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02/07/2002 | FRANCE | N°1999/02248

France | France, Cour d'appel de chambéry, 02 juillet 2002, 1999/02248


Le DEUX JUILLET DEUX MILLE DEUX LA CHAMBRE CIVILE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont le teneur suit : dans la cause 99/02248 - Chambre commerciale

(Jonction avec le 00/1875 par mention au dossier du 28.09.00) opposant :

APPELANTE ET INTIMEE SA INTERSPORT FRANCE dont le siège social est 2 RUE VICTOR HUGO - 91160 LONGJUMEAU représentée par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, avoués à la Cour assistée de la SCP MONNOT CALLET , avocats au barreau de PARIS à : INTIMES ET APPELANTS Mme Martine X..., ... par Me Bruno DELACHENAL, avoué à la Cour assistée de

la SCP FAVRE LAMOTTE , avocats au barreau de THONON M. JEAN Y..., ......

Le DEUX JUILLET DEUX MILLE DEUX LA CHAMBRE CIVILE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont le teneur suit : dans la cause 99/02248 - Chambre commerciale

(Jonction avec le 00/1875 par mention au dossier du 28.09.00) opposant :

APPELANTE ET INTIMEE SA INTERSPORT FRANCE dont le siège social est 2 RUE VICTOR HUGO - 91160 LONGJUMEAU représentée par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, avoués à la Cour assistée de la SCP MONNOT CALLET , avocats au barreau de PARIS à : INTIMES ET APPELANTS Mme Martine X..., ... par Me Bruno DELACHENAL, avoué à la Cour assistée de la SCP FAVRE LAMOTTE , avocats au barreau de THONON M. JEAN Y..., ... par Me Bruno DELACHENAL, avoué à la Cour assisté de la SCP FAVRE LAMOTTE , avocats au barreau de THONON M. JEAN-PIERRE X..., ... par Me Bruno DELACHENAL, avoué à la Cour assisté de la SCP FAVRE LAMOTTE , avocats au barreau de THONON Mme MARYSE Y..., ... par Me Bruno DELACHENAL, avoué à la Cour assistée de la SCP FAVRE LAMOTTE , avocats au barreau de THONON COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue en rapporteur , sans opposition des avocats, le 14 mai 2002 par Madame XXX, Président, à ces fins désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 29 avril 2002, qui a entendu les plaidoiries, en présence de M. XXX, conseiller, avec l'assistance de Madame XXX, Greffier Et lors du délibéré, par : - Madame BERAUDO, Président, qui a rendu compte des plaidoiries - Madame Z...,

Conseiller - Monsieur BETOUS, Conseiller -=-=-=-=-=-=-=-=-

Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains, chambre commerciale, le 27 mai 1999, qui a déclaré la société Intersport France irrecevable à réclamer à MM. Y... et X... le paiement de la créance détenue par la société CAHIF et condamné solidairement MM. Y... et X... à payer à la société Intersport la somme de 96 920,83 F avec intérêts légaux à compter du 28 février 1998, déboutant les parties du surplus de leurs prétentions,

Vu le jugement rendu par la chambre civile du même tribunal le 15 juin 2000 qui a :

Déclaré la demande principale de la société INTERSPORT FRANCE recevable et bien fondée,

En conséquence condamné solidairement Madame Maryse A... épouse Y... et Madame Martine B... épouse X... à payer à la société INTERSPORT FRANCE la somme principale de 1 440 647, 39 F outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation, ainsi que de la somme de 8 000 F au titre de l'article 700 du NCPC,

Débouté la société INTERSPORT FRANCE du surplus de sa demande en paiement,

Débouté Mesdames Y... et X... de leur demande reconventionnelle,

Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement en ce qui concerne la condamnation en principal et intérêts,

Vu les appels interjetés par la société Intersport France du premier jugement, Mme Y... et Mme X... du second jugement,

Vu les conclusions de la société Intersport France déposées le 6 mai 2002 et celles de MM. et Mmmes Y... et X... en date du 7 mai 2002,

Attendu que la société New Sport, aujourd'hui liquidée, a exploité un

fonds de commerce d'articles de sports ; que M. et Mme Y... ainsi que M. X... (vendeur) étaient porteurs de parts ; que M. Y... était le gérant de la société ;

Attendu qu'en 1986, la société New Sport a adhéré, comme actionnaire, à la société La Hutte et, comme sociétaire, à la société coopérative Centre Achat Hutte Intersport France (CAHIF), les deux adhésions étant obligatoirement liées, la société CAHIF étant la centrale d'achats des actionnaires de La Hutte, agissant comme mandataire et garante de ses sociétaires pour le paiement des fournisseurs autres que La Hutte ; que MM. Y... et X... ont signé les règlements intérieurs de ces deux sociétés ;

Attendu que les époux Y... et les époux X... se sont portés cautions, respectivement les 25 juillet et 21 août 1986, des engagements de la société New Sport à l'égard à la fois des deux sociétés La Hutte et CAHIF ;

Attendu que le 22 septembre 1995, la société New Sport a été déclarée en redressement judiciaire, postérieurement converti en liquidation judiciaire ; que les sociétés La Hutte et CAHIF ont déclaré leurs créances à hauteur respectivement de 96 920,83 F et 1 343 726,56 F ; que le 2 décembre 1996, Me Belluard, mandataire liquidateur, leur a délivré un certificat d'irrecouvrabilité ;

Attendu que que la société CAHIF, devenue depuis Groupe Intersport, a fait apport de sa branche d'activité d'intermédiaire à l'achat-répartiteur et de mandataire au paiement à la société La Hutte, dénommée aujourd'hui Intersport France ; que cet apport partiel d'actif comprenait la créance de la société CAHIF sur la société New Sport ;

Sur la recevabilité de la demande de la société Intersport en ce qui concerne la créance de la société CAHIF,

Attendu que les cautions, qui ne contestent pas l'existence de la

cession de créance intervenue entre la société CAHIF et la société La Hutte, opposent l'absence de déclaration de créance au passif de la société New Sport et l'absence de signification régulière de cette cession de créance ;

Attendu, tout d'abord, que la créance a bien été déclarée au passif par la société CAHIF ; que ce n'est que postérieurement qu'elle a été cédée à la société La Hutte devenue ensuite Intersport France ; que la société Intersport France est donc titulaire sur la société New Sport d'une créance qui n'est pas éteinte ;

Attendu, ensuite, que les cautions ont eu connaissance de la cession de créance par l'assignation en justice ; qu'à supposer que les mentions de cette assignation puissent être considérées comme insuffisantes dans la mesure où elles ne reproduisent pas les termes de l'acte de cession, les cautions sont aujourd'hui pleinement informées par les conclusions de la société Intersport France ; que celles-ci, à tout le moins, valent signification de la cession au sens de l'article 1690 du Code Civil ; que les pièces produites (contrat d'apport partiel d'actif du 1er avril 1996, déposé au greffe du tribunal de commerce, publié, enregistré le 20 juin 1996, et balance des comptes clients de la société CAHIF au 31 décembre 1995 faisant apparaître la créance) établissent le caractère certain de cette cession ; que, dès lors, celle-ci est opposable aux cautions ;

Attendu qu'il n'est pas contesté, en revanche, que la cession de créance n'a pas été signifiée à la société New Sport dans les formes prévues par l'article 1690 du Code Civil ;

Attendu que la formalité de la signification a pour but d'informer le débiteur de la cession de créance et de rendre à ses yeux le transport certain, afin de lui éviter, éventuellement, de devoir

payer deux fois la même dette ;

Attendu qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la dette n'a pas été payée à la société CAHIF par le débiteur principal, la société New Sport, dont la liquidation a été clôturée pour insuffisance d'actif par jugement du 23 février 2001 ; qu'au demeurant, si elle l'avait été, ce paiement valablement fait viendrait nécessairement en déduction de la créance de la société Intersport à l'égard des cautions ;

Attendu que la circonstance que la cession de créance n'ait pas été signifiée à la société New Sport est sans incidence sur l'étendue du droit à subrogation des cautions ;

Qu'en effet, s'il est vrai que, même en cas de clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, la caution ou le coobligé qui a payé au lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci, à supposer, pour les besoins de la discussion, que la société New Sport puisse un jour revenir à meilleure fortune, et faire l'objet de poursuites de la part des cautions subrogées dans les droits de la société Intersport France, rien n'interdirait à ces cautions de lui signifier la cession de créance ;

Attendu que, dans ces conditions, l'absence de signification de la cession de créance au débiteur principal est sans incidence sur l'obligation des cautions, laquelle est attachée à la créance, non au créancier ;

Sur l'étendue et la validité du cautionnement,

Attendu que les cautions prétendent que leur engagement, rédigé en termes généraux, est indéterminé, et que par suite, il est nul ;

Mais attendu que si l'engagement de chaque caution n'est pas limité quant à son montant et quant à sa durée, il est bien déterminé en ce qu'il concerne toutes les sommes dues en principal, frais et accessoires par un débiteur déterminé, à savoir la société New Sport,

à deux créanciers déterminés, à savoir les sociétés La Hutte et CAHIF ;

Qu'en stipulant qu'il est souscrit "à raison de tous engagements et de toutes opérations de quelque nature qu'ils soient et, notamment, de toutes fournitures de marchandises, ces engagements étant bien connus des cautions de par leur fonction dans la société cautionnée", il s'inscrit en fait dans un rapport contractuel parfaitement déterminé entre la société New Sport et chacune des deux sociétés La Hutte et CAHIF, auxquelles la société New Sport a adhéré ;

Attendu que le cautionnement peut être indéfini, ainsi que le prévoit l'article 2016 du Civil ; qu'il peut donc être souscrit sans limitation de montant ;

Attendu que toutes les cautions, à l'exception de Mme Y..., ont fait précéder leur signature de la mention écrite de leur main "bon pour cautionnement personnel et solidaire du paiement ou remboursement de toutes sommes, en principal, intérêts, frais et accessoires, ayant donné lieu ou non à la création d'effets de commerce, traites ou billets par la société" ;

Attendu que cette formulation répond aux exigences de l'article 1326 du Code Civil ;

Attendu que Mme Y... s'est contentée de signer en dessous de la mention manuscrite apposée par son époux ;

Mais attendu que dans un acte notarié d'affectations hypothécaires en date du 25 juin 1994, affectations consenties pour le remboursement de la dette de la société New Sports par les époux Y... et M. X..., Mme Y... a confirmé son engagement de caution dans les termes suivants : "en garantie de tous engagements pris par la société New Sports auprès de la société Centre Achat Hutte Intersport France et de toutes opérations, de quelque nature qu'elles soient, M. et Mme Jean Y... ainsi que M. et Mme Jean-Pierre X... se sont

portés cautions solidaires de la société New Sports en vertu d'actes sous seing privés respectivement en date à Thonon-les-Bains du 25 juillet et du 21 août 1986. M. et Mme Jean Y... ainsi que M. et Mme Jean-Pierre X... confirment par les présentes être cautions solidaires de tous engagements stipulés dans les deux actes sus-mentionnés" ; que les actes sous seing privé sont annexés à l'acte notarié ;

Attendu que cet acte notarié se suffit à lui-même et rend sans objet la contestation de Mme Y... concernant l'irrégularité du cautionnement en faveur de la CAHIF ; qu'en ce qui concerne le cautionnement en faveur de la société La Hutte, constaté par le même acte sous seing privé que celui en faveur de la CAHIF, l'acte notarié constitue un élément extrinsèque qui vient à l'appui de l'acte sous seing privé incomplet et qui établit la parfaite connaissance de la portée de ses engagements qu'avait, au moment de sa signature, Mme Y..., épouse du gérant de la société cautionnée et ayant en outre la qualité d'associée ;

Attendu que s'agissant des intérêts de retard dûs sur les marchandises acquises par l'intermédiaire des sociétés La Hutte et CAHIF, il faut noter que si leur taux ne figure pas sur les engagements de caution, il figure en revanche sur les engagements du débiteur principal, à savoir sur les actes d'adhésion aux règlements intérieurs, signés de MM. Y... et X... ; qu'il s'agit du taux moyen des deux banques principales de chacune des deux sociétés La Hutte et Cahif, majoré de quatre points;

Attendu que le taux des intérêts de retard dûs sur le principal n'a pas à figurer sur un engagement de caution indéfini ; que cette exigence n'aurait aucun sens puisque cet engagement peut concerner des dettes futures dont ni le montant ni le taux d'intérêt applicable ne sont encore connus au moment où il est pris ;

Attendu qu'il suffit que le taux d'intérêt soit constaté par écrit dans l'engagement cautionné, ce qui est le cas en l'espèce ;

Attendu que les dispositions de l'article 313-32 du Code monétaire et financier (ancien article 48 de la loi du 1er mars 1984) ne sont pas applicables, puisque la dette cautionnée ne résulte pas d'un concours financier accordé par un établissement de crédit à une entreprise ;

Que les intérêts réclamés sont, en effet, exclusivement, des intérêts de retard dûs sur des factures impayées, factures dues à la société La Hutte en tant que fournisseur, ou dont le montant a été avancé par la société CAHIF en tant que mandataire ducroire ; que ni la société La Hutte devenue Intersport France, ni la société CAHIF devenue Groupe Intersport ne sont des établissements de crédit ;

Attendu qu'aucune mise en demeure n'était nécessaire pour faire courir ces intérêts ;

Attendu, en effet, que le règlement de La Hutte prévoit que "tout actionnaire doit régler régulièrement les relevés de factures et de frais qui lui sont adressés chaque quinzaine en retournant dans un délai de huit jours les traites ou lettres de change relevé (LCR) jointes aux dits relevés, après les avoir acceptés sans aucune modification. Tout retard dans les paiements entraîne la perception d'intérêts de retard au taux de base moyen des deux principales banques de la société, majoré de quatre points" ;

que, de même, le règlement de la CAHIF dispose : "tous les relevés de factures sont établis chaque quinzaine et donnent lieu à l'établissement de traites ou lettres de change relevé (LCR) transmises aux sociétaires et qui doivent être retournées acceptées dans un délai maximum de huit jours. Tout retard dans les paiements entraîne la perception d'intérêts de retard au taux de base moyen des deux principales banques de la société, majoré de quatre points" ;

Attendu que, par conséquent, c'est à tort que le tribunal a écarté l'application des intérêts conventionnels ; que ceux-ci sont bien dûs, dès la constatation du retard dans les paiements ;

Qu'en ce qui concerne le montant cumulé de ces intérêts, arrêté au 30 novembre 1997 (et non pas au 30 septembre 1997 comme l'indiquent les conclusions de la société Intersport France), la société Intersport France produit un décompte détaillé qui n'est pas discuté ;

Qu'il y a lieu, toutefois, de relever que ce décompte comporte des intérêts calculés HT et un total d'intérêts TTC (403 939,90 F) ; que la Cour ne voit pas ce qui justifie cette application de la TVA aux intérêts de retard ; que ceux-ci ne sont pas, en principe, imposables à la TVA ; que la Cour retiendra donc le montant HT ;

Sur la responsabilité des sociétés La Hutte et Intersport France dans l'aggravation du passif,

Attendu que les cautions prétendent échapper à leurs engagements et obtenir reconventionnellement le paiement de dommages-intérêts en invoquant des fautes qu'auraient commises les sociétés La Hutte et CAHIF ;

Qu'elles font valoir, s'agissant des intérêts de retard, que ces sociétés ont attendu plusieurs années avant de les assigner en justice ; que s'agissant du principal, elles estiment que les sociétés ne les ont pas suffisamment informées lors de la souscription de leurs engagements de caution, alors pourtant qu'elles étaient déjà fortement endettées et que ces engagements étaient disproportionnés par rapport à la surface financière de la société New Sports et à leurs propres facultés ; qu'elles soutiennent ensuite que les sociétés La Hutte et Cahif ont laissé s'accroître le montant de la dette de la société New Sport jusqu'à parvenir à plus de 1 000 000 F en 1993 et 1 300 000 F à fin 1995, sans les alerter ni les informer sur l'importance de ces engagements ;

Attendu, tout d'abord, que les cautions ne justifient en rien qu'elles étaient déjà particulièrement endettées au moment de la souscription de leurs engagements, ni que les engagements souscrits étaient disproportionnés par rapport à leurs facultés et à celles de la société New Sports, étant observé qu'il s'agissait simplement, pour une société de vente d'articles de sports, d'adhérer à un réseau regroupant des commerçants indépendants afin de bénéficier de produits de marque et d'une centrale d'achats ;

Attendu, ensuite, que M. Y... était associé et gérant de la société New Sports ; que M. X... était étroitement associé à la prise de décisions puisqu'il était également associé, outre ses fonctions salariées, et qu'il a signé les mêmes engagements que M. Y... ;

Attendu que Mme Y... était associée au même titre et avec le même nombre de parts que M. Y..., son époux ; que seule Mme X... n'était pas associée, mais qu'elle était tout de même bien placée, en tant qu'épouse de M. X..., pour s'informer de la situation de la société ;

Attendu que les époux Y... et M. X... ont confirmé leur engagement de caution en 1994 et affecté hypothécairement des immeubles leur appartenant au remboursement de leur dette, ce qui démontre qu'ils étaient conscients de la situation difficile de la société New Sports ;

Attendu que la dégradation de la situation financière de la société New Sports n'est pas due au caractère disproportionné des engagements pris ;

Qu'en effet, la société La Hutte n'était qu'un fournisseur et la société CAHIF une centrale d'achats et qu'il appartenait à la société New Sports de moduler ses achats en fonction de ses possibilités financières ;

Attendu que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire du 22

septembre 1995 a reporté la date de cessation des paiements au 23 mars 1994 ; que les difficultés de la société New Sports étaient cependant bien antérieures, puisque les impayés de la société CAHIF remontent à 1991 ; que, cependant, la situation ne s'est vraiment dégradée qu'en 1992, en raison de la baisse du chiffre d'affaires due à la crise économique (rapport de Me Meynet, administrateur judiciaire) ; que le résultat est devenu déficitaire à partir de l'exercice du 1er avril 1992 au 31 mars 1993 ;

Attendu qu'il résulte du rapport de synthèse en évaluation de M. C..., expert commis par l'administrateur judiciaire aux fins d'évaluer le fonds de commerce, que la société New Sports bénéficiait d'atouts favorables mais que son chiffre d'affaires s'est dégradé en raison du renversement de la conjoncture économique avec perte de la clientèle suisse, de la modification du comportement des consommateurs privilégiant l'aspect prix, de l'installation de l'enseigne Decathlon à Annemasse, de la multiplication des points de vente et mise en rayon dans les grandes surfaces d'articles de même nature, enfin d'un manque de trésorerie limitant l'achalandage en rayon ;

Attendu que toutes ces causes sont étrangères au comportement des sociétés La Hutte et CAHIF ;

Attendu que les cautions font valoir qu'en 1993, le montant de l'en-cours des sociétés La Hutte et CAHIF représentait approximativement un tiers du chiffre d'affaires réalisé par la société New Sports ;

Attendu qu'il convient d'observer que la société New Sports était contractuellement tenue de réaliser 75% de son chiffre d'affaires avec ces sociétés ; que, déjà, elle ne respectait donc plus ses engagements ;

Attendu qu'ainsi que le relèvent les sociétés La Hutte et CAHIF, leur

part dans l'activité de la société New Sports a considérablement diminué au cours des deux derniers exercices ;

Attendu, en effet, qu'alors que le chiffre d'affaires de la société New Sports est de 3 855 822 F au titre de l'exercice 1993-1994 et de 3 660 667 F au titre de l'exercice 1994-1995, la part de la créance de la société CAHIF correspondant aux effets impayés postérieurement au 30 septembre 1993 n'est que de 135 755,15 F (effets échelonnés du 15 septembre 1994 au 15 janvier 1996) sur une créance totale de 1 447 910,90 F au titre des effets impayés depuis le 30 juillet 1991 ;

Que s'agissant de la société La Hutte, les effets impayés, qui ne remontent pas antérieurement au 30 avril 1995, ne concernent qu'à hauteur de 50 347, 29 F des factures d'achats de marchandises ;

Attendu que les sociétés La Hutte et CAHIF font valoir, sans être contredites, qu'en raison des particularités du commerce des articles de sports, les commandes sont passées entre six mois et un an avant la facturation par les fournisseurs ;

Qu'ainsi, pendant les deux derniers exercices, la société New Sports s'est, en fait, approvisionnée essentiellement auprès d'autres fournisseurs ;

Attendu qu'en cet état, les cautions sont mal fondées à se prévaloir d'un soutien abusif ou d'un manquement des sociétés La Hutte et CAHIF à leur obligation de conseil ; qu'en réalité, la société New Sports s'était largement affranchie de ses propres obligations dès la constatation d'un résultat déficitaire ; qu'elle ne pouvait, dès lors, prétendre obtenir une aide particulière des sociétés La Hutte

et CAHIF ;

Attendu, enfin, que les cautions ne sauraient reprocher aux sociétés La Hutte et CAHIF d'avoir d'abord tenté d'obtenir un règlement dans le cadre de la procédure collective avant de les assigner en justice, et ce d'autant qu'elles étaient parfaitement informées de la situation, au moins en ce qui concernait les époux Y... et M. X..., vu les affectations hypothécaires consenties en 1994 ;

Sur le montant des créances des sociétés La Hutte et CAHIF,

Attendu que ces deux sociétés produisent des décomptes clairs et précis des effets impayés ; que les cautions affirment, sans en justifier, que la société CAHIF aurait récupéré des marchandises assorties d'une clause de réserve de propriété après le prononcé de la liquidation judiciaire et demandent qu'il soit tenu compte de la valeur de rachat des actions La Hutte et CAHIF ;

Attendu que d'après son décompte la société Intersport France a déduit du montant de la créance CAHIF : une action CAHIF à 5 000 F, des trop perçus CAHIF à hauteur de 37 886,04 F, et 82 actions La Hutte à hauteur de 61 500 F ; que ces déductions privent d'objet la contestation des cautions concernant le remboursement des actions CAHIF et La Hutte ;

Attendu que les cautions font également état de l'intervention du fonds de garantie créé par le règlement intérieur de la CAHIF ; que ce règlement dispose en effet que "le sociétaire participe à la constitution d'un fonds de garantie, suivant les règles définies par le conseil d'administration" ; que, toutefois, les cautions n'apportent aucun élément de nature à justifier que ce fonds de garantie pourrait prendre en charge tout ou partie de la créance ;

Attendu, en définitive, que la créance en principal s'établit bien à 1 343 726,56 Frs (créance CAHIF après déductions) + 96 920,83 F (créance La Hutte) = 1 440 647,39 F soit 219 625,28 euros, outre les

intérêts contractuels ;

Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

Par ces motifs,

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Réforme les jugements,

Condamne désormais solidairement M. et Mme Y..., M. et Mme X... à payer à la société Intersport France la somme de 219 625,28 euros en principal et celle de 51 061,56 euros à titre d'intérêts conventionnels, outre les intérêts à échoir au taux contractuel à compter du 1er décembre 1997,

Les condamne solidairement aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction, pour ces derniers, au profit de la SCP Bollonjeon, Arnaud, Bollonjeon, avoués,

Déboute les parties de leurs conclusions plus amples ou contraires.

Ainsi prononcé en audience publique le 02 juillet 2002 par Madame XXX, Président, qui a signé le présent arrêt avec Madame XXX, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Numéro d'arrêt : 1999/02248
Date de la décision : 02/07/2002

Analyses

CESSION DE CREANCE - Formalités de l'article 1690 du Code civil.

Le défaut de signification de la cession de créance au débiteur principal n'est pas un obstacle au recouvrement de la dette auprès de la caution dès lors que la cession lui a été signifiée personnellement, alors même que la signification prend la forme d'une assignation en justice ou de conclusions émanant du bénéficiaire

CAUTIONNEMENT - Conditions de validité - Engagement.

Doit être considéré comme valable l'acte de cautionnement indéfini qui vise toutes les sommes présentes et futures, dues en principal, frais et accessoires, par un débiteur déterminé à un créancier déterminé, et qui s'inscrit dans un rapport contractuel parfaitement déterminé. En conséquence, les intérêts stipulés au profit du créancier sont automatiquement dus par la caution, dès le constat de retard dans les paiements, sans mise en demeure préalable, même s'ils ne sont pas expressement prévus dans l'acte de cautionnement indéfini, dès lors qu'ils figurent sur l'engagement pris par le débiteur principal


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2002-07-02;1999.02248 ?
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