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02/04/2002 | FRANCE | N°1999/02236

France | France, Cour d'appel de chambéry, 02 avril 2002, 1999/02236


LE DEUX AVRIL DEUX MIL DEUX LA CHAMBRE CIVILE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont la teneur suit : dans la cause 1999/02236 - section 2 (V.N.M/E.M.) opposant : MONSIEUR X... DOMINIQUE demeurant RUE DES FLEURS, LES ANEMONES APPARTEMENT 12 73350-BOZEL ; APPELANT Représenté par ME DELACHENAL, Avoué et ayant pour Avocat Me LIVET du barreau d' ALBERTVILLE ; à: MONSIEUR Y... JEAN-HENRI demeurant RESIDENCE EDEN CAP 105 AVENUE DES CHENES 06600-ANTIBES ; INTIME Représenté par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, Avoués et ayant pour Avocat Me GENOVESE du barreau de GRASSE COMPOS

ITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des déba...

LE DEUX AVRIL DEUX MIL DEUX LA CHAMBRE CIVILE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont la teneur suit : dans la cause 1999/02236 - section 2 (V.N.M/E.M.) opposant : MONSIEUR X... DOMINIQUE demeurant RUE DES FLEURS, LES ANEMONES APPARTEMENT 12 73350-BOZEL ; APPELANT Représenté par ME DELACHENAL, Avoué et ayant pour Avocat Me LIVET du barreau d' ALBERTVILLE ; à: MONSIEUR Y... JEAN-HENRI demeurant RESIDENCE EDEN CAP 105 AVENUE DES CHENES 06600-ANTIBES ; INTIME Représenté par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, Avoués et ayant pour Avocat Me GENOVESE du barreau de GRASSE COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 06 Février 2002 avec l'assistance de XXX, Greffier Et lors du délibéré, par : - Monsieur XXX, Conseiller, faisant fonction de Président, à ces fins désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 26 Novembre 2001 - Monsieur XXX, Conseiller - Madame XXX, Conseiller

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Monsieur Jean-Henri Y... a souscrit un engagement de caution solidaire des obligations de Monsieur Dominique X... envers la Société CREDIT AGRICOLE DE LA SAVOIE devenue CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE résultant d'un prêt de 50.000,00 F souscrit auprès de cette dernière. Monsieur Dominique X... a été déclaré en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de Grande Instance d'Albertville statuant en matière commerciale du 3 juin 1994. Monsieur Jean-Henri Y... a en sa qualité de caution réglé le 21 décembre 1994 à la Société CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE une somme de 30.506,67 F réduite à 28.213,18 Frs après déduction d'un trop-perçu. Puis, le 16 septembre 1994, la liquidation judiciaire de Monsieur Dominique X... a été prononcée, et cette procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif par décision du 16 juin 1995.

Par jugement du 28 juillet 1999, le Tribunal d'Instance de Moûtiers a, notamment, condamné Monsieur Dominique X... à payer à Monsieur Jean-Henri Y... la somme de 28.213,18 F correspondant à ce que ce dernier avait réglé en sa qualité de caution, outre des dommages-intérêts et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par déclaration au greffe en date du 7 septembre 1999, Monsieur Dominique X... a interjeté appel de cette décision. Par conclusions du 5 janvier 2000 vues par la Cour conformément à l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile, il demande la réformation du jugement déféré, et le rejet de toutes demandes de Monsieur Jean-Henri Y.... Il soutient, à cette fin, que la créance de ce dernier serait éteinte faute d'avoir été déclarée par lui au passif de son redressement judiciaire en application des dispositions de l'article 53 de la loi du 25 juillet 1985. Il ajoute que la déclaration faite à ce titre par la Société CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE ne dispenserait pas la caution d'en effectuer une pour son propre compte.

Dans ce cas, il demande condamnation de Monsieur Jean-Henri Y... à lui payer la somme de 5.000,00 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A titre subsidiaire, il demande qu'il soit dit qu'il n'est pas tenu des intérêts échus après la date d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire le concernant, dès lors qu'en vertu de l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa version antérieure à la réforme du 14 juin 1994, la caution n'était pas tenue des

intérêts sur la dette. Il conclut encore, dans un tel cas, au rejet de la demande de dommages-intérêts de Monsieur Jean-Henri Y... pour résistance abusive.

Monsieur Jean-Henri Y..., par conclusions du 20 janvier 2000 vues par la Cour conformément à l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile, demande la confirmation pure et simple du jugement déféré, en faisant valoir notamment que son recours contre Monsieur Dominique X... est fondé non pas sur l'article 2032 du Code Civil mais sur l'article 2029 du même code, et que, dès lors, il se trouve subrogé dans les droits de la Société CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE selon les termes de la déclaration de créance opérée par cette dernière. En outre, il aurait bien recouvré son droit de poursuite individuel contre Monsieur Dominique X... en application du dernier alinéa de l'article 169 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 10 juin 1994.

Il demande encore condamnation de Monsieur Dominique X... à lui payer la somme de 5.000,00 F à titre de dommages-intérêts en application de l'article 1153 alinéa 4 du Code Civil, et celle de 10.000,00 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

SUR QUOI sur l'extinction de la créance

Monsieur Dominique X... se prévaut de l'absence de déclaration de créance opérée personnellement par Monsieur Jean-Henri Y... au passif de son redressement judiciaire, pour invoquer l'extinction de la dette en application de l'article L. 621-46 du Nouveau Code de Commerce (anciennement 53 de la loi du 25 janvier 1985). Or, ce moyen n'aurait d'effet que si Monsieur Jean-Henri Y... exerçait son

recours contre Monsieur Dominique X... en application de l'article 2032 du Code Civil, c'est-à-dire avant d'avoir réglé le créancier, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. En effet, Monsieur Jean-Henri Y... agit après avoir réglé la créance de la Société CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE et dans les limites de ce règlement, et peut en conséquence invoquer les dispositions de l'article 2029 du Code Civil aux termes duquel il est entièrement subrogé dans les droits qu'avait le créancier contre le débiteur.

Dans la mesure où le paiement est intervenu après l'ouverture du redressement judiciaire de Monsieur Dominique X... dans le cadre duquel la Société CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE avait régulièrement déclaré sa créance avant d'avoir été réglée par la caution, cette dernière bénéficie des effets de cette déclaration puisqu'elle dispose, par les effets de la subrogation, de tous les droits et actions qui appartenaient au créancier avant paiement, et qui se rattachaient directement à la créance réglée ; tel est bien le cas de la déclaration d'une créance au sens de l'article L. 621-43 du code précité, laquelle équivaut à une demande en justice.

Dès lors, l'absence de déclaration de créance effectuée personnellement par Monsieur Jean-Henri Y... est inopérante, et le moyen tiré de l'extinction de la créance ne peut qu'être écarté. sur la condamnation à paiement et le montant de la dette

Monsieur Jean-Henri Y... fonde sa demande de condamnation à paiement de Monsieur Dominique X... sur les dispositions de l'article 169 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction antérieure à la réforme résultant de la loi du 10 juin 1994 ; en effet, cette dernière n'est applicable qu'aux procédures ouvertes à

compter du 22 octobre 1994, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque le redressement judiciaire de Monsieur Dominique X... a été ouvert le 3 juin de la même année. Monsieur Jean-Henri Y... ne bénéficie donc pas de la disposition selon laquelle "la caution (...) qui a payé aux lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci" résultant de cette réforme.

S'agissant du dernier alinéa de l'article 169 tel qu'il s'applique à l'espèce, ainsi formulé "les créanciers recouvrent leur droit de poursuite individuelle (...) lorsque le débiteur ou la personne morale dont il a été le dirigeant a été déclaré en état de cessation de paiement et que la procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif", il ne concerne que le cas où, par le passé, leur débiteur ou la personne morale qu'il dirigeait a déjà fait l'objet d'une procédure collective clôturée pour insuffisance d'actif ; il n'est pas démontré par Monsieur Jean-Henri Y... que tel ait été le cas en l'espèce, puisqu'il se contente d'alléguer à ce titre les éléments de la procédure collective ouverte le 3 juin 1994 et clôturée le 16 juin 1995.

Dès lors, Monsieur Jean-Henri Y... n'ayant pas recouvré son droit de poursuite individuelle, aucune condamnation ne peut intervenir en sa faveur contre Monsieur Dominique X... , mais il ne peut que voir fixer sa créance au passif de ce dernier dans les limites de la déclaration de la Société CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE.

Sur le montant dû, la Société CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE a déclaré au passif une créance en principal de 32.157,31 F et Monsieur Jean-Henri Y... lui a réglé celle au total de 28.213,18 F ainsi qu'il résulte des documents justificatifs versés aux débats et prenant en compte un

reversement de 2.293,49 F opéré par le Crédit Agricole. Ainsi, le montant pour lequel Monsieur Jean-Henri Y... est subrogé est, contrairement à ce que soutient l'appelant, parfaitement justifié par les pièces versées aux débats. S'agissant des intérêts, l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 devenu L. 621-48 du Nouveau Code de Commerce prévoit l'arrêt de leur cours au jour du redressement judiciaire sauf pour ceux résultant "de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an" alors que tel est bien le cas en l'espèce, puisque le prêt contracté par Monsieur Dominique X... auprès de la Société CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE l'était pour une durée de 48 mois. Les intérêts sur la créance pouvaient donc bien courir, en l'espèce, après l'ouverture du redressement judiciaire , et la demande de Monsieur Dominique X... tendant à les voir déduire de la créance n'est pas fondée.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Jean-Henri Y... tout ou partie des frais qu'il a dû engager dans la présente instance et qui ne sont pas compris dans les dépens ; il y a donc lieu de lui allouer une somme de 460 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, en sus de celle déjà allouée par le tribunal.

En revanche, Monsieur Jean-Henri Y... ne démontre pas le préjudice que lui cause la résistance de Monsieur Dominique X... puisqu'il ne peut dans la réalité poursuivre le recouvrement de sa créance. Ses demandes de dommages-intérêts ainsi fondées ne peuvent qu'être

rejetées.

Les dispositions de l'article 696 du Nouveau Code de Procédure Civile entrainent la mise des dépens de première instance et d'appel à la charge de M. X... qui succombe.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

statuant publiquement, par arrêt contradictoire après en avoir délibéré conformément à la loi,

Reçoit Monsieur Dominique X... en son appel, régulier en la forme. Au fond :

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a considéré que Monsieur Dominique X... doit à Monsieur Jean-Henri Y... la somme principale de 28.213,18 F, quant à l'indemnité fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et quant aux dépens.

L'INFIRME pour le surplus et, statuant à nouveau,

DIT qu'il ne peut y avoir lieu à condamnation de Monsieur Dominique X... à ce titre, Monsieur Jean-Henri Y... n'ayant pas recouvré son droit de poursuite individuelle.

En conséquence, fixe la créance de Monsieur Jean-Henri Y... au passif du redressement judiciaire de Monsieur Dominique X... à la

somme de 28.213,18 F soit 4.301,07 euros.

Condamne Monsieur Dominique X... à payer à Monsieur Jean-Henri Y... la somme de 460 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Rejette toutes les autres demandes.

Condamne Monsieur Dominique X... aux dépens d'appel, avec application, au profit de la S.C.P BOLLONJEON, ARNAUD, BOLLONJEON, avoués associés, des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ainsi prononcé en audience publique le 2 AVRIL 2002 par Monsieur XXX, Conseiller, faisant fonction de Président, qui a signé le présent arrêt avec XXX, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Numéro d'arrêt : 1999/02236
Date de la décision : 02/04/2002

Analyses

CAUTIONNEMENT - Caution - Recours contre le débiteur principal.

La caution qui a payé le créancier après l'ouverture du redressement judiciaire du débiteur est, selon les termes de l'article 2029 du Code civil, subrogée dans tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur. Dès lors, la caution peut agir contre le débiteur en fixation de cette créance alors même qu'elle ne l'a pas déclarée au passif puisqu'elle se trouve subrogée dans les droits du créancier qui a quant à lui procedé à cette formalité

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Généralités - Loi du 10 juin 1994 - Application dans le temps.

La caution d'un débiteur ayant fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire avant l'application de la Loi du 16 juin 1994 ne peut se prévaloir de la disposition de l'article 169 de la Loi du 25 janvier 1985 selon laquelle la caution qui a payé en lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci. En application des dispositions de ce texte dans sa rédaction antérieure à la Loi de 1994, le créancier ne recouvre son droit de poursuite individuelle que dans l'hypothèse ou dans le passé, le débiteur a déjà fait l'objet d'une procédure collective clôturée pour insuffisance d'actif. Dès lors, la caution qui a payé le créancier après l'ouverture de la procédure collective ne recouvre pas de plein droit son droit de poursuite individuelle contre le débiteur après la clôture de la procédure

CAUTIONNEMENT - Caution - Action des créanciers contre elle - Redressement ou liquidation judiciaire du débiteur principal.

Au terme des dispositions de l'article L.621-48 du Code de commerce, le ju- gement d'ouverture du redressement judiciaire arrête le cours des intérêts légaux ou conventionnels sauf pour ceux résultant de contrats de prêt pour une durée supérieure ou égale à deux ans. En conséquence, la mise en re- dressement judiciaire d'un débiteur ayant contracté un prêt auprès d'une banque pour une durée de 48 mois ne cesse pas de faire courir les intérêts attachés à la créance


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2002-04-02;1999.02236 ?
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