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24/11/2022 | FRANCE | N°21/00341

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 24 novembre 2022, 21/00341


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY







2ème Chambre



Arrêt du Jeudi 24 Novembre 2022



N° RG 21/00341 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GT77



Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ANNECY en date du 13 Janvier 2021, RG 18/01299



Appelants



M. [O] [K] [U] [J]

né le à [Localité 5],

et

Mme [D] [F] [M] épouse [J]

née le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 6],

demeurant ensemble [Adresse 1]



Représentés par Me Agnès UNAL

, avocat postulant au barreau d'ANNECY et Me Anne-Sophie RAMOND, avocat plaidant au barreau de PARIS



Intimée



CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAV OIE, dont le siège social e...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 24 Novembre 2022

N° RG 21/00341 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GT77

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ANNECY en date du 13 Janvier 2021, RG 18/01299

Appelants

M. [O] [K] [U] [J]

né le à [Localité 5],

et

Mme [D] [F] [M] épouse [J]

née le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 6],

demeurant ensemble [Adresse 1]

Représentés par Me Agnès UNAL, avocat postulant au barreau d'ANNECY et Me Anne-Sophie RAMOND, avocat plaidant au barreau de PARIS

Intimée

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAV OIE, dont le siège social est sis [Adresse 3] prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Hélène ROTHERA, avocat au barreau d'ANNECY

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 04 octobre 2022 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,

Et lors du délibéré, par :

- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte authentique du 6 juin 2006, M. [O] [J] et Mme [D] [M] son épouse ont souscrit auprès de la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie (ci-après la société CRCAM) deux prêts en francs suisses afin de financer l'achat d'un bien situé en France, à [Localité 4] :

- un prêt immobilier de 184 356,90 CHF soit 117 000 euros, remboursable trimestriellement sur une durée de 300 mois, dont 357 mois de différé, au taux d'intérêt annuel révisable de 2,25 %,

- un prêt immobilier de 169 740,71 CHF soit 107 724 euros, remboursable trimestriellement sur une durée de 300 mois, au taux d'intérêt annuel révisable de 2,93 %.

Le 31 juillet 2018, M. [O] [J] et Mme [D] [M] ont procédé au remboursement anticipé total des deux crédits susvisés.

Par acte du 4 juillet 2018, M. [O] [J] et Mme [D] [M] ont assigné la société CRCAM aux fins notamment d'obtention de dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire du 13 janvier 2021, le tribunal judiciaire d'Annecy a :

- déclaré irrecevable l'action en responsabilité de M. [O] [J] et Mme [D] [M] formée à l'encontre de la société CRCAM,

- condamné M. [O] [J] et Mme [D] [M] à verser à la société CRCAM la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de M. [O] [J] et Mme [D] [M] formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [O] [J] et Mme [D] [M] aux entiers dépens,

- rejeté la demande d'exécution provisoire formée tant par M. [O] [J] et Mme [D] [M].

Par déclaration du 16 février 2021, M. [O] [J] et Mme [D] [M] ont interjeté appel du jugement.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 mai 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [O] [J] et Mme [D] [M] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement,

statuant à nouveau,

- les recevoir en leurs demandes et les dire bien fondées,

- débouter la société CRCAM de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que leur action n'est pas prescrite,

- dire et juger que la société CRCAM a manqué à son obligation d'information et de conseil à leur égard concernant les risques liés au taux de change,

- condamner la société CRCAM à leur payer la somme de 173 243,33 euros à parfaire, à titre de

dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

En tout état de cause,

- condamner la société CRCAM à leur payer la somme de 6 000,00 euros par application des

dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

- prononcer l'exécution provisoire du jugement à intervenir (SIC).

En réplique, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 18 août 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie demande à la cour de :

à titre principal,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en ce qu'il a :

- déclaré irrecevable l'action en responsabilité de M. [O] [J] et Mme [D] [M],

- condamné M. [O] [J] et Mme [D] [M] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de M. [O] [J] et Mme [D] [M] formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [O] [J] et Mme [D] [M] aux entiers dépens,

à titre subsidiaire,

- déclarer irrecevables les demandes de M. [O] [J] et Mme [D] [M] sur les prétentions relatives à la nullité du contrat et aux clauses abusives la cour n'étant pas saisie de ces prétentions,

- rejeter comme infondées toutes les autres demandes,

à titre extrêmement subsidiaire,

- rejeter les demandes de M. [O] [J] et Mme [D] [M] en l'absence d'un préjudice démontré,

en tout état de cause,

- condamner M. [O] [J] et Mme [D] [M] au paiement d'une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens en sus des sommes obtenues devant le premier juge,

- rejeter toutes les autres demandes.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 juillet 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'action en responsabilité contre la banque

L'article 2224 du Code civil dispose que : 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer'. Il est constant que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

Il est tout aussi constant que le dommage résultant d'un manquement au devoir de mise en garde, consistant en une perte de chance de ne pas contracter, se manifeste, envers l'emprunteur, dès l'octroi des crédits (cass. com. 25 octobre 2017 n°16-15.116). Il n'y a pas lieu de distinguer ici entre le devoir de mise en garde et l'obligation ou encore le devoir d'information. Par ailleurs, il convient de rappeler que le banquier n'est pas tenu à un devoir de conseil en vertu du principe de non ingérence sauf s'il s'est engagé contractuellement à fournir conseil et sauf s'il dispense spontanément ou à la demande du client un conseil, ce dernier devant alors être adapté.

M. [O] [J] et Mme [D] [M] prétendent qu'à la suite de la réforme de la prescription opérée en 2008, l'article 2232 nouveau du code civil prévoit un délai butoir de 20 ans commençant à courir à partir de la naissance du droit.

La cour observe que, en l'espèce, le point de départ du délai de prescription (dies a quo) doit, être fixé à la date de souscription du prêt, soit le 6 juin 2006. En ce qui concerne la date d'acquisition de la prescription (dies ad quem), il convient de noter que la réforme de la prescription, opérée par la loi du 17 juin 2008, a réduit le délai de 10 à 5 ans. Le nouveau délai est dans ce cas applicable, selon l'article 26-II de la loi du 17 juin 2008, à compter de l'entrée en vigueur de la loi (en l'espèce le 19 juin 2008). A cet égard, les dispositions de l'article 2232 du code civil, invoquées par M. [O] [J] et Mme [D] [M] (prévoyant que le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au delà de 20 ans à compter du jour de la naissance du droit), n'ont pas, contrairement à ce qu'ils affirment, eu pour effet de créer un délai de prescription de 20 ans qui se serait achevé en l'espèce en 2030. Ce texte signifie au contraire et uniquement que, si le délai de 5 ans se trouve impacté soit par une cause report du point de départ, soit par une cause d'interruption ou de suspension, le délai maximal depuis la naissance du droit est de 20 ans. Or en l'espèce, il n'est question ni de report du point de départ du délai, ni de cause de suspension, ni de cause d'interruption. Il sera enfin rappelé que l'assignation a été délivrée le 4 juillet 2018, soit plus de 5 ans après la conclusion du contrat.

C'est donc par une exacte application de la situation, en fait et en droit, que le tribunal a déclaré irrecevable comme prescrite l'action en responsabilité contractuelle engagée par M. [O] [J] et Mme [D] [M] contre la société CRCAM. Le jugement doit en conséquence être confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile M. [O] [J] et Mme [D] [M] qui succombent seront condamnés in solidum aux dépens d'appel. Par ailleurs, ils seront déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme n'en remplissant pas les conditions d'octroi.

Il n'est par ailleurs pas inéquitable de faire supporter par M. [O] [J] et Mme [D] [M] partie des frais irrépétibles non compris dans les dépens exposés par la société CRCAM en cause d'appel. Ils seront donc condamnés in solidum à lui verser une somme de 2 000 euros en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. [O] [J] et Mme [D] [M] aux dépens d'appel,

Déboute M. [O] [J] et Mme [D] [M] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [O] [J] et Mme [D] [M] à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Ainsi prononcé publiquement le 24 novembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/00341
Date de la décision : 24/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-24;21.00341 ?
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