betemps que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

L'ordonnance de clôture est en date du 7 novembre 2022.

Motifs et décision

A titre liminaire, il sera observé que compte tenu de l'appel partiel de Mme [M] [Y] et des conclusions d'appel incident des frères [Y], sont définitives les dispositions suivantes du jugement déféré :

- ordonne l'ouverture des opérations de liquidation partage de la succession de Mme [P] [X], désigne Me [V] pour y procéder,

- donne mission au notaire désigné de procéder à la constitution de lots de meubles et leur répartition, ordonne la licitation au plus offrant devant Me [V] de l'ensemble des biens immobiliers situés à [Localité 9] et [Localité 8] composant la succession,

- rejette la demande en paiement de M. [S] [Y] de la somme de 3 812,38 euros au titre des frais de conservation des biens indivis,

I - Sur les fins de non-recevoir

1. Sur la recevabilité de la demande de Mme [Y] au titre d'une créance d'assistance

Selon l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai prefix, la chose jugée.

L'action en demande de fixation d'une créance d'assistance est fondée sur un enrichissement sans cause. Il s'agit d'une action quasi-contractuelle classée parmi les actions personnelles et mobilières.

Selon l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le délai quinquennal de prescription de cette action a commencé à courir au jour du décès de Mme [P] [X] épouse [Y], soit le 10 décembre 2013, Mme [M] [Y] n'alléguant ni ne justifiant d'aucune impossibilité d'agir.

Or cette dernière a formulé pour la première fois une telle demande devant la cour par conclusions notifiées le 15 mars 2021, soit postérieurement à l'expiration du délai quinquennal de prescription, de sorte que sa demande sera déclarée irrecevable, sans qu'il y ait lieu d'examiner la fin de non-recevoir tirée de l'existence d'une demande nouvelle en cause d'appel, excipée par les intimés.

2. Sur la recevabilité de la demande en fixation d'une indemnité d'occupation

Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Il est jugé qu'en matière de partage, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l'établissement de l'actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.

Il en résulte que la demande en fixation d'une indemnité d'occupation présentée par Mme [Y] en cause d'appel est recevable.

Les intimés soutiennent par ailleurs, que la demande serait prescrite.

Selon l'article 815-10 alinéa 2 du code civil, « les fruits et revenus des biens indivis accroissent à l'indivision, à défaut de partage provisionnel ou de tout autre accord établissant la jouissance divise.

Aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera toutefois, recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l'être. »

Il résulte de ces dispositions que la demande de Mme [M] [Y], tendant à voir fixer une indemnité d'occupation et condamner ses frères au paiement de cette dernière, n'est pas prescrite, mais qu'elle ne peut être fixée à une date antérieure au 15 mars 2016, soit cinq ans avant sa demande formulée pour la première fois par conclusions du 15 mars 2021.

II - Sur la nullité du rapport d'expertise

Mme [M] [Y] épouse [K] fait valoir la nullité du rapport d'expertise pour défaut de respect du contradictoire en soutenant que son mari, à qui elle avait donné pouvoir de la représenter, était présent lors de la première réunion mais a quitté cette dernière du fait des injures subies par l'un des coindivisaires, qu'elle n'a pas été avisée de la deuxième réunion d'expertise et qu'elle n'a pas été destinataire du pré-rapport d'expertise de sorte qu'elle n'a pas pu formuler ses observations.

Il résulte du rapport d'expertise que l'expert a adressé aux parties, dont Mme [Y], une convocation par lettre recommandée en vue de la première réunion qui s'est déroulée sur place le 21 juillet 2016 et au cours de laquelle Mme [Y] était représentée par son mari, M. [G] [K], muni d'un pouvoir à cet effet.

Au cours de cette première réunion, que M. [K] a quitté avant qu'elle ne s'achève, les bâtiments ont été visités et l'expert a procédé à leur estimation au contradictoire des parties.

Une deuxième réunion s'est déroulée le 15 septembre 2016, au cours de laquelle ont été visités les terrains, en vue de leur estimation.

Contrairement à ce que soutient Mme [Y], cette dernière a bien été convoquée par l'expert qui mentionne dans son rapport :

« L'ensemble des parties a été régulièrement convoqué. Seuls Messieurs [S] et [L] [Y] étaient présents ».

Par la suite, l'expert a adressé le 21 octobre 2016, son pré-rapport aux parties laissant à ces dernières jusqu'au 10 novembre 2016 pour formuler des dires et leur demandant de lui transmettre toutes les pièces nécessaires à l'établissement des comptes entre les parties (Factures ' loyer fermage- travaux etc.).

Il est bien évident qu'il a adressé ce pré-rapport à Mme [Y] qui est partie à la procédure.

De la même manière, cette dernière a été destinataire du dire adressé à l'expert par le conseil de M. [L] [Y] qui lui a envoyé copie de ce dernier et des pièces jointes par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 9 novembre 2016.

Elle a enfin été destinataire du rapport d'expertise final en date du 26 novembre 2016.

En tout état de cause, il sera relevé que Mme [Y] n'a pas interjeté appel de la disposition du jugement qui a ordonné la licitation des biens immobiliers composant la succession « avec pour prix minimums les valeurs mentionnées par M. [L] [E] en pages 10 à 13 de son rapport déposé le 24 novembre 2016 », disposition devenue définitive, de sorte que sa demande en nullité est devenue sans objet.

Il sera ajouté qu'ensuite du jugement assorti de l'exécution provisoire, le notaire commis Me [J] [V] a convoqué à deux reprises les parties.

Le 26 février 2021, a été dressé un acte notarié contenant procès-verbal d'ouverture des opérations de partage judiciaire à la requête des trois coindivisaires, Mme [Y] étant représentée par son mari ayant reçu pouvoir à cet effet.

Aux termes de cet acte, il a été dressé un procès-verbal contenant remise des pièces et documents par les conseils des parties. Il a, en outre, été décidé d'un certain nombre d'attributions avec des prix fixés sur la base du rapport d'expertise.

Le 18 juin 2021, en présence des trois coindivisaires, le notaire a dressé un acte contenant procès-verbal d'ouverture de continuation des opérations de partage judiciaire, aux termes duquel les parties ont réitéré leur volonté relative à la vente de certaines parcelles sur la base de prix fixés par le rapport d'expertise et M. [S] [Y] a remis un certain nombre de pièces relatives aux frais exposés pour le compte de l'indivision.

Ces actes ont été signés le premier par M. [K], es qualité de représentant de son épouse, le deuxième par Mme [M] [Y].

Au vu de l'ensemble de ces éléments, Mme [Y] ne peut qu'être déboutée de sa demande en nullité du rapport d'expertise de M. [E] et le jugement sera confirmé de ce chef.

III - Sur les libéralités sujettes à rapport

1. Sur l'existence de versements au profit de Mme [M] [Y] et de M. [G] [K] par Mme [P] [X]

Il résulte des pièces communiquées que des versements réguliers ont été effectués au profit de Mme [M] [Y] par sa mère, soit par chèques, soit par virements à partir de l'année 2005.

Sur les chèques émis

Ainsi que l'a retenu à bon droit le premier juge, seuls doivent être pris en compte les chèques émis à l'ordre de Mme [M] [Y] ou son mari M. [G] [K], à l'exception des chèques même émis par cette dernière (qui avait manifestement procuration sur les comptes de sa mère) dont il n'est pas démontré qu'ils lui ont bénéficié.

- Trois chèques ont été émis sur l'année 2005 au profit de Mme [M] [Y] pour un montant total de 1 180 euros.

Par ailleurs, le premier juge a, en outre, retenu à juste titre un chèque d'un montant de 3 500 euros à l'ordre de M. [F], lequel a attesté avoir vendu à M. [G] [K] un quad, versement dont il n'est aucunement démontré qu'il constituerait un présent d'usage.

Les versements par chèques ont ainsi représenté une somme totale de 4 680 euros, sur l'année 2005.

- Sept chèques ont été émis en 2008 au bénéfice de M. [K] ou Mme [Y] d'un montant total de 1 600 euros.

- Cinq chèques ont été émis en 2009 au bénéfice de M. [K] ou Mme [Y] pour un montant total de 4 280 euros.

- Dix sept chèques ont été émis en 2010 au bénéfice de M. [K] ou Mme [Y] pour un montant total de 21 400 euros.

- Seize chèques ont été émis en 2011 au bénéfice de M. [K] ou Mme [Y] pour un montant total de 13 850 euros,

- Treize chèques ont été émis en 2012 pour un montant total de 8 440 euros.

- Quatre chèques ont été émis en 2013 au bénéfice de M. [K] ou Mme [Y] pour un montant de 4 350 euros auxquels le premier juge a rajouté à juste titre un chèque d'un montant de 1 566 euros à l'ordre du Docteur [H] dentiste, lequel a attesté n'avoir jamais reçu en consultation Mme [P] [X] veuve [Y], soit une somme totale de 5 916 euros.

Sur les ordres de virement

Le premier juge a retenu à bon droit les virements suivants :

- Trois virements en 2006 ayant pour bénéficiaires M. ou Mme [K] [G] pour un montant total de 4 800 euros,

- Un relevé des opérations du CCP n° 01 205 66 H ouvert au nom de Mme [P] [Y] entre le 13 novembre 2014 et le 31 décembre 2007 mentionnant un virement le 8 juin 2007 au profit de « [K] [G] » d'un montant de 1 500 euros, un virement le 23 juillet 2007 pour « [K] » d'un montant de 9 000 euros et un virement le 30 novembre 2007 au profit de M. Mme [K] d'un montant de 1 300 euros soit un total de 11 800 euros.

- Un ordre de virement de 1 200 euros le 9 juin 2008 au profit de Mme [M] [Y].

- Un ordre de virement de 3 500 euros le 22 octobre 2009 au profit de Mme [M] [Y].

- Quatre ordres de virements en 2011 ayant pour bénéficiaires M. [K] ou Mme [Y] pour un montant total de 2 750 euros.

Soit un montant total (chèques + virements) de 84 216 euros, se répartissant ainsi :

Année 2005 4 680 euros

Année 2006 4 800 euros

Année 2007 11 800 euros

Année 2008 2 800 euros

Année 2009 7 780 euros

Année 2010 21 400 euros

Année 2011 16 600 euros

Année 2012 8 440 euros

Année 2013 5 916 euros

S'agissant de la demande de retrait partiel de 40 000 euros du contrat Poste Avenir (CNP) le 6 mai 2003, sollicité par Mme [P] [X] épouse [Y], il résulte des pièces produites que cette dernière a demandé par l'intermédiaire du receveur de la poste un changement du numéro de CCP de liaison avec le contrat, à mettre en place pour ce retrait partiel.

Il est joint le relevé d'identité postal correspondant, le titulaire étant Mme [K] ou Mme [Y]. Le numéro du compte [XXXXXXXXXX03] ne correspond ni au compte chèque postal des époux [K] ([XXXXXXXXXX02]) sur lequel ont été encaissés les chèques et les virements, ni à celui de Mme [P] [X] épouse [Y] ([XXXXXXXXXX01]).

Il s'agit manifestement d'un compte joint entre Mme [M] [Y] et sa mère mais rien ne permet d'établir qui a été le bénéficiaire final des sommes.

Il en est de même des retraits effectués sur les livrets A et d'Epargne populaire ouverts au nom de Mme [P] [Y] dont le bénéficiaire final n'est pas connu.

Le jugement qui n'a pas pris en compte ces opérations sera confirmé.

2. Sur l'existence de libéralités rapportables

L'article 893 code civil énonce : « La libéralité est l'acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d'une autre personne » ; puis il ajoute : « Il ne peut être fait de libéralité que par donation entre vifs ou par testament. »

L'article 843 du code civil dispose que : « Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale. »

La reconnaissance d'une donation suppose la réunion des deux éléments constitutifs suivants: l'appauvrissement du disposant et son intention libérale, éléments qui sont appréciés souverainement par les juges du fond.

Les principes généraux relatifs à la charge de la preuve s'appliquent à l'intention libérale : c'est à celui qui invoque l'existence d'une donation d'établir l'intention libérale du donateur.

L'intention libérale se constate, elle ne peut se déduire du seul déséquilibre constaté entre les engagements respectifs des contractants (1ère Civ., 24 sept. 2002 n° 00-21.035)

En l'espèce, Mme [Y] conteste toute intention libérale de sa mère à son égard, faisant valoir que cette dernière n'a pas entendu la privilégier mais l'a rémunérée en contrepartie de services rendus ou de remboursements de sommes avancées. Elle rappelle que lorsque sa mère a voulu privilégier un enfant par rapport à un autre membre de la fratrie, elle a pris soin de faire enregistrer sa volonté expresse par devant notaire.

Au soutien de son argumentation elle produit deux documents signés par sa mère.

Le premier en date du 15 février 2007 écrit de la main de cette dernière est rédigé en ces termes :

« Je soussignée Mme [I] [Y], atteste sur l'honneur avoir aidé financièrement ma fille [M] [K] demeurant à [Localité 11] en reconnaissance de très bons soins à la maman. »

Le deuxième en date du 22 août 2012 est rédigé en ces termes :

« Je soussignée Mme [Y] [I] avoir rémunéré ma fille [M] en contrepartie d'une part de l'aide-ménagère à domicile, des courses, des transports effectués par cette dernière et d'autre part des travaux et entretien de la maison et du jardin par mon gendre.

En effet seule ma fille, aidée de son mari m'aide au quotidien depuis le décès de mon mari depuis 12 ans. »

Ainsi, Mme [M] [Y] invoque l'existence d'une donation dite « rémunératoire » laquelle constitue un acte de disposition à titre onéreux.

En effet, dans de telles circonstances, le disposant n'est pas mû par une intention libérale, mais par le désir de conférer une contrepartie. Ce caractère commutatif exclut la qualification de libéralité.

Il arrive, toutefois, que la rémunération soit disproportionnée par rapport au service rendu.

Dans cette hypothèse, l'excès qui n'entraîne pas une disqualification de l'ensemble de l'opération en donation pure et simple doit être isolé et traité comme une libéralité, éventuellement réductible pour atteinte à la réserve

Il convient dès lors d'apprécier si l'aide et l'assistance apportées au disposant ont excédé les exigences de la piété familiale et dans l'affirmative d'en déterminer la quote-part.

En l'espèce, s'agissant de l'état de santé de Mme [P] [I] [Y] qui a nécessairement évolué sur la période allant du décès de son mari survenu le 19 novembre 2000, alors qu'elle était âgée de 77 ans et son propre décès survenu le 10 décembre 2013 à l'âge de 90 ans, la cour ne dispose que d'un certificat médical en date du 31 juillet 2015 du Docteur [C], médecin généraliste, qui atteste que :

« Je soussigné, Dr [C], docteur en médecine, certifie avoir soigné Mme [P] [I] [Y] née le 28 mars 1923, du 19 juillet 2012 au 13 novembre 2013 en visites à domicile à la demande de sa fille Mme [K] [M]. C'est sa fille qui était la seule personne aidante lors de mes visites.

Elle avait du mal à se déplacer physiquement pour se rendre en consultation, mais elle ne présentait aucun signe en faveur d'une démence.

Elle est décédée à l'hôpital de [Localité 6] le 10 décembre 2013 de mort naturelle. »

Il en résulte qu'en 2012, 2013, Mme [P] [Y] n'était pas grabataire mais rencontrait des difficultés pour se déplacer, n'était atteinte d'aucune maladie de nature à engager son pronostic vital et disposait de ses facultés mentales.

Par ailleurs, cette dernière, en 2007, évoquait les « très bons soins prodigués par sa fille » sans plus de précision alors qu'en 2012, elle faisait état de services précis et divers qui montrent qu'elle ne disposait plus de la même autonomie.

Enfin les versements au profit de sa fille n'ont débuté qu'en 2005 et sont d'un montant très variable selon les années (11 800 euros en 2007 mais 2 800 euros en 2008, 7780 euros en 2009 mais 21 400 euros en 2010) ce qui tend à montrer qu'ils ne sont pas uniquement la contrepartie d'une aide et d'une assistance filiale mais sont également corrélés avec les besoins financiers du couple [K] qui a fait l'objet, à l'époque d'une procédure de surendettement (plan définitif de surendettement adressé par la commission le 28 mai 2013 - pièce 12 [K]).

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que l'état physique de Mme [P] [Y] ne s'est vraiment dégradé que sur les dernières années de sa vie, nécessitant une aide et une assistance excédant les exigences de la piété familiale, de sorte qu'il y a lieu de prendre en compte, sur les sommes dont Mme [M] [Y] a bénéficié, une quote-part de 20 000 euros représentant une donation rémunératoire, par définition non rapportable, le solde soit la somme de 64 216 euros constituant des versements mus par une intention libérale de la part de Mme [P] [X] veuve [Y], à savoir celle d'aider sa fille en difficulté financière, somme que Mme [M] [Y] sera condamnée à rapporter à la succession et le jugement sera infirmé en ce sens.

IV - Sur l'existence d'un recel successoral

Selon l'article 778 du code civil :

« Sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession. »

En l'absence d'élément nouveau, c'est par une motivation pertinente que la cour adopte expressément, que le premier juge a considéré que les frères [Y] ne rapportaient pas la preuve de ce que Mme [Y] avait agi avec mauvaise foi ou munie d'une intention frauduleuse, c'est à dire voulu s 'approprier indûment des effets successoraux dans le but de nuire à ses frères et rompre ainsi l'égalité du partage.

Il sera ajouté que compte tenu des écrits de Mme [P] [Y] faisant état d'une rémunération accordée en échange des services rendus par sa fille, cette dernière a pu en toute bonne foi penser que lesdites sommes n'étaient pas soumises à rapport, ce qui est retenu d'ailleurs partiellement par la cour.

Ainsi faute d'élément intentionnel, le jugement qui a rejeté la demande de MM [Y] tendant à voir juger que leur s'ur a commis un recel successoral, sera confirmé.

V - Sur la demande de fixation d'une indemnité d'occupation

En première instance Mme [M] [Y] réclamait la condamnation de MM [Y] à lui remettre à leur frais un jeu des clés de la maison d'habitation, demande le premier juge a rejeté à bon droit, considérant qu'elle ne justifiait pas de son impossibilité d'accès à la maison indivise.

Devant la cour, elle forme désormais une demande de fixation d'indemnité d'occupation.

Pour autant elle ne justifie toujours pas de la jouissance privative par ses frères de la maison indivise alors même que cette question n'a aucunement été évoquée lors des deux réunions qui se sont déroulées sous l'égide Me [V], notaire commis qui n'en fait aucun état dans les procès-verbaux qu'elle a rédigés et qui ont été signés par les coindivisaires.

Il sera ajouté, au surplus, que Mme [Y] demande au titre de cette indemnité une somme mensuelle de 667 euros sans fournir la moindre explication quant à ce montant, ni le moindre justificatif concernant la valeur locative dudit bien, étant précisé que l'expert judiciaire, qui n'avait pas reçu mission en ce sens, n'a pas chiffré la valeur locative du bien.

Sa demande sera rejetée.

VI - Sur les demandes accessoires

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel au profit de l'une quelconque des parties et le jugement qui a condamné Mme [Y] à verser une indemnité procédurale à chacun de ses frères sera infirmé.

Par ailleurs, il y a lieu d'ordonner l'emploi des dépens de première instance et d'appel incluant les frais d'expertise, en frais privilégiés de partage, et le jugement sera également infirmé en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en ses dispositions dont la cour est saisie sauf en ce qui concerne le montant du rapport dû par Mme [M] [Y] épouse [K], l'indemnité procédurale et les dépens.

L'infirme de ces chefs,

Condamne Mme [M] [Y] épouse [K] à rapporter à la succession la somme de 64 216 euros outre intérêts au taux légal depuis le 16 novembre 2020, date du jugement,

Déboute MM. [S] et [L] [Y] de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne l'emploi des dépens de première instance incluant les frais d'expertise judiciaire en frais privilégiés de partage,

Y ajoutant,

Déclare Mme [M] [Y] irrecevable en sa demande en fixation d'une créance d'assistance,

Déclare Mme [M] [Y] recevable en sa demande de fixation d'une indemnité d'occupation,

L'en déboute,

Déboute les parties de leurs demandes en paiement d'une indemnité procédurale en cause d'appel.

Ordonne l'emploi des dépens exposés devant la cour en frais privilégiés de partage,

Admet les parties qui en ont formé la demande et en réunissent les conditions au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, La Présidente,

Copie délivrée le

à

Me Michel FILLARD

la SELARL SELARL CORDEL BETEMPS

Me Richard DAMIAN

Copie exécutoire délivrée le

à

Me Michel FILLARD

la SELARL SELARL CORDEL BETEMPS

Me Richard DAMIAN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/01561
Date de la décision : 07/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-07;20.01561 ?
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