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24/01/2023 | FRANCE | N°21/00274

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 24 janvier 2023, 21/00274


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY





Chambre civile - Première section



Arrêt du Mardi 24 Janvier 2023





N° RG 21/00274 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GTYC



Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce d'ANNECY en date du 12 Janvier 2021





Appelante



E.U.R.L. SELECT AUTO NEGOCES, dont le siège social est situé [Adresse 1]



Représentée par Me Charlène BERTA-GRANGER, avocat postulant au barreau d'ANNECY

Représentée par Me Nicolas SCHNEIDER, avocat plaidant au bar

reau de DRAGUIGNAN









Intimé



M. [T] [W], demeurant [Adresse 2]



Sans avocat constitué







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Date de l'ordonnance de clôture : 10 Oct...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile - Première section

Arrêt du Mardi 24 Janvier 2023

N° RG 21/00274 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GTYC

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce d'ANNECY en date du 12 Janvier 2021

Appelante

E.U.R.L. SELECT AUTO NEGOCES, dont le siège social est situé [Adresse 1]

Représentée par Me Charlène BERTA-GRANGER, avocat postulant au barreau d'ANNECY

Représentée par Me Nicolas SCHNEIDER, avocat plaidant au barreau de DRAGUIGNAN

Intimé

M. [T] [W], demeurant [Adresse 2]

Sans avocat constitué

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Date de l'ordonnance de clôture : 10 Octobre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 15 novembre 2022

Date de mise à disposition : 24 janvier 2023

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Composition de la cour :

- Mme Hélène PIRAT, Présidente,

- Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,

- Mme Claire STEYER, Vice-présidente placée,

avec l'assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Faits et Procédure :

M. [T] [W] a acquis un véhicule de marque Jaguar XK8 de 2002, auprès de M. [L] [I].

Le 26 juillet 2018, M. [T] [W] a revendu le véhicule à la société Select Auto Négoces, qui l'a revendu à son tour à un client particulier. Des difficultés sont alors apparues lors de l'immatriculation du véhicule.

Par acte du 7 octobre 2020, la société Select Auto Négoces a assigné M. [T] [W] devant le tribunal de commerce d'Annecy aux fins d'obtenir sa condamnation à lui verser à titre principal la somme de 5.700 euros de dommages et intérêts et 2.000 euros d'indemnité procédurale.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 12 janvier 2021, le tribunal de commerce d'Annecy a :

- débouté la société Select Auto Négoces de toutes ses demandes,

-          condamné la société Select Auto Négoces aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 5 février 2021, la société Select Auto Négoces a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.

 

Prétentions et moyens des parties

Par dernières écritures en date du 29 avril 2021, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Select Auto Négoces sollicite l'infirmation du jugement déférée et demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Annecy le 12 janvier 2021,

A titre principal,

- constater la faute contractuelle de M. [T] [W],

A titre subsidiaire,

- constater l'enrichissement injustifié de M. [T] [W],

En tout état de cause,

- condamner M. [T] [W] à payer à la société Select Auto Négoces une somme de 5.700 euros à titre de dommages et intérêts,

Y ajoutant,

- condamner M. [T] [W] à payer à la société Select Auto Négoces une somme de 2.500 euros à titre de résistance abusive,

- condmaner M. [T] [W] à payer à la société Select Auto Négoces une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la société Select Auto Négoces expose essentiellement que :

   - elle a subi un préjudice direct résultant de la faute commise par M. [W], qui a prétendu être propriétaire du véhicule alors que ce n'était pas le cas,

-  en plus des frais exposés, elle a subi un préjudice moral en raison de sa convocation par les services de police et de sa perte de crédibilité auprès de son client,

- la décision de première instance est fondée exclusivement sur l'enrichissement injustifié alors qu'elle se basait dans ses demandes, à titre principal, sur la responsabilité contractuelle,

-  le tribunal dispose du certificat de cession, de la facture et du chèque qu'elle a émis au bénéfice de M. [W] pour le rachat du véhicule, de telle sorte qu'il dispose de tous les éléments pour statuer sur une faute de nature contractuelle,

-  n'ayant pas eu accès au dossier pénal en première instance, elle ne connaissait pas le montant du prix d'acquisition par M. [W] du véhicule, dossier qui est aujourd'hui accessible.

La déclaration d'appel a été signifiée à M. [T] [W] le 1 avril 2021 à étude, et les conclusions de l'appelant lui ont été signifiées le 30 avril 2021 à étude. M. [T] [W] n'a toutefois pas constitué avocat, le présent arrêt sera donc rendu par défaut.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.

Une ordonnance en date du 10 octobre 2022 clôture l'instruction de la procédure. 

MOTIFS et DECISION

Aux termes de l'article 1604 du code civil, la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur.

Il est de principe que constitue un défaut de délivrance de la chose vendue la vente d'un véhicule volé, dont la carte grise a été falsifiée. (1ère chambre civile, 29 mai 1996)

Aux termes de l'article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :

' refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation,

' poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation,

' obtenir une réduction du prix,

' provoquer la résolution du contrat,

' demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.

Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Aux termes de l'article 1231-2 du même code, les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après.

Aux termes de l'article 1231-3 du même code, le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf lorsque l'inexécution est due à une faute lourde ou dolosive.

En l'espèce, il ressort des pièces transmises que, lors de la vente du véhicule, M. [T] [W] a transmis à la société Select Auto Négoces la carte grise du véhicule (pièce 1), et le certificat des douanes françaises, s'agissant d'un véhicule étranger (pièce 2).

Il est constant que ce n'est que lorsque le nouvel acquéreur du véhicule Jaguar, M. [H], a fait une demande d'immatriculation française du véhicule qu'il est apparu que ce dernier faisait l'objet d'un signalement Schengen en date du 7 mai 2018, le véhicule étant présenté comme volé.

Il est fait état au dossier d'une plainte de M. [L] [I], déposée en Suisse le 6 mai 2018. Toutefois, cette plainte ne figure dans aucune des pièces transmises par la société Select Auto Négoces.

Par ailleurs, il doit être noté qu'aucun élément n'a été transmis par M. [L] [I] quant au prix de la transaction conclue entre M. [T] [W] et lui-même, M. [L] [I] se contentant d'affirmer que M. [T] [W] ne l'a réglé que d'une partie du prix de vente.

Enfin, aucune explication n'est fournie par M. [L] [I] quant aux circonstances dans lesquelles M. [T] [W] a pu se trouver en possession de la carte grise du véhicule, qu'il a ensuite remise à société Select Auto Négoces lors de la revente de ce dernier.

Il doit être relevé en outre que M. [T] [W] n'a pas été entendu dans le cadre de la procédure pénale, et qu'il apparaît dans les documents transmis que le gérant de la société Select Auto Négoces a pris contact à plusieurs reprises avec lui pour tenter de trouver un arrangement, et qu'il a refusé tout arrangement, contestant fermement les faits qui lui sont reprochés par M. [L] [I]. Enfin, il est constant que M. [T] [W] n'a pas fait l'objet d'une condamnation pénale définitive en France ou en Suisse pour les faits de vol qui lui sont reprochés.

Au regard du fait que le caractère frauduleux de la transaction intervenue entre M. [T] [W] et M. [L] [I] ne relève que des déclarations de ce dernier, sans qu'aucun élément objectif ne vienne soutenir ses accusations, du fait que M. [T] [W] conteste avoir acquis le véhicule dans des conditions frauduleuses, du fait qu'il n'a pas fait l'objet d'une condamnation définitive concernant ces faits, il doit être considéré que la société Select Auto Négoces n'apporte pas la preuve que M. [T] [W] n'était pas le légitime propriétaire du bien lors de la transaction intervenue le 26 juillet 2018.

Dans ces conditions, aucune faute de nature contractuelle ne saurait être reprochée à M. [T] [W], et il doit être considéré que la société Select Auto Négoces n'apporte pas la preuve qu'il n'ait pas correctement exécuté son obligation de délivrance de la chose vendue.

Il doit en outre être souligné que la société Select Auto Négoces, vendeur professionnel, a manifestement manqué de prudence lors de la transaction intervenue avec le nouveau propriétaire du bien, M. [H], puisqu'elle aurait dû s'assurer, avant de vendre le véhicule, que le nouveau propriétaire ne rencontrerait aucune difficulté lors de l'immatriculation de ce dernier.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, et en l'absence de faute de M. [T] [W], la responsabilité contractuelle de ce dernier ne saurait être engagée.

S'agissant de l'enrichissement sans cause, il est de principe que cette action ne peut être admise qu'à défaut de tout autre action ouverte au demandeur : elle ne peut l'être notamment pour suppléer à une autre action que le demandeur ne peut intenter parce qu'il ne peut apporter les preuves qu'elle exige. (Chambre commerciale, 10 octobre 2000)

En l'espèce, dans la mesure où la société Select Auto Négoces a à sa disposition une action au titre de la responsabilité contractuelle du fait du contrat de vente qui la lie à M. [T] [W], contrat dont l'existence n'est pas contestée, elle ne peut invoquer l'enrichissement sans cause, qui ne saurait être un moyen d'éluder la règle juridique normalement applicable à la situation concernée.

La décision de première instance sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté les demandes de la société Select Auto Négoces.

Dans la mesure où ses demandes à l'encontre de M. [T] [W] ne sont pas accueillies, la société Select Auto Négoces ne pourra qu'être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

La société Select Auto Négoces qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et de l'instance d'appel.

Elle sera déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par défaut et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Déboute la société Select Auto Négoces EURL de ses plus amples demandes,

Condamne la société Select Auto Négoces EURL aux dépens de l'instance d'appel,

Arrêt de Défaut rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, La Présidente,

Copie délivrée le

à

Me Charlène BERTA-GRANGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/00274
Date de la décision : 24/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-24;21.00274 ?
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