La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/01/2023 | FRANCE | N°22/00089

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 31 janvier 2023, 22/00089


COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence









AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le TRENTE ET UN JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,



Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :



Dans la cause N° RG 22/00089 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HEAN débattue à notre audience publique du 29 Novembre 2022 - RG n° 22/

00089 - 2ème section



ENTRE



M. [P] [E], demeurant [Adresse 5]



Mme [Z] [I] épouse [E], demeurant [Adresse 5]



Mme [H] [E]...

COUR D'APPEL

DE CHAMBERY

Première Présidence

AUDIENCE DES RÉFÉRÉS DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY, tenue au Palais de Justice de cette ville le TRENTE ET UN JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

Nous, Marie-France BAY-RENAUD, première présidente de la cour d'appel de CHAMBÉRY, assistée de Ghislaine VINCENT, greffière, avons rendu l'ordonnance suivante :

Dans la cause N° RG 22/00089 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HEAN débattue à notre audience publique du 29 Novembre 2022 - RG n° 22/00089 - 2ème section

ENTRE

M. [P] [E], demeurant [Adresse 5]

Mme [Z] [I] épouse [E], demeurant [Adresse 5]

Mme [H] [E], demeurant [Adresse 1]

M. [T] [E], demeurant [Adresse 3]

Représentés par la SCP ARMAND - CHAT ET ASSOCIES, avocats au barreau de CHAMBERY

Demandeurs en référé

ET

M. [N] [Y], demeurant [Adresse 4]

Mme [V] [G] épouse [Y], demeurant [Adresse 4]

Ayant pour avocat postulant Me Jennifer BOULEVARD, avocat au barreau de CHAMBERYet pour avocat plaidant Me Magalie PIN, avocate au barreau d'AIX EN PROVENCE.

Défendeurs en référé

'''

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement en date du 17 juin 2022, le tribunal judiciaire d'Albertville a :

- condamné in solidum Monsieur [N] [Y] et madame [V] [G] épouse [Y] à retirer le muret de soutènement qu'ils ont édifié en partie sur la parcelle de leur voisin aux abords de la borne C, tel qu'il figure sur le plan de bornage de monsieur [M], dans le délai d'un mois suivant la signification du jugement, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard,

- condamné monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] à supprimer les deux parties du mur de soutènement empiétant sur le fonds des consorts [Y] aux abords de la borne A et en remontant en direction de la borne B, tels qu'ils figurent sur le plan de bornage de monsieur [M], dans un délai de trois mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- condamné monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] à faire réaliser par un professionnel sur leur parcelle en limite des parcelles des consorts [Y] entre le point C et le point B et entre le point A et le point B un mur de soutènement destiné à retenir le talus de ces derniers, dans le délai de trois mois sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard,

- condamné monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] à verser aux consorts [Y] la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] ont interjeté appel de ce jugement le 30 août 2022 (déclaration d'appel n°22/1611; n°RG 22/1585).

Par assignation en référé délivrée le 4 novembre 2022 à Monsieur [N] [Y] et madame [V] [G] épouse [Y], Monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] demandent au premier président de la Cour d'appel de Chambéry, sur le fondement des articles 514, 523 et 524 du code de procédure civile dans leur rédaction antérieure au 1er janvier 2020, de suspendre l'exécution provisoire ordonnée au terme du jugement susvisé en ce qu'il les a :

- condamné à supprimer les deux parties du mur de soutènement empiétant sur le fonds des consorts [Y],

- condamné à faire réaliser par un professionnel un mur de soutènement destiné à retenir le talus des consorts [Y],

- dit que les astreintes provisoires courront pendant un délai de six mois et rappelé qu'il appartenait à la partie la plus diligente de saisir le juge de l'exécution compétent en liquidation d'astreinte.

L'affaire a fait l'objet d'un renvoi à la demande des parties et a été retenue à l'audience du 29 novembre 2022.

Par conclusions soutenues à l'audience, monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] sollicitent de voir suspendre l'exécution provisoire du jugement contesté en ce qu'il les a condamnés à faire réaliser par un professionnel un mur de soutènement destiné à retenir le talus des consorts [Y] et a dit que les astreintes provisoires courront pendant un délai de six mois.

Ils demandent la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils précisent avoir exécuté le jugement de première instance en ce qu'il les a condamnés à supprimer les deux parties de mur empiétant sur le fonds des époux [Y]. Ils font valoir qu'ils ne peuvent être condamnés à réaliser un mur de soutènement sur près de 43 mètres de long alors même qu'il est totalement contesté et contestable qu'il soit nécessaire, en ce compris au droit du point C si les époux [Y] retiraient les terres dont il est prouvé qu'elles ont été apportées bien après la réalisation de leur construction et en tout état de cause que la réalisation d'un tel ouvrage ait été mis à leur charge sur la base d'une interprétation totalement erronée d'un acte d'échange de parcelles de novembre 1998. Ils ajoutent que la réalisation de ce mur de soutènement engendrerait des conséquences manifestement excessives sur le plan financier pour eux et les priveraient surtout du droit constitutionnel d'interjeter appel d'une décision de justice.

Par conclusions soutenues à l'audience, Monsieur [N] [Y] et madame [V] [G] épouse [Y] sollicitent le rejet de la demande de suspension, ajoutant qu'il y a urgence à ce que les consorts [E] exécutent les causes du jugement du 17 juin 2022 du tribunal judiciaire d'Albertville. Ils sollicitent la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [N] [Y] et madame [V] [G] épouse [Y] font notamment valoir que les factures communiquées sont sybillines et ne permettent pas d'objectiver le coût des travaux.

A l'issue des débats, la première présidente a autorisé les parties à communiquer au plus tard le 1er janvier 2023 des devis détaillés sur le coût des travaux ordonnés par le tribunal.

La cour a ainsi reçu, par RPVA, d'une part une première note en délibéré des consorts [E] le 29 décembre 2022 comportant trois devis et un courrier, puis une deuxième le 2 janvier 2023 à 16h55 et d'autre part une note en délibéré de Monsieur [N] [Y] et madame [V] [G] épouse [Y] le 2 janvier à 10h07, une deuxième le 3 janvier 2023 à 17h01 aux termes desquelles les parties discutent du coût des travaux.

SUR CE

Selon l'article 55-1 du décret du 11 décembre 2019, l'instance visant à arrêter ou aménager l'exécution provisoire reste soumise aux dispositions des anciens articles 514 et suivants du code de procédure civile lorsqu'elle a été engagée avant le 1er janvier 2020, ce qui est le cas en l'espèce.

Aux termes de l'ancien article 524 du code de procédure civile "Lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président statuant en référé et dans les cas suivants :

1° Si elle est interdite par la loi ;

2° Si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522.

Le même pouvoir appartient, en cas d'opposition, au juge qui a rendu la décision.

Lorsque l'exécution provisoire est de droit, le premier président peut prendre les mesures prévues au deuxième alinéa de l'article 521 et à l'article 522.

Le premier président peut arrêter l'exécution provisoire de droit en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article 12 et lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives" ;

Pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire ordonnée, les demandeurs doivent rapporter la preuve que cette exécution provisoire serait interdite par la loi, ce qu'ils ne soutiennent pas, ou qu'elle risquerait d'entraîner pour eux des conséquences manifestement excessives, ce qu'ils avancent aujourd'hui ;

S'agissant de l'existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu'il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques concrets générés par la mise à exécution de la décision rendue ;

Le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d'une obligation de faire, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;

Il appartient à monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] de rapporter la preuve de ces risques occasionnés par l'exécution provisoire ;

Monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] font valoir que la réalisation d'un mur de soutènement sur toute la limite séparative par un professionnel est totalement disproportionnée sur le plan financier et technique, d'autant plus qu'aucune dangerosité pour la sécurité des personnes ne justifie l'urgence de l'intervention d'un professionnel, les conséquences matérielles et financières de l'exécution provisoire seraient ainsi manifestement excessives outre le fait que la procédure d'appel serait vidée de son sens ;

Le tribunal judiciaire d'Albertville a ordonné, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- la démolition par Monsieur [N] [Y] et madame [V] [G] épouse [Y] du muret de soutènement édifié en partie sur la parcelle de leur voisin aux abords de la borne C ; il est constant et il résulte du constat d'huissier établi le 14 novembre 2022 par maître [W] ainsi que des photographies communiquées que le muret en béton aux abords de la borne C a été détruit, les morceaux de béton laissés sur place et les terres laissées libres sans retenues,

- la démolition par monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] des deux parties du mur de soutènement empiétant sur le fonds des consorts [Y] aux abords de la borne A et en remontant en direction de la borne B ; il est constant et il résulte des photographies communiquées que monsieur [E] a enlevé ces parties du mur de soutènement ;

Les deux parties ont exécuté partiellement la décision rendue par le tribunal judiciaire d'Albertville ;

La demande d'arrêt de l'exécution provisoire porte ainsi uniquement sur la condamnation faite aux consorts [E] de faire édifier par un professionnel sur leur parcelle en limite des parcelles des consorts [Y] entre le point C et le point B et entre le point A et le point B un mur de soutènement destiné à retenir le talus de ces derniers ;

Les parties s'accordent sur le fait que la distance entre ces points est d'environ 45 mètres ;

Plusieurs devis ont été produits aux débats :

- le devis de la société AP pour un mur maçonné de 45 ml d'un coût global de 83 520 euros TTC en date du 22 novembre 2022,

- un devis détaillé de la même entreprise en date du 15 décembre 2022 pour le même montant spécifiant le coût de chaque prestation,

- le devis de la société Vanoise Construction en date du 7 décembre 2022 pour un coût de 73 296 euros TTC

- le devis de la SAS ROSSI et Fils d'un montant de 97 315,25 euros, soit 58 547, 94 euros HT pour le lot maçonnerie et 22548,10 euros pour le lot habillage des murs en pierre,

- le devis de la société Alpes Maçonnerie en date du 30 décembre 2022 d'un montant de 33 648 euros TTC;

Au regard des éléments du dossier, il n'est pas établi qu'une étude réalisée par un bureau d'études au coût de 4 200 euros (devis de la société AP) soit nécessaire ; en outre, l'habillage en pierres du mur de soutènement n'est pas prévu par la décision du tribunal judiciaire d'Albertville, ainsi il n'a pas à être réalisé dans le cadre de l'exécution provisoire et peut attendre, si les consorts [E] le souhaite, que la cour d'appel ait statué sur le fond;

En définitive, au regard des devis communiqués le coût de la réalisation du mur de soutènement s'élève entre 33 648 euros et 70 257,52 euros, étant constaté que les prestations peuvent être très différentes ;

Il n'en reste pas moins que les deux parties, en première instance, ont sollicité la construction d'un mur de soutènement ; ainsi, aux termes des conclusions notifiées le 28 septembre 202, les consorts [E] sollicitaient de faire condamner les époux [Y] à supprimer le mur béton et les talus décors construits par leur soin au nord ouest de la parcelle [Cadastre 2] et empiétant sur leur fonds, puis de le faire reconstruire sur leur parcelle pour assurer la retenue des terres rapportées et ce par une entreprise spécialisée en maçonnerie ;

De leur côté, les consorts [Y], aux termes de leurs conclusions notifiées le 1er décembre 2021 ont sollicité de voir condamner les consorts [E] à procéder à leur frais à la réalisation de murs de soutènement sur leur parcelle ;

En l'état, les murs qui servaient de soutènement jusqu'à aujourd'hui, au point C et au point A ont été démolis en exécution de la décision rendue le 17 juin 2022 ; or le corollaire de ces destructions est l'édification d'un nouveau mur de soutènement sur la parcelle des consorts [E] ;

Par ailleurs, aucune des parties n'apporte d'éléments sur les conséquences financières manifestement excessives , au regard de leur situation, de l'exécution de la décision, à savoir la mise en oeuvre par les consorts [E] et en cas de réformation, l'exécution de l'arrêt par les consorts [Y] ;

Par ailleurs, l'édification de ce mur ne viderait pas de sens l'appel puisque ce qui a été construit peut être détruit ;

En conséquence, il convient de rejeter la demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

L'équité n'appelle pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

La partie qui succombe supporte les dépens.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par décision contradictoire et en matière de référé,

Déclarons recevable la demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Albertville le 22 juin 2022,

Déboutons monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] de leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire,

Déboutons les parties de toutes leurs autres demandes,

Condamnons monsieur [E], madame [Z] [I] épouse [E], madame [H] [E] et monsieur [T] [E] aux dépens.

Ainsi prononcé publiquement, le 31 janvier 2023, par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Marie-France BAY-RENAUD, première présidente, et Ghislaine VINCENT, greffière.

La greffière La première présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 22/00089
Date de la décision : 31/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-31;22.00089 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award