La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/2022 | FRANCE | N°22/00170

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 27 octobre 2022, 22/00170


COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence







ORDONNANCE



STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES





du Jeudi 27 Octobre 2022





RG : N° RG 22/00170 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HDPG





Appelant

M. [U] [G]

né le 24 Novembre 1996 à [Localité 7]

SANS DOMICILE FIXE

hospitalisé au CHS de [6]

assisté de Maître Pascale GABORIEAU, avocate désignée d'

office inscrite au barreau de CHAMBERY



Appelés à la cause

CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE [6]

[Localité 3]

non comparant



M. LE PREFET DE LA SAVOIE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité...

COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence

ORDONNANCE

STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES

du Jeudi 27 Octobre 2022

RG : N° RG 22/00170 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HDPG

Appelant

M. [U] [G]

né le 24 Novembre 1996 à [Localité 7]

SANS DOMICILE FIXE

hospitalisé au CHS de [6]

assisté de Maître Pascale GABORIEAU, avocate désignée d'office inscrite au barreau de CHAMBERY

Appelés à la cause

CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE [6]

[Localité 3]

non comparant

M. LE PREFET DE LA SAVOIE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

non comparant

intervenant à la cause

Mme [X] [H] (curateur)

Préposée aux tutelles CHS

[Adresse 5]

[Localité 1]

comparante

Partie Jointe :

Le Procureur Général - Cour d'Appel de CHAMBERY - Palais de Justice - 73018 CHAMBERY CEDEX - dossier communiqué - réquisitions écrites

DEBATS :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du mercredi 26 octobre 2022 à 10h devant Madame Isabelle CHUILON, conseillère à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par ordonnance de Madame la première présidente, pour prendre les mesures prévues aux dispositions de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de prise en charge, assistée de Madame Sophie Messa, greffière

L'affaire a été mise en délibéré au jeudi 27 octobre 2022,

****

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE, DES PRETENTIONS ET MOYENS

Le 31 Août 2015, la directrice du CHS de [Localité 3] avisait les services de police qu'un viol venait d'être commis, aux alentours de 00h15, au sein de l'établissement. [U] [G], âgé de 18 ans, était rentré vers 23h45, alcoolisé, après avoir été déclaré en fugue. Alerté par des gémissements provenant de sa chambre, le personnel le surprenait nu, le sexe à la main, derrière le dos de son compagnon de chambre, [L] [T], schizophrène de 69 ans, lequel révélait avoir subi, sous la menace, une relation anale non protégée.

Par arrêt du 14 décembre 2017, la chambre de l'instruction près la cour d'appel de Chambéry a dit que Monsieur [U] [G] avait commis de tels faits de viol sur personne vulnérable, tout en le déclarant irresponsable pénalement en raison d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes lors de la commission de tels faits. Au visa de l'article 706-135 du code de procédure pénale, son admission en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète sans consentement a été ordonnée.

Le 19 Décembre 2017, le préfet de la Savoie prenait un arrêté maintenant l'hospitalisation complète d'[U] [G] au CHS de [6] à [Localité 3].

Cette mesure, au regard des certificats médicaux mensuels et des avis du collège, indiquant qu'elle était toujours justifiée, a été maintenue, sans discontinuité, par les différents juges des libertés et de la détention ayant eu à la contrôler, la dernière ordonnance datant du 18 octobre 2022.

M. [G] [U] a interjeté appel de cette décision par mail du 20 octobre 2022.

Par réquisitions écrites du 21 octobre 2022, le parquet général a conclu à l'irrecevabilité de l'appel, non motivé, et subsidiairement, à la confirmation de la décision du juge des libertés et de la détention de Chambéry en date du 18 octobre 2022.

Maître [K], avocate de M. [G], a adressé un mail en date du 24 octobre 2022, afin de complèter sa déclaration d'appel et la motiver, lequel a été porté à la connaissance du parquet général.

L'avis du collège, composé de deux psychiatres et d'un représentant de l'équipe pluridisciplinaire assurant la prise en charge du patient, en date du 21 octobre 2022, a décidé que l'actuelle mesure d'hospitalisation à temps complet sous contrainte devait être maintenue compte tenu que :

'M. [G] souffre d'une pathologie psychiatrique chronique très invalidante ayant pour antécédents des passages à l'acte grave (dont, par le passé, une agression sexuelle sur un patient vulnérable). S'il n'est pas pris en charge dans un cadre hospitalier très contraignant et très ritualisé, le risque de passage à l'acte est élevé. Il est donc indispensable que la mesure de soins sous contrainte soit maintenue. Depuis plusieurs mois il ne présente pas de tableau psychiatrique décompensé et continue petit à petit, mais de façon toujours fluctuante, à avoir moins du mal à respecter les consignes liées à son hospitalisation, avec toujours cependant de réelles difficultés pour contenir son impulsivité et différer la moindre demande. Cela continue à entraîner des problèmes relationnels avec d'autres patients et avec l'équipe. Dès que M. [G] a un peu plus de liberté, il peut vite se montrer moins bien, plus impulsif, voire agressif verbalement. Il est difficile d'imaginer un projet autre que l'hospitalisation, compte tenu des antécédents et du tableau clinique actuel, qui nécessite donc une prise en charge très organisée et conséquente. Néanmoins, il a pu visiter un foyer à [Localité 2] et peut donc commencer à se projeter dans un projet à très long terme, qu'il imagine bien sûr, lui se réaliser immédiatement. Pour l'heure, les soins ne peuvent se poursuivre qu'en milieu hospitalier».

Suivant le certificat de situation du 21 octobre 2022 émanant du docteur [S] [J], il est indiqué que son cadre hospitalier actuel lui permet de bénéficier de permissions régulières sur des temps limités, de sorte qu'il était en capacité de se rendre à l'audience seul.

Lors de l'audience du 26 octobre 2022, M. [G] a indiqué être 'enfermé' depuis 8/9 ans, avoir fait une 'erreur', qu'il avait 'payé ses actes', et qu'il entendait, désormais, accéder à davantage de libertés pour sortir et voir sa famille, mais qu'on ne lui laissait pas la possibilité 'de faire ses preuves'. Il s'est dit conscient d'avoir besoin de soins, qu'il n'envisageait aucunement de les interrompre, que c'était 'primordial' pour lui sinon il 'partait en live'. Son souhait était de rester hospitalisé au CHS de [6], mais de manière libre. Il a expliqué que s'il était amené de temps en temps à prendre du 'shit', c'était en raison du fait qu'il ne supportait plus 'd'être enfermé'. Il reconnaissait être 'parano sur les bords', se sentir persécuté à cause de son passé difficile, mais précisait qu'il ne délirait pas. Il disait être satisfait de son traitement (neuroleptique et thymo-régulateur), qu'il prenait tous les jours, et rencontrer son psychiatre à raison d'une fois par semaine. Par ailleurs, il a indiqué bénéficier, depuis 1 an et demi, de permissions de sortie le vendredi durant 2 heures, pendant lesquelles il se promenait, achetait des cigarettes, allait manger au Mac Do, et rendait visite à son père. Il a précisé être allé trois fois voir un foyer à [Localité 2]. Il considérait être plus calme depuis plusieurs mois, notamment, en ce qu'il n'insultait plus l'infirmière quand elle lui demandait de faire son lit. Enfin, il sollicitait une expertise afin de 'prouver qu'il est apte à retrouver la liberté', précisant que les professionnels du CHS ne voyaient pas sa souffrance et les efforts qu'il faisait, ne retenant que 'ses erreurs'.

Sa curatrice, Mme [H], a expliqué être très en lien avec les professionnels du CHS et l'équipe éducative, qu'un projet d'accueil dans une structure sociale était travaillé, mais qu'il dépendait d'une réponse de la MDPH, et qu'il ne pourrait s'agir que de séjours temporaires. Elle a fait état, par ailleurs, d'un incident très récent, au cours duquel, suite à un refus de remise immédiate d'argent pour acheter un portable, il a pu s'emporter, avant de finir par s'excuser. Elle a expliqué que cet évènement faisait suite à une diminution de son traitement, lequel avait eu, immédiatement, un effet néfaste sur son comportement. En dehors de cela, elle a décrit M. [G] comme une personne intelligente, respectueuse, dotée de qualités. Par ailleurs, elle a évoqué que l'environnement familial de M. [G], en dehors d'une assistance morale, ne pouvait rien lui offrir d'autre, et que subsistait, y compris, au sein de celui-ci, une problématique de consommation de drogues. Elle a enfin expliqué que M. [G] avait besoin d'un cadre contenant et ritualisé au quotidien et qu'il apparaissait difficile d'envisager un changement brutal de celui-ci, que progressivement des permissions de sortie lui avaient été accordées, notamment les week-ends.

Son avocate, Maître [K] a été entendue en ses observations. Elle a fait valoir que le CHS était devenu une 'prison' pour M. [G], qui s'y trouvait déjà en 2015, au moment du passage à l'acte, ce qui représentait une privation de liberté supérieure à 7 ans, et sans doute à celle qu'il aurait eue s'il avait été reconnu responsable pénalement et condamné. Elle a indiqué que les conditions nécessaires au maintien de son hospitalisation sans consentement sur décision du représentant de l'Etat n'étaient plus remplies, en ce que M. [G] ne constituait plus une atteinte grave à l'ordre public et ne compromettait plus la sécurité des personnes. Par ailleurs, elle a évoqué que les certificats médicaux étaient identiques de mois en mois, que plus personne ne se posait de questions au sujet de M. [G], dont l'état de santé était pourtant stable depuis longtemps, que celui-ci ne niait pas sa maladie, qu'il était conscient d'avoir besoin de soins, qu'on lui faisait 'miroiter' un projet, mais que pour autant, personne n'était en capacité de lui donner une échéance. De plus, elle a précisé que les soins libres devaient être privilégiés, que l'hospitalisation pouvait se faire dans un cadre consenti, que sa situation devait évoluer, qu'il était capable d'autonomie et de respecter les consignes données puisqu'il était venu seul à la Cour d'Appel. Elle a demandé, à titre principal, qu'il soit procédé à des expertises psychiatriques de M. [G] avant dire droit, ou qu'à défaut, il soit décidé de la mainlevée de son hospitalisation complète. Enfin, elle a remis une attestation de M. [M], père de M. [G], mentionnant que l'état de son fils s'était amélioré, qu'il ne constituait plus une menace, pour lui-même ou pour les autres, et qu'il était en capacité d'intégrer un appartement thérapeutique, en sachant qu'il bénéficiait du soutien de sa famille.

Le ministère public n'a pas comparu, mais ses réquisitions écrites ont été mises à la disposition des parties avant l'audience et portées à la connaissance de la personne hospitalisée lors du débat contradictoire.

Le représentant de l'Etat et le directeur d'établissement n'ont point comparu, bien que régulièrement avisés.

L'affaire a été mise en délibéré au 27 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Aux termes de l'article R.3211-19 du code de la santé publique: 'Le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel'.

En l'espèce, M. [G] [U] a fait appel de la décision du juge des libertés et de la détention de Chambéry du 18 octobre 2022, par mail du 20 octobre 2022, sans que celui-ci ne soit motivé.

Son avocate, Maître [K], a adressé un mail en date du 24 octobre 2022, soit dans le délai d'appel, afin de complèter sa déclaration d'appel et la motiver. Ce mail a été porté à la connaissance du parquet général, de manière contradictoire.

Dans ces conditions, il convient de considérer que l'appel de M. [G] est recevable, en raison de la régularisation opérée.

Sur la régularité et le bien-fondé de la mesure de soins psychiatriques sans consentement :

L'office du juge des libertés et de la détention (et du premier président ou son délégué) consiste à opérer un contrôle de la régularité de l'hospitalisation complète sous contrainte, puis de son bien-fondé.

Il convient de rappeler qu'en raison de la règle de purge des nullités, le premier président ou son délégué ne saurait apprécier la régularité des procédures antérieures ayant donné lieu à un contrôle du juge des libertés et de la détention à travers une décision définitive.

En l'espèce, il apparait à la lecture des pièces transmises visées à l'article R.3211-12 du code de la santé publique que la procédure relative aux soins psychiatriques de M. [G], depuis la dernière décision définitive du juge des libertés et de la détention apparaît régulière.

L'appréciation du bien-fondé de la mesure doit s'effectuer au regard des certificats médicaux qui sont communiqués, dont le juge ne saurait dénaturer le contenu, son contrôle supposant un examen des motifs évoqués, mais ne lui permettant pas de se prononcer sur l'opportunité de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte et de substituer son avis à l'évaluation faite, par le corps médical, des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

L'article L.3211-12-1 I. du code de la santé publique prévoit que l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement ou par le représentant de l'Etat dans le département, ait statué sur cette mesure :

- avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de l'admission ou de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète,

- avant l'expiration d'un délai de six mois à compter soit de toute décision judiciaire prononçant l'hospitalisation en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale, soit de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application du présent I ou des articles L. 3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision.

Toutefois, lorsque le juge des libertés et de la détention a ordonné, avant l'expiration de l'un de ces délais, une expertise, ce délai est prolongé d'une durée qui ne peut excéder quatorze jours à compter de la date de cette ordonnance. L'hospitalisation complète du patient est alors maintenue jusqu'à la décision du juge.

L'article L.3213-3 I. du code de la santé publique mentionne que dans le mois qui suit l'admission en soins psychiatriques décidée en application du présent chapitre ou résultant de la décision mentionnée à l'article 706-135 du code de procédure pénale et ensuite au moins tous les mois, la personne malade est examinée par un psychiatre de l'établissement d'accueil qui établit un certificat médical circonstancié confirmant ou infirmant, s'il y a lieu, les observations contenues dans les précédents certificats et précisant les caractéristiques de l'évolution des troubles ayant justifié les soins ou leur disparition. Ce certificat précise si la forme de la prise en charge du malade décidée en application de l'article L. 3211-2-1 du présent code demeure adaptée et, le cas échéant, en propose une nouvelle. Lorsqu'il ne peut être procédé à l'examen du patient, le psychiatre de l'établissement établit un avis médical sur la base du dossier médical du patient.

Il résulte du II de l'article L.3211-12 et du III de l'article L.3211-12-1 du code de la santé publique que, lorsque la personne fait l'objet d'une mesure de soins ordonnée en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale, à la suite d'un classement sans suite, d'une décision d'irresponsabilité pénale, prise notamment sur le fondement du 1er alinéa de l'article 122-1 du code pénal, concernant des faits punis d'au moins 5 ans d'emprisonnement en cas d'atteinte aux personnes ou d'au moins 10 ans en cas d'atteinte aux biens, le juge des libertés et de la détention ne peut statuer qu'après avoir recueilli l'avis du collège mentionné à l'article L.3211-9, et qu'il ne peut, en outre, décider de la mainlevée de la mesure qu'après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l'article L.3213-5-1 (n'appartenant pas à l'établissement d'accueil).

En l'espèce, il ressort des éléments communiqués que, dès l'âge de 8 ans, [U] [G] a manifesté des troubles du comportement, ayant necessité la prise d'un traitement psychiatrique, lesquels ont été aggravés à l'adolescence par une consommation de toxiques (alcool, stupéfiants), et qu'il a été hospitalisé, en milieu spécialisé, à de très nombreuses reprises, dès l'âge de 12 ans.

Les faits du 31 août 2015, sus-rappelés, ont été commis dans un contexte de dissociation psychotique alors qu'il était, déjà, en soins psychiatriques, ayant été diagnostiqué schizophrène (comme sa mère), avec des traits de personnalité dyssociale.

A l'époque de la procédure pénale dont il a fait l'objet, ayant abouti à une déclaration d'irresponsabilité pénale, sa dangerosité était qualifiée, par les experts psychiatres, de majeure, et nécessitait son maintien en établissement psychiatrique.

Plus de 7 ans après, les certificats et avis médicaux présents au dossier font état, depuis plusieurs mois, d'une absence de tableau psychiatrique décompensé, au point qu'un allégement de sa mesure d'hospitalisation sous contrainte et que l'établissement d'un projet de sortie ont commencé à être envisagés, certes de manière très progressive, et pas assez avancée d'après la personne hospitalisée et son conseil.

M. [G] souhaite une levée de la mesure de soins psychiatriques sans consentement dont il fait l'objet, de manière à basculer vers un régime libre, se disant conscient d'avoir besoin de soins et être prêt à poursuivre, de lui-même, son hospitalisation.

Si un tel discours se veut rassurant, il ne saurait, bien évidemment, à lui seul, suffire, pour se convaincre du bien-fondé de sa requête.

A cet égard,

le corps médical est unanime pour dire, qu'à l'heure actuelle, la levée de la mesure d'hospitalisation sous contrainte ne peut toujours pas s'envisager, sauf à faire naître un risque de passage à l'acte élevé.

Les professionnels assurant, au quotidien, la prise en charge de M. [G] expliquent qu'il éprouve encore de sérieuses difficultés à supporter la frustration, les contrariétés, et à gérer son impulsivité et son impatience, ce qui engendre des problèmes relationnels, que ce soit avec les autres patients ou l'équipe de soins.

La diminution récente de son traitement, certes non imputable à l'intéressé, a conduit rapidement, d'après sa curatrice, à une aggravation de ses troubles du comportement, sans compter qu'il lui arrive toujours, notamment dans un cadre familial, dès lors peu équilibrant, de recourir à une consommation de toxiques, ce qui, à l'évidence, n'est pas compatible avec sa problématique de santé et ne peut que l'impacter négativement.

D'une manière générale, il est indiqué que M. [G] a besoin d'un cadre particulièrement contraignant et ritualisé à défaut de quoi il peut vite, dès qu'il accède à davantage de liberté, retomber dans ses 'travers' et manifester un comportement agressif et opposant.

Par ailleurs, il convient d'accueillir avec prudence l'attestation de son père, évoquant, notamment, l'existence de progrès et d'un soutien familial, eu égard, notamment, aux graves carences éducatives dont M. [G] a été victime dès sa plus jeune enfance.

Dès lors, compte tenu du potentiel de dangerosité dont reste porteur M. [G], personne souffrant de troubles mentaux susceptibles de compromettre la sûreté des personnes ou de porter gravement atteinte à l'ordre public, et de l'absence de garanties suffisantes entourant sa capacité à respecter un cadre non contraint,

il apparaît prématuré, en l'état de sa situation, d'ordonner la mainlevée immédiate de sa mesure d'hospitalisation complète sans consentement.

Il convient, dès lors, de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention de Chambéry du 18 octobre 2022, sans qu'il ne soit nécessaire d'ordonner une double expertise psychiatrique de M. [G], tant il apparaît indiscutable, à travers les éléments médicaux de la procédure, que son état de santé mentale commande toujours le maintien d'une hospitalisation sous contrainte.

Il apparait difficile, en l'état, de donner une échéance à M. [G] quant à des perspectives d'évolution, tant celles-ci dépendent de divers facteurs, principalement des fluctuations de son état clinique, sur lesquels les différents professionnels n'ont que peu de maitrise.

Par ailleurs, il pourrait être judicieux qu'il effectue, dans la limite de ses facultés, et à supposer que cela n'ait pas déjà été engagé, un réel travail avec ses soignants, autour de la question de la sexualité, au regard de son vécu traumatique, pour le mettre en lien, le cas échéant, avec son passage à l'acte, dans un souci d'atténuation de sa dangerosité criminologique.

PAR CES MOTIFS

Nous, Isabelle CHUILON, conseillère à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par ordonnance de Madame la Première Présidente, statuant par ordonnance contradictoire, après débats tenus en audience publique, au siège de ladite Cour d'Appel, assistée de Sophie MESSA, greffière,

Déclarons recevable l'appel de M. [U] [G],

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Chambéry du 18 octobre 2022,

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public,

Disons que la notification de la présente ordonnance sera faite sans délai, par tout moyen permettant d'établir la réception, conformément aux dispositions de l'article R.3211-22 du code de la santé publique.

Ainsi prononcé le 27 octobre 2022 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Isabelle CHUILON, conseillère à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par Madame la première présidente et Madame Sophie MESSA, greffière.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 22/00170
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;22.00170 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award