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17/01/2012 | FRANCE | N°10/02898

France | France, Cour d'appel de chambéry, Chambre civile - première section, 17 janvier 2012, 10/02898


CB/DA

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

chambre civile - première section

Arrêt du Mardi 17 Janvier 2012

RG : 10/02898

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ANNECY en date du 10 Novembre 2010, RG 08/2070

Appelants

M. Christophe X...

Mme Valérie Y... épouse X...

demeurant ensemble ... - Robinson - 98809 MONT DORE - NOUVELLE CALEDONIE

représentés par la SCP FILLARD COCHET-BARBUAT, avoués à la Cour

assistés de Me Serge MOREL VULLIEZ, avocat au barreau d'ANNECY

Intimée

la SARL T

AKE AWAY,

dont le siège social est sis 24 Rue Perrière - 74000 ANNECY

représentée par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avoués à la ...

CB/DA

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

chambre civile - première section

Arrêt du Mardi 17 Janvier 2012

RG : 10/02898

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ANNECY en date du 10 Novembre 2010, RG 08/2070

Appelants

M. Christophe X...

Mme Valérie Y... épouse X...

demeurant ensemble ... - Robinson - 98809 MONT DORE - NOUVELLE CALEDONIE

représentés par la SCP FILLARD COCHET-BARBUAT, avoués à la Cour

assistés de Me Serge MOREL VULLIEZ, avocat au barreau d'ANNECY

Intimée

la SARL TAKE AWAY,

dont le siège social est sis 24 Rue Perrière - 74000 ANNECY

représentée par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avoués à la Cour

assistée de Me Christian BROCAS, avocat au barreau d'ANNECY

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 05 décembre 2011 avec l'assistance de Madame Vidal, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

- Monsieur Billy, Président de chambre,

- Monsieur Leclercq, Conseiller

- Monsieur Morel, Conseiller.

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Attendu que, par acte du 22 octobre 2007, monsieur et madame X... ont promis de vendre à la Sarl Take away pour un prix de 150.000 € le droit au bail commercial d'un local situé ..., sous condition suspensive, pour cette dernière, de l'obtention d'un prêt d'au minimum 100.000 € au taux de 5,20 % hors assurance d'une durée de 7 ans avant le 13 décembre 2007, prorogée par avenant au 31 décembre, la convention prévoyant une réitération par acte authentique le 7 janvier 2008 ;

Que la Sarl Take away a informé, par son conseil, les époux X... le 4 janvier 2008 qu'elle n'avait pas obtenu de prêt, et que la vente n'a pas été réitérée ;

Que, par jugement du 10 novembre 2010, le tribunal de grande instance d'Annecy a condamné la Sarl Take away à payer aux époux X... la somme de 7.500 € de clause pénale, l'a déboutée de sa demande de réduction de ladite pénalité, a débouté les époux X... de leurs autres demandes indemnitaires et a condamné la Sarl take away à lui payer 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que monsieur et madame X... en ont interjeté appel par déclaration du 28 décembre suivant ;

Attendu que, soutenant qu'ils n'ont reçu aucune information de refus du prêt avant le 31 décembre 2007, que la Sarl Take away ne leur a transmis que le 9 janvier une attestation de la banque, que le contrat précise que le refus de prêt doit émaner d'au moins deux banques ou établissements financiers différents et soit porté à la connaissance du cédant dans le même délai que celui de l'obtention du prêt, qu'ils ont appris que le gérant était en congé dans le courant de décembre, que le courrier du conseil de la société indiquait que le gérant devait les contacter le jour même, qu'ils lui ont téléphoné et ont appris qu'il était toujours en congé et ne rentrerait que quelques jours plus tard, qu'il ne leur a transmis qu'après sommation du notaire d'une part le 9 janvier une attestation de la Société générale du 3 janvier et d'autre part le 10 avril 2008 un courrier de refus de la société HSBC, qu'aucune ne précise les caractéristiques des prêts sollicités, que la Sarl Take away avait émis un chèque de 10.000 € lors de la signature du compromis, qu'ils l'ont présenté à la date fixée pour l'acte authentique mais que l'acquéreur y avait fait opposition pour perte, que Take away leur a fait une proposition légèrement supérieure à celle de madame Z... avec qui les négociations étaient très avancées, que la hausse de loyer proposée par le gérant de Take away, monsieur A..., au propriétaire des murs, monsieur B..., 1.600 € au lieu de 1.500 € par mois convenus avec madame Z..., a entraîné une baisse évidente de la valeur du fonds de commerce, que le droit au bail a été vainement proposé à 110.000 €, qu'ils ont résilié le bail de façon anticipée le 7 juillet 2008, le bailleur leur versant 108.000 € sur 10 ans et qu'ils ont donc un préjudice de 42.000 €, que le compromis prévoyait la cessation d'activité des cédants au 31 décembre 2008 et une entrée en jouissance au jour de la réitération, qu'ils n'ont donc pas rentré la collection d'hiver et n'ont pas passé de commandes pour le printemps 2008, qu'ils ont donc seulement liquidé leur stock pendant les fêtes de Noël, qu'ils ont réglé les charges de l'année et les indemnités du licenciement de la vendeuse, subissant un préjudice de 28.000 €, que, s'ils avaient rentré un stock normal, il aurait fallu deux mois après l'acceptation des banques pour déstocker, que Take away voulait acquérir très rapidement pour faire des travaux et ouvrir en mars/avril, qu'ils ont dû brader leur stock perdant un bénéfice de 3.220 €, qu'ils ont dû payer 11.202,33 € de dépenses supplémentaires, que la bonne santé financière de la Sarl take away, qui a 8 établissements et a augmenté son capital en février 2009 et l'expérience de son gérant, qui dirige six autres sociétés, ne font aucun doute, qu'elle a ouvert un établissement en avril 2008 à Annecy, monsieur et madame X... demandent de confirmer la condamnation prononcée, de réformer pour le surplus, et de condamner la Sarl Take away à leur payer 42.000 € de perte de bénéfice sur cession de fonds, 18.000 € de manque à gagner sur l'absence de placement en assurance vie, 45.568,10 € de perte de marge brute et de dépenses, ainsi que 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que, alléguant qu'elle a confié un dossier de financement dès le 24 octobre 2007 à la Société générale, qu'il résulte d'une attestation du 17 février 2009 que ce dossier était conforme à la condition du contrat, que la société Hsbc a également refusé, que le principe de non réalisation de la condition suspensive à la date convenue est acquis, que le délai de la condition suspensive expirait la veille d'un jour férié, qu'elle a fait connaître le refus de la banque dès le 3 janvier, qu'elle a informé son cocontractant dans un temps qui ne lui était pas préjudiciable, que les époux X..., éclairés par leur notaire, ont en toute connaissance de cause choisi de prendre le risque de contracter à un prix plus élevé avec elle avec, en contrepartie, la condition suspensive de l'obtention d'un prêt, qu'ils ont été imprudents de cesser leur activité avant la survenance du terme et sont à l'origine de leur propre préjudice, qu'ils résident en Nouvelle Calédonie, qu'il y a tout lieu de penser qu'ils avaient mis en oeuvre ce projet d'expatriation avant décembre 2007, que l'attestation de la Société générale du 17 février 2009 montre que leur demande respectait les termes du compromis, que les époux X... n'ont subi aucun préjudice, que le prix n'avait pas été correctement fixé, que rien ne leur interdisait, s'ils avaient continué normalement l'exploitation, de poursuivre ultérieurement, qu'ils ne l'ont pas mise en demeure de régulariser l'acte authentique, que la perte de valeur ne résulte pas de son manquement, que l'objet du présent litige n'a pas causé de perte de marge ni de perte de bénéfice sur vente du stock, que les pièces sur les dépenses supplémentaires sont relatives à la période antérieure au 31 décembre 2007, la Sarl Take away conclut à la réformation du jugement, au débouté des époux X... et à leur condamnation à lui payer 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que la vente était suspendue à la condition que "le cessionnaire obtienne un ou plusieurs prêts" d'un montant minimum de 100.000 €, au taux de 5,20 % hors assurance d'une durée de sept ans, qu'il s'obligeait à déposer le ou les dossiers de demande de prêts dans le délai de quinze jours calendaires à compter de la signature du compromis et "à en justifier à première demande du cédant par tout moyen de preuve écrite", l'obtention du ou des prêts devant intervenir au plus tard le 10 décembre, date reportée ultérieurement au 31, 2007 et être portée à la connaissance du cédant par le cessionnaire ;

Qu'il était également précisé que "le refus du ou des prêts doit émaner d'au moins deux banques ou établissements financiers différents" et devait être porté à la connaissance du cédant par le cessionnaire dans le même délai que celui de l'obtention du prêt ;

Qu'en cas de non régularisation de l'acte authentique, toutes les conditions étant remplies et après mise en demeure, la partie auteur du refus s'engage à payer à l'autre la somme de 7.500 € "à titre de clause pénale indépendamment de tous dommages et intérêts" ;

Attendu que, en l'espèce, la Sarl Take away produit une attestation de la Société générale d'Annecy le Vieux, mais dont l'auteur n'est pas indiqué, en date du 24 octobre 2007, certifiant "avoir un dossier de financement pour la Sarl Take away concernant l'acquisition d'un pas de porte sis ... pour un montant de 100.000 €" ;

Que la Sarl Take away n'a pas justifié au 31 décembre 2007, comme convenu de la non obtention de deux demandes de prêt, qu'elle n'en a pas justifié non plus lorsque son avocat a écrit aux vendeurs cette situation le 3 janvier, que c'est seulement le 9 janvier que son propre avocat a envoyé le même jour copie d'une attestation de la Société générale, datée du 3 janvier 2008, attestant "avoir refusé un financement pour la Sarl Take away concernant l'acquisition d'un droit au bail sis ... pour un montant de 120.000 €" ;

Que d'une part, à cette date, il n'y avait de justification que d'un seul refus de banque d'accorder un prêt, que d'autre part, l'attestation ne porte pas la durée et le taux de prêt refusés, et qu'enfin la discordance entre les montants indiqués par les deux attestations, dont le nom de l'auteur n'est toujours pas précisé, est le signe du manque de fiabilité de ces attestations et de l'absence vraisemblable de constitution de dossier de demande de prêt ;

Que ce n'est que le 30 avril que l'avocat de la Sarl Take away produit un courrier de la banque HSBC, daté du 30 janvier 2008, remerciant celle-ci de l'avoir sollicitée au sujet d'un projet à Annecy et ajoutant qu' "après une étude attentive des documents que vous avez bien voulu nous faire parvenir, notre établissement ne donne pas une suite favorable à votre demande", et que cette lettre, outre son caractère tardif au regard de la convention des parties, ne porte aucune des précisions exigées par cette dernière et souligne encore plus le peu de sérieux des prétendues demandes de prêt ;

Que de telles attestations ne peuvent pas être considérées comme des écrits justifiant la demande de prêt conformément au compromis de vente et c'est exactement que le premier juge a fait droit à la demande de paiement de la clause pénale ;

Qu'en outre il résulte de tels faits que la Sarl Take away, qui ne conteste pas avoir ouvert un autre local à Annecy dans les quatre mois suivants et avoir plusieurs autres établissements dans la région, a manifestement traité cette affaire sans aucun sérieux et dans le but, au moins, d'immobiliser ce local pendant le temps de ses recherches ;

Qu'en outre, il résulte de l'avis de rejet du CIC que monsieur A..., ce que la Sarl Take away ne conteste pas, a immédiatement fait opposition pour perte au paiement du chèque de 10.000 € qu'il avait émis au nom du vendeur qui s'est vu opposer un rejet le 14 janvier 2008 ;

Attendu que les époux X... invoquent d'autres préjudices tenant à la perte de valeur de leur droit au bail, vendu 108.000 € au lieu des 150.000 € convenus, et promis verbalement par madame Z... selon l'attestation de celle-ci, ainsi que divers frais et pertes liés à l'accélération de leur fin d'activité sur place qui aurait été faite à la demande du gérant de la Sarl Take away ;

Que, toutefois, sur ces derniers points, ils ne justifient pas avoir subi d'autres frais ou pertes que celles qu'ils devaient supporter en toute hypothèse du fait de la cessation d'activité ;

Qu'il n'est justifié, en outre, que de la perte d'une chance de céder leur droit au bail à un meilleur prix que celui finalement obtenu et que le préjudice en résultant doit être estimé à 10.000 € ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Réformant,

Condamne la Sarl Take away à payer à monsieur et madame X... la somme de 10.000 € (DIX MILLE EUROS) de dommages et intérêts supplémentaires,

Confirme le jugement pour le surplus,

Condamne la Sarl Take away à payer aux appelants 3.000 € (TROIS MILLE EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamne aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Fillard et Cochet-Barbuat.

Ainsi prononcé publiquement le 17 janvier 2012 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Claude Billy, Président de Chambre, et Marina Vidal, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Formation : Chambre civile - première section
Numéro d'arrêt : 10/02898
Date de la décision : 17/01/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2012-01-17;10.02898 ?
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