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15/12/2022 | FRANCE | N°21/01136

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 15 décembre 2022, 21/01136


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY







2ème Chambre



Arrêt du Jeudi 15 Décembre 2022



N° RG 21/01136 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GW3G



Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 05 Mai 2021, RG 1121000074



Appelante



S.A. BANQUE [N] dont le siège social est sis [Adresse 1] prise en la personne de son représentant légal



Représentée par la SELARL EUROPA AVOCATS, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELARL LEXWA

Y, avocat plaidant au barreau de GRENOBLE



Intimée



Mme [R] [C], née le [Date naissance 2] 1998 à [Localité 4] - SENEGAL demeurant [Adresse 3]



sans avoc...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 15 Décembre 2022

N° RG 21/01136 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GW3G

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 05 Mai 2021, RG 1121000074

Appelante

S.A. BANQUE [N] dont le siège social est sis [Adresse 1] prise en la personne de son représentant légal

Représentée par la SELARL EUROPA AVOCATS, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELARL LEXWAY, avocat plaidant au barreau de GRENOBLE

Intimée

Mme [R] [C], née le [Date naissance 2] 1998 à [Localité 4] - SENEGAL demeurant [Adresse 3]

sans avocat constitué

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 25 octobre 2022 avec l'assistance de Madame Sylvie LAVAL, Greffière,

Et lors du délibéré, par :

- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 02 mai 2019, la SA banque [N] a consenti à Mme [R] [C] un prêt personnel de 16.500 euros remboursable en 72 mensualités au taux d'intérêt effectif global de 3,897 % l'an.

Les échéances n'ont pas été régulièrement payées.

Par acte du 03 février 2021, la banque [N] a fait assigner Mme [J] en paiement devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville.

Mme [J] a comparu en personne devant le tribunal en sollicitant essentiellement des délais de paiement.

Le premier juge a soulevé d'office les moyens tirés de la forclusion de l'action de la banque, de la nullité du contrat en raison d'un déblocage prématuré des fonds, de la déchéance du droit aux intérêts et de l'absence de déchéance du terme régulière faute de mise en demeure préalable.

La Banque [N] a maintenu ses demandes.

Par jugement contradictoire rendu le 05 mai 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville a :

dit que la banque [N] est déchue de son droit aux intérêts concernant le prêt de 16.500 euros consenti le 02 mai 2019 à Mme [R] [C],

condamné Mme [R] [C] à payer à la banque [N] la somme de 11.136,43 euros arrêtée au 19 mars 2021 au titre du solde de ce prêt, avec intérêts au taux légal à compter du 03 février 2021,

exclut l'application du taux d'intérêt légal majoré prévu à l'article L. 313-3 du code monétaire et financier,

débouté Mme [R] [C] de sa demande de délais de paiement,

dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné Mme [R] [C] aux entiers dépens.

Par déclaration du 31 mai 2021, la banque [N] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 19 juillet 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la banque [N] demande à la cour de  :

Vu les dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation,

Vu les dispositions de l'article 1103 du code civil,

- déclarer recevable et bien fondé l'appel de la banque [N],

- infirmer la décision du juge des contentieux de la protection de Bonneville rendue le 05 mai 2021 en ce qu'elle a déchu la banque [N] du droit aux intérêts conventionnels,

- en conséquence, condamner Mme [J] à payer à la Banque [N] la somme de 16 083.17 euros, outre intérêts au taux contractuel de 3.897 % et capitalisation des intérêts par années entières conformément à l'article 1343-2 du code civil, sur le principal de 14 687.39 euros, à compter du 16 décembre 2019,

- la condamner au paiement d'une somme de 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et capitalisation des intérêts par année entière, ainsi qu'aux dépens par application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

La déclaration d'appel et les conclusions de la banque [N] ont été signifiées à Mme [J] par acte du 26 juillet 2021, remis à sa personne. Elle n'a pas constitué avocat devant la cour.

L'affaire a été clôturée à la date du 26 septembre 2022 et renvoyée à l'audience du 25 octobre 2022, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 15 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La Banque [N] fait grief au jugement déféré d'avoir prononcé à son encontre la déchéance du droit aux intérêts conventionnels sur le fondement de l'article L. 312-16 du code de la consommation, au seul motif que la banque n'a pas vérifié la réalité de l'hébergement gratuit déclaré par la débitrice lors de la souscription de l'emprunt.

En application de l'article L. 341-2 du code de la consommation, le prêteur qui n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 312-14 et L. 312-16 est déchu de son droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

L'article L. 312-16 dispose que, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L. 751-1, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 751-6, sauf dans le cas d'une opération mentionnée au 1 de l'article L. 511-6 ou au 1 du I de l'article L. 511-7 du code monétaire et financier.

Ainsi, si le prêteur est tenu de procéder à des vérifications sur les éléments essentiels de la situation de l'emprunteur, y compris en sollicitant les justificatifs utiles, il ne lui est pas imposé de procéder au contrôle systématique de toutes les informations fournies, notamment quant à leur sincérité.

En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que la banque a procédé à la vérification des ressources de Mme [J], laquelle a par ailleurs déclaré être hébergée à titre gratuit et n'avoir donc aucun loyer à acquitter.

Cette déclaration ne pouvait raisonnablement être mise en doute par le prêteur compte tenu de l'âge de Mme [J], qui avait alors tout juste 21 ans, étant souligné que l'adresse déclarée par elle, qui est au demeurant toujours la même aujourd'hui, était déjà la sienne alors qu'elle était encore mineure (cf carte d'identité), ce qui accrédite un logement à titre gratuit. En outre, il n'est pas démontré, compte tenu des mensualités de remboursement du prêt de 264,20 euros, que les revenus justifiés de 1.400 euros par mois ne permettaient pas à l'emprunteuse de supporter en plus la charge d'un loyer.

En conséquence, c'est à tort que le premier juge a appliqué la sanction de la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et le jugement sera réformé de ce chef.

La déchéance du terme a été valablement prononcée après une mise en demeure de payer par lettre recommandée avec accusé de réception revenue non réclamée en date du 18 décembre 2019. Devant le tribunal Mme [J] n'a pas contesté le montant de sa dette.

Les pièces produites aux débats établissent que la créance de la banque [N] s'élève à la somme de :

- capital restant dû à la déchéance du terme 14.687,39 euros

- échéances impayées 1.395,78 euros

- total 16.083,17 euros

Mme [J] sera donc condamnée au paiement de cette somme, outre intérêts au taux contractuel de 3,897 % à compter du 16 décembre 2019.

En application de l'article L. 312-38 du code de la consommation, aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.

Ces dispositions font obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts. En outre, et contrairement à ce qui est soutenu par la banque, la lecture du contrat de prêt révèle que celui-ci ne prévoit pas la capitalisation des intérêts dans les clauses relatives à la défaillance de l'emprunteur. Il ne sera donc pas fait droit à cette demande.

Aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [J] supportera les entiers dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,

Infirme le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville, mais seulement en ce qu'il a :

dit que la banque [N] est déchue de son droit aux intérêts concernant le prêt de 16.500 euros consenti le 02 mai 2019 à Mme [R] [C],

condamné Mme [R] [C] à payer à la banque [N] la somme de 11.136,43 euros arrêtée au 19 mars 2021 au titre du solde de ce prêt, avec intérêts au taux légal à compter du 03 février 2021,

Statuant à nouveau de ces seuls chefs,

Condamne Mme [R] [C] à payer à la banque [N] la somme de 16.083,17 euros, outre intérêts au taux contractuel de 3,897 % à compter du 16 décembre 2019,

Rejette la demande de la Banque [N] en capitalisation des intérêts,

Confirmant pour le surplus, et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [J] aux entiers dépens de l'appel.

Ainsi prononcé publiquement le 15 décembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière pour le prononcé.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/01136
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;21.01136 ?
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