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22/01/2002 | FRANCE | N°1998/03214

France | France, Cour d'appel de chambéry, 22 janvier 2002, 1998/03214


LE VINGT DEUX JANVIER DEUX MIL DEUX LA CHAMBRE COMMERCIALE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont la teneur suit : dans la cause 1998/03214 - section 9 (F.C./E.M.) opposant : LA SA BOUVIER HYDRO dont le siège social est 49/51 BOULEVARD PAUL LANGEVIN 38600-FONTAINE ; Représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX APPELANTE Représentée par ME DELACHENAL, Avoué et ayant pour Avocats la SCP FOLCO TOURETTE du barreau de GRENOBLE ; à: LA SA SAVOISIENNE DE PRODUCTION ELECTRIQUE AUTONOME dont le siège social est CENTRALE DE LA PERRIERE 73460-SAINTE HELENE SUR ISERE ; Représentée par SES

DIRIGEANTS LEGAUX INTIMEE Représentée par la SCP VASSEUR ...

LE VINGT DEUX JANVIER DEUX MIL DEUX LA CHAMBRE COMMERCIALE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont la teneur suit : dans la cause 1998/03214 - section 9 (F.C./E.M.) opposant : LA SA BOUVIER HYDRO dont le siège social est 49/51 BOULEVARD PAUL LANGEVIN 38600-FONTAINE ; Représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX APPELANTE Représentée par ME DELACHENAL, Avoué et ayant pour Avocats la SCP FOLCO TOURETTE du barreau de GRENOBLE ; à: LA SA SAVOISIENNE DE PRODUCTION ELECTRIQUE AUTONOME dont le siège social est CENTRALE DE LA PERRIERE 73460-SAINTE HELENE SUR ISERE ; Représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX INTIMEE Représentée par la SCP VASSEUR BOLLONJEON ARNAUD, Avoués et ayant pour Avocat ME M. X... du barreau de CHAMBERY LA SA BOUVIER DARLING dont le siège social est 49/51 BOULEVARD PAUL LANGEVIN 38600-FONTAINE ; Représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX INTIMEE Représentée par ME DANTAGNAN, Avoué et ayant pour Avocat ME PETERKA du barreau de PARIS ; LA COMPAGNIE D'ASSURANCES CIGNA INTERNATIONAL dont le siège social est 114 RUE BALLU 75009-PARIS ; Représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX INTIMEE Représentée par ME DANTAGNAN, Avoué et ayant pour Avocat ME PETERKA du barreau de PARIS ; LA COMPAGNIE D'ASSURANCES GERLING dont le siège social est à 75116 PARIS 111/113 rue de Longchamp INTIMEE Représentée par Me PELET avocat COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 27 Novembre 2001 avec l'assistance de XXX, Greffier Et lors du délibéré, par : - XXX, Président - XXX, Conseiller - XXX, Conseiller

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EXPOSE DU LITIGE

La Société de Production Electrique Autonome (S.P.E.A) . qui exploite

une micro centrale hydraulique à Sainte Hélène sur Isère (Savoie), a souhaité, à la fin de l'été 1994, procéder au remplacement de la roue PELTON et des roulements à bille d'une des génératrices d'électricité de sa centrale de production qui en comporte trois.

Elle a confié ce travail à la société BOUVIER HYDRO qui était déjà intervenue sur cette génératrice.

La société BOUVIER HYDRO a fait appel à la société BOUVIER DARLING qui a dépêché deux de ses salariés sur le site le 12 octobre 1994 vers 9 heures.

Monsieur Y..., salarié de la S.P.E.A. a dégagé la génératrice de son support et l'a installée sur deux plots en bois puis a quitté les lieux.

Lorsqu'il est revenu plus tard dans la matinée, il a constaté que les deux ouvriers avaient été écrasés par la roue PELTON qu'ils étaient employés à démonter.

Une information pénale a été ouverte contre X qui s'est terminée par une ordonnance de non-lieu en date du 28 décembre 1995.

Par acte en date du 10 juin 1996, la société S.P.E.A. a fait assigner la société BOUVIER HYDRO pour la voir déclarer responsable du retard dans l'exécution de sa prestation et du préjudice résultant de l'immobilisation de la génératrice et condamner à lui payer la somme de 500.000,00 francs à titre de dommages-intérêts.

La société BOUVIER HYDRO a appelé en garantie son assureur, la

société GERLING, ainsi que la société BOUVIER DARLING et l'assureur de celle-ci, la société CIGNA.

Par jugement en date du 24 novembre 1998 auquel le présent arrêt se réfère pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, le Tribunal de Grande Instance d'Albertville statuant en matière commerciale a notamment :

- déclaré la société BOUVIER HYDRO entièrement responsable du préjudice résultant pour la société S.P.E.A. de l'immobilisation de la génératrice objet de l'intervention du 12 octobre 1994,

- sursis à statuer sur l'évaluation de ce préjudice,

- avant dire droit, ordonné une expertise confiée à Monsieur Pascal Z... avec mission, connaissance prise du dossier, les parties préalablement convoquées, de donner son avis motivé et détaillé sur le montant du préjudice ayant résulté pour la société S.P.E.A. de l'immobilisation du 12 octobre 1994 au 14 avril 1995 de la génératrice objet de l'intervention du 12 octobre 1994, se faire communiquer tous documents utiles à l'objet de sa mission, entendre tous sachants, répondre à tous dires des parties,

- condamné la société BOUVIER HYDRO à payer à la société S.P.E.A. une indemnité provisionnelle de 30.000,00 francs et ce, avec exécution provisoire,

- condamné la société BOUVIER HYDRO à lui payer la somme de 6.000,00 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- rejeté la demande reconventionnelle et les appels en garantie de la société BOUVIER HYDRO,

- condamné la société BOUVIER HYDRO à payer au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile la somme de 4.000,00 francs à la société GERLING et la somme de 6.000,00 francs indivisément aux

sociétés DARLING et CIGNA,

- condamné la société BOUVIER HYDRO aux dépens exposés à ce jour.

La société BOUVIER HYDRO a relevé appel de ce jugement.

Dans des écritures signifiées le 22 avril 1999, elle fait valoir:

- qu'elle n'encourt aucune responsabilité dans la mesure où elle-même ou ses préposés n'ont commis aucune faute, tout en reconnaissant qu'elle était tenue à une obligation de résultat vis-à-vis de sa cliente, la société S.P.E.A.,

- que l'immobilisation de la roue PELTON est due au fait que celle-ci a été placée sous scellés pendant plusieurs mois, que le maintien inutile sous scellés pendant de nombreux mois de l'installation a contribué à augmenter dans des proportions non négligeables le préjudice de la société S.P.E.A.,

- que si elle encourt à l'encontre de la société S.P.E.A. une responsabilité contractuelle, les dommages en résultant ont cessé dès le mois de décembre 1994,

- qu'en ce qui concerne l'intervention de la société BOUVIER DARLING, il est étonnant que le Tribunal ait retenu le prêt de main d'oeuvre pour exonérer celle-ci de toute responsabilité car il est illicite, que si elle s'était contentée de mettre du personnel à sa disposition, elle se serait rendue coupable du délit de marchandage, que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude et qu'une telle situation qui ne correspond d'ailleurs pas à la réalité ne peut lui être opposée,

- qu'elle est la filiale de la société BOUVIER DARLING, qu'aux termes du protocole du 19 mars 1992 passé entre les deux sociétés qui l'ont créée, il était prévu qu'elle sous-traiterait à la société BOUVIER DARLING l'intégralité de la fabrication, du montage sur site et de la

mise en service des opérations qu'elle réaliserait, que c'est dans ce cadre qu'elle a passé commande à la société BOUVIER DARLING de la fabrication de la roue de rechange et de son remplacement sur le site,

- qu'il n'y avait pas lieu à un contrat de sous-traitance puisque le protocole qui liait les deux sociétés prévoyait le principe systématique de cette sous-traitance, que d'ailleurs pendant toute la durée dudit protocole, il a été procédé ainsi, qu'il ne pouvait de surcroît en être autrement dès lors que tout le savoir-faire en matière de fabrication, de montage et de mise en service se trouvait pendant la période considérée dans la maison mère,

- qu'elle n'emploie pas de monteur, que le procès-verbal de réunion du C.H.S.C.T. en date du 21 octobre 1994 confirme que c'est la société BOUVIER DARLING et elle-seule qui était à même de définir et qui avait effectivement défini un mode opératoire,

- que les monteurs sont intervenus sur les instructions du responsable du montage extérieur de la société BOUVIER DARLING, Monsieur Pierre A..., et que tout le matériel d'intervention a été fourni par la société BOUVIER DARLING,

- que la preuve du contrat de sous-traitance est rapportée .

Elle demande à la Cour de :

"Déclarer recevable l'appel de la société BOUVIER HYDRO et le dire bien fondé,

Donner acte à la société BOUVIER HYDRO de ce qu'elle s'en rapporte à Justice sur le principe de sa responsabilité contractuelle à l'encontre de la société SPEA,

Réformant , dire que la société BOUVIER HYDRO ne saurait être tenue des conséquences de l'immobilisation de la génératrice de la société SPEA au-delà de la date du 7 décembre 1994, date à laquelle , de

l'avis même du Parquet , l'installation aurait pu être libérée des scellés mis en place sur ordonnance du Juge d'Instruction,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré inopposable à la société BOUVIER HYDRO l'évaluation du préjudice de la sociétéSPEA tel que résultant d'une analyse comptable non contradictoire et confirmer, en conséquence, la mesure d'expertise ordonnée par le tribunal.

Réformant totalement pour le surplus, dire et juger que l'intervention de la société BOUVIER DARLING n'a pu consister en un prêt de main d'oeuvre au profit de la société BOUVIER HYDRO, ledit prêt de main d'oeuvre étant d'ailleurs illicite puisque n'entrant pas dans un des cas autorisés par la loi.

Constater au contraire qu'il résulte du protocole du 12 mars 1992 passé entre les sociétés VA M.C.E. et BOUVIER DARLING pour la constitution de la société BOUVIER HYDRO, de l'acte de cession de fonds de commerce passé entre la société BOUVIER DARLING et la société BOUVIER HYDRO le 19 mars 1992, de la documentation technique de la société BOUVIER DARLING, du savoir faire et du personnel dont celle ci disposait au moment de l'accident et dont ne disposait pas la société BOUVIER HYDRO, que la société BOUVIER DARLING est intervenue sur l'opération considérée en qualité de sous-traitante de la société BOUVIER HYDRO.

Dire et juger, en conséquence, qu'en sa qualité de sous-traitante, la société BOUVIER DARLING était tenue à l'égard de la société BOUVIER HYDRO d'une obligation de résultat à laquelle elle a failli.

En conséquence, condamner la société BOUVIER DARLING, et son assureur, la société CIGNA, à relever et garantir intégralement la société BOUVIER HYDRO de toute condamnation prononcée à son encontre sur la demande de la société SPEA.

Condamner la société BOUVIER DARLING et la société SPEA à payer à la

société BOUVIER HYDRO la somme de 20 000 Frs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'au entiers dépens, ceux d'appel étant récupérés par Maitre DELACHENAL, avoué, conformément aux disposition de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile".

Par voie de conclusions signifiées le 2 décembre 1999, la SA BOUVIER DARLING et la Compagnie CIGNA INTERNATIONAL expliquent :

- que l'ordre d'achat qu'a passé la société BOUVIER HYDRO à la société BOUVIER DARLING le 11 octobre 1994 ne peut s'analyser en un contrat de sous-traitance,

- que les prescriptions résultant de cet ordre d'achat se sont imposées à la société BOUVIER DARLING et aux salariés qu'elle a mis à la disposition de la société BOUVIER HYDRO, que ces salariés se sont trouvés placés sous la subordination de la société BOUVIER HYDRO, que la prestation de la société BOUVIER DARLING s'est limitée à cette mise à disposition de personnel spécialisé, que la mise à disposition en cause s'analyse comme un prêt de main d'oeuvre,

- que toutes les conditions d'un prêt licite de main d'oeuvre étaient réunies, que le motif de la mise à disposition tenait à la nécessité pour la société BOUVIER HYDRO de réaliser une opération de remplacement d'une roue PELTON, ces salariés ayant une spécialisation inexistante chez elle,

- que la société BOUVIER DARLING a parfaitement rempli ses obligations, l'accident survenu le 12 octobre 1994 étant de la seule responsabilité de la société BOUVIER HYDRO, qu'en effet, dans l'ordre d'exécution des travaux, était prévu le matériel nécessaire au démontage et au remontage de la roue PELTON à l'exclusion du dispositif de sécurité, qu'il incombait à la société BOUVIER HYDRO d'imposer aux salariés la mise en oeuvre du dispositif de sécurité.

Elles concluent à la confirmation de la décision entreprise, au débouté de la société BOUVIER HYDRO de l'intégralité de ses demandes, à la condamnation de la société BOUVIER HYDRO à payer à la société BOUVIER DARLING la somme de 15.000,00 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et aux entiers dépens avec pour ceux d'appel application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de Maître DANTAGNAN, avoué.

La S.P.E.A. soutient dans des conclusions signifiées le 16 septembre 1999 :

- que l'ouverture de l'information pénale et le préjudice lié à l'immobilisation de sa génératrice principale sont les conséquences directes de l'accident survenu lors du démontage de la roue PELTON dont la société BOUVIER HYDRO ne conteste pas être la seule responsable,

- que c'est au moment de la faute et non de ses conséquences dommageables que doit s'apprécier l'existence d'une force majeure exonératoire,

- que l'information pénale ne peut constituer un cas de force majeure en faveur de la société BOUVIER HYDRO.

Elle demande à la Cour de :

- dire et juger recevable mais mal fondé l'appel de la société BOUVIER HYDRO,

- confirmer la décision entreprise,

- y ajoutant,

- condamner la société BOUVIER HYDRO à lui payer la somme de 10.000,00 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- la condamner aux entiers dépens d'instance et d'appel, avec application pour ces derniers des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de la SCP VASSEUR-BOLLONJEON-ARNAUD, avoués associés.

Par acte d'avoué à avoué en date du 8 septembre 1999, la SA BOUVIER HYDRO a déclaré se désister de son appel à l'encontre de la société GERLING.

SUR CE, LA COUR Sur le désistement d'appel de la société BOUVIER HYDRO à l'égard de la Compagnie d'Assurance GERLING

Attendu qu'il y a lieu de donner acte à la société BOUVIER HYDRO de ce qu'elle se désiste de son appel à l'égard de la compagnie d'assurance GERLING ; Sur la responsabilité de la société BOUVIER HYDRO à l'égard de la société S.P.E.A.

Attendu qu'il est constant que la société S.P.E.A. a confié à la société BOUVIER HYDRO le remplacement de la roue PELTON et des roulements à bille d'une des génératrices d'électricité de sa centrale de production ;

que la société BOUVIER HYDRO qui a accepté de réaliser cette prestation a contracté à cet égard envers la société S.P.E.A. une obligation de résultat ;

que le 12 octobre 1994, lors de son démontage par deux salariés de la société BOUVIER DARLING dont l'intervention avait été sollicitée par la société BOUVIER HYDRO, la roue est tombée sur ceux-ci qui ont été écrasés et sont décédés ;

que dans le cadre de l'information pénale qui a été ouverte, une expertise a été confié à Monsieur René B... d'une part puis à

Messieurs Pierre C... et Pierre BELLE, d'autre part ,

que Monsieur B... a conclu dans un rapport en date du 23 novembre 1994 : "L'accident est dû à l'oubli "volontaire ou involontaire" de la mise en place du système de démontage avant de procéder au desserrage du Dynanobloc (les vis posés à côté). Aucune autre cause, ou manquement, n'est à mettre au compte à la S.P.E.A. ou à l'entreprise BOUVIER HYDRO. Un seul ouvrier pouvait démonter le Dynanobloc. La présence de M. Y... n'était pas justifiée pendant l'opération de démontage" ;

que Messieurs C... et BELLE ont quant à eux exposé dans un rapport en date du 4 mai 1995 :

- que les différents rapports de gendarmerie sont clairs, qu'ils indiquent que le jour du sinistre, avant le désaccouplement de la roue de son axe, les dispositifs de sécurité n'avaient pas été installés, que l'étrier de sécurité , ou appareil de démontage, utilisé pour contrôler la descente de la roue n'avait pas été mis en place, que les deux madriers de retenue, mis généralement en secours sous la roue, étaient restés à l'extérieur, que l'absence de l'étrier de sécurité était confirmée par l'obstruction des deux trous taraudés M 14 dans la roue, prévus pour recevoir les deux tiges filetées de l'étrier de sécurité, entièrement bouchées par le produit d'étanchéité durci, étant précisé que le trou taraudé M 20, au centre de l'axe de l'alternateur, devant recevoir la tige filetée centrale de l'étrier de sécurité, ne présentait pas de défaut significatif pour interdire la mise en place de cette pièce,

- que les conditions de fonctionnement de la génératrice n'avaient pas eu d'incidence sur l'accident,

- que l'appareil d'assemblage n'était pas desserré avant le démontage;

que l'information pénale a en réalité permis d'établir que les deux

victimes n'avaient pas mis en place le dispositif en U permettant le démontage de la roue de la turbine en toute sécurité et qu'ainsi, il n'y avait pas de faute de quiconque en dehors des victimes. ;

qu'il est indiqué dans l'ordonnance de non-lieu qu'il s'est avéré que les trous de fixation des tiges filetées de diamètre de 14 mm, utilisées pour assurer le démontage de la roue avec toute la sécurité requise, étaient remplis d'un produit plastique bleu, produit qui n'a pas été retiré de sorte que le dispositif de sécurité en U n'a jamais été installé ou tenté d'être installé ; que cette non-utilisation des tiges filetées a été corroborée par leur présence sur le sol, derrière la génératrice ; qu'enfin, les expertises et l'étude de l'anneau de serrage par l'APAVE ont mis en évidence que tous les boulons ou vis de serrage ont été actionnés par les monteurs et que c'est le déblocage du dernier boulon ou vis de l'anneau de serrage qui libère la roue de l'axe de l'alternateur ;

Attendu que suite à l'accident du 12 octobre 1994, la génératrice s'est trouvée immobilisée pour les besoins de l'information pénale ; que par courrier en date du 16 novembre 1994, le conseil de la S.P.E.A. a sollicité du magistrat instructeur l'autorisation de remettre en fonctionnement la turbine dès lors que les opérations d'expertise avaient eu lieu ;

que le Procureur de la République a a fait connaître le 7 décembre 1994 qu'il n'avait cause d'opposition à la remise en fonctionnement de la génératrice sous réserve d'en informer l'avocat de la partie civile ;

que par courrier du 27 décembre 1994, le magistrat instructeur a estimé ne pouvoir faire droit à la requête eu égard aux nombreuses incertitudes sur la cause de l'accident et à la nécessité d'autres

investigations techniques et d'une reconstitution des opérations de démontage ;

que c'est par une ordonnance du 7 avril 1995 qu'il a ordonné la restitution d'office des scellés n° 1 et 2 relatifs à la génératrice à l'exception de celui de la roue de turbine et du dynanobloc ;

que cette ordonnance a été communiquée au conseil de la société S.P.E.A. par soit-transmis du 10 avril 1995 ;

qu'il n'est pas contesté que la génératrice a été remise en service le 14 avril 1995 ;

Attendu qu'en l'état de l'accident dont ont été victimes les deux monteurs de la société BOUVIER DARLING, le remplacement de la roue et des roulements à bille de la génératrice n'est pas intervenu à la date convenue et que la génératrice a été immobilisée pendant environ 7 mois ; que la société BOUVIER HYDRO dont il est établi par le seul fait de l'accident qu'elle a failli à son obligation de résultat n'établit pas ni même n'allègue devant la Cour qu'il procède d'une cause étrangère de nature à l'exonérer de sa responsabilité résultant de l'inexécution de son obligation;

que le fait des deux monteurs qui n'est ni extérieur, ni imprévisible ni irrésistible ne peut constituer une telle cause étrangère exonératoire ;

qu'elle n'établit pas non plus ni n'allègue en cause d'appel une faute de la société S.P.E.A. que le Tribunal a à bon droit écartée par des motifs pertinents qui doivent en tant que de besoin être adoptés ;

qu'elle estime par contre qu'au-delà du 7 décembre 1994, l'installation a été inutilement maintenue sous main de justice et qu'elle ne saurait se voir imputer les conséquences de l'immobilisation postérieure à cette date ;

qu'il n'est cependant pas sérieusement contestable que c'est à l'occasion de la prestation à laquelle elle s'était engagée envers la S.P.E.A. qu'est intervenu l'accident au cours duquel deux salariés de la société BOUVIER DARLING sont décédés, ce qui a entraîné l'ouverture d'une information pénale et, pour les besoins de celle-ci, l'immobilisation de l'installation du jour de l'accident jusqu'au 14 avril 1995 ;

qu'ainsi que l'a relevé le tribunal, c'est parce qu'il y eu accident à l'occasion de la prestation de la société BOUVIER HYDRO qu'une information pénale a été ouverte et que la génératrice a été placée sous mains de justice, que l'information pénale et l'immobilisation jusqu'à la restitution des scellés sont les conséquences directes de l'accident survenu lors du démontage de la roue Pelton, que c'est par rapport à la faute ou au fait dommageable, c'est-à-dire en l'espèce l'accident, que doit s'apprécier l'existence de la cause étrangère exonératoire et non par rapport à ses conséquences dommageables c'est-à-dire la durée de l'immobilisation, que la décision du magistrat instructeur de maintenir l'installation sous mains de justice au-delà du 7 décembre 1994, malgré des réquisitions contraires du Ministère Public, et jusqu'au 7 avril 1995 n'est de nature ni a exonérer la société BOUVIER HYDRO de sa responsabilité ni à réduire l'étendue du préjudice qui lui est imputable ;

que cette société qui ne conteste pas le principe de son obligation de résultat et de sa responsabilité à l'égard de la S.P.E.A. est mal fondée à en contester l'étendue en ce qui concerne l'immobilisation au-delà au 7 décembre 1994 ;

qu'elle a été à bon droit déclarée responsable du préjudice résultant de l'immobilisation de l'installation à compter du 12 octobre 1994 étant observé qu'il n'est pas contesté qu'elle a été remise en service le 14 avril 1995, suite à la décision de restitution de

scellés du magistrat instructeur en date du 7 avril 1995 notifiée au conseil de la S.P.E.A. le 10 avril 1995 ;

que le préjudice doit donc bien être pris en compte jusqu'à la date du 14 avril 1995 ; Sur l'action récursoire de la société BOUVIER HYDRO à l'encontre de la société BOUVIER DARLING et de son assureur la société CIGNA

Attendu que la société BOUVIER HYDRO soutient que la société BOUVIER DARLING est intervenue dans le cadre d'une convention de sous-traitance tandis que celle-ci se prévaut d'un prêt de main-d'oeuvre ;

Attendu qu'il y a sous-traitance lorsqu'une entreprise se voit confier par une autre entreprise l'exécution d'une tâche définie sous sa propre responsabilité et avec le concours de son propre personnel ;

que le prêt de main d'oeuvre n'est pas prohibé par l'article L 125-3 du Code du Travail lorsqu'il n'est que la conséquence nécessaire de la transmission d'un savoir-faire ou de la mise en place d'une technicité qui relève de la spécificité propre de l'entreprise prêteuse ;

Attendu qu'il est versé au dossier un accord général conclu entre les sociétés VOEST-ALPINE Machinery, Construction etamp; Engineering (en abrégé VA M.C.E.) et Bouvier Darling le 19 mars 1992 aux termes duquel elles ont fondé une société d'actions, la société BOUVIER HYDRO; que le chapitre VI prévoit : "article 15 : - 15-1. La SOCIETE est disposée à utiliser sur une base d'exclusivité la capacité des ateliers de production de BD durant les années civiles de telle manière qu'un minimum de 15.000,00 heures de services de production

(y compris mais non limités aux usinages, soudages, meulages, assemblages, essais, services sur site) sera commandé à BD par année civile. ......................................... - 15-2. BD s'engage à fournir à la SOCIETE tous les services de fabrication (y compris la préparation) en y apportant le même soin qu'elle y apporte pour son propre compte; De plus, BD acceptera les mêmes obligations pour sa part de fourniture que la SOCIETE assurera vis-à-vis de ses clients.................................................... - 15-3. Préalablement à toute proposition effectuée auprès des clients, la SOCIETE doit informer BD de la teneur du projet, de façon à permettre à cette dernière de lui communiquer le planning de fabrication envisageable. La SOCIETE passera la commande de services de production par écrit à BD, en indiquant les spécifications et la description du produit, la date de livraison demandée et toute autre instruction et spécification particulière. BD accusera réception de ces commandes et fera part de ses éventuels commentaires dans les 15 jours de leur réception. Au-delà de cette période, les commandes seront réputées acceptées sans aucune réserve. Si les spécifications ne sont pas suffisamment détaillées, BD demandera des instructions complémentaires raisonnables..................... Quinze jours avant la date de livraison de chaque produit, BD devra informer la SOCIETE afin de permettre aux représentants de celle-ci de prendre les mesures nécessaires pour la vérification de la conformité du produit avec les spécifications. ..................................................................... .......................... Les services extérieurs sont fournis seulement en liaison avec un contrat de fourniture d'équipement entre la SOCIETE et ses clients.Les autres demandes de services extérieurs tels que réparations, entretien, etc. devront être acceptées par BD si le personnel est disponible.", étant précisé que le terme la

SOCIETE vise la société BOUVIER HYDRO, BD étant les initiales de la société BOUVIER DARLING ;

que suivant acte en date également du 19 mars 1992, la société BOUVIER DARLING a cédé à la société BOUVIER HYDRO ses activités de conception et de commercialisation de turbines ;

que c'est dans le cadre de ces conventions que la société BOUVIER HYDRO a passé commande à la société BOUVIER DARLING de laet de commercialisation de turbines ;

que c'est dans le cadre de ces conventions que la société BOUVIER HYDRO a passé commande à la société BOUVIER DARLING de la fabrication de la roue de rechange puis de son remplacement sur le site ;

que selon ordre d'achat n° A3HO6OOD en date du 15 avril 1993, elle a passé commande à la société BOUVIER DARLING d'une roue de rechange PELTON au prix HT de 147.120,00 francs, avec une date de livraison fixée au 15 décembre 1993 ; qu'il était précisé sur cet ordre d'achat qu'il concernait l'affaire de Sainte-Hélène-Sur-Isère ;

qu'elle a facturé cette roue PELTON à la société S.P.E.A. le 16 décembre 1993 au prix HT de 235.000,00 francs soit 278.710,00 francs TTC ;

que par courrier du 28 septembre 1994, elle a communiquait à la société S.P.E.A. ses meilleures conditions d'intervention sur site pour le démontage et le remontage après intervention Alsthom sur la génératrice de la roue de la turbine à savoir :

I- Main d'oeuvre et déplacement pour une durée estimée à un jour (ou deux jours en cas de difficultés importantes au démontage) pour le démontage et à un jour pour le remontage,

estimatif total pour 2 jours : environ FF 15.000,00 HT

estimatif total pour 3 jours : environ FF 22.000,00 HT

II- Matériel remplacement du dispositif de fixation de la roue sur l'arbre et fourniture de celui-ci au prix de FF 2.100,00 francs ;

que la société S.P.E.A. lui a retourné ce document après y avoir apposé la mention "Bon pour accord" suivie d'une signature ;

que la société BOUVIER HYDRO a alors établi un ordre d'exécution n° 4H028 en date du 7 octobre 1994 relatif au client S.P.E.A., affaire Sainte-Hélène-Sur-Isère, qui mentionnait :

"Description du matériel - Désignation 1 - Intervention 2 monteurs le 12.10.94 à STE HELENE s/ISERE pour démontage roue de la turbine PELTON verticale Bouvier en vue remplacement par rechange 1 - Intervention 2 monteurs le 26.10.94 à STE HELENE s/ISERE pour remontage roue de rechange de la turbine PELTON verticale Bouvier après remise en état de la génératrice par Alsthom Nancy

Observations particulières 1/ Prévoir dégrippant pour extraction dynanobloc et roue à l'aide de l'extracteur disponible à la centrale, 2/ dynanobloc de remplacement fourni par Bouvier Hydro (posiva-Tas 3020 140x190) - Prévoir dynamométrique pour serrage 22 vis H M 12 au couple 145 nm" ;

que contrairement à ce que soutient la société BOUVIER DARLING, il n'était nullement mentionné sur cet ordre d'exécution que le responsable de l'opération était BOUVIER HYDRO ; que cet ordre d'exécution comportait par contre une rubrique intitulée "responsables BOUVIER HYDRO"" sous laquelle figuraient trois autres rubriques à savoir Superviseur, Chargé d'affaires et Projeteur, celle Chargé d'affaires ayant été complétée des initiales DS ;

que selon ordre d'achat n° A4HO290001 daté du 11 octobre 1994, la société BOUVIER HYDRO a passé commande à la société BOUVIER DARLING de l'intervention d'un monteur en deux phases suivant détails de l'ordre d'exécution 4H028 du 10 octobre 1994, avec une date de livraison fixée au 12 octobre 1994 ;

Attendu qu'il ressort des pièces ci-dessus que c'est à la demande de

la société BOUVIER HYDRO et dans le cadre des conventions entre les sociétés VA M.C.E et BOUVIER DARLING et BOUVIER DARLING et BOUVIER HYDRO que la société BOUVIER DARLING a fabriqué la roue de remplacement PELTON de la génératrice de la société S.P.E.A. et qu'elle devait procéder au démontage de l'ancienne roue et au montage de la nouvelle ;

qu'elle a dépêché deux de ses salariés sur le site de la société S.P.E.A. pour le démontage de l'ancienne roue le 12 octobre 1994 et que c'est à cette occasion que l'accident est survenu ;

que tandis que le démontage et le remontage étaient la suite logique de la fabrication et de la fourniture de la roue de la génératrice et qu'en l'espèce, il y a eu de la part de la société BOUVIER DARLING à la fois fabrication et fourniture de matériel et fourniture de main d'oeuvre, l'opération apparaît davantage comme une prestation de services que comme un prêt de main d'oeuvre ;

que de plus, lors de son audition par les gendarmes le 12 octobre 1994, Monsieur Gérard D..., directeur de production de la société BOUVIER DARLING a lui-même expliqué que cette société avait été sollicitée par la société BOUVIER HYDRO pour intervenir sur la centrale hydraulique de "La Perrière" à Sainte Hélène sur Isère pour le client S.P.E.A. et qu'elle avait envoyé sur ce chantier Messieurs E... et LA RIZZA ; que dans cette déclaration, il n'était pas question d'un prêt de main d'oeuvre mais d'une demande de prestation de service ;

qu'il est également versé au dossier de nombreux ordres d'achat adressés par la société BOUVIER HYDRO à la société BOUVIER DARLING et ayant pour objet indifféremment la fabrication et la fourniture de pièces de rechange ou l'intervention de personnel sur sites, lesquels démontrent que ces sociétés avaient systématiquement recours à cette formule pour formaliser leurs relations ;

qu'il apparaît ainsi qu'au-delà de la terminologie employée, les ordres d'achat et ordres d'exécution adressés par la société BOUVIER HYDRO à la société BOUVIER DARLING doivent en réalité s'analyser comme des bons de commandes pur et simples ;

qu'ils s'adressaient à la société BOUVIER DARLING et non à ses employés directement ;

qu'il n'est pas par ailleurs pas contesté que la société BOUVIER DARLING a seule choisi et désigné les deux monteurs qu'elle a envoyés sur le site le 12 octobre 1994 ;

que dès lors que ces salariés étaient ses salariés et donc dans un lien de subordination à son égard, il appartient à cette société qui se prévaut en ce qui les concerne d'un prêt de main-d'oeuvre à la société BOUVIER HYDRO de rapporter la preuve qu'ils sont passés au moins provisoirement sous la subordination de celle-ci ;

qu'à cet égard, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'ils ont reçu personnellement des instructions directement de la société BOUVIER HYDRO et qu'elle était habilitée à leur en donner ;

qu'une telle conclusion ne saurait être tirée du fait que l'ordre d'exécution portait sur l'intervention de deux monteurs à des dates déterminées et de qu'il y était précisé sous une rubrique "observations particulières" qu'il fallait prévoir du dégrippant et, du fait de la fourniture d'un dynanobloc par la société BOUVIER HYDRO, un dynamométrique pour serrage d'autant que ces éléments s'adressaient à la société BOUVIER DARLING et non à ses salariés ; qu'il s'agissait là en effet d'instructions ou de spécifications au sens de l'article 15-3 de l'accord général conclu entre la VA MCE et la société BOUVIER DARLING le 19 mars 1992 ;

qu'il n'apparaît même pas que les deux monteurs aient eu affaire de quelque façon que ce soit à la société BOUVIER HYDRO ou à un représentant ou un préposé de celle-ci en ce qui concerne l'opération

dont s'agit ;

qu'il résulte d'un document à en-tête de la société BOUVIER DARLING intitulé MODE OPERATOIRE DEMONTAGE ROUE TURBINE VERTICALE annexé au compte-rendu du C.H.S.C.T. en date du 14 octobre 1994 que le mode opératoire de l'intervention était défini par la société BOUVIER DARLING et que Messieurs E... et LARRIZA agissaient donc bien selon les instructions de celle-ci ; qu'il ne pouvait du reste en être autrement puisque tout le savoir-faire en matière de fabrication, de montage et de mise en service se trouvait à l'époque considérée au sein de la société BOUVIER DARLING ;

que de surcroît, la société BOUVIER HYDRO n'employait quant à elle aucun personnel d'exécution ;

qu'il est aussi indiqué dans le compte-rendu du C.H.S.C.T. que tout le matériel nécessaire avait été emporté de l'atelier de la société BOUVIER DARLING de FONTAINE (Isère) et que des madriers étaient disponibles pour caler la roue, qu'il a été constaté que l'outillage n'avait pas été mis en place ni le calage de la roue, que les outillages nécessaires à la dépose avaient été retrouvés dans le coffre de la voiture des deux monteurs, garée devant la porte ;

que lors de son audition par les gendarmes le 12 octobre 1994 déjà évoquée précédemment, Monsieur D... de la société BOUVIER DARLING a enfin confirmé que les opérateurs étaient partis le matin avec le maximum d'outillages et d'informations pour cette intervention, ce qui prouve bien que cette société avait conscience de ce qu'elle devait fournir tout le matériel nécessaire au démontage et au remontage, y compris le dispositif de sécurité, et assumer la responsabilité de l'opération ;

qu'en définitive, dès lors qu'il y a eu à la fois fabrication et fourniture de matériel et fourniture de personnel, que la commande d'intervention portait sur une prestation de service, que le mode

opératoire du démontage était fourni par la société BOUVIER DARLING, que cette société, seule détentrice du savoir-faire, a reconnu par l'intermédiaire de Monsieur D... avoir donné aux deux monteurs les instructions nécessaires et que c'est elle qui a fourni tout le matériel nécessaire au démontage, y compris le dispositif de sécurité, qu'ils ont emporté dans leur voiture, il y a lieu de retenir que l'on n'est pas en présence d'un prêt de main d'oeuvre par la société BOUVIER DARLING à la société BOUVIER HYDRO mais bien d'un contrat de sous-traitance entre celles-ci ;

que dans le cadre de ce contrat de sous-traitance, la société BOUVIER DARLING avait à l'égard de la société BOUVIER HYDRO une obligation de résultat ;

que la survenance de l'accident suffit à caractériser le manquement à cette obligation ;

qu'elle n'établit ni même n'invoque une cause étrangère ou une faute de la société BOUVIER HYDRO ;;

que sa responsabilité est engagée à l'égard de la société BOUVIER HYDRO et que la société CIGNA ne conteste pas sa garantie ; qu'il convient, par infirmation du jugement entrepris, de dire qu'elles seront tenues de relever et garantir la société BOUVIER HYDRO de toutes condamnations en principal, intérêts, frais et dépens, qui seront prononcées à son encontre du fait de l'accident du 12 octobre 1994 ; Sur l'évaluation du préjudice de la société S.P.E.A

Attendu qu'en l'état d'un rapport non contradictoire réalisé par le Cabinet SAFIREC, le Tribunal ne s'est pas estimé suffisamment informé pour statuer sur l'évaluation du préjudice subi par la SPEA et a ordonné de ce chef une expertise ;

que l'utilité de cette mesure d'instruction et la condamnation de la société BOUVIER HYDRO au paiement d'une indemnité provisionnelle de

30.000,00 francs, soit 4.573,47 euros, ne sont pas contestées et pas sérieusement contestables ;

qu'il convient de confirmer ces chefs de décision sauf à fixer un nouveau délai pour la consignation par la S.P.E.A. de la provision à valoir sur les frais d'expertise et pour le dépôt du rapport par l'expert judiciaire ; Sur les demandes accessoires

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société S.P.E.A. l'intégralité des frais irrépétibles que lui a occasionnés la présente procédure ;

que la société BOUVIER HYDRO dont la responsabilité contractuelle est engagée à son égard sera tenue de lui verser la somme de 1600 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel confondus sous la condition de garantie ci-dessus ;

que l'équité commande également que la société BOUVIER DARLING soit condamnée à verser à la société BOUVIER HYDRO la somme de 1600 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel exposés par celle-ci ;

qu'il n'y a pas lieu par contre à condamnation de la société S.P.E.A. sur le fondement de ce texte au profit de la société BOUVIER HYDRO puisqu'elle est bien fondée en sa demande à l'encontre de celle-ci ; qu'il n'est enfin pas inéquitable de laisser à la charge de la société BOUVIER DARLING et de la société CIGNA l'intégralité des frais irrépétibles qu'elles ont elles-mêmes exposés puisqu'elles succombent au fond ;

que les dépens seront supportés comme ci-après indiqué au dispositif du présent arrêt ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement et contradictoirement,

Donne acte à la société BOUVIER HYDRO de ce qu'elle se désiste de son appel à l'égard de la société GERLING,

Pour le surplus, déclare son appel recevable et confirme le jugement entrepris sauf :

- en ce qu'il a débouté la société BOUVIER HYDRO de son appel en garantie à l'encontre de la société BOUVIER DARLING et de l'assureur de celle-ci, la société CIGNA,

- en ce qui concerne les condamnations au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens, et sauf à reporter l'échéance du délai de consignation de la provision à valoir sur les frais d'expertise et de dépôt du rapport,

Statuant à nouveau sur les chefs réformés et ajoutant au jugement entrepris,

Condamne la société BOUVIER DARLING et son assureur, la société CIGNA, à relever et garantir la société BOUVIER HYDRO de toutes les condamnations en principal, intérêts, frais et dépens qui seront prononcées à son encontre du fait de l'accident en date du 12 octobre 1994 et de l'immobilisation de la génératrice qui en est résultée,

Dit qu'en conséquence, les opérations d'expertise instituées par le

Tribunal auront lieu contradictoirement tant à l'égard de la société BOUVIER DARLING et de la société CIGNA que de la société BOUVIER HYDRO,

Précise que le préjudice résultant pour la société S.P.E.A. de l'immobilisation de la génératrice objet de l'intervention du 12 octobre 1994 s'entend de l'immobilisation à compter de cette date jusqu'au 14 avril 1995 et convertit en euros à 4.573,47 euros l'indemnité provisionnelle de 30.000,00 francs allouée à la société S.P.E.A.

Dit que la société S.P.E.A. devra consigner au greffe du Tribunal de Grande Instance d'Albertville la provision de 10.000,00 francs soit 1.524,49 euros à valoir sur les honoraires d'expertise avant le 28 février 2002 et que l'expert devra y déposer son rapport avant le 31 juillet 2002,

Renvoie la cause et les parties devant le tribunal aux fins qu'il soit statué au vu des résultats de l'expertise.

Condamne la société BOUVIER HYDRO à payer à la société S.P.E.A la somme de 1.600 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile sous la condition de garantie ci-dessus et la société BOUVIER DARLING à payer la même somme à la société BOUVIER HYDRO au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel exposés par celle-ci,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société BOUVIER HYDRO aux entiers dépens de première

instance et d'appel à l'égard de la société S.P.E.A sous la condition de garantie ci-dessus et la société BOUVIER DARLING et la société CIGNA aux entiers dépens de première instance et d'appel à l'égard de la société BOUVIER HYDRO avec droit de recouvrement direct pour les dépens d'appel au profit des avoués de la cause qui en ont fait la demande conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ainsi prononcé en audience publique le 22 JANVIER 2002 par XXX, Président, qui a signé le présent arrêt avec XXX, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Numéro d'arrêt : 1998/03214
Date de la décision : 22/01/2002

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Sous-traitant - Responsabilité - Responsabilité à l'égard de l'entrepreneur principal - Garantie - Etendue

Dans l'hypothèse ou l'instrument de travail du maître de l'ouvrage est immobilisé en raison d'un accident de chantier et notamment d'une enquête judiciaire, l'entrepreneur est directement responsable du dommage en résultant pour le maître. Néanmoins, le sous-traitant à l'origine des dommages est tenu de garantir l'entrepreneur des condamnations prononcées à son encontre.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2002-01-22;1998.03214 ?
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