COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 02 Février 2023
N° RG 20/00817 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GPPP
Décision déférée à la Cour : Jugement du Président du TJ de THONON LES BAINS en date du 19 Mai 2020, RG 17/01991
Appelant
FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS ayant pour société de gestion EQUITIS GESTION SAS, dont le siège social est sis [Adresse 6] et représenté par la société MCS ET ASSOCIES SAS, ayant son siège sociale [Adresse 4] agissant en qualité de recouvreur, pursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège venant aux droits de la SOCIETE GENERALE dont le siège social est sis [Adresse 5] prise en la personne de son représentant légal
Représenté par Me Pierre BREGMAN, avocat au barreau d'ANNECY
Intimés
M. [F] [T]
né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 8] (68), demeurant [Adresse 2]
Représenté par la SAS SR CONSEIL, avocat au barreau de CHAMBERY
Mme [J] [N]
née le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 9] (74), demeurant [Adresse 7]
Représentée par la SCP ARMAND - CHAT ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue le 29 novembre 2022 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente
- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 19 octobre 1998, complété par 5 avenants des 10 octobre 2002, 19 décembre 2003, 15 décembre 2005, 24 avril 2008 et 22 novembre 2008, la SA Société Générale et la Sarl Rhône Alpes Échafaudages ont convenu des modalités d'une convention de trésorerie courante comportant ouverture d'un crédit d'un montant maximum de 30 100 euros.
Le 10 janvier 2009, Monsieur [F] [T] et Madame [J] [N] son épouse se sont l'un et l'autre portés caution solidaire de la Sarl Rhône Alpes Échafaudages, au bénéfice de la SA Société Générale, pour l'ensemble de ses engagements et sur une durée de 10 ans, dans la limite de la somme de 195 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard.
Postérieurement, le 8 février 2010, la SA Société Générale a octroyé à la Sarl Rhône Alpes Échafaudages un prêt d'un montant de 180 000 euros remboursable en 84 mensualités.
Par décision du 11 février 2014, le tribunal de commerce de Chambéry a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la Sarl Rhône Alpes Échafaudages, laquelle a été convertie en liquidation judiciaire par décision du 23 juin 2014.
Appelés en garantie par la banque par lettres recommandées avec demande d'avis de réception du 4 juillet 2014, les cautions n'ont pas honoré leurs engagements respectifs.
Par acte du 8 novembre 2017, la SA Société Générale a alors fait assigner en paiement Monsieur [F] [T] et Madame [J] [N] divorcée [T].
Par jugement contradictoire du 19 mai 2020, le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains a :
- débouté la SA Société Générale de ses demandes de condamnation de Madame [N] et Monsieur [T] à lui régler les sommes de 32 180,41 et 99 580,37 euros avec intérêts capitalisés par années entières, au titre de leurs engagements de caution souscrits le 10 janvier 2009,
- débouté Madame [N] et Monsieur [T] de leur demande reconventionnelle de condamnation de la SA Société Générale à leur régler des dommages et intérêts avec compensation,
- débouté les parties de leurs demandes respectives formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SA Société Générale aux dépens,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- débouté les demandeurs de toutes leurs autres demandes, comprenant les demandes plus amples et contraires.
Par acte du 24 juillet 2020, le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits et obligations de la SA Société Générale, a interjeté appel du jugement.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 7 février 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, le Fonds commun de titrisation Cedrus demande à la cour de :
Réformant le jugement entrepris,
- condamner Madame [N], ainsi que Monsieur [T] à lui régler les sommes de :
44 350,46 euros, avec intérêts de retard au taux légal courant jusqu'à complet règlement au titre du prêt n°2100 390 1090 5000 4930,
18 494,40 euros, avec intérêts de retard au taux légal courant jusqu'à complet règlement au titre du prêt n°114 000 2005 359 5000 2030,
- condamner Madame [N] ainsi que Monsieur [T] au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les intimés aux entiers dépens dont la distraction interviendra au bénéfice de Maître Bregman en application de l'article 699 du code de procédure civile.
En réplique, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 octobre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, Monsieur [T] demande à la cour de :
À titre principal,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SA Société Générale de toutes ses demandes à son encontre,
- infirmer ce jugement en ce qu'il a :
- dit et jugé que l'engagement de caution souscrit n'était pas manifestement disproportionné,
- débouté Monsieur [T] de sa demande de condamnation de la SA Société Générale au paiement de dommages et intérêts,
Et statuant à nouveau, à titre principal,
- dire et juger que la SA Société Générale ne démontre pas avoir rempli son obligation de renseignement à l'égard des cautions,
- dire et juger que l'engagement de caution du 10 janvier 2009 est manifestement disproportionné,
- dire et juger que la SA Société Générale ne peut se prévaloir de son acte de caution litigieux,
En conséquence,
- débouter le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale, de l'ensemble de ses demandes,
À titre subsidiaire,
- dire et juger que la SA Société Générale n'a pas déféré à son obligation de mise en garde à son égard, caution non avertie,
- condamner en conséquence le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale, à lui verser des dommages et intérêts à hauteur des sommes qu'il lui réclame et ordonner la compensation entre les créances respectives des parties,
À titre infiniment subsidiaire,
- dire et juger que la SA Société Générale n'a pas déféré à son obligation d'information de la caution,
- prononcer en conséquence, à l'encontre du Fonds commun de titrisation Cedrus, la déchéance du droit aux intérêts, frais et pénalités depuis l'origine des engagements de caution,
- dire et juger qu'à défaut pour le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale, de produire un décompte de créance expurgé de tous les intérêts, frais et pénalités, il devra être considéré comme ne justifiant pas d'une créance certaine en son montant,
- débouter le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale de l'ensemble de ses demandes formulées à son, faute de créance certaine, liquide et exigible,
- dire et juger que sa condamnation ne saurait excéder les sommes de 44 350,46 euros au titre du prêt n°2100 390 1090 5000 4930 et de 18 494,40 euros au titre du prêt n°114 000 2005 359 5000 2030,
- lui octroyer un échelonnement de la dette sur 24 mois, avec imputation des paiements en priorité sur le capital,
En tout état de cause,
- condamner le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale, au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Enfin, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 4 octobre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, Madame [N] demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SA Société Générale aux droits de laquelle vient le Fonds commun de titrisation Cedrus de ses demandes, fins et prétentions,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle de condamnation de la SA Société Générale aux droits de laquelle vient le Fonds commun de titrisation Cedrus à lui régler des dommages et intérêts,
À défaut,
- dire et juger que son engagement de caution est disproportionné,
- dire et juger que le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale ne peut se prévaloir de son engagement de caution du 1er juin 2018,
À titre subsidiaire,
- dire et juger que le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale a manqué à son devoir de mise en garde,
- condamner en conséquence le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- constater que le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale ne justifie pas du respect de son obligation d'information annuelle la concernant,
- constater que le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale ne justifie pas du respect de son obligation d'information dès le premier incident de paiement de la société Rhône Alpes échafaudages,
- dire et juger en conséquence que le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale est déchu du droit aux intérêts et pénalités de retard,
À titre très subsidiaire,
- limiter sa condamnation à 44 350,46 euros au titre du prêt et celle de 18 494,40 euros au titre de la convention de trésorerie,
À titre infiniment subsidiaire,
- dire et juger qu'elle pourra bénéficier d'un délai de paiement sur deux ans pour régler les sommes dont elle serait redevable,
En tout état de cause,
- condamner le Fonds commun de titrisation Cedrus, venant aux droits de la SA Société Générale à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de l'instance.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande en paiement
Selon l'article 1134 du code civil, dans sa version en vigueur au jour de la conclusion du contrat, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Conformément aux articles 2288 et suivants du même code, celui qui se rend caution d'une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même. Le cautionnement ne se présume point. Il doit être exprès et on ne peut l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté.
En application des dispositions de l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait ayant éteint son obligation.
En l'espèce, le Fonds commun de titrisation Cedrus produit aux débats l'engagement de caution omnibus signé le 10 janvier 2009 par Monsieur [T], d'une part, et Madame [N], d'autre part.
Il produit par ailleurs la convention de trésorerie courante du 19 octobre 1998, les 5 avenants des 10 octobre 2002, 19 décembre 2003, 15 décembre 2005, 24 avril 2008 et 22 novembre 2008 ayant porté l'ouverture de trésorerie à la somme 30 100 euros ainsi que le contrat de prêt du 8 février 2010 souscrit par la Sarl Rhône Alpes Échafaudages. Le Fonds commun de titrisation Cedrus verse enfin aux débats l'avis d'irrecouvrabilité adressé le 14 mars 2018 par le liquidateur de la Sarl Rhône Alpes Échafaudages, à la SA Société Générale, pour un montant de 106 700,73 euros.
Quoique non-justifiée, la cession de créance intervenue entre la SA Société Générale et le Fonds commun de titrisation Cedrus n'est pas contestée par les intimés lesquels ne contestent pas davantage le nouveau décompte de la créance expurgé des intérêts contractuels.
Quant à la disproportion de l'engagement et à l'obligation, pour la banque de se renseigner sur le patrimoine réel de la caution
L'article L.341-4 du code de la consommation, en vigueur au jour de la signature des actes de caution, et recodifié à droit constant à l'article L.332-1, dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
L'appréciation de la disproportion se fait donc à la date de la conclusion du contrat de cautionnement, à charge pour la caution de démonter son existence. Dans l'affirmative, le créancier peut toutefois démontrer que le patrimoine de la caution est suffisant pour honorer l'engagement au jour de l'appel en garantie. A défaut, l'acte de cautionnement s'avère inopposable.
Cette disposition est mobilisable par toutes les cautions personnes physiques, qu'elles soient ou non averties.
Pour apprécier factuellement la disproportion, il convient de prendre en considération la situation patrimoniale de la caution dans sa globalité. Sont donc non seulement pris en compte les revenus et les biens propres de la caution mais également tous les éléments de patrimoine susceptibles d'être saisis. Concernant l'appréciation de la disproportion manifeste au jour de la signature de l'engagement, viennent en déduction des actifs ainsi identifiés l'ensemble des prêts et des engagements souscrits par la caution à l'exception de ceux qui auraient été pris postérieurement à la souscription de la garantie litigieuse. S'agissant de l'appréciation de la disproportion au jour de l'appel en garantie, la consistance du patrimoine de la caution à prendre en considération s'entend de son endettement global à cette date, en ce compris celui résultant d'autres engagements par la caution.
En l'absence d'anomalie apparente, la fiche déclarative de patrimoine renseignée par la caution au moment de la souscription de l'engagement lui est opposable, sans que la banque ait à vérifier l'exactitude des éléments financiers déclarés.
Il est en l'espèce constant que le cautionnement litigieux est en date du 10 janvier 2009. Aucune fiche de patrimoine concomitante n'est produite par les parties, de sorte que la preuve d'une éventuelle disproportion au jour de l'engagement demeure libre.
Monsieur [T], sur qui pèse la charge de la démonstration d'une disproportion manifeste au 10 janvier 2009, ne produit pour autant aucun élément de patrimoine antérieur à 2018. Il échoue, par conséquent, à démontrer l'existence d'une disproportion manifeste au jour de la souscription du cautionnement contesté. Aussi, son engagement de caution lui est parfaitement opposable.
Madame [N] ne verse pas davantage d'élément susceptible de permettre à la cour d'apprécier la consistance de son patrimoine avant 2018. Dans ces conditions, elle ne saurait revendiquer efficacement l'existence d'une disproportion manifeste concernant l'engagement de caution souscrit au bénéfice de la SA Société Générale.
Aucune disproportion manifeste n'ayant étant retenue au jour de la souscription des engagements, il n'y a pas lieu, subséquemment, d'observer la situation de fortune des cautions au jour de l'appel en garantie, étant au surplus rappelé que l'obligation pour la banque de se renseigner s'avère, sauf anomalie apparente de la fiche patrimoniale, inexistante en droit positif.
Quant à l'obligation de mise en garde
Aucune demande spécifique n'étant reprise dans le dispositif des conclusions du Fonds commun de titrisation Cedrus concernant l'éventuelle prescription de la demande indemnitaire des intimés, la cour indique qu'il ne lui appartient pas, en conséquence, de statuer sur ce moyen.
Le devoir de mise en garde consiste, pour un établissement de crédit, à alerter l'emprunteur ou la caution sur l'inadaptation de son engagement au regard de ses capacités financières et sur le risque d'endettement qui en résulte. Il n'existe toutefois qu'envers une personne non-avertie, étant précisé qu'un emprunteur professionnel ne peut être, de facto, considéré comme un emprunteur averti.
En l'espèce, il est avéré que Monsieur [T] a été le gérant et un actionnaire historique de la Sarl Rhône Alpes Échafaudages qu'il a constituée le 1er octobre 1997 avec Madame [N], pour sa part actionnaire majoritaire de l'entreprise, étant observé que cette société était une structure relativement importante en ce qu'elle présentait un chiffre d'affaires annuel de 1 272 900 euros en 2012 selon l'extrait société.com versé par l'appelant.
Concernant cette société, les pièces versées aux débats permettent de retenir que Monsieur [T] a successivement négocié puis visé la convention de trésorerie courante du 19 octobre 1998, puis les 5 avenants successifs des 10 octobre 2002, 19 décembre 2003, 15 décembre 2005, 24 avril 2008 et 22 novembre 2008. En outre, il apparaît que Monsieur [T] et Madame [N] se sont antérieurement portés caution de la société Rhône Alpes Échafaudages par actes des 10 avril 2002 puis du 17 mai 2005, le cautionnement du 10 janvier 2009 venant annuler et remplacer les précédentes garanties offertes par ces derniers.
Le Fonds commun de titrisation Cedrus produit à cet égard la copie de fiches de patrimoine renseignées les 10 avril 2002 et 22 novembre 2007 par Madame [N], attestant que les cautions étaient, de longue date, coutumiers de ce type d'engagement au demeurant relativement courant pour des dirigeants de société ou des actionnaires dans le cadre du développement de leur entreprise.
La cour retient encore que, antérieurement à la constitution de la Sarl Rhône Alpes Échafaudages, Monsieur [T] et Madame [N] étaient d'ores et déjà actionnaires à parts égales de la Sci Les Bleuets, laquelle a été immatriculée le 15 octobre 1985 et était gérée par Madame [N].
En outre, postérieurement aux engagements contestés, Monsieur [T] et Madame [N] ont poursuivi le développement de différentes affaires en créant la Sci Les 3 Jonquilles (constituée le 27 mai 2013 et ayant pour gérant Monsieur [T] (actionnariat de Monsieur [T] à hauteur de 60% et de Madame [N] pour 10%)) ou encore de l'Eurl F.M. Démolition - Construction (immatriculée le 1er août 2013, gérée par Monsieur [T] et ayant réalisé un chiffre d'affaire de 1 452 800 euros pour l'année 2015), témoignant plus avant de leur esprit d'initiative et du caractère avisé de chacune des deux cautions dans la gestion de leur patrimoine commun.
Il en résulte que, de part leurs activités respectives de dirigeant de sociétés, la détention de nombreuses part sociales dans différentes structures de nature civile et commerciale, et leurs interventions multiples pour la négociation d'avenants et la formalisation de cautionnements antérieurs, le caractère averti de Monsieur [T] et de Madame [N] dans la vie des affaires est avéré au 10 janvier 2009, jour où ils se sont chacun portés caution solidaire de la Sarl Rhône Alpes Échafaudages.
Il s'ensuit que ces derniers ne peuvent qu'être déboutés de leurs demandes indemnitaires pour un quelconque manquement de la banque au devoir de mise en garde.
Quant à l'obligation d'information
Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L.341-6 du code de la consommation (applicable du 05/02/2004 au 01/07/2016) et L.313-22 du code monétaire et financier (applicable du 11/12/2016 au 01/01/2022), que les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.
La bonne exécution de cette obligation étant contestée par les cautions, il appartient dès lors au Fonds commun de titrisation Cedrus de démontrer qu'il a effectivement satisfait à cette obligation pour se prévaloir du montant des intérêts conventionnels échus à compter du 31 mars 2010.
Or, le premier juge ayant retenu l'absence de force probante des duplicatas produits par la SA Société Générale, le Fonds commun de titrisation Cedrus, étant dans l'incapacité de démontrer l'envoi effectif des courriers d'information, limite de son propre chef ses demandes au montant du capital expurgé des frais, intérêts contractuels et des remboursements intervenus par la débitrice principale.
Ces décomptes, nouvellement produits à hauteur d'appel, ne sont pas contestés en leur quantum par les intimés qui sollicitent, in fine, que leur condamnation à paiement soit limitée aux montants revendiqués par l'appelant.
Dans ces conditions, la cour ne peut que faire droit à la demande en paiement pour un montant de (44 350,46 + 18 494,40) 62 844,86 euros avec intérêts au taux légal jusqu'à complet règlement.
Sur les délais de paiement
Conformément à l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Monsieur [T] et Madame [N], qui excipent de la modicité de leurs ressources actuelles pour revendiquer le bénéfice d'un échéancier sur deux ans, ne justifient aucunement au moyen de documents actualisés qu'il seraient en capacité d'honorer mensuellement des échéances supérieures à 2 600 euros.
Dans ces conditions, ils ne peuvent qu'être déboutés de leurs demandes.
Sur les demandes annexes
Monsieur [T] et Madame [N], qui succombent en principal, sont condamnés aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Bregman s'agissant des frais dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision.
Monsieur [T] et Madame [N] sont en outre condamnés à payer au Fonds commun de titrisation Cedrus la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Réforme la décision entreprise,
Condamne Monsieur [F] [T] et Madame [J] [N] à payer au Fonds commun de titrisation Cedrus la somme de 62 844,86 euros avec intérêts au taux légal jusqu'à complet règlement,
Condamne Monsieur [F] [T] et Madame [J] [N] aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Bregman s'agissant des frais dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision,
Condamne Monsieur [F] [T] et Madame [J] [N] à payer au Fonds commun de titrisation Cedrus la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi prononcé publiquement le 02 février 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente