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27/10/2022 | FRANCE | N°20/00060

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 27 octobre 2022, 20/00060


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY







2ème Chambre



Arrêt du Jeudi 27 Octobre 2022



N° RG 20/00060 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GMPA



Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ANNECY en date du 14 Novembre 2019, RG 15/01103



Appelants



M. [T] [O]

né le [Date naissance 2] 1967 à REDRUTH (GRANDE BRETAGNE), demeurant [Adresse 3]



Mme [K] [V]

née le [Date naissance 1] 1966 à PRESTATYN (GRANDE BRETAGNE), demeurant [Adresse 4]



Rep

résentés par la SELARL CHAMBET NICOLAS, avocat plaidant au barreau d'ANNECY et la SELARL AUFFRET DE PEYRELONGUE, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX



Intimée



CAISSE REGIONAL...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 27 Octobre 2022

N° RG 20/00060 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GMPA

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ANNECY en date du 14 Novembre 2019, RG 15/01103

Appelants

M. [T] [O]

né le [Date naissance 2] 1967 à REDRUTH (GRANDE BRETAGNE), demeurant [Adresse 3]

Mme [K] [V]

née le [Date naissance 1] 1966 à PRESTATYN (GRANDE BRETAGNE), demeurant [Adresse 4]

Représentés par la SELARL CHAMBET NICOLAS, avocat plaidant au barreau d'ANNECY et la SELARL AUFFRET DE PEYRELONGUE, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX

Intimée

CAISSE REGIONAL DU CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE dont le siège social est sis [Adresse 5] prise en la personne de son représentant légal

Représentée par la SCP CABINET DENARIE BUTTIN PERRIER GAUDIN, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELARL BERNASCONI-ROZET-MONNET SUETY-FOREST, avocat plaidant au barreau d'AIN

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 13 septembre 2022 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,

Et lors du délibéré, par :

- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte notarié du 5 juillet 2000, la société caisse de crédit agricole des Savoie (aujourd'hui société Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel des Savoie, ci-après la société CRCAM) a consenti à M. [T] [O] et Mme [K] [V] un prêt en devises d'un montant de 1 835 000 francs suisses, soit une contre-valeur de 1 170 094,05 euros, remboursable à un taux révisable calculé par application du taux de la devise obtenu par la caisse nationale de crédit agricole sur le marché des changes à Paris + 1.2 points sur une durée de 25 ans, par échéances trimestrielles, la première au plus tard le 5 octobre 2000 et la dernière au plus tard le 05 juillet 2025.

Par ordonnance du 15 janvier 2015, le juge des référés du tribunal d'instance de Nantua a ordonner la suspension de l'obligation de remboursement de Mme [K] [V] pour une durée de 12 mois à compter du 1er avril 2014.

Par courrier du 22 mai 2015, la déchéance du terme a été prononcée à l'égard de M. [T] [O]. Par courrier du 8 avril 2016, la déchéance du terme était prononcée à l'égard de Mme [K] [V].

Pensant l'offre de prêt entachée d'irrégularité M. [T] [O] et Mme [K] [V] ont, par acte du 9 juin 2015, assigné la société CRCAM aux fins de voir annuler la déchéance du terme et la clause de stipulation d'intérêts et aux fins d'indemnisation.

Par jugement contradictoire du 14 novembre 2019, le tribunal de grande instance d'Annecy a :

- déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de nullité des stipulations d'intérêts conventionnels et de déchéance du droit aux intérêts,

- rejeté l'ensemble des autres demandes formées par M. [T] [O] et Mme [K] [V],

- dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire de la présente décision,

- condamné in solidum M. [T] [O] et Mme [K] [V] aux entiers dépens distraits au profit de la selarl Bernasconi.

Par déclaration du 13 janvier 2020, M. [T] [O] et Mme [K] [V] ont interjeté appel du jugement.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique 1er juillet 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [T] [O] et Mme [K] [V] demandent à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en ce qu'il :

- les a déboutés de leur demande d'annulation de la déchéance du terme prononcée par la société caisse de crédit agricole des Savoie en exécution du prêt du 5 juillet 2010,

- a déclaré prescrite leur action à l'encontre de la société caisse de crédit agricole des Savoie tendant à voir annuler la clause de stipulation d'intérêts contenue dans le prêt du 5 juillet 2010 pour avoir fait usage de l'année bancaire, et la faire condamner au paiement de la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts pour défaut d'information en ayant pratiqué un taux d'appel,

en conséquence,

- annuler la décision de déchéance du terme prononcée par la société caisse de crédit agricole des Savoie le 22 mai 2015,

- condamner la société caisse de crédit agricole des Savoie à leur verser à chacun une somme de 25 000 euros en réparation du préjudice moral,

subsidiairement, sur la déchéance du terme,

- condamner la société caisse de crédit agricole des Savoie au paiement des sommes réclamées aux termes du commandement de payer valant saisie immobilière soit la somme de 1 084 424.91 euros à titre de dommages et intérêts en réparation en raison de la mise en oeuvre de sa responsabilité,

très subsidiairement,

- condamner la société caisse de crédit agricole des Savoie à leur payer la somme de 517 770 à parfaire, à titre dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

sur les intérêts,

- prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts conventionnels et ordonner la substitution du taux légal de l'année du prêt (2.74%) au taux d'intérêt conventionnel (4.350%) et ordonner l'imputation des intérêts indûment perçus jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir, déduction faite des intérêts légaux alors échus, sur le capital restant dû,

- fixer le montant du capital restant dû,

- enjoindre sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant le prononcé de l'arrêt à intervenir, la société caisse de crédit agricole des Savoie de produire un nouvel échéancier prenant en compte la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel de l'année du prêt,

- subsidiairement, le prêteur sera déchu de l'intégralité des intérêts conventionnels,

en tout état de cause,

- condamner la société caisse de crédit agricole des Savoie à payer à chacun des concluants la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la même aux entiers dépens.

Par ordonnance en date du 14 octobre 2021, le conseiller chargé de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la société Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel des Savoie, irrecevabilité s'étendant aux pièces produites à l'appui, à l'exception des pièces produites en première instance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 04 juillet 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'annulation de la déchéance du terme et la demande d'indemnisation subséquente

L'article L. 312-12 du code de la consommation dans sa version applicable à la date du de la conclusion du contrat (devenu aujourd'hui l'article L. 314-20) dispose : 'L'exécution des obligations du débiteur peut être, notamment en cas de licenciement, suspendue par ordonnance du juge d'instance dans les conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil. L'ordonnance peut décider que, durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiront point intérêt.

En outre, le juge peut déterminer dans son ordonnance les modalités de paiement des sommes qui seront exigibles au terme du délai de suspension, sans que le dernier versement puisse excéder de plus de deux ans le terme initialement prévu pour le remboursement du prêt ; il peut cependant surseoir à statuer sur ces modalités jusqu'au terme du délai de suspension'.

Il est constant que la seule co-emprunteuse, Mme [K] [V], a obtenu en référé le 15 janvier 2015 la suspension de ses obligations de remboursement relatives au prêt litigieux pour une période de 12 mois à compter du 1er avril 2014. A cette date, selon les propres écritures de la débitrice, il existait un arriéré représentant un montant de 47 366,63 euros (conclusions p.4). L'ordonnance de référé ne prévoit pas de modalités particulières de paiement des sommes dues au terme du délai de suspension (pièce appelant n°4).

Il convient de relever que, dans ce cas, la première échéance exigible après la suspension est celle qui aurait dû être payée à la date de suspension, le terme du prêt étant reporté d'une durée égale à celle de la suspension. La banque ne pouvait donc pas exiger immédiatement le paiement des sommes venues à échéance pendant la suspension. Elle pouvait, en revanche, exiger d'une part, le paiement de l'arriéré et, d'autre part, le paiement d'une échéance en avril 2015, représentant l'échéance qui aurait dû être payée en avril 2014.

Par ailleurs, l'article L. 312-22 du code de la consommation, dans sa version applicable au contrat litigieux, dispose que : 'en cas de défaillance de l'emprunteur (....) lorsque le prêteur est amené à demander la résolution du contrat, il peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, ainsi que le paiement des intérêts échus'.

En l'espèce, par courrier du 26 mars 2015, le conseil de Mme [K] [V] faisait savoir à la banque qu'elle souhaitait rembourser l'arriéré du prêt, sollicitait la production d'un décompte et précisait avoir besoin d'une attestation en vue du déblocage de son troisième pilier (pièce n°8).

Par courrier du 30 mars 2015, la banque indiquait à Mme [K] [V] que l'arriéré, pour le prêt, s'élevait à la somme de 40 646,12 euros, outre un arriéré au titre d'un compte de dépôt. Elle indiquait également le montant de l'échéance d'avril 2015 (21 722,89 CHF), date à laquelle le prêt reprenait son cours et prenait bonne note de l'intention de la débitrice de régulariser sa situation avant la fin du mois d'avril 2015 (pièce appelant n°5). Il ne saurait s'en déduire une quelconque intention de la banque d'accorder un délai supplémentaire, au delà de la fin avril.

Il en résulte que, à la reprise des obligations de remboursement début avril 2015, Mme [K] [V] et M. [T] [O] étaient redevables, d'une part, de l'arriéré et, d'autre part, de l'échéance d'avril 2014, reportée en avril 2015. Or, selon le décompte produit par les emprunteurs (pièce n°31) sont impayées les échéances d'avril, juillet et octobre 2014 ainsi que les quatre échéances de l'année 2015, outre les deux premières de 2016.

Selon le même décompte, un paiement de 10 000 CHF est intervenu le 8 avril 2015 et un autre de 9 339,23 CHF le 13 mai 2015. Mme [K] [V] prétend par ailleurs avoir réglé une somme de 37 718,25 CHF le 24 avril 2015. Toutefois, elle produit un avis de virement de la société SwissLife du 28 avril 2015 de ce montant mais sur son propre compte, sans verser de pièce démontrant que cette somme a servi, ensuite, au paiement de sa dette envers la société CRCAM (pièce appelant n°23).

A supposer même que ce virement ait, en définitive, bénéficié à la banque, la cour observe qu'au début du mois d'avril les emprunteurs étaient redevables d'une somme globale de 60 748,67 CHF (échéance d'avril 2014 reportée en avril 2015 de 17 380,30 CHF outre 696,31 CHF d'intérêts + 40 646,12 euros d'arriérés soit, au cours d'avril 2015 de 1,04 CHF pour 1 euro, 42 271,96 CHF).

Or, ils ne se seraient acquittés que de la somme globale de 57 057,48 CHF.

Par conséquent c'est à bon droit que la société CRCAM a pu prononcer la déchéance du terme sans commettre d'abus, étant entendu que l'arriéré dont il est question a été constitué à compter du mois de juillet 2013 et que si Mme [K] [V] travaillait à Londres et Amsterdam au moment de l'envoi de l'avis de déchéance du terme, il lui appartenait soit de communiquer ses nouvelles adresses à la banque, soit de faire en sorte que son courrier puisse lui parvenir.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de la déchéance du terme et la demande d'indemnisation subséquente.

Sur la responsabilité de la banque quant à la déchéance du terme

M. [T] [O] et Mme [K] [V] reprochent à la banque d'avoir commis une faute en prononçant de manière abusive la déchéance du terme, les exposant ainsi à une procédure de saisie immobilière hautement préjudiciable, préjudice dont ils demandent réparation à hauteur de 1 084 424,91 euros.

Toutefois, comme cela a été relevé ci-dessus, la déchéance du terme telle qu'elle a été prononcée ne relève d'aucune faute, ni d'aucun comportement abusif de la banque laquelle a simplement constaté qu'à la fin du mois d'avril 2015 la situation d'impayé n'était toujours pas entièrement régularisée.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts pour faute de la banque dans le prononcé de la déchéance du terme.

Sur la responsabilité de la banque

L'article 2224 du code civil, dans sa version en vigueur depuis le 19 juin 2008, précise que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce le contrat litigieux a été conclu le 5 juillet 2000 indique clairement la nature du prêt 'prêt en devises' (p.2) remboursable en francs suisses comme l'indique la mention relative au montant théorique de la première échéance '30 192 CHF'. Ainsi, M. [T] [O] et Mme [K] [V] qui reconnaissent eux-mêmes dans leurs écritures que le remboursement était prévu en devises, étaient en mesure de connaître dès la souscription du prêt les causes de l'action en responsabilité.

La réforme de la prescription, opérée par la loi du 17 juin 2008, a réduit le délai de 10 à 5 ans. Selon l'article 26-II de cette loi, les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Il en résulte que M. [T] [O] et Mme [K] [V] avaient jusqu'au mois de juillet 2010 pour agir en responsabilité contre la banque sur le fondement qu'ils invoquent.

En conséquence, M. [T] [O] et Mme [K] [V] seront déclarés irrecevables en leur demande de condamnation de la société CRCAM à leur payer une somme de 517 770 euros à titre de dommages et intérêts présentée à titre 'très subsidiaire'.

Pour le surplus la cour observe que M. [T] [O] et Mme [K] [V] développent dans leurs conclusions des arguments relatifs au caractère abusif de la clause relative au risque de change, sur le manquement de la banque à son obligation d'information et de conseil, sans en tirer aucune conséquence particulière dans le dispositif.

Sur les irrégularités de l'offre de prêt tirés de l'obligation de remboursement en devises

- Sur la prescription

M. [T] [O] et Mme [K] [V] précisent avoir découvert, le 18 mars 2015, que l'offre du prêt litigieux était entachée d'irrégularités dans le TEG et la base de calcul des intérêts, ils en déduisent que le délai de prescription pour agir en nullité a commencé à courir à cette date, de sorte qu'au temps de l'assignation du 9 juin 2015 leur action n'était pas prescrite.

L'article 2224 du code civil, dans sa version en vigueur depuis le 19 juin 2008, précise que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce, M. [T] [O] et Mme [K] [V] excipent notamment de la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels au motif que le TEG stipulé n'intégrerait pas tous les frais inhérents au prêt. En particulier, alors que le prêt indique que le TEG s'entend comme comprenant les frais de notaire, l'analyse financière révélerait qu'en réalité les frais liés à la publication des sûretés prises par la banque n'étaient pas inclus dans le calcul. Les emprunteurs précisent également que le TEG est calculé sur la base d'une année de 360 jours sans que cela n'ait été précisé dans le contrat.

Il convient de relever que :

- ni l'offre de prêt, ni l'acte de prêt notarié ne mentionnent que le calcul des intérêts et donc du TEG prend pour base une année de 360 jours, dite 'année lombarde',

- l'offre de prêt indique un TEG de 4,454 % l'an, précision faite de ce que 'ce taux est à compléter par le notaire en fonction des tarifs des frais d'actes en vigueur au jour de la signature de l'acte', tandis que l'acte de prêt précise un TEG de 4,554 % l'an 'frais de notaire inclus'.

Dès lors, les erreurs revendiquées par les emprunteurs affectant potentiellement le TEG ne sont en effet pas décelables à la simple lecture de l'offre et du contrat de prêt contrairement à l'appréciation du tribunal. Il convient donc de retenir que ces erreurs ont pu leur être révélées à l'occasion du rapport d'analyse financière qu'ils ont sollicité, soit le 18 mars 2015. Il en résulte que l'action intentée en juin 2015 n'était pas prescrite.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et de déchéance du droit aux intérêts.

- Sur le fond

- Sur la demande de nullité de la stipulation des intérêts

Il est constant en jurisprudence (par exemple cass. civ 1., 2 juin 2021, n°19-22.853), qu'en cas d'erreur de TEG, la seule sanction applicable est la déchéance du droit aux intérêts à l'exclusion de la nullité de la stipulation conventionnelle des intérêts.

En conséquence, M. [T] [O] et Mme [K] [V] seront déboutés de leur demande en nullité de la clause de stipulation d'intérêts conventionnels, en substitution du taux légal de l'année du prêt au taux d'intérêt conventionnel, d'imputation des intérêts indûment perçus jusqu'à la date du jugement, de fixation du montant du capital restant dû et d'injonction sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8 ème jour suivant de production d'un nouvel échéancier prenant en compte la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel de l'année du prêt.

- Sur la déchéance du droit aux intérêts

Il convient de relever que l'emprunteur qui conteste la stipulation d'intérêts doit démontrer l'existence des erreurs, notamment que les intérêts ont été calculés sur la base d'une année de 360 jours et que ce calcul a généré à son détriment une erreur supérieure à la décimale.

En l'espèce, M. [T] [O] et Mme [K] [V] appuient leur démonstration sur deux rapports d'analyse financière qui n'ont pas été réalisés au contradictoire de la société CRCAM. Le premier de ces rapports (pièce appelant n°7) conclut que le TEG est de 4,354 % alors que la banque a affiché un TEG de 4,440 %. Le second, produit uniquement en cause d'appel (pièce appelant n°24) conclut, pour sa part, que le TEG réel est de 5,4 % alors que celui indiqué par le prêteur est de 4,354 %, 'soit 4,4 % (après arrondi au dixième)'.

Il en résulte qu'en présentant deux rapports aboutissant à des conclusions différentes quant à la différence de TEG supérieure ou inférieure à la décimale, M. [T] [O] et Mme [K] [V] échouent dans la preuve qui leur incombe à démontrer l'existence d'une erreur de TEG supérieure à la décimale.

En conséquence, M. [T] [O] et Mme [K] [V] seront déboutés de leur demande relative à la déchéance du droit aux intérêts.

Sur les dépens et la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

M. [T] [O] et Mme [K] [V] qui succombent seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile. Ils seront corrélativement déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme n'en remplissant pas les conditions d'octroi.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Réforme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau sur le tout pour plus de clarté,

Déboute M. [T] [O] et Mme [K] [V] de leur demande d'annulation de la déchéance du terme et de la demande d'indemnisation subséquente,

Déboute M. [T] [O] et Mme [K] [V] de leur demande subsidiaire de dommages et intérêts fondée sur le prononcé de la déchéance du terme,

Dit irrecevable comme prescrite la demande présentée à titre très subsidiaire de dommages et intérêts fondée sur le remboursement en devise du prêt,

Dit recevable les demandes de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et de déchéance du droit aux intérêts et des demandes subséquentes,

Déboute M. [T] [O] et Mme [K] [V] de leurs demandes au titre de la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels, de la déchéance du droit aux intérêts et des demandes subséquentes,

Condamne in solidum M. [T] [O] et Mme [K] [V] aux dépens de première instance et d'appel,

Déboute M. [T] [O] et Mme [K] [V] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 27 octobre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/00060
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;20.00060 ?
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