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28/06/2022 | FRANCE | N°20/00708

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 28 juin 2022, 20/00708


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY





Chambre civile - Première section



Arrêt du Mardi 28 Juin 2022





N° RG 20/00708 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GPDX



Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALBERTVILLE en date du 15 Mai 2020, RG 18/01007





Appelant



Syndicat des copropriétaires LES SITELLES représenté par son syndic la régie Rosier dont le siège social est situé 12, Rue Lieutenant-Colonel Prevost - 69009 LYON



Représenté par Me Michel FILLA

RD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY

Représenté par la SELARL BERGER AVOCATS ET ASSOCIES, avocats plaidants au barreau de LYON









Intimée



S.A.S. MM...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile - Première section

Arrêt du Mardi 28 Juin 2022

N° RG 20/00708 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GPDX

Décision attaquée : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALBERTVILLE en date du 15 Mai 2020, RG 18/01007

Appelant

Syndicat des copropriétaires LES SITELLES représenté par son syndic la régie Rosier dont le siège social est situé 12, Rue Lieutenant-Colonel Prevost - 69009 LYON

Représenté par Me Michel FILLARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY

Représenté par la SELARL BERGER AVOCATS ET ASSOCIES, avocats plaidants au barreau de LYON

Intimée

S.A.S. MMV, dont le siège social est situé 51 Avenue France d'Outremer - 06700 SAINT LAURENT DU VAR

Représentée par Me Anne-marie LAZZARIMA, avocat postulant au barreau d'ALBERTVILLE

Représentée par la SELARL ASKESIS, avocats plaidants au barreau de GRASSE

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, le 07 juin 2022 par M. Michel FICAGNA, Président de Chambre, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseiller, avec l'assistance de Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

- M. Michel FICAGNA, Président,

- Mme Alyette FOUCHARD, Conseiller,

- Madame Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Il a été procédé au rapport.

La société MMV, exploitante de la résidence de tourisme dénommée Les Sitelles située à La Plagne-Montalbert 73210 Longefoy a donné congé en sa qualité de preneuse, à l'ensemble des propriétaires-bailleurs un congé avec effet au 12 janvier 2018.

Une assemblée générale s'est tenue le 24 avril 2017, au cours de laquelle ont notamment été votés :

- une résolution concernant le montant du budget prévisionnel pour l'exercice du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018 à hauteur de 19 925 € (résolution n°11) en vue de la reprise de la gestion des parties communes,

- une résolution donnant mandat aux conseils de la copropriété aux fins de préserver ses droits à l'égard du groupe MMV et engager toutes actions judiciaires à cet effet (résolution n° 14.1 et 14.2).

Par acte du 31 juillet 2017, la société MMV, également propriétaire de divers lots au sein de la copropriété, a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Les Sitelles devant le tribunal de grande instance d' Albertville, aux fins d'annulation de ces deux résolutions.

Aux termes d'un assemblée du 23 avril 2018, les copropriétaires ont voté une résolution n° 13 ainsi libellée :

Résolution

l'assemblée générale , après avoir délibéré , approuve les honoraires des conseils juridiques suivants concernant les démarches entreprises avec MMV :

- cabinet Nexen avocat : 31 740 euros

- cabinet La Finance Humaniste : 84 554 euros

sous réserve qu'une remise de 15 % soit effectuée par le cabinet Nexen que par le cabinet La Finance Humaniste.'

Par acte du 7 août 2018, la société MMV a assigné le syndicat des copropriétaires en annulation de cette résolution.

Par jugement du 15 mai 2020, le tribunal judiciaire d'Albertville a :

- débouté la société MMV de sa demande de communication de pièces,

- annulé la résolution n° 13 de l'assemblée générale du syndicat des copropriétaires,

- condamné le syndicat des copropriétaires à payer à la demanderesse la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Les syndicat des copropriétaires Les Sitelles, a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions n° 2, il demande à la cour :

- de réformer le jugement du tribunal de grande instance d'Albertville du 15 mai 2020 et, statuant a nouveau,

A titre liminaire,

- de dire et juger que la résolution n° 13 de l'assemblée générale du 23 avril 2018 valable,

- de dire et juger que les demandes, fins et prétentions de la société MMV ne sont pas fondées,

- de débouter en conséquence la société MMV de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions, tendant notamment à l'annulation de cette résolution et à l'octroi d'une somme au titre de l'article 700 code de procédure civile,

- de condamner la société MMV à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Les Sitelles, représenté par son syndic la régie Rosier, la somme de 7 000 € au titre de l'article 700 code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Me Fillard, avocat au barreau de Chambéry, sur son affirmation de droit,

- de confirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Albertville du 15 mai 2020 pour le surplus de ses dispositions.

Il soutient :

- qu'une résolution ne peut être annulée pour abus de majorité que s'il est établi qu'elle est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu'elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires,

- qu'en l'espèce, l'intégralité de la copropriété est exploitée en résidence de tourisme dans le cadre de baux commerciaux tous détenus par la société MMV,

- que tous les copropriétaires se sont trouvés à l'arrivée du terme du bail dans une situation strictement identique sans exception aucune,

- que la résolution s'inscrivait dès lors dans le cadre de la poursuite de l'intérêt collectif,

- que le règlement de copropriété mentionne que l'immeuble est à destination de ' village vacances avec des services et des équipements communs ainsi que des prestations touristiques au bénéfice d'une clientèle touristique,

- qu'il existe un lien direct entre son exploitation et son mode d'administration,

- que la remise en cause des baux a eu pour conséquence de remettre en cause la destination même du bail,

- que la question du devenir de la Résidence et donc les frais de conseil afférents relève assurément de l'intérêt de la copropriété mais également de l'intérêt collectif des copropriétaires,

- que la société MMV a admis cet point de vue lors des assemblées générales de juin 2016 et de janvier 2017, et du fait de son acceptation de négocier avec le conseil des copropriétaires, et ce qu'elle n'a pas contesté lors de l'assemblée générale du 8 janvier 2018.

Aux termes de ses conclusions d'intimée du 23 décembre 2020, la société MMV demande à la cour :

Vu les articles 10-1 et 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis,

- de confirmer le jugement du tribunal judiciaire d'Albertville du 15 mai 2020 en ce qu'il a annulé la résolution n° 13 de l'assemblée générale du 23 avril 2018,

- dispensé la société MMV de toutes participation à la dépense commune des frais de procédure,

- de débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Les Sittelles de l'ensemble de ses demandes,

- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Les Sittelles à payer à MMV la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de maître Anne-marie Lazzarima.

Elle soutient :

- que constitue un abus de majorité toute décision prise dans le cadre des pouvoirs de l'assemblée générale mais allant à l'encontre de l'intérêt collectif ou prise dans un intérêt autre que l'intérêt collectif,

- que le tribunal a caractérisé l'abus en ce qu'il consiste à faire payer au syndicat des copropriétaires les honoraires de conseils correspondant à la négociation des baux commerciaux conclus avec certains copropriétaires,

- que la difficulté vient de ce que les intérêts en présence ont toujours été traités collectivement du fait de la signature par l'ensemble des copropriétaires de baux avec l'exploitant entretenant ainsi l'illusion que les intérêts de la copropriété et ceux des copropriétaires bailleurs étaient les mêmes , ce qui n'est pas le cas,

- que si l'on peut admettre que le syndicat des copropriétaires ait pris conseil sur le devenir de l'immeuble, la négociation des baux sur les parties privatives n'entre pas dans son objet, ni dans on budget,

- que le syndicat des copropriétaires ne saurait avoir la charge financière d'honoraires qui ne seraient pas liés à la conservation de l'immeuble ou à l'administration des parties communes.

MOTIFS

Sur la demande d'annulation de la résolution n° 13

Il sera rappelé que cette résolution est la suivante :

'l'assemblée générale , après avoir délibéré , approuve les honoraires des  conseils juridiques suivants concernant les démarches entreprises avec MMV :

- cabinet Nexen avocat : 31 740 euros

- cabinet La Finance Humaniste : 84 554 euros

sous réserve qu'une remise de 15 % soit effectuée par le cabinet Nexen que par le cabinet La Finance Humaniste.'

Il est soutenu que cette résolution a trait à une question ne relevant pas des pouvoirs de l'assemblée générale.

Or , il est admis par les parties que les honoraires des conseils rémunèrent leur action dans l'intérêts de la copropriété.

En effet, la copropriété est à destination de résidence de tourisme ce qui a impliqué pour tous les copropriétaires un mode d'exploitation fondé sur la gestion de la résidence par un exploitant et le fait de destiner certains lots pour l'usage des touristes .

Cet mode d'exploitation est expressément mentionné au règlement de copropriété qui indique que la destination de l'immeuble est à usage de 'village de vacance'.

Le règlement prévoit à cet égard des dispositions très spécifiques avec à l'origine, cession à l'exploitant de nombreux lots pour l'euro symbolique : bureau, local, studios, discothèque, bar, restaurant, salle de spectacle et en outre la mise à disposition gratuite de nombreux espaces relevant des parties communes.

Le règlement prévoit également qu'à la fin du bail, l'exploitante s'oblige à rétrocéder ses lots soit au nouvel exploitant soit au syndicat des copropriétaires , 'pour le cas où à l'unanimité desdits copropriétaires la destination de l'immeuble aurait été modifiée et les autorisations administratives et réglementaires obtenues'.

Il apparaît ainsi que le syndicat des copropriétaires se devait de négocier avec la société MMV exploitante et copropriétaire laquelle avait donné congé, dans le but de décider de l'avenir de la résidence : poursuite de l'exploitation sous le mode de résidence de tourisme avec la société MMV ou un autre exploitant ou changement de destination de la résidence avec recueil de l'unanimité, dont la société MMV, copropriétaire...

Ainsi, les honoraires de conseils dans le but de parvenir à une solution pour l'avenir de la résidence impliquait des négociation sur les clauses des baux .

Le paiement de ces honoraires n'était donc nullement contraire à l'intérêt collectif.

Il sera relevé ainsi que le rappel le syndicat des copropriétaires que cette problématique a été évoquée en assemblée générale dès 2016, puisqu'une résolution a été adoptée à l'unanimité lors de l'assemblée générale du 27 juin, avec le libellé suivant :

' l'assemblée générale décide de demander l'aide de conseils ( juridique, gestion immobilière...) le choix de ceux-ci pour l'organisation du devenir de la résidence, se fera en concertation avec le conseil syndical . vote pour ce faire un budget de 20 000 euros .'

La société MMV n'a pas contesté cette résolution.

Courant 2017, lors de l'assemblée générale du 2 janvier 2017, il a été mentionné :

'Lors de la dernière assemblée générale une première présentation avait été effectuée de la situation reliant juridiquement la copropriété et MMV ainsi qu'un point technique sur l'état de la résidence et une étude du contexte économique. Les copropriétaires confirment avoir refusé le nouveau bail présenté par MMV allant jusqu'à 35 % de réduction du loyer figurant dans le bail actuel et assorti d'une enveloppe de travaux de 2 000 000 d'euros à la seule charge des propriétaires à laquelle s'ajoute 770 000 euros répartis à parts égales entre les propriétaires et MMV, MMV a refusé jusqu'à présent de modifier sa position. Néanmoins, eu égard à la bonne gestion passée de MMV, les copropriétaires et groupe MMV, restent d'accord pour poursuivre leur collaboration. MMV demande cette fois aux copropriétaires de construire une contre-proposition à l'aide de professionnels...'

Ainsi la société MMV est mal venue de venir contester l'intervention de professionnels dont elle a elle-même souhaité un temps l'intervention pour faire aboutir une solution globale portant tant sur les loyers des baux commerciaux que sur les investissements lourds à réaliser.

Il apparaît que la conservation de l'immeuble à tout le moins sa destination telle qu'imposée au règlement de copropriété (sauf unanimité...) ainsi que l'administration des parties communes, étaient en cause.

En conséquence, il n'apparaît pas que l'assemblée générale a dépassé les pouvoirs qu'elle tient de loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 en adoptant la résolution litigieuse fixant le montant des honoraires de conseillers juridiques dont l'intervention avait été prévue par une résolution définitive et approuvée par les copropriétaires dont la société MMV elle-même en 2016.

Le jugement sera dès lors réformé et la société MMV sera déboutée de ses demandes.

Sur les frais irrépétibles

Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, "la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie".

En l'espèce les dépens doivent incomber à la société MMV.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Réformant le jugement déféré et statuant de nouveau,

Déboute la société MMV de sa demande d'annulation de la résolution n° 13 de l'assemblée générale du 23 avril 2018,

Rejette les autres demandes,

Condamne la société MMV à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Sitelles, la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société MMV aux dépens de première instance et d'appel, distraits au profit de Me Fillard, avocat au barreau de Chambéry, sur son affirmation de droit, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 28 juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Michel FICAGNA, Président et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/00708
Date de la décision : 28/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-28;20.00708 ?
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