COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 12 Janvier 2023
N° RG 22/00655 - N° Portalis DBVY-V-B7G-G65T
Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge de l'exécution de THONON-LES-BAINS en date du 18 Janvier 2022, RG 21/02022
Appelante
S.C.I. GRAMMONT dont le siège social est sis [Adresse 3] prise en la personne de son représentant légal
M. [F] [K] demeurant [Adresse 4]
Représentés par la SELARL LEVANTI, avocat au barreau de THONON LES BAINS
Intimés
M. [Y] [C]
né le 07 Mars 1961 à [Localité 5],
et
Mme [U] [E] épouse [C]
née le 22 Février 1961 à [Localité 7],
demeurant ensemble [Adresse 1]
Représentée par Me Corine BIGRE de la SELAS AGIS, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue le 15 novembre 2022 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente
- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
M. [Y] [C] et Mme [U] [E] son épouse sont propriétaires d'un bien immobilier situé à [Localité 6]. La SCI Grammont a fait édifier un lotissement de six lots desservi par une voie empruntant une parcelle sur laquelle se trouve un talus qui borde l'Ouest du fonds appartenant aux époux [C].
Par jugement du 23 janvier 2007, le tribunal d'instance de Thonon-les-Bains a condamné la SCI du Grammont notamment à procéder au nettoyage et à l'élagage des arbres et arbustes qui croissent sur la parcelle supportant le chemin, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à entretenir régulièrement la parcelle, sous astreinte de 300 euros par infraction constatée.
Par décision du 19 mai 2009, rectifiée par jugement du 8 septembre 2009, le juge de l'exécution a liquidé l'astreinte en condamnant la SCI Grammont à payer aux époux [C] la somme de 300 euros, outre 200 euros de dommages et intérêts et 250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 20 décembre 2016, le juge de l'exécution a liquidé l'astreinte en condamnant la SCI Grammont à payer à M. [Y] [C] et Mme [U] [E] la somme de 300 euros et a assorti la condamnation de la SCI Grammont à entretenir régulièrement la parcelle sous couvert d'une nouvelle astreinte provisoire de 1 000 euros par infraction constatée passé le délai de 10 jours suivant la signification de la décision. Il a, en outre, condamné la SCI Grammont à payer aux époux [C] la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts et 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, et rappelé que la liquidation de l'astreinte est assortie de l'exécution provisoire.
Sur appel de ce jugement, la cour d'appel de Chambéry a, par un arrêt du 25 janvier 2018, confirmé le jugement, sauf à porter à 2 000 euros le montant de l'astreinte par infraction constatée à l'obligation d'entretenir la parcelle. L'arrêt a condamné la SCI Grammont à payer à M. [Y] [C] et Mme [U] [E] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Par jugement du 11 mai 2021, le juge de l'exécution de Thonon-les-Bains a liquidé l'astreinte en condamnant la SCI Grammont à payer aux époux [C] la somme de 2 000 euros, outre la somme de 6 000 euros au titre de dommages et intérêts et 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Le 3 août 2021, les époux [C] ont fait procéder à un constat d'huissier concernant la repousse des végétaux sur leur terrain.
Par acte d'huissier du 19 octobre 2021, M. [Y] [C] et Mme [U] [E] ont assigné la SCI Grammont afin notamment de voir prononcer la liquidation de l'astreinte fixée par la cour d'appel de Chambéry dans son arrêt du 25 janvier 2019.
Par décision réputée contradictoire du 18 janvier 2022, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains a :
- constaté l'inexécution, par la SCI Grammont, de l'obligation d'entretenir la parcelle [Cadastre 2] ordonnée par la cour d'appel de Chambéry par arrêt du 25 janvier 2018,
- ordonné la liquidation de l'astreinte prévue par la cour d'appel de Chambéry par arrêt du 25 janvier 2018, à savoir 2 000 euros par infraction constatée,
- condamné la SCI Grammont à payer à M. [Y] [C] et à Mme [U] [E] épouse [C] la somme de 2 000 euros au titre de liquidation de l'astreinte,
- condamné la SCI Grammont à payer à M. [Y] [C] et Mme [U] [E] la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné la SCI Grammont à payer à M. [Y] [C] et Mme [U] [E] la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SCI Grammont aux dépens de l'instance comprenant notamment le coût de l'assignation délivrée le 19 octobre 2021 et le coût du constat d'huissier du 3 août 2021 dressé par la SELARL Viatores,
- débouté les parties du surplus des demandes,
- rappelé que la décision est exécutoire par provision.
Par déclaration du 15 avril 2022, la SCI Grammont a interjeté appel de la décision.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 7 juin 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SCI Grammont demande à la cour de :
- réformer en toutes ses dispositions la décision dont appel et statuant à nouveau,
- constater que l'astreinte provisoire prononcée par l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry du 25 janvier 2018 a déjà été liquidée par une décision du juge de l'exécution de Thonon-les-Bains du 09 janvier 2019 et que lors de cette dernière procédure, les époux [C] ont renoncé au prononcé d'une nouvelle astreinte,
- constater qu'ils ont en outre été déboutés par une décision du 22 janvier 2019 du juge de l'exécution d'une requête en rectification d'erreur matérielle visant à voir prononcer une nouvelle astreinte provisoire,
- constater que l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry du 25 janvier 2018 n'a mis à sa charge aucune obligation ce qu'elle ne pouvait d'ailleurs pas n'étant saisie qu'au titre de l'appel d'une liquidation d'astreinte provisoire et de la fixation d'une nouvelle astreinte provisoire,
en conséquence,
- débouter les époux [C] de toutes leurs demandes,
- condamner les époux [C] à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Par conclusions aux fins de radiation notifiées par voie électronique le 29 juin 2022, M. [Y] [C] et Mme [U] [E] ont demandé au conseiller de la mise en état de prononcer la radiation de l'appel interjeté par la sci du Grammont à l'encontre de la décision rendue le 18 janvier 2022 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains.
Par message électronique du 29 juin 2022, il a été précisé au conseil de M. [Y] [C] et Mme [U] [E] que sa demande de radiation relevait de la compétence de Madame la Première Présidente de la cour d'appel.
Aucune conclusion au fond n'a été déposée.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour précise que son office consiste à trancher un différend ou homologuer un accord mais ne consiste pas à statuer sur des demandes de 'donner acte' ou de faire des constats autres que ceux prévus par la loi. Ainsi, il ne sera pas répondu aux demandes de constats figurant dans le dispositif des écritures de la SCI Grammont, celles-ci n'étant pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
Sur la liquidation de l'astreinte et les dommages et intérêts
Conformément aux articles L.131-2 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. Le taux de l'astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation. L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère.
Il appartient au débiteur d'une obligation de faire de démontrer la bonne exécution de l'obligation mise à sa charge, étant précisé que le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement aux poursuites.
Il convient de rappeler que l'obligation d'entretien régulier de la parcelle n°[Cadastre 2] a été mise à la charge de la SCI du Grammont par le jugement du tribunal d'instance de Thonon les Bains rendu le 23 janvier 2007.
Par arrêt du 25 janvier 2018, la deuxième chambre de la cour d'appel de Chambéry, saisie en appel du jugement du 20 décembre 2016, a 'approuvé' le juge de l'exécution 'en qu'il énonce que l'obligation d'entretien se renouvelle et ne s'accorde pas avec une astreinte prononcée par jour' et a '[constaté] que l'astreinte initialement prononcée n'a aucune effet coercitif sur la SCI du Grammont [pour] en déduire que le montant de l'astreinte [...] doit être sérieusement relevé' à la somme de 2 000 euros par infraction constatée.
Aucune limite temporelle n'ayant été fixée par les décisions du 25 janvier 2018 et du 20 décembre 2016, il ne peut qu'être retenu, au regard de la motivation précitée et de la nature même de l'obligation (entretien d'une parcelle), que l'autorité de chose jugée attachée aux décisions de liquidation déjà intervenues ne fait pas obstacle à la présentation d'une nouvelle demande, au moyen d'éléments nouveaux et pour une période postérieure à celle visée dans ces décisions, dès lors que la non-exécution du débiteur se renouvelle dans le temps.
En ce sens, la décision du juge de l'exécution de Thonon-les-Bains, en date du 22 janvier 2019, statuant sur requête en omission de statuer quant au prononcé d'une nouvelle astreinte au bénéfice des époux [C], et rejetant leur demande, est sans incidence sur l'obligation résultant du jugement du 23 janvier 2007 et sur l'astreinte encourue à défaut d'exécution de cette obligation, fixée en dernier lieu par l'arrêt du 25 janvier 2018.
La SCI Grammont ne prétend pas avoir respecté ses obligations. Au contraire, le juge de l'exécution a relevé qu'un constat d'huissier en date du 2 août 2021 prouve que la parcelle litigieuse n'a pas fait l'objet d'un entretien régulier, les végétaux ayant repoussé et n'ayant été ni taillés ni coupés. Dès lors, c'est à bon droit que le premier juge a accueilli les demandes des époux [C] en liquidant l'astreinte précitée et en condamnant la SCI appelante à leur verser à ce titre la somme de 2 000 euros, outre 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les nuisances subséquentes et l'atteinte à leur droit de propriété, étant précisé que les appelants ne développent aucun moyen au soutien de leur demande d'infirmation de la disposition du jugement déféré portant sur cette indemnité.
Sur les dépens et la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
La SCI Grammont qui succombe sera, par application de l'article 696 du code de procédure civile, condamnée aux dépens d'appel. Elle sera, dans le même temps déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme n'en remplissant pas les conditions d'octroi.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SCI Grammont aux dépens d'appel,
Déboute la SCI Grammont de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé publiquement le 12 janvier 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente