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06/10/2022 | FRANCE | N°21/00145

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 06 octobre 2022, 21/00145


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY







2ème Chambre



Arrêt du Jeudi 06 Octobre 2022





N° RG 21/00145 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GTLW



Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALBERTVILLE en date du 25 Juin 2020, RG 1119000340



Appelante



Mme [R] [B], demeurant [Adresse 2]



Représentée par Me Séverine DERONZIER, avocat au barreau de CHAMBERY



Intimée



S.C.I. DES REMPARTS DE CONFLANS, dont le siège social est

sis [Adresse 1] prise en la personne de son représentant légal



Représentée par la SELARL PADZUNASS SALVISBERG & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'ALBERTVILLE



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COMPO...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 06 Octobre 2022

N° RG 21/00145 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GTLW

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALBERTVILLE en date du 25 Juin 2020, RG 1119000340

Appelante

Mme [R] [B], demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Séverine DERONZIER, avocat au barreau de CHAMBERY

Intimée

S.C.I. DES REMPARTS DE CONFLANS, dont le siège social est sis [Adresse 1] prise en la personne de son représentant légal

Représentée par la SELARL PADZUNASS SALVISBERG & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'ALBERTVILLE

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, le 28 juin 2022 par Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller qui a entendu les plaidoiries, en présence de Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller, avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,

Et lors du délibéré, par :

- Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseillère faisant fonction de Présidente,

- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, qui a rendu compte des plaidoiries

- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

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EXPOSÉ DU LITIGE

Selon bail verbal Mme [R] [B] louait, auprès de M. [O] [M], depuis 1966, un logement n°103 dans une maison située [Adresse 3] et composée de plusieurs appartements. La location comprenait l'appartement lui-même (92 mètres carrés) un garage et un atelier. La bail était conclu sous le régime de la loi du 1er septembre 1948.

Les dépenses d'eau et d'électricité étaient directement payées par Mme [R] [B] dans la mesure où les appartements étaient équipés de compteurs individuels.

Par acte du 26 décembre 2013, M. [M] [O] a vendu le bien immobilier à la SCI Des Remparts de Conflans. Le 6 décembre 2014, Mme [R] [B] mettait un terme au contrat de bail en ce qui concerne l'atelier.

Un contentieux naissait alors au sujet du montant des charges et du loyer. Mme [R] [B] prétendait en effet que le loyer de 549 euros se décomposait comme suit :

- 365 euros pour l'appartement et le garage,

- 74 euros pour l'atelier,

- 110 euros de provisions sur charges.

La SCI Des Remparts de Conflans estimait pour sa part que le loyer se décomposait comme suit :

- 365 euros pour l'appartement,

- 46 euros pour le garage,

- 28 euros pour l'atelier,

- 110 euros de charges provisionnelles (comprenant le chauffage et la taxe sur les ordures ménagères).

Par acte du 4 septembre 2018, Madame [B] a alors assigné la SCI Des Remparts de Conflans en restitution des sommes trop payées. Le 30 septembre 2019, en cours de procédure, elle quittait le logement.

Par jugement contradictoire du 25 juin 2020, le tribunal judiciaire d'Albertville a :

- condamné la SCI Des Remparts de Conflans à payer à Mme [R] [B] la somme de 2 208 euros au titre des loyers trop perçus de janvier 2015 à septembre 2019,

- condamné la SCI Des Remparts de Conflans à payer à Mme [R] [B] la somme de 185,05 euros au titre des régularisations de charges des années 2014 à 2019,

- débouté Mme [R] [B] de sa demande au titre du préjudice de jouissance,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la SCI Des Remparts de Conflans à payer à Mme [R] [B] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI Des Remparts de Conflans aux dépens de l'instance.

Par déclaration du 27 janvier 2021, Mme [R] [B] a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 27 avril 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, Mme [R] [B] demande à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondé son appel,

- réformer le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

sur le loyer de l'atelier,

- dire et juger qu'il n'est pas contesté par les parties qu'elle a résilié le bail de l'atelier à effet au 31 décembre 2014,

- condamner la SCI Des Remparts de Conflans à lui rembourser la somme de 74 euros trop perçu en janvier 2015 au titre du loyer de l'atelier,

sur le trop-perçu au titre de l'augmentation des loyers,

- dire et juger que la SCI Des Remparts de Conflans ne justifie pas avoir respecté les conditions fixées par la loi du 1er août 1948 pour procéder à l'augmentation des loyers,

- dire et juger que cette augmentation du prix du loyer s'est faite de manière unilatérale, sans son accord,

- dire et que juger qu'elle a réglé à tort une somme de 46 euros par mois, de septembre 2015 à septembre 2019,

- condamner la SCI Des Remparts de Conflans à lui payer la somme de 2 254 euros au titre du trop-perçu en raison d'une augmentation injustifiée du prix du loyer,

sur la régularisation de charges,

- dire et juger que le montant des charges réelles justifiées par la SCI Des Remparts de Conflans sont inférieures au montant des provisions versées,

- condamner la SCI Des Remparts de Conflans au paiement de la somme de 6 854,51 euros se décomposant comme suit :

- 575,64 euros au titre des factures d'eau froide

- 610,68 euros au titre des provisions sur charges trop perçues en 2014

- 1 035,22 euros au titre des provisions sur charges trop perçues en 2015

- 1 055,22 euros au titre des provisions sur charges trop perçues en 2016

- 1 267,75 euros au titre des provisions sur charges trop perçues en 2017

- 1 320 euros au titre des provisions sur charges trop perçues en 2018

- 990 euros au titre des provisions sur charges trop perçues en 2019

sur le préjudice de jouissance,

- réformer le jugement entrepris,

- condamner la SCI Des Remparts de Conflans au paiement de la somme de 365 euros au titre du préjudice de jouissance subi au mois de mars 2019,

sur les autres demandes,

- condamner la SCI Des Remparts de Conflans au paiement d'une indemnité de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner la SCI Des Remparts de Conflans au paiement d'une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

En réplique, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 26 juillet 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SCI Des Remparts de Conflans demande à la cour de :

- débouter Mme [B] de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Mme [B] de sa demande au titre du préjudice de jouissance,

reconventionnellement,

- dire et juger que la SCI Des Remparts de Conflans n'a procédé à aucune augmentation de loyers et charges durant la durée du bail,

- dire et juger que la SCI Des Remparts de Conflans justifie le montant des charges réclamées pour les années 2014 à 2019,

- dire et juger irrecevable la demande nouvelle formée par Mme [B] au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive,

en conséquence,

- condamner Mme [B] à lui verser la somme de 294 euros au titre de l'arriéré de loyers et charges dû de février à août 2015,

- débouter Mme [B] de sa demande au titre des provisions sur charges trop perçues de 2014 à 2019 à hauteur de 6 854,51 euros,

- débouter la même de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 3 000 euros pour résistance abusive,

- condamner Mme [B] à payer à la SCI Des Remparts de Conflans la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

L'article 564 du code de procédure civile dispose que, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Selon l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

L'article 566 du code de procédure civile prévoit pour sa part que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

La cour observe qu'aucune demande de dommages et intérêts pour résistance abusive n'a été formée en première instance par Mme [R] [B]. Or, une telle demande ne peut pas être considérée comme étant née de l'intervention d'un tiers, de la survenance ou de la révélation d'un fait. Elle n'a pas pour objet d'opposer compensation ou de faire écarter les prétentions adverses. Elle ne tend pas aux mêmes fins que les demandes présentées en première instance (restitution de trop perçu de charges et de loyer et indemnisation d'un préjudice de jouissance et des frais irrépétibles). Enfin, une telle demande ne peut pas être analysée comme constituant l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des demandes soulevées en première instance.

En conséquence, la cour dira irrecevable la demande de Mme [R] [B] en condamnation de la SCI Des Remparts de Conflans à des dommages et intérêts pour résistance abusive.

Sur le trop perçu de loyers

Mme [R] [B] estime, sur la foi d'une quittance dont elle dit qu'elle a été établie par le précédent propriétaire que son loyer était de 549 euros par mois, soit 365 euros pour l'appartement et le garage, 74 euros pour l'atelier et 110 euros de provision sur charges. Elle estime avoir payé en trop la somme de 74 euros en janvier 2015 dans la mesure où le bail sur l'atelier avait pris fin le 31 décembre 2014.

Elle précise qu'ensuite la SCI Des Remparts de Conflans a augmenté le loyer à la somme de 521 euros, à compter du mois de septembre 2015, soit 46 euros d'augmentation. Elle prétend que, ce faisant, la SCI Des Remparts de Conflans n'a pas respecté les conditions d'augmentation de loyer prévues par la loi du 1er août 1948. Elle indique qu'en conséquence elle a payé en trop la somme de 46 euros par mois de septembre 2015 à septembre 2019, date de son départ.

La SCI Des Remparts de Conflans expose pour sa part que, le montant de 549 euros dont Mme [R] [B] s'acquittait jusqu'en décembre 2014 représentait 110 euros de provision sur charges, 365 euros de loyer pour l'appartement, 46 euros de loyer pour le garage et 28 euros de loyer pour l'atelier. Elle reconnaît ainsi un trop perçu de 28 euros seulement en janvier 2015. Elle conteste toute augmentation de loyer expliquant que la somme de 521 euros réclamée à compter de janvier 2015 représentait 110 euros de charges, 46 euros pour le garage et 365 euros pour l'appartement.

La cour relève que les seules pièces sur lesquelles elle peut forger sa décision sont:

- une quittance de loyer de décembre 2013 produite par Mme [R] [B] (pièce 2) laquelle, à en-tête du précédent propriétaire, n'est pas signée et qui ne mentionne pas dans la liste des locaux occupés le garage ; elle indique 'loyer 365.00" avec une mention manuscrite indiquant 'y compris garage' / 'atelier 74.00"/ 'charges 110.00" / 'total 549.00 euros' ;

- un courriel du fils de Mme [R] [B] adressé à M. [Z] versé par la SCI Des Remparts de Conflans (pièce 25 également produite par la locataire en pièce 5), indiquant 'montant mensuel appartement + garage :(365.00€ +46.00€) = 411.00€ par mois'.

Il est notable que ce courriel concerne la période de l'année 2015, soit un moment où la location ne comprend plus l'atelier. De ce point de vue la quittance qui date de 2013 ne peut plus servir de référence. Il ressort clairement du courriel du fils de la locataire que, depuis 2015, le loyer est bien de 365 euros pour l'appartement et de 46 euros pour le garage outre 110 euros de provisions sur charges dont le montant n'est pas discuté. Un tel montant est en contradiction avec l'affirmation de Mme [R] [B] selon laquelle elle a payé la somme de 475 euros (365 +110) de février à août 2015 (conclusions p.6), puis 521 euros à partir de septembre 2015.

Au regard de ces éléments, la cour considère que le loyer et les provisions pour charges ont représenté à compter du mois de janvier 2015, une somme de 521 euros (365 + 46 + 110). Il en résulte que le loyer n'a pas souffert l'augmentation illicite dénoncée par la locataire. Il n'est pas contesté que Mme [R] [B] a réglé :

- pour le mois de janvier 2015, la somme de 549 euros au lieu de 521 euros, soit un trop perçu de 28 euros pour le propriétaire,

- pour les mois de février à août 2015, la somme de 475 euros par mois au lieu de 521 euros, générant une créance de 322 euros en faveur du bailleur,

- pour les mois de septembre 2015 à septembre 2019, la somme de 521 euros par mois.

Mme [R] [B] se trouve donc débitrice envers la SCI Des Remparts de Conflans d'une somme de 294 euros (322-28 = 294) au paiement de laquelle elle sera condamnée.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la SCI Des Remparts de Conflans à payer à Mme [R] [B] la somme de 2 208 euros au titre de loyers trop perçus de janvier 2015 à septembre 2019. Mme [R] [B] sera déboutée de sa demande à ce titre et reconnue débitrice envers la SCI Des Remparts de Conflans de la somme de 294 euros.

Sur le trop perçu de charges

Il est constant que le bail litigieux relève du régime de la loi du 1er août 1948. Selon l'article 38 de ce texte, les locataires ou occupants sont tenus, en sus du loyer principal, au remboursement des charges locatives définies à l'article 23 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, dans les conditions prévues à cet article. Celui-ci dispose notamment que : 'Les charges récupérables, sommes accessoires au loyer principal, sont exigibles sur justification en contrepartie :

1° Des services rendus liés à l'usage des différents éléments de la chose louée ;

2° Des dépenses d'entretien courant et des menues réparations sur les éléments d'usage commun de la chose louée (...) ;

3° Des impositions qui correspondent à des services dont le locataire profite directement (...).

Les charges locatives peuvent donner lieu au versement de provisions et doivent, en ce cas, faire l'objet d'une régularisation annuelle'.

Il est constant en jurisprudence que si le bailleur ne justifie pas du montant des charges récupérables, le locataire peut solliciter le remboursement des provisions qu'il a réglées. Il n'est pas discuté qu'entre janvier 2014 et septembre 2019, Mme [R] [B] s'est acquittée d'un montant mensuel de 110 euros de provision sur charges, soit 7 590 euros (69 x 110). Elle s'est également acquittée en 2015 d'un montant de 856 euros à titre de régularisation. Elle a donc, au total, payé des charges à hauteur de 8 446 euros sur cette période.

- Sur la consommation d'eau froide réchauffée pour le chauffage

Il convient de relever que la demande de la SCI Des Remparts de Conflans s'appuie sur des tableaux élaborés par ses soins pour les années de 2014 à 2017 incluses (pièces n°8 à 10). Toutefois, ces documents ne mentionnent ni le compteur d'eau objet de la facturation, ni le nombre de mètres cubes concernés qui aurait permis de voir si la consommation facturée était en cohérence avec les seuls besoins en eau froide nécessités par la mise en fonctionnement de la chaudière. En conséquence la SCI Des Remparts de Conflans ne justifie pas du montant des charges récupérables sur ce poste et doit être considérée comme ayant imputé, à tort, une somme totale de 597,48 euros à Mme [R] [B] de ce chef. Aucune justification n'est en outre versée pour les années 2018 et 2019.

- Sur l'entretien de la chaudière

Comme l'a justement relevé le premier juge, les travaux entrepris par la SCI Des Remparts de Conflans ne doivent pas avoir d'incidence sur la répartition des charges. En effet, celle-ci ne démontre pas avoir conclu avec Mme [R] [B] un avenant modifiant la quote-part de chacun des locataires. Le bailleur a donc unilatéralement modifié l'économie générale du contrat en laissant Mme [R] [B] seule utilisatrice d'une chaudière devenue surdimensionnée pour l'usage qui en était désormais fait. La répartition des charges liées à l'entretien de la chaudière doit donc se faire sur la répartition initiale c'est-à-dire, comme la locataire le reconnaît elle-même dans ses écritures (p2) aux tantièmes des surfaces. A ce titre l'appartement de Mme [R] [B] est de 92 mètres carrés sur 427 mètres carrés au total, soit 21,54%.

Mme [R] [B] reconnaît que sont justifiées à son égard sur ce poste les charges suivantes : 56,88 euros en 2014, 75,07 euros en 2015 et 52,25 euros en 2017.

Toujours sur la base de documents établis par ses soins, la SCI Des Remparts de Conflans précise que ce poste s'est élevé à la somme de 539 euros en 2014 et 2015 (pièce 5), 280,50 euros en 2016 (pièce 6) et 313,55 euros en 2017 (pièce 7). Elle a ainsi imputé au proprata des 92 mètres carrés occupés par Mme [R] [B] les sommes de 166,96 euros pour 2014/2015, 86,29 euros pour 2016 et 313,55 euros pour 2017 (100 % du montant), soit un total de 566,80 euros. Par application de la répartition aux tantièmes ci-dessus retenue, la locataire aurait dû se voir retenir sur ce poste les sommes de 127,73 euros pour 2014/2015, 60,41 euros pour 2016 et 67,53 euros pour 2017. Aucune justification n'est fournie pour les années 2018 et 2019. Il en résulte que sur ce poste de charge Mme [R] [B] doit donc une somme de 255,67 euros.

- Sur la taxe sur les ordures ménagères

Mme [R] [B] reconnaît, comme justifiées, les sommes de 135,10 euros pour l'année 2014 et 123,80 pour l'année 2015. La SCI Des Remparts de Conflans, toujours sur la base de documents rédigés par elle-même (pièces 12 à 15) estime que sa locataire lui doit les sommes de 135,10 euros pour 2014, 123,30 euros pour 2015, 123,28 euros pour 2016 et 104,52 euros pour 2017.

Il convient de retenir la somme de 135,10 euros pour 2014 sur laquelle les parties s'accordent, celle de 123,80 euros pour l'année 2015, dont la locataire se reconnaît débitrice et qui est, à 50 centimes près, celle revendiquée par le bailleur. Pour les années suivantes, la SCI Des Remparts de Conflans ne fournit aucun justificatif. En conséquence, il convient de dire que Mme [R] [B] est débitrice pour ce poste d'une somme de 258,90 euros.

- Sur la consommation de gaz

Mme [R] [B] reconnaît comme justifiées, et donc se reconnaît débitrice pour ce poste de charges des sommes suivantes : 517,34 euros en 2014, 941,91 euros en 2015, 264,78 en 2016. Elle précise que pour les années 2017 à 2019, aucune dépense en gaz n'est justifiée par le bailleur. De son côté, la SCI Des Remparts de Conflans revendique un calcul sur la base des seuls mètres carrés chauffés au gaz mais ne fournit que les mêmes types de documents établis par elle-même à titre de justificatif. Elle estime ainsi les charges dues pour ce poste à 769,38 euros en 2014, 1 068,16 euros en 2015, 483,17 euros en 2016 et 485,34 en 2017 (où la locataire restait la seule à bénéficier d'un chauffage au gaz).

Il ressort des pièces du dossier que la surface totale chauffée au gaz jusqu'en 2017 était de 287 mètres carrés dont 92 étaient occupés par Mme [R] [B], soit 32,06 %. S'agissant des années 2014 à 2016, la locataire précise avoir eu les justificatifs mais ne prend pas la même base de calcul que celle du bailleur. Au regard des chiffres de consommation proposés par ce dernier pour les trois années pour lesquelles la locataire reconnaît avoir eu les justificatifs, et par application du pourcentage défini plus haut, il convient de retenir les sommes suivante : 769,45 euros pour 2014, 1 105,52 euros pour 2015 et 391,63 pour 2016 (déduction faite, pour le total général, de la somme de 285,72 euros correspondant à juillet 2015 et qui est déjà comptée dans le total de 2015). Les autres années doivent être considérées comme non justifiées.

En conséquence, il convient de dire que Mme [R] [B] est débitrice pour ce poste d'une somme de 2 266,60 euros.

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, sur les années concernées, les charges justifiées à l'encontre de Mme [R] [B] représentent un total de 2781,17 euros (255,67 +258,90+2 266,60). Comme relevé ci-dessus, elle a réglé, au titre des provisions sur charges et d'un régularisation une somme totale de 8 446 euros. Il en résulte que la SCI Des Remparts de Conflans devrait lui restituer une somme de 5 664,83 euros dont elle sera reconnue débitrice envers elle.

Sur la compensation

Aux termes de l'article 1289 ancien du code civil, applicable au contrat litigieux, lorsque deux personnes se trouvent débitrices l'une envers l'autre, il s'opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes. L'article 1290 ancien du même code expose, pour sa part, que la compensation s'opère de plein droit par la seule force de la loi, même à l'insu des débiteurs ; les deux dettes s'éteignent réciproquement, à l'instant où elles se trouvent exister à la fois, jusqu'à concurrence de leurs quotités respectives.

En l'espèce Mme [R] [B] est débitrice envers la SCI Des Remparts de Conflans de la somme 294 euros tandis que celle-ci est débitrice envers elle d'une somme de 5 664,83 euros euros. En conséquence, il convient d'ordonner la compensation entre ces sommes et de condamner la SCI Des Remparts de Conflans à payer à Mme [R] [B] la somme de 5 370,83 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance

Mme [R] [B] se plaint d'avoir été victime d'une fuite d'eau, immédiatement signalée à son bailleur et qui n'aurait été réparée que 3 semaines plus tard, le 25 mars 2019. Elle dit qu'en l'absence d'eau, elle a dû quitter l'appartement pour trouver refuge chez sa fille et demande l'indemnisation à hauteur d'un mois de loyer (365 euros) en réparation de son préjudice de jouissance. Elle ajoute que la fuite a fait perdre un mètre cube d'eau, dépense que le propriétaire devrait conserver à sa charge. Toutefois, elle ne formule aucune demande de condamnation à ce titre.

Mme [R] [B] ne verse aux débats que des courriels de son fils adressés au gérant de la SCI Des Remparts de Conflans (pièce 21) :

- en date du 5 mars 2019 signalant une fuite sur l'alimentation d'eau froide située dans le plafond de la cave et le fait que l'eau chaude n'arrive plus aux robinets ;

- en date du 10 mars 2019 précisant que sa mère était partie dans la famille pour laisser le temps d'effectuer les travaux ;

- en date du 18 mars 2019 par lequel il dit avoir constaté le retour de l'eau chaude aux robinets mais que la fuite de la cave n'était pas réparée.

Elle joint en outre la réponse du 19 mars 2019 du gérant précisant qu'il envoie quelqu'un et que la fuite se situe a priori sur une évacuation en non sur une alimentation.

La SCI Des Remparts de Conflans relève qu'aucun élément ne contraignait la locataire à quitter le domicile et prétend avoir réagi tout de suite dans la mesure où un plombier s'est rendu sur place pour régler le problème de l'eau chaude, ce que reconnaît le fils de la locataire dans son message du 18 mars 2019. Elle ajoute qu'une nouvelle intervention a eu lieu le 25 mars 2019 ayant mis fin la fuite d'eau et que les problèmes signalés ont donc été réglés en 20 jours.

Il résulte de ce qui précède que Mme [R] [B] ne démontre pas, sur la base des éléments fournis, la réalité du préjudice de jouissance qu'elle invoque. En particulier, la nécessité pour elle de quitter les lieux, à supposer exact qu'elle soit partie, n'est pas établie. C'est à bon droit que le premier juge l'a déboutée de sa demande à ce titre. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la SCI Des Remparts de Conflans qui succombe en principal sera tenue aux dépens de première instance et d'appel et corrélativement déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme n'en remplissant pas les conditions d'octroi.

Il n'est pas inéquitable de lui faire supporter par ailleurs partie des frais irrépétibles exposés par Mme [R] [B] en première instance et en appel. Elle sera condamnée à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Dit irrecevable la demande de Mme [R] [B] en condamnation de la SCI Des Remparts de Conflans à des dommages et intérêts pour résistance abusive,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [R] [B] de sa demande au titre du préjudice de jouissance,

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la SCI Des Remparts de Conflans à payer à Mme [R] [B] la somme de 2 208 euros au titre de loyers trop perçus de janvier 2015 à septembre 2019,

Statuant à nouveau sur ce point,

Déboute Mme [R] [B] de ses demandes,

Dit que Mme [R] [B] est débitrice envers la SCI Des Remparts de Conflans d'une somme de 294 euros,

Réforme le jugement déféré pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Dit que la SCI Des Remparts de Conflans est débitrice envers Mme [R] [B] d'une somme de 5 664,83 euros,

Ordonne la compensation entre les sommes de 294 euros et de 5 770,74 euros,

Condamne la SCI Des Remparts de Conflans à payer à Mme [R] [B] la somme de 5 370,83 euros,

Condamne la SCI Des Remparts de Conflans aux dépens de première instance et d'appel,

Déboute la SCI Des Remparts de Conflans de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCI Des Remparts de Conflans à payer à Mme [R] [B] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.

Ainsi prononcé publiquement le 06 octobre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller en remplacement de la Présidente légalement empêchée et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La GreffièreP/La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/00145
Date de la décision : 06/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-06;21.00145 ?
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