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25/05/2022 | FRANCE | N°20/00850

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 25 mai 2022, 20/00850


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY







2ème Chambre



Arrêt du Mercredi 25 Mai 2022



N° RG 20/00850 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GPUO



Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALBERTVILLE en date du 10 Juillet 2020, RG 19/00850



Appelante



La Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Agricoles de Rhône Alpes Auvergne - GROUPAMA RHONE ALPES AUVERGNE dont le siège social est sis 50 rue de Saint Cyr - 69251 LYON CEDEX 09

prise en la personne de son représen

tant légal



Représentée par la SCP GIRARD-MADOUX & ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY



Intimés



M. [J] [W], demeurant 223 rue Pierre Mauroy...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Mercredi 25 Mai 2022

N° RG 20/00850 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GPUO

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ALBERTVILLE en date du 10 Juillet 2020, RG 19/00850

Appelante

La Caisse Régionale d'Assurances Mutuelles Agricoles de Rhône Alpes Auvergne - GROUPAMA RHONE ALPES AUVERGNE dont le siège social est sis 50 rue de Saint Cyr - 69251 LYON CEDEX 09

prise en la personne de son représentant légal

Représentée par la SCP GIRARD-MADOUX & ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY

Intimés

M. [J] [W], demeurant 223 rue Pierre Mauroy - 59000 LILLE

Représenté par Me Stéphanie BAUDOT, avocat postulant au barreau d'ALBERTVILLE et la SELARL ADEKWA - SOCIÉTÉ D'AVOCATS, avocat plaidant au barreau de LILLE

S.C.A. EAU ET CHALEUR EN HAUTE MONTAGNE (ECHM), dont le siège social est sis 2 Avenue des Canuts - 69120 VAUX EN VELIN

prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Christian ASSIER de l'AARPI ASSIER & SALAUN, avocat postulant au barreau d'ALBERTVILLE et la SCP DUCROT ASSOCIÉS DPA, avocat plaidant au barreau de LYON

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 08 février 2022 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,

Et lors du délibéré, par :

- Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [J] [W] est propriétaire d'un chalet situé sur la commune de La Plagne, dans une copropriété dénommée 'Ensemble des chalets des moniteurs', qu'il occupe ponctuellement et qu'il loue de manière saisonnière.

Ce chalet est assuré auprès de Groupama Rhône-Alpes Auvergne.

Toutes les canalisations d'eaux -potable avant compteur, usées et pluviales- passent sous le chalet.

Le service public de l'eau est géré par la SCA Eau et Chaleur en Haute-Montagne (ECHM).

A la mi-janvier 2016, cette société a détecté une fuite d'eau conséquente (plus de 71 m3 en trois jours, soit en moyenne presque 1m3 par heure) la conduisant :

- d'une part, à fermer le branchement en eau potable du chalet pour supprimer la fuite,

- d'autre part, à réaliser un branchement provisoire par voie aérienne.

Les travaux aux fins de rétablissement du branchement initial ont débuté le 26 octobre 2016.

Il a alors été découvert, en sus de l'effondrement du réseau d'alimentation en eau potable, l'existence sous le chalet d'une cavité importante, provoquée par la dissolution du gypse présent dans le sol, et le désemboitement des canalisations d'eaux usées et pluviales.

Le 21 novembre 2016, le maire de la commune de La Plagne a :

- d'une part, pris un arrêté déclarant l'état de péril du bâtiment auquel il a interdit l'accès,

- d'autre part, saisi le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble aux fins de désignation d'un expert aux fins d'apprécier l'existence d'un péril imminent et de proposer les mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril. Mme [U], désignée par ordonnance du 22 novembre 2016, a rendu son rapport le 28 novembre 2016.

Saisi par M. [W], le juge des référés du tribunal de grande instance d'Albertville a également confié une expertise à Mme [U] aux fins d'apprécier essentiellement la cause des désordres et le coût des travaux de remise en état du chalet, ce par ordonnances du 11 avril 2017 et du 19 septembre 2017.

Les opérations d'expertise se sont déroulées au contradictoire de M. [W], de Groupama, de la société ECHM, du syndicat de la copropriété 'Ensemble des chalets des moniteurs' et de la commune de La Plagne.

Mme [U] a rendu son rapport le 26 mars 2019.

Le 24 juin 2019, le maire de La Plagne a pris un arrêté portant interdiction d'habiter le chalet et d'y accéder tant que la sécurité de ses occupants ne serait pas assurée.

Par actes du 26 juillet 2019, M. [W] a fait citer Groupama et la société ECHM devant le tribunal de grande instance d'Albertville aux fins d'être indemnisé de ses préjudices.

Il a durant l'instance fait réaliser à ses frais les travaux préconisés par l'expert, si bien que par arrêté du 10 mars 2020, le maire de La Plagne a, sur la base des pièces et attestations remises par la société Alpes Réalisations Coordination, ordonné la main-levée de l'interdiction d'habiter le chalet et d'y accéder.

Par jugement du 10 juillet 2020, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire d'Albertville a :

- rejeté les demandes formées à l'encontre de la société ECHM,

- condamné Groupama à payer à M. [W] les dommages-intérêts suivants, le surplus de ses demandes indemnitaires étant rejetées :

. 48 125,40 euros au titre du préjudice matériel,

. 29 150 euros au titre du préjudice immatériel,

- condamné Groupama aux entiers dépens comprenant les frais de l'expertise judiciaire, avec distraction au profit de Me Christian Assier,

- condamné Groupama à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté la demande présentée par la société ECHM sur le fondement de ce texte.

Par déclaration du 30 juillet 2020, Groupama a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes du dispositif des conclusions qu'elle a notifiées par voie électronique le 9 avril 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien des prétentions, Groupama demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de :

' à titre principal, déclarer mal fondées les demandes formées à son encontre par M. [W] et le débouter de l'intégralité de ses demandes,

' subsidiairement,

- limiter le préjudice réclamé par M. [W] et le fixer dans de plus justes proportions, en particulier au titre de son préjudice matériel qui ne saurait excéder la somme de 27 894,35 euros, ainsi que pour la perte de revenus locatifs qui ne saurait excéder la somme de 21 550 euros, et sur le préjudice de jouissance qui ne saurait excéder 8 000 euros, dans la limite d'un an conformément aux stipulations contractuelles,

- débouter M. [W] de sa demande de remboursement de la taxe foncière 2017 et 2018 à hauteur de 1 463 euros,

- débouter M. [W] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

' en tout état de cause,

- condamner la société ECHM à la relever et garantir de toutes condamnations pouvant intervenir à son encontre,

- condamner M. [W] ou qui mieux le devra :

. aux entiers dépens,

. à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes du dispositif des conclusions qu'elle a notifiées par voie électronique le 18 janvier 2021 , auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien des prétentions, la société ECHM demande à la cour de :

- à titre principal, confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté toute demande présentée à son encontre,

- à titre subsidiaire, limiter toute indemnisation accordée à M. [W] aux montants strictement retenus par l'expert judiciaire, et les réduire d'autant que les responsabilités sont partagées,

- en toute hypothèse, condamner Groupama ou qui mieux le devra :

. aux entiers dépens, distraits au profit de Me Christian Assier,

. à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes du dispositif des conclusions qu'il a notifiées par voie électronique le 18 mai 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens développés au soutien des prétentions, M. [W] demande à la cour de :

' confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné Groupama :

- à le garantir des conséquences des désordres survenus dans son chalet selon les termes des conditions générales produites par lui,

- à lui verser la somme de 5 164,50 euros TTC au titre des travaux de reprise des réseaux et celle de 19 718,05 euros TTC au titre des travaux d'urgence,

- à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- aux entiers dépens,

' infirmer le jugement dont appel en ce qu'il :

- l'a débouté de ses demandes à l'encontre de la société ECHM,

- a réduit son préjudice matériel au titre des travaux de réaménagement du rez de chaussée du chalet à la somme de 22 729,85 euros,

- l'a débouté de sa demande au titre des frais de maîtrise d'oeuvre,

- a limité son préjudice immatériel à une année soit 21 150 euros et son trouble de jouissance à 8 000 euros,

' statuant à nouveau,

- juger que le tribunal judiciaire d'Albertville n'a pas statué ultra petita et que l'augmentation de ses demandes chiffrées ne constituent pas des demandes nouvelles en cause d'appel,

- juger la société ECHM responsable aux côtés de Groupama sur le fondement de l'article 1242 alinéa 1 du code civil qui institue une présomption de responsabilité du gardien, la société ECHM ne rapportant pas la preuve d'un cas fortuit, de force majeure ou d'une cause étrangère qui ne lui soit pas imputable,

- fixer à la somme de 30 116,35 euros les travaux de réfection au rez de chaussée du chalet sinistré,

- juger nécessaire la prise en compte de frais de maîtrise d'oeuvre à hauteur de 4 514,05 euros,

- fixer la perte de revenus locatifs à la somme de 75 425 euros,

- fixer son trouble de jouissance à la somme de 28 000 euros,

en conséquence, modifiant le jugement déféré,

- condamner in solidum Groupama et la société ECHM à lui payer les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 26 juillet 2019 :

. 5 164,50 euros TTC au titre des travaux de reprise des réseaux,

. 19 718,05 euros TTC au titre des travaux d'urgence,

. 30 116,35 euros au titre des travaux de remise en état du chalet,

. 4 514,05 euros au titre des frais de maîtrise d'oeuvre,

- condamner in solidum Groupama et la société ECHM à lui payer :

. 21 550 euros au titre de la perte de revenus locatifs,

. 8 000 euros au titre de la perte de jouissance,

- condamner pour le surplus la société ECHM à lui payer :

. 53 875 euros au titre de la perte de revenus locatifs,

. 20 000 euros au titre de la perte de jouissance,

- condamner in solidum Groupama et la société ECHM :

. aux dépens de l'appel,

. à lui payer la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La clôture est intervenue le 24 janvier 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les éléments techniques du litige

Tous les techniciens intervenus dans ce dossier, qu'il s'agisse de Mme [G] [X], des sapiteurs qu'elle s'est adjoint ou des experts qui ont assisté la société ECHM, s'accordent sur le fait que le dommage a pour origine des eaux venues de l'intérieur du chalet qui ont dissous le gypse du sous-sol et ont contribué à la création de la cavité qui a fragilisé le bâtiment.

Compte tenu de la forme de la cavité sous le chalet, tous les techniciens intervenus dans ce dossier estiment qu'elle s'est créée sous l'effet d'une grande quantité d'eau sous pression.Toutefois, cette déduction doit être relativisée car elle n'est compatible avec aucune des causes envisageables du sinistre, qu'elles soient considérées isolément ou même ensemble.

Aucun dégât des eaux n'a été observé à l'intérieur du chalet et aucune fuite sur les éléments d'équipement, notamment les sanitaires de ce chalet, n'a été relevée par quiconque, ne serait-ce qu'indirectement par l'observation d'une consommation anormale d'eau.

Par ailleurs, lorsque pour les besoins du rétablissement du branchement initial en eau potable, la société ECHM a créé une trémie dans le dallage, elle n'a relevé aucune humidité particulière sur celui'ci.

En conséquence, les eaux à l'origine du dommage n'ont pu venir, compte tenu de la configuration des lieux, que des canalisations d'eaux sises dans le sous-sol qui avaient été installées il y a environ 50 / 60 ans.

S'agissant de la canalisation unitaire d'eaux pluviales et d'eaux usées, elle était en fonte, matériau qui peut rester en place pendant environ 100 ans. Il a été constaté qu'elle ne présentait aucune rupture, ni aucun trou et aucune observation n'a été faite sur sa conception.

Elle était toutefois désemboitée. Si aucun des éléments du dossier, notamment pas le rapport d'expertise de Mme [U], ne permet de déterminer quand, pour quelles raisons, et de quelle manière le désemboitement de cette canalisation s'est produit, il a néanmoins été relevé que :

- la cavité sous le chalet était propre et ne contenait pas de déchet organique,

- aucun événement climatique particulier n'était survenu, étant rappelé que les eaux pluviales sont intermittentes.

Il peut raisonnablement être déduit de ces éléments que le désemboitement de cette canalisation ne s'est pas produit, sous l'effet de la circulation des eaux pluviales ou usées.

S'agissant de la canalisation d'eau potable avant compteur, elle était en acier et était installée dans une gaine en ciment.

L'acier est un matériau qui n'est plus utilisé et dont la durée est de l'ordre de 60 ans, si bien qu'en l'espèce, la question du renouvellement de cette canalisation se posait ou allait se poser lors de la détection de la fuite d'eau en janvier 2016. Par ailleurs, elle présentait des coudes qui constituent des zones de fragilité favorisant la corrosion, l'un d'entre eux se situant juste au niveau de l'effet de 'tourbillon' sur la paroi de gypse.

Il a été constaté que cette canalisation en acier était oxydée à l'intérieur, mais également à l'extérieur, ce qui signifie qu'elle n'était pas étanche. Ce défaut d'étanchéité, entraînant une circulation d'eau à l'extérieur de la canalisation en acier et à l'intérieur de la gaine en ciment, est d'ailleurs confirmé par la présence de terre et de graviers fins dans cette gaine.

Sur les responsabilités

La responsabilité de la société ECHM est recherchée sur fondement de l'ancien article 1384 ou de l'actuel article 1242 du code civil aux termes desquels on est responsable du dommage causé par le fait des choses que l'on a sous sa garde.

Il est certain en l'espèce que la société ECHM avait la garde de la canalisation d'eau potable avant compteur, passant sous le chalet de M. [W].

Elle ne peut être déclarée responsable que si cette canalisation, chose inerte, a été l'instrument, du dommage affectant la propriété de M. [W], en raison notamment de son mauvais état ou de sa position anormale.

Or, il résulte des éléments techniques du litige rappelés ci-dessus que cette canalisation présentait des défectuosités ayant entraîné sa cassure au droit du point le plus bas de la cavité. Le mauvais état de la canalisation d'eau potable avant compteur doit donc être retenu comme étant à l'origine du sinistre.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement déféré sur ce point et de retenir que la responsabilité de la société ECHM est engagée.

La société ECHM évoque dans le dispositif de ses conclusions, un partage de responsabilité avec M. [W]. Il lui appartient en conséquence de démontrer que celui-ci a commis une faute qui a contribué à la survenance du sinistre et de son dommage.

Elle évoque une faute d'entretien de la canalisation d'eaux usées et d'eaux pluviales à l'origine de fuites ayant contribué au creusement de la cavité.

Cette faute d'entretien n'est toutefois pas établie et ne peut pas être déduite des constatations effectuées sur cette canalisation.

Au regard de l'ensemble des éléments décrits ci-dessus, la responsabilité du sinistre subi par M. [W] doit être mise intégralement à la charge de la société ECHM.

Sur l'exécution du contrat d'assurance liant M. [W] à Groupama

Le 23 janvier 1997, M. [W] a souscrit auprès de Groupama un contrat multi-option des chefs de famille, garantissant son chalet notamment contre les dégâts des eaux.

Les conditions générales de ce contrat sont produites à la fois par M. [W], sous la référence MOD.3046, et par Groupama, sous la référence MO.03. Ces conditions générales étant différentes, c'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le premier juge a décidé d'appliquer les conditions générales produites par M. [W], solution qui n'est pas discutée en cause d'appel par Groupama.

A l'article 11 des conditions générales produites par M. [W], intitulé 'Obligations de l'assuré', il est stipulé que l'assuré :

- s'engage à entretenir en bon état de service notamment les conduites et appareils dont il a la charge,

- doit, en cas d'inhabitation soit totale soit partielle des locaux ou arrêt du chauffage, interrompre la circulation d'eau, vidanger et purger les conduites et radiateurs.

Il est précisé qu'en cas de sinistre résultant de l'inobservation de ces prescriptions, Groupama aura droit à une indemnité proportionnée au préjudice qui en sera résulté pour elle.

Ainsi que l'a justement observé le premier juge, cette clause ne contient aucune exclusion de garantie.

Par ailleurs, quand bien même M. [W] n'aurait pas coupé l'eau en janvier 2016, alors que son chalet était inoccupé, force est de constater que le sinistre dont il demande la prise en charge est sans lien de causalité avec le défaut d'interruption de circulation de l'eau.

Enfin, il résulte de ce qui précède qu'aucun défaut d'entretien de la canalisation des eaux usées et des eaux pluviales ne peut être imputé à M. [W], étant au surplus observé que Groupama ne demande pas l'application de la règle de la proportionnalité stipulée par l'article 11 des conditions générales du contrat.

En conséquence, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu que Groupama devait garantir le sinistre subi par M. [W].

Sur les préjudices de M. [W]

A titre liminaire, il convient de constater que dans le dispositif de leurs conclusions, ni la société ECHM, ni la société Groupama ne soulèvent l'irrecevabilité de certaines demandes de M. [W] au motif qu'elles seraient nouvelles en cause d'appel, fin de non-recevoir que la cour n'a pas l'obligation et n'entend pas soulever d'office.

Toutes les demandes indemnitaires de M. [W] doivent donc être examinées.

' Sur les préjudices matériels

Ils sont justifiés et non contestés à hauteur de :

- 19 718,05 euros, somme correspondant aux travaux d'urgence que M. [W] a fait réaliser,

- 5 164,50 euros, somme correspondant aux travaux de reprise des réseaux.

Sur les frais de réaménagement du rez-de-chaussée du chalet

En se fondant sur le devis soumis à Mme [U], M. [W] réclame la somme de 30 116,35 euros.

Toutefois, ainsi que l'a parfaitement expliqué Mme [U] dans son rapport et que l'a justement retenu le premier juge, certains postes de ce devis sont sans lien de causalité avec le sinistre. Il en est ainsi de la mise aux normes de l'électricité, de la réfection du carrelage du salon, pièce non affectée par le sinistre, du changement de certains éléments d'électroménager. En conséquence, au titre de ce poste de préjudice, l'indemnité due à M. [W] doit être réduite à 22 729,85 euros TTC.

Sur les frais de maîtrise d'oeuvre

M. [W] justifie avoir, le 4 décembre 2018, conclu avec la société Alpes Réalisation Construction un contrat de maîtrise d'oeuvre au titre duquel il s'est engagé à payer les sommes suivantes :

- 2 500 euros HT soit 2 750 euros TTC au titre de la maîtrise d'oeuvre afférente aux travaux de reprise des réseaux. Cette somme doit être allouée à M. [W], étant rappelé que c'est sur la base de documents émanant du maître d'oeuvre que le maire de la commune de La Plagne a, par arrêté du 10 mars 2020, levé l'interdiction d'accéder au chalet et de l'habiter,

- 5 % du montant des travaux de réaménagement du rez-de-chaussée du chalet. Cette somme calculée sur la base de celle retenue ci-dessus à hauteur de 22 729,85 euros, soit 1 136,50 euros, doit être allouée à M. [W], étant rappelé que Mme [U] avait considéré que les travaux à exécuter devaient être suivis par un maître d'oeuvre.

Globalement, au titre de ses préjudices matériels, il est alloué à M. [W] la somme de 51 498,90 euros.

La société ECHM et Groupama sont in solidum tenues au paiement de cette somme, la première sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la seconde sur le fondement de l'exécution du contrat la liant à M. [W].

' Sur les préjudices immatériels

M. [W] demande en premier lieu l'indemnisation du préjudice constitué par le fait qu'il n'a pas pu louer son chalet.

Au regard des réservations dont il justifie pour la saison d'hiver 2016 / 2017 qu'il a dû annuler et des revenus locatifs régulièrement produits par son chalet, il convient d'évaluer le préjudice constitué par la perte de revenus locatifs et la perte de chance d'en obtenir à la somme moyenne de 21 550 euros par an, valeur admise par Groupama.

M. [W] demande en second lieu l'indemnisation du préjudice constitué par le fait qu'il n'a pas pu personnellement jouir de son bien pour lui-même et les siens. Ce poste de préjudice a été justement évalué par le premier juge à la somme de 8 000 euros par an, qui n'est pas discutée par Groupama.

M. [W] demande l'indemnisation de ses préjudices immatériels sur une période de 3 années et demi, ce qui est légitime dans la mesure où son chalet a été inhabitable sur la période comprise entre le 21 novembre 2016 et le 10 mars 2020.

En conséquence, la cour lui alloue la somme de 75 425 euros au titre de la perte des revenus locatifs et celle de 28 000 euros au titre de la perte de jouissance, soit un total de 103 425 euros.

Il ressort des stipulations du contrat d'assurance liant M. [W] à Groupama, que la garantie des préjudices immatériels est limitée à une année.

En conséquence, la société ECHM et Groupama sont in solidum tenues au paiement de la somme de 29 550 euros et la société ECHM est seule tenue au paiement de la somme de 73 875 euros.

Sur l'appel en garantie de Groupama à l'encontre de la société ECHM

Dans la mesure où la société ECHM est responsable du dommage subi par M. [W], elle devra supporter la charge finale des indemnités allouées à celui-ci.

En conséquence, elle devra relever et garantir Groupama des sommes qu'elle aura versées à son assuré, dans les droits duquel elle sera d'ailleurs subrogée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, les dépens de première instance comprenant les frais d'expertise judiciaire, et les dépens d'appel doivent être mis à la charge de la société ECHM.

Les conditions d'application de l'article 700 du code de procédure civile ne sont réunies qu'en faveur de M. [W] et de Groupama, auxquels il est respectivement alloué 4 000 euros et 2 000 euros, au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS, après en avoir délibéré conformément à la loi, la cour statuant publiquement et contradictoirement,

Réformant partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau sur le tout pour davantage de clarté,

Condamne in solidum la société Groupama Rhône Alpes Auvergne et la SCA Eau et Chaleur en Haute Montagne à payer à M. [J] [W] les dommages-intérêts suivants :

- au titre de ses préjudices matériels, la somme de 51 498,90 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2020 sur le principal de 48 125,40 euros et à compter de ce jour sur le surplus,

- au titre de ses préjudice immatériels, la somme de 29 550 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2020 sur le principal de 29 150 euros et à compter de ce jour sur le surplus,

Condamne la SCA Eau et Chaleur en Haute Montagne à relever et garantir la société Groupama Rhône-Alpes Auvergne de ces condamnations,

Condamne la SCA Eau et Chaleur en Haute Montagne à payer à M. [J] [W] la somme de 73 875 euros de dommages-intérêts, au titre de ses préjudices immatériels, outre intérêts au taux légal à compter de ce jour,

Condamne la SCA Eau et Chaleur en Haute Montagne :

- aux dépens de première instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, et aux dépens d'appel,

- à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile :

. 4 000 euros à M. [J] [W],

. 2 000 euros à la société Groupama Rhône-Alpes Auvergne,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes, plus amples ou contraires.

Ainsi prononcé publiquement le 25 mai 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/00850
Date de la décision : 25/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-25;20.00850 ?
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