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22/11/2022 | FRANCE | N°20/01123

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 22 novembre 2022, 20/01123


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY





Chambre civile - Première section



Arrêt du Mardi 22 Novembre 2022





N° RG 20/01123 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GQZV



Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce de CHAMBERY en date du 09 Septembre 2020









Appelante



S.A.S. BDO VIA FINANCE, dont le siège social est situé [Adresse 1]



Représentée par la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocats postulants au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SCP BER

TIN & PETITJEAN-DOMEC, avocats plaidants au barreau de LYON











Intimée



S.A. WIISMILE, dont le siège social est situé [Adresse 2]



Représentée par Me Marie ALSOUFI, avo...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile - Première section

Arrêt du Mardi 22 Novembre 2022

N° RG 20/01123 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GQZV

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce de CHAMBERY en date du 09 Septembre 2020

Appelante

S.A.S. BDO VIA FINANCE, dont le siège social est situé [Adresse 1]

Représentée par la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocats postulants au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SCP BERTIN & PETITJEAN-DOMEC, avocats plaidants au barreau de LYON

Intimée

S.A. WIISMILE, dont le siège social est situé [Adresse 2]

Représentée par Me Marie ALSOUFI, avocat au barreau de CHAMBERY

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Date de l'ordonnance de clôture : 27 Juin 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 20 septembre 2022

Date de mise à disposition : 22 novembre 2022

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Composition de la cour lors des débats et du délibéré :

- Mme Hélène PIRAT, Présidente,

- Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,

- Mme Claire STEYER, Vice-présidente placée,

avec l'assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Faits et procédure

La société anonyme Wiismile est une entreprise de service dédiée aux PME, qui propose en particulier des services d'intranet professionnel et un service intitulé « CE pour tous ''.

Le 28 juin 2016, la société par actions simplifiées BDO Via Finance a signé un contrat d'une durée de 36 mois avec la société Novalto (devenue ultérieurement la société Wiismile) pour :

- un service d'intranet professionnel d'un montant trimestriel de 1 260 euros TTC.

- un service de CE pour tous d'un montant total de 1 260 euros TTC.

La société BDO Via Finance a réglé uniquement les 5 premiers trimestres du service d'intranet professionnel ainsi que la facture du service CE pour tous.

Par acte d'huissier de justice du 2 juillet 2019, la société Wiismile a fait assigner, devant le tribunal de commerce de Chambéry la société BDO Via Finance en paiement de six factures non réglées.

Par jugement du 9 septembre 2020, le tribunal de commerce de Chambéry a :

' déclaré régulière, recevable et bien fondée la demande principale de la société Wiismile à l'encontre de la société BDO Via Finance,

' condamné la société BDO Via Finance à payer, en deniers ou quittances valables, à la société Wiismile :

* la somme de 8 820 euros, montant de six factures impayées (FCI804278 du 04/IO/2017,FC1841992 du 04/O1/2018, FC1871263 du 04/04/2018, FCI90005I du 04/07/2018, FCI929588 du O4/10/2018 et FC1956131 du 10/12/2018),

* les intérêts de retard au taux de trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 1 260 euros à compter du 04/10/2017,

* les intérêts de retard au taux de trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 1 260 euros à compter du 04/01/2018,

* les intérêts de retard au taux de trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 1 260 euros à compter du 04/04/2018,

* les intérêts de retard au taux de trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 1 260 euros à compter du 04/07/2018,

* les intérêts de retard au taux de trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 1 260 euros à compter du 04/10/2018,

* les intérêts de retard au taux de trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 2 520 euros à compter du 10/12/2018,

* la somme de 240 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,

* les dépens

' liquidé les frais de greffe à la somme de 73,22 euros TTC avec TVA = 20 %, comprenant les frais de mise au rôle et de la présente décision,

' ordonné l'exécution provisoire de la décision,

' rejeté toutes les autres demandes.

Par déclaration au greffe en date du 5 octobre 2020, la société BDO Via Finance a interjeté appel de cette décision, en visant la totalité du dispositif.

Prétentions des parties

Par dernières conclusions en date du 20 décembre 2020, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société BDO Via Finance demande à la cour de :

' annulant et en toute hypothèse réformant le jugement entrepris,

' dire nul l'acte introductif d'instance, et inviter la société Wiismile à mieux se pourvoir,

' en toute hypothèse,

' débouter la société Wiismile de l'intégralité de ses demandes,

' dire nul le contrat d'adhésion régularisé le 28 juin 2016,

' à défaut, dire que la société WIISMILE n'a pas exécuté le contrat et le résilier à ses torts exclusifs,

' subséquemment,

' débouter la société Wiismile de l'intégralité de ses demandes.

' la condamner à rembourser à la société BDO Via Finance la somme de 6.300 euros, versée à titre de cotisations indues,

' condamner la société Wiismile à payer à la société BDO Via Finance la somme de 5.000 euros pour procédure abusive, outre la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamner la même aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SELARL Juliette Cochet Barbuat.

Par dernières conclusions en date du 19 mars 2021, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Wiismile demande à la cour de :

Vu la convention de Rome de 1980, vu les articles 2262bis et suivants du code civil belge, vu la loi belge du 12/06/1991 sur le crédit à la consommation

' recevoir la société Wiismile en ses demandes, fins et conclusions,

' l'en déclarer bien fondée

' rejeter l'ensemble des demandes de la société BDO Via Finance,

' confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré régulière, recevable et bien fondée la demande principale de la société Wiismile à l'encontre de la société BDO Via Finance, en ce qu'il a condamné la société BDO Via Finance à régler à la société Wiismile la somme de 8 820 euros au principal, des pénalités de retard avec un taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal à compter de la date d'exigibilité de chaque facture, conformément aux dispositions de l'article L.441-10 du code de commerce, la somme de 240 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement, les entiers des dépens,

' infirmer le jugement du tribunal de commerce de Chambéry du 9 décembre 2020,

' statuant à nouveau,

' condamner la société BDO Via Finance au paiement de la somme de 1 323 euros au titre de l'indemnité complémentaire,

' condamner la société BDO Via Finance au paiement de la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts,

' condamner la société BDO Via Finance à une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' débouter la société BDO Via Finance de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.

Une ordonnance en date du 27 juin 2022 a clôturé l'instruction de la procédure.

MOTIFS ET DECISION

1 ' Sur la nullité de l'assignation

sur la nullité pour défaut de pouvoir

La société BDO Via Finance soutient que l'délivrée par la société Wiismile est nulle, en ce que la représentation de cette société est irrégulière, et que seul un avocat peut faire profession habituelle de représenter une partie devant la juridiction consulaire.

La société Wiismile soutient de son côté que l'assignation n'est pas nulle dans la mesure où elle est valablement représentée par la société Saint Louis Recouvrement, et justifie d'un pouvoir spécial en date du 24 janvier 2019, où par ailleurs la société BDO Via Finance ne justifie pas du caractère habituel de cette représentation, et où enfin elle est bien représentée par un avocat dans le cadre de la procédure.

Sur ce,

Aux termes de l'article 853 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur à la date de l'assignation, les parties se défendent elles-mêmes.

Elles ont la faculté de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix.

Le représentant, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial.

Aux termes de l'article 117 du code de procédure civile, constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l'acte :

- Le défaut de capacité d'ester en justice ;

- Le défaut de pouvoir d'une partie ou d'une personne figurant au procès comme représentant soit d'une personne morale, soit d'une personne atteinte d'une incapacité d'exercice ;

- Le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice.

Aux termes de l'article 121 du code de procédure civile, les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public.

Le juge peut relever d'office la nullité pour défaut de capacité d'ester en justice.

Il est de principe que si le défaut de pouvoir spécial d'une personne chargée de représenter une partie dans une procédure sans représentation obligatoire constitue une irrégularité de fond affectant la validité des actes de procédure, l'article 121 du code de procédure civile, sans faire de distinction entre la procédure de première instance et celle d'appel, dispose que cette nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue. ( Civile 2ème, 21 avril 2005)

En l'espèce, la société Wiismile excipe d'un pouvoir de représentation en date du 24 janvier 2019. Il y a lieu de relever que ce pouvoir, pour être spécial, doit avoir été donné pour une instance déterminée, doit préciser la juridiction saisie, l'objet de la demande et mentionner la partie adverse. Le pouvoir fourni ne mentionne ni la juridiction saisie, ni l'objet de la demande, et ne saurait donc être considéré comme un pouvoir spécial.

Toutefois, en étant représentée devant le tribunal de commerce par un avocat, ce que l'appelante ne conteste pas, la société Wiismile a procédé à la régularisation de ce vice de fond. La cause de la nullité invoquée ayant disparu au moment où les premiers juges ont statué, c'est à bon droit que le tribunal de commerce a rejeté ce moyen.

sur la nullité pour vice de forme

La société BDO Via Finance soutient que l'assignation est nulle également :

' en ce qu'elle ne contient aucun énoncé intelligible des demandes, en opposition aux dispositions de l'article 56 du code de procédure civile,

' en ce que les textes visés sont inapplicables aux faits d'espèce, s'agissant d'un contrat souscrit avant le 1er octobre 2016,

' en ce que l'article L441-6 du code de commerce n'est plus applicable,

' en ce qu'elle porte des réclamations indemnitaires ineptes, le premier juge ayant par ailleurs à tort considéré que l'objet de la demande était les factures, et le moyen le contrat,

' en ce que l'article 12 du code de procédure civile ne permettant pas au juge de motiver une demande aux lieu et place du plaideur.

La société Wiismile soutient que :

' l'assignation n'est pas non plus nulle en ce que l'exposé des faits et sa demande sont parfaitement clairs et énoncés dans l'assignation puisqu'elle demande le règlement des factures (objet) qu'elle a émises en contrepartie de ses prestations conformément au contrat (moyen) conclu entre les deux parties,

' l'erreur dans la numérotation des articles ne fait pas grief à la société BDO Via Finance puisque si la numérotation a changé, le contenu des textes reste le même, et le visa des articles ne constitue pas une mention obligatoire prévue par l'article 56 du code de procédure civile,

' le juge doit trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et restituer leur exacte qualification aux faits, en vertu de l'article 12 du code de procédure civile.

Sur ce,

Aux termes de l'article 56 du code de procédure civile, l'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice et celles énoncées à l'article 54 :

1° Les lieu, jour et heure de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée,

2° Un exposé des moyens en fait et en droit,

3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé,

4° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.

L'assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée.

Elle vaut conclusions.

Aux termes de l'article 12 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Il est de principe qu'en l'absence de toute précision sur le fondement de la demande, les juges du fond doivent examiner les faits sous tous leurs aspects juridiques conformément aux règles de droit qui leur sont applicables. Ils doivent alors expliciter le fondement juridique de la demande dont ils sont saisis. ( Civile 1°, 15 janvier 1980)

En l'espèce, il doit être relevé que l'assignation comporte bien l'objet de la demande, à savoir le paiement des factures non honorées, ainsi que les moyens de cette dernière, à savoir l'inexécution par la société BDO Via Finance de sa part du contrat signé.

Si l'assignation vise en effet des textes qui ne trouvaient pas encore à s'appliquer lors de la conclusion du contrat, ou qui ont cessé de s'appliquer par la suite, il doit être relevé que cette erreur n'a eu aucune conséquence sur l'exercice des droits de la défense, dans la mesure où la société BDO Via Finance, dans ses conclusions, s'est expliquée sans difficulté sur les fondements juridiques des différentes demandes, si bien que cette erreur ne fait pas grief.

Par ailleurs, et dans le cadre de l'article 12 du code de procédure civile, il appartient au juge de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, si bien qu'il entrait dans l'office du juge de première instance de juger le litige à l'aune des règles qui lui étaient effectivement applicables.

C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté le moyen tiré de la nullité de forme de l'assignation, et a déclaré les demandes de la société Wiismile recevables.

La décision sera donc confirmée sur ce point.

2 ' Sur la nullité du contrat

La société BDO Via Finance soutient que le contrat signé le 28 juin 2016 est nul en raison d'un objet indéterminé, et en raison de son absence de cause, en ce que l'activité de la société Wiismile est dépourvue de toute consistance et ne procure aucun avantage au co-contractant, privant l'obligation souscrite de toute cause.

La société Wiismile soutient de son côté qu'il est faux d'affirmer que le contrat serait dépourvu de cause et d'objet puisque le paiement réclamé des factures correspond bien à la contrepartie des prestations d'intranet professionnel correctement réalisées par la société Wiismile et qui n'ont pas été contestées par la société BDO Via Finance.

Sur ce,

Aux termes de l'article 1126 du code civil, dans sa version en vigueur à la date du contrat, tout contrat a pour objet une chose qu'une partie s'oblige à donner, ou qu'une partie s'oblige à faire ou à ne pas faire.

Aux termes de l'article 1131 du code civil, dans sa version en vigueur à la date du contrat, l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.

En l'espèce, il ressort de la lecture du contrat, et des pièces transmises par la société BDO Via Finance ( en l'espèce la pièce 15) que l'objet du contrat portait sur la fourniture de prestations à des prix préférentiels, via un accès par une plate-forme Intranet. Il doit être souligné également que les deux options souscrites par la société BDO Via Finance, à savoir l'Intranet professionnel et le CE pour tous, ouvrent l'accès à des services différents, le service CE pour tous ouvrant notamment l'accès à des avantages pour les salariés de l'entreprise, et l'Intranet professionnel permettant notamment d'accéder à des groupements d'achat professionnels, et d'utiliser des contrats cadre négociés.

Ainsi, il est établi que les obligationde la société Wiismile dans le contrat étaient bien déterminées, et que la cause de l'obligation de paiement de la société BDO Via Finance résidait bien dans la fourniture des services visés.

Il sera ajouté qu'il ressort des pièces transmises que le représentant de la société BDO Via Finance a à plusieurs reprises informé la société Wiismile de son insatisfaction quant à la qualité des prestations dispensées par cette dernière, et a de ce fait sollicité une réduction du montant de sa cotisation en contrepartie. Cet élément à lui seul démontre que la société BDO Via Finance avait une parfaite connaissance de l'objet des obligationde la société Wiismile et que le litige ne porte que sur la qualité des services fournis et non sur leur existence même.

Ainsi, c'est à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de la société BDO Via Finance quant à la nullité du contrat, la décision sera donc confirmée sur ce point.

3 ' Sur la résiliation du contrat

La société BDO Via Finance soutient que le contrat n'a pas été exécuté par la société Wiismile, à telle enseigne que cette dernière a proposé de diminuer le montant de ses prestations, admettant l'absence de contrepartie réelle au coût de l'abonnement, si bien que la résolution aux torts exclusifs de la société BDO Via Finance s'impose.

La société Wiismile soutient qu'elle a bien mis à disposition l'outil d'Intranet professionnel au profit de la société BDO Via Finance pendant toute la durée contractuelle et a donc bien rempli ses obligations. Elle ajoute que si elle a émis de nouvelles propositions commerciales à la société BDO Via Finance, c'est non pas en reconnaissance d'une quelconque carence, mais afin de répondre au mieux aux attentes de son cocontractant.

Sur ce,

Aux termes de l'article 1184 du code civil, dans sa version en vigueur à la date de conclusion des contrats, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

En l'espèce, et en l'absence de clause résolutoire au contrat, il appartenait à la partie qui estimait que l'engagement à son égard n'avait pas été exécuté, de solliciter la résolution judiciaire du contrat.

Ainsi, le courrier de M. [G] [B], président de la société BDO Via Finance, en date du 24 juillet 2017, informant la société Wiismile du fait que la société BDO Via Finance « met un terme au contrat à compter de ce jour » ne vaut pas résolution du contrat.

De même, le courrier de Mme [K] [R], Direction Administrative et Financière de la société Wiismile, en date du 11 décembre 2018, aux termes duquel « le non-respect des engagements par votre société entraîne la résiliation de plein droit de votre contrat sous 8 jours à compter de l'envoi du présent courrier » ne vaut pas résolution du contrat.

A ce jour, la société BDO Via Finance sollicite la résolution du contrat aux torts exclusifs de la société Wiismile, au motif que cette dernière n'aurait pas fourni le service promis.

C'est donc à elle de prouver que la société Wiismile n'a pas respecté ses obligations contractuelles. A ce sujet, il doit être relevé que si elle produit des courriers émanant de son directeur faisant état d'une « disproportion de la cotisation par salarié par rapport à la qualité des services rendus », les réponses transmises par la société Wiismile démontrent que cette dernière conteste toute défaillance dans l'exécution du contrat. Il ressort également de ces échanges que des négociations ont été entamées entre les parties pour renégocier le montant de l'abonnement à ces prestations, la société Wiismile proposant de passer d'une cotisation de 35 euros par mois et par salarié à une cotisation de 25 euros par mois et par salarié, la société BDO Via Finance proposant quant à elle de passer à une cotisation de 15 euros par mois et par salarié.

Il ne saurait toutefois être déduit de cette négociation que la société Wiismile a admis implicitement qu'elle a manqué à ses obligations.

Il doit enfin être constaté que la société BDO Via Finance n'apporte pas la preuve des manquements contractuels précis qu'elle reproche à la société Wiismile.

Dans ces conditions, elle ne pourra qu'être déboutée de sa demande de résolution du contrat aux torts exclusifs de la société Wiismile.

En l'absence d'annulation et de résolution du contrat aux torts exclusifs de la société Wiismile, la société BDO Via Finance sera également déboutée de sa demande de remboursement de la somme de 6 300 euros au titre des cotisations indues.

4 ' Sur la demande en paiement

Aux termes des dispositions de l'article 1134 du code civil, dans sa version en vigueur au moment de la conclusion des contrats, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Par ailleurs, il est de principe que l'interdépendance des réciproques résultant d'un contrat synallagmatique permet à l'une des parties de ne pas exécuter son obligation lorsque l'autre n'exécute pas la sienne. Toutefois, il est nécessaire que l'inexécution soit d'une gravité suffisante, et relative à une obligation exigible.

Sur ce,

La société BDO Via Finance justifie l'absence de paiement des factures par l'absence d'exécution par la société Wiismile de ses obligations.

Or, ainsi que dit plus haut, il ressort des échanges entre les parties que, si la société BDO Via Finance a fait part d'insatisfactions relatives à la qualité des prestations fournies par la société Wiismile, elle n'apporte pas la preuve de ce que la société Wiismile aurait manqué à ses obligations, et ce de manière grave. Il sera ajouté qu'elle a réglé le montant des premières factures sans faire valoir de difficultés, et que ce n'est que lorsqu'elle a cessé de régler les factures qu'elle a excipé de manquements.

Dans ces conditions, la société BDO Via Finance n'était pas fondée à refuser de régler les factures, sa simple insatisfaction quant à l'importance des avantages apportés par l'adhésion aux prestations proposées par la société Wiismile ne justifiant pas une inexécution totale de son obligation de paiement.

Dès lors, et en l'absence par ailleurs de contestation subsidiaire sur le montant des factures, et sur les intérêts de retard, la décision de première instance sera confirmée sur ce point.

5 ' Sur les demandes de dommages et intérêts

Aux termes des dispositions de l'article 1153 du code civil, dans sa version en vigueur à la date de conclusion des contrats, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.

Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer, ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.

Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

A l'appui de sa demande de dommages et intérêts, la société Wiismile ne produit aucun élément, notamment comptable, permettant de mettre en lumière un préjudice indépendant du retard dans le paiement. Dans ces conditions, la décision ayant rejeté la demande de dommages et intérêts de la société Wiismile sera confirmée.

Aux termes de l'article 1240 du code civil, dans sa version en vigueur au moment de l'introduction de l'instance, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l'espèce, et dans la mesure où la société Wiismile a été reçue dans sa demande en paiement, il ne saurait être considéré qu'elle a introduit une procédure abusive, si bien que la décision ayant rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la société BDO Via Finance pour procédure abusive sera confirmée.

6 ' Sur l'indemnité complémentaire de l'article L441-10 du code de commerce

Aux termes de l'article L441-10 du code de commerce, tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire, sur justification. Toutefois, le créancier ne peut invoquer le bénéfice de ces indemnités lorsque l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire interdit le paiement à son échéance de la créance qui lui est due.

C'est à bon droit que le juge de première instance a condamné la société BDO Via Finance à régler à la société Wiismile l'indemnité forfaitaire, et la décision sera confirmée sur ce point.

La société BDO Via Finance sollicite par ailleurs la somme de 1 323 euros au titre de l'indemnité complémentaire.

Il doit toutefois être relevé qu'elle ne fournit pas de facture attestant de ce qu'elle a effectivement réglé cette somme à l'organisme de recouvrement engagé, ce d'autant que cet organisme, dans la mise en demeure adressée à la société BDO Via Finance le 31 janvier 2019, avait fixé le montant de cette indemnité complémentaire à 680,40 euros.

C'est donc à bon droit que le juge de première instance a rejeté la demande de la société Wiismile à ce titre, la décision sera donc confirmée sur ce point.

7 - Sur les dépens et sur la demande d'indemnité procédurale

La décision de première instance sera confirmée quant aux dépens.

La société BDO Via Finance qui succombe sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel.

La décision de première instance sera confirmée quant à l'indemnité procédurale.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Wiismile l'ensemble de ses frais irrépétibles ; l'équité commande de faire droit à sa demande à hauteur de la somme de 2 000 euros.

En conséquence, la société BDO Via Finance sera condamnée à payer à la société Wiismile la somme de 2 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Déboute la société par actions simplifiées BDO Via Finance de sa demande tendant à la résolution du contrat aux torts exclusifs de la société anonyme Wiismile,

Déboute la société par actions simplifiées BDO Via Finance de sa demande de condamnation de la société anonyme Wiismile au remboursement de la somme de 6 300 euros,

Condamne la société par actions simplifiées BDO Via Finance aux dépens de l'instance d'appel,

Condamne la société par actions simplifiées BDO Via Finance à payer à la société anonyme Wiismile la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, La Présidente,

Copie délivrée le

à

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY

Me Marie ALSOUFI

Copie exécutoire délivrée le

à

Me Marie ALSOUFI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/01123
Date de la décision : 22/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-22;20.01123 ?
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