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08/01/2002 | FRANCE | N°2000/01188

France | France, Cour d'appel de chambéry, 08 janvier 2002, 2000/01188


Par jugement en date du 4 mai 2000 le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de BONNEVILLE a condamné la BANQUE POPULAIRE SAVOISIENNE à payer au Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD la somme de 19 799 590, 87 F (dix neuf millions sept cent quatre vingt dix neuf mille cinq cent quatre vingt dix francs et quatre vingt sept centimes) outre intérêts capitalisés au taux légal à compter du 17 novembre 1999, date de l'assignation ainsi que la somme de 4 000 F (quatre mille francs) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La

BANQUE POPULAIRE SAVOISIENNE a interjeté appel de ce ju...

Par jugement en date du 4 mai 2000 le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de BONNEVILLE a condamné la BANQUE POPULAIRE SAVOISIENNE à payer au Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD la somme de 19 799 590, 87 F (dix neuf millions sept cent quatre vingt dix neuf mille cinq cent quatre vingt dix francs et quatre vingt sept centimes) outre intérêts capitalisés au taux légal à compter du 17 novembre 1999, date de l'assignation ainsi que la somme de 4 000 F (quatre mille francs) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La BANQUE POPULAIRE SAVOISIENNE a interjeté appel de ce jugement le 11 mai 2000. Par conclusions récapitulatives en date du 11 octobre 2001, la BANQUE POPULAIRE DES ALPES anciennement dénommée BANQUE POPULAIRE SAVOISIENNE, demande de réformer le jugement du 4 mai 2000, de débouter le Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD de ses demandes ; en conséquence de le condamner à lui restituer la somme de 20 192 595,83 F augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2000, date du règlement, ainsi qu'une indemnité de 30 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; et de le condamner aux dépens de première instance et d'appel. Par conclusions récapitulatives en date du 14 septembre 2001, le Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD demande la confirmation du jugement et la condamnation de la BANQUE POPULAIRE DES ALPES à lui verser une indemnité de 30 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et de la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel. MOTIFS DE LA DÉCISION Par ordonnance en date du 30 juillet 1999 la Haute Cour de Justice de LONDRES, statuant dans un litige opposant le Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD aux époux X... Y... et Danielle PLANCHER a notamment rendu immédiatement exigibles les sommes stipulées à l'article 1 de la transaction intervenue le 18 mai

1999 entre les parties. Par ordonnance en date du 6 octobre 1999, Monsieur le Président du Tribunal de grande instance de GRASSE a rendu cette ordonnance exécutoire en FRANCE. Par ordonnance en date du 29 juillet 1999, Monsieur le Président du Tribunal de grande instance de BONNEVILLE a autorisé le Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD à pratiquer une saisie conservatoire entre les mains de la SCP de notaires DALMAIS, CUVIT, JAQUIOT, PETULLA sur les sommes détenues pour le compte des époux Y... provenant de la vente d'immeubles à concurrence de la somme de 20 000 000 F. Le Notaire a indiqué au procès-verbal de saisie ne plus être en possession de ces sommes, celles-ci ayant été transférées par chèque au compte de Monsieur Y... à la BANQUE POPULAIRE SAVOISIENNE de LA ROCHE-SUR-FORON. Par ordonnance en date du 13 septembre 1999, Monsieur le Président du Tribunal de grande instance de BONNEVILLE a autorisé le Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD à pratiquer une saisie conservatoire entre les mains de la BPS sur toutes les sommes détenues pour le compte des époux Y... pour obtenir paiement de la somme de 20 000 000 F et à demander à la banque la destination des sommes correspondant au produit des ventes d'immeubles dans l'hypothèse où ces fonds ne seraient plus entre ses mains. Par acte en date du 17 septembre 1999, le Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD a tenté de pratiquer la saisie. Le responsable juridique de la BPS a répondu à l'huissier instrumentaire : "Nous n'avons pas de compte ouvert au nom de Monsieur Y... X... ni au nom de Madame PLANCHER Z... épouse Y... à la BPS. "Tenu par le secret professionnel, nous ne pouvons vous donner aucun renseignement sur d'éventuels mouvements de fonds qui auraient pu être effectués par ces derniers à la BPS". Or, le Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD a eu connaissance, dans la suite de la procédure anglaise, de la communication par les époux Y... des relevés de deux

comptes bancaires à la BPS. Par acte en date du 14 octobre 1999, il a procédé à une nouvelle saisie conservatoire des comptes bancaires des époux Y... à la BPS qui a déclaré : "le compte N° 850 302 02 195 est créditeur de la somme de 102 237,01 F (compte joint M. et Mme Y...) "le compte N° 883 084 02 191 est créditeur de la somme de 98 172,12 F (compte ouvert au nom de Monsieur Y... X... A...) " La communication du N° de compte a permis de pallier à un problème de recherche informatique fondée sur le nom." Interrogée par procès-verbal en date du 14 octobre 1999 la BPS a répondu que la réponse négative donnée à l'huissier lors de la saisie conservatoire du 10 septembre 1999 provenait "d'un problème de recherche informatique faite par le seul nom des saisis la recherche informatique ne faisait apparaître l'existence d'aucun nom". Le Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD demande en conséquence l'application des dispositions de l'article 238 du décret du 31 juillet 1992 au terme duquel : "le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus, s'expose à devoir payer les sommes pour lesquelles la saisie a été pratiquée si le débiteur est condamné et sauf son recours contre ce dernier. "Il peut aussi être condamné à des dommages et intérêts en cas de négligence fautive ou de déclaration inexacte ou mensongère". La BANQUE POPULAIRE SAVOISIENNE devenue BANQUE POPULAIRE DES ALPES oppose à cette demande : - la caducité de la saisie à défaut d'avoir été portée à la connaissance du débiteur saisi dans le délai de huit jours et par conséquent la privation rétroactive de tout effet à la saisie litigieuse ; - l'inapplicabilité à l'espèce des dispositions de l'alinéa 1 de l'article 238 du décret du 31 juillet 1992, qui permettrait de condamner le tiers saisi aux causes de la saisie, aux motifs qu'elle n'a pas refusé de répondre à l'huissier mais que sa réponse comporte une erreur excusée par un motif légitime à savoir la

défaillance de son système informatique ; - l'inapplicabilité à l'espèce de l'alinéa 2 de l'article 238 du décret du 31 juillet 1992 qui permettrait d'allouer des dommages et intérêts au demandeur aux motifs que celui-ci doit rapporter la preuve du préjudice qu'il a subi du fait de l'attitude de la banque, préjudice inexistant puisque la seconde saisie a été fructueuse ainsi qu'une troisième pratiquée en mars 2000. 1° sur la caducité de la saisie : Les opérations de saisies conservatoires sont régies par les dispositions des articles 234 à 239 du décret du 31 juillet 1992. Aux termes de l'article 236, "dans un délai de huit jours, à peine de caducité, la saisie conservatoire est portée à la connaissance du débiteur par acte d'huissier". Il est constant que le créancier ne peut faire condamner le tiers saisi sur le fondement des dispositions de l'article 238 du même décret en présence d'une saisie conservatoire nulle ou caduque. Cependant, la privation rétroactive d'effets de la saisie nulle ou caduque ne s'entend que pour les saisies fructueuses qui auraient emporté saisie de biens : en l'espèce, la saisie n'ayant pu être pratiquée en raison des déclarations faites par la Banque Populaire qui niait l'existence de comptes bancaires permettant précisément l'exercice de la saisie, le créancier n'avait pas l'obligation, à défaut d'intérêt de le faire, de dénoncer la saisie au débiteur. En conséquence, la demande du créancier fondée sur l'article 238 du décret du 31 juillet 1992 est recevable. 2° sur la déclaration du tiers saisi : La BANQUE POPULAIRE DES ALPES conteste que les dispositions de l'alinéa 1 de l'article 238 lui soient applicables, aux motifs d'une part qu'elle n'a pas refusé de fournir les renseignements et d'autre part que ceux qu'elle a fournis se sont révélés inexacts en raison d'un mauvais fonctionnement de son système informatique ce qui constitue le motif légitime qui l'exonère des conséquences de sa déclaration. Au regard des circonstances de fait

rappelées plus haut, ce sont bien les dispositions de l'alinéa 1 de l'article 238 du décret du 31 juillet 1992 qui sont applicables, la banque n'ayant communiqué aucun renseignement à l'huissier au prétexte qu'elle ne détenait aucun compte bancaire ouvert au nom des débiteurs. En ce qui concerne le motif légitime invoqué par la banque à supposer exact le fait que la recherche informatique telle qu'elle a été pratiquée par son agent n'ait pas révélé les comptes dont étaient titulaires les époux Y..., il s'agit d'une circonstance inopposable au créancier qui provient soit d'une incompétence de son agent, alors qu'il a été révélé que le même agent quelques mois plus tard donnait à l'huissier le montant des sommes portées aux comptes des époux Y..., soit d'une inadaptation du système informatique imputable à la seule responsabilité de la banque, soit enfin d'une abstention volontaire du même agent sachant que celui-ci pouvait difficilement ignorer la présence dans son agence bancaire d'importance moyenne, de clients tels que les époux Y... dont les comptes bancaires se sont révélés créditeurs en octobre de 200 409,13 F et sur lesquels Maître DALMAIS, Notaire, a déclaré avoir versé le prix de vente d'immeubles à hauteur de 20 000 000 F. La BANQUE POPULAIRE DES ALPES ne justifiant d'aucun motif légitime pour n'avoir pas fourni les renseignements prévus à l'article 44 de la loi du 9 juillet 1991 a, par une exacte application de la loi, été condamnée par le premier juge à payer au créancier les sommes pour lesquelles la saisie a été pratiquée. L'ordonnance du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de BONNEVILLE doit en conséquence être intégralement confirmée. Les circonstances de la cause justifient l'allocation au Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD d'une indemnité de 5 000 F soit 762,25 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement après en

avoir délibéré conformément à la loi. Déclare l'appel recevable en la forme.199 AU FOND Confirme l'ordonnance du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de BONNEVILLE du 4 mai 2000 dans toutes ses dispositions. Condamne la BANQUE POPULAIRE DES ALPES à payer au Prince MOHAMAD BIN FAHAD BIN ABDULAZIZ AL SAUD d'une indemnité de 5 000 F soit 762,25 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour les frais irrépétibles d'appel. Condamne la BANQUE POPULAIRE DES ALPES aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement par l'avoué qui en fera la demande conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Numéro d'arrêt : 2000/01188
Date de la décision : 08/01/2002

Analyses

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures conservatoires - Saisie conservatoire - Tiers saisi - Obligation de renseignement - Etendue de ses obligations à l'égard du saisi - Déclaration - Défaut ou retard - Motif légitime.

Aux termes des dispositions de l'article 238 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus, s'expose à devoir payer les sommes pour lesquelles la saisie a été pratiquée si le débiteur a été condamné et sauf son recours contre ce dernier. Une banque, tiers saisi dans une procédure de saisie conservatoire, qui ne donne pas à l'huissier de justice les renseignements nécessaires à la saisie ne peut se justifier en invoquant un dysfonctionnement du système informatique dès lors que cette circonstance est soit le fait volontaire ou involontaire d'un agent de la banque, soit la conséquence d'une inadaptation du matériel informatique relevant de sa responsabilité. Le dysfonctionnement informatique étant en conséquence inopposable au créancier, la banque doit être condamnée à lui payer les sommes pour lesquelles la saisie a été pratiquée

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures conservatoires - Saisie conservatoire - Dénonciation.

En application de l'article 236 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, la saisie conservatoire doit être, à peine de caducité, portée à la connaissance du débiteur par acte d'huissier de justice dans un délai de huit jours. Cependant, lorsque la saisie a été infructueuse du fait de l'absence de renseignement donné par le tiers saisi à l'huissier, le créancier n'est plus dans l'obligation de dénoncer la saisie au débiteur


Références :

N 1 décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, article 238
N 2 décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, article 236

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2002-01-08;2000.01188 ?
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