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11/05/2022 | FRANCE | N°22/00078

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 11 mai 2022, 22/00078


COUR D'APPEL DE CHAMBERY

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Première Présidence







ORDONNANCE



STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES





du Mercredi 11 Mai 2022





RG : N° RG 22/00078 - N° Portalis DBVY-V-B7G-G7MU





Appelant

M. [W] [D]

né le 10 Février 1984

1 Chemin des Renaulières

74210 MARLENS

hospitalisé au centre hospitalier d'Annecy Genevois

assisté de Maître Lis

a LEGRAND, avocate désignée d'office inscrite au barreau de CHAMBERY



Appelés à la cause

CENTRE HOSPITALIER ANNECY GENEVOIS

1 avenue de l'Hôpital - Metz Tessy

B.P. 90074

74374 PRINGY CEDEX

...

COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence

ORDONNANCE

STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES

du Mercredi 11 Mai 2022

RG : N° RG 22/00078 - N° Portalis DBVY-V-B7G-G7MU

Appelant

M. [W] [D]

né le 10 Février 1984

1 Chemin des Renaulières

74210 MARLENS

hospitalisé au centre hospitalier d'Annecy Genevois

assisté de Maître Lisa LEGRAND, avocate désignée d'office inscrite au barreau de CHAMBERY

Appelés à la cause

CENTRE HOSPITALIER ANNECY GENEVOIS

1 avenue de l'Hôpital - Metz Tessy

B.P. 90074

74374 PRINGY CEDEX

non comparant

UDAF DE HAUTE SAVOIE (curateur - et tiers à l'admission)

3 RUE LEON REY-GRANGE

BP 1033

74966 MEYTHET CEDEX

non comparant

Partie Jointe :

Le Procureur Général - Cour d'Appel de CHAMBERY - Palais de Justice - 73018 CHAMBERY CEDEX Dossier communiqué et réquisitions écrites en date du 9 mai 2022

*********

DEBATS :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du mercredi 11 mai 2022 à 10h devant Monsieur Cyril GUYAT, conseiller à la cour d'appel de Chambéry, délégué par ordonnance de Madame la première présidente, pour prendre les mesures prévues aux dispositions de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de prise en charge, assisté de Madame Sophie Messa, greffière

L'affaire a été mise en délibéré au mercredi 11 mai 2022 après-midi,

Par une décision en date du 11 septembre 2013, le directeur du centre hospitalier Annecy Genevois a prononcé l'admission de M. [W] [D] en soins psychiatriques sans consentement à la demande d'un tiers et en urgence.

Depuis cette date, des soins sont dispensés à M. [D] sans son consentement, tantôt sous la forme d'une hospitalisation complète et tantôt sous la forme d'un programme de soins.

Par décision du 4 février 2022, le directeur du centre hospitalier Annecy Genevois a pris une décision de prise en charge de M. [W] [D] dans le cadre d'un programme de soins.

Le certificat médical auquel se rapportait cette décision prévoyait :

- une hospitalisation séquentielle d'une semaine par mois,

- une consultation mensuelle,

- une injection retard tous les 28 jours,

- une prise quotidienne d'un traitement par voie orale,

- une consultation hebdomadaire auprès d'un infirmier pour la préparation du pilulier.

Par décision du 8 avril 2022, le directeur du centre hospitalier Annecy Genevois a ordonné la réintégration de M. [W] [D] en hospitalisation complète.

Le certificat médical du 8 avril 2022 fondant cette décision mentionnait une instabilité motrice, une tension psychique palpable avec une attitude menaçante, un délire de grandeur et de persécution avec adhésion totale, un déni de ses troubles et un refus de soins.

Par ordonnance du 19 avril 2022, le juge des libertés et de la détention d'Annecy a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète sous contrainte.

Cette décision a été notifiée au patient le jour même. Il en a relevé appel par courrier motivé transmis au greffe par courriel le 3 mai 2022.

Par réquisitions écrites du 9 mai 2022, le ministère public a :

- à titre principal, soulevé l'irrecevabilité de l'appel, celui-ci n'ayant pas été envoyé dans le délai de 10 jours,

- à titre subsidiaire, conclu à la confirmation de l'ordonnance déférée.

L'avis motivé du Dr [P] en date du 10 mai 2022 relevait que la décision de réintégration du 8 avril 2022 avait été prise car le patient ne s'était pas présenté à l'hospitalisation séquentielle prévue le jour même. Les symptômes délirants persistent, il présente une forte tension psychique, une instabilité motrice. Le patient a donné trois coups de poing au visage d'un infirmier, ce qui a nécessité sa mise en chambre d'isolement depuis le deux mai. L'examen du 10 mai, réalisé en chambre d'isolement, révèle toujours une instabilité motrice (le patient vocifère et tape sur les murs à la moindre irritation), un délire de grandeur et de persécution, une hostilité majeure avec attitude menaçante envers l'équipe soignante, une victimisation systématique, une absence de critique de son passage à l'acte.

A l'audience du 11 mai 2022, M. [W] [D] indique ne pas se souvenir d'avoir signé la notification de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le 19 avril 2022, qu'il était placé à l'isolement. Il indique ne pas comprendre ce qu'il fait dans un hôpital psychiatrique, être hyperactif et autiste, que s'il arrête les médicaments il va bien. S'agissant des violences qu'il aurait commises sur un infirmier, il indique s'être défendu de ce dernier. Il a peur qu'on l'envoie en UMD. Il demande une hospitalisation libre.

Son conseil soulève que les patients signent les documents qui leur sont remis sans savoir ; que M. [W] [D] était en isolement pendant le délai de 10 jours pour faire appel ; que le programme de soins dont il bénéficiait avait l'air de fonctionner. Son client soutient que c'est son père, qui l'a mis en hôpital psychiatrique, qui a plus besoin de soins que lui.

Le curateur, quoique régulièrement convoqué par courriel le 5 mai 2022, n'a pas comparu et n'a pas fait connaître les raisons de son absence.

Le Ministère Public, non comparant, a requis à titre principal que soit constatée l'irrecevabilité de l'appel compte-tenu du non respect du délai d'appel. Au fond, il requière la confirmation de la décision.

SUR CE

Sur la recevabilité de l'appel

Au terme de l'article R 3211-18 du code de la santé publique, l'ordonnance (du juge des libertés et de la détention) est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans un délai de dix jours à compter de sa notification.

En l'espèce, l'ordonnance a été notifiée au patient le 19 avril 2022, et il a été relevé appel le 3 mai 2022, soit au-delà du délai de dix jours prescrit par ce texte.

Cependant, il convient de constater que la procédure ne permet pas de vérifier que le patient a été informé de l'exact délai dans lequel son appel devait être formé : l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ne mentionne pas le délai de dix jours, et la notification de la décision mentionne que M. [W] [D] a été 'informé des délais d'appel', sans plus de précision.

Il doit donc être retenu que ce délai ne lui est pas opposable.

L'appel de M. [W] [D] est déclaré recevable.

Sur le fond

En application de l'article L3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

En l'espèce, il résulte des certificats médicaux versés au dossier que le patient est suivi dans le cadre d'une procédure de soins sans consentement depuis 2013, soit en programme de soins, soit en hospitalisation complète, en fonction de l'évolution de son état de santé.

Il a été réintégré en hospitalisation complète le 8 avril 2022, et à cette date étaient relevés une tension psychique palpable avec une attitude menaçante, un délire de grandeur et de persécution avec adhésion totale, un déni de ses troubles et un refus de soins.

Il a été placé en isolement le 2 mai pour avoir donné trois coup de poing à un infirmier, ce qui démontre la persistance depuis sa réhospitalisation d'un risque de passage à l'acte agressif . Ses propos à l'audience démontrent qu'il reste dans le déni de sa pathologie et de la nécessité pour lui de bénéficier de soins.

Ainsi M. [W] [D] n'apparaît pas en mesure de donner un consentement éclairé aux soins qui lui sont nécessaires, alors que son état mental impose toujours actuellement des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète.

Les conditions fixées par la loi pour maintenir M. [W] [D] en hospitalisation complète sans son consentement sont donc remplies.

En conséquence, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention sera confirmée.

Les dépens de l'instance resteront à la charge du Trésor Public.

PAR CES MOTIFS,

Nous, Cyril Guyat, conseiller délégué par la première présidente de la cour d'appel de Chambéry, statuant après débats en audience publique, par ordonnance contradictoire au siège de la cour d'appel de Chambéry,

Déclarons recevable l'appel de M. [W] [D],

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention d'Annecy du 19 avril 2022,

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

Disons que la notification de la présente ordonnance sera faite conformément aux dispositions de l'article R 3211-22 du Code de la santé publique.

Ainsi prononcé le 11 mai 2022 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, et signé par Monsieur Cyril GUYAT, conseiller à la Cour d'appel de Chambéry, délégué par Madame la première présidente et Madame Sophie MESSA, greffière.

LA GREFFIERELE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 22/00078
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;22.00078 ?
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