COUR D'APPEL DE CAYENNE
[Adresse 1]
[Localité 3]
Dossier n°N° RG 24/00358 - N° Portalis 4ZAM-V-B7I-BKYC
Ordonnance n°2024/139
O R D O N N A N C E DU 02 AOUT 2024
Le 02 Août 2024, à 15 heures 10
Nous, BAUDIS, conseillère à la cour d'appel de Cayenne, déléguée par ordonnance de la première présidente pour connaître des recours prévus par les articles L. 552-9 et R.552-12 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
assistée de Lysiane DESGREZ, directrice de greffe
PARTIES
Personne placée en rétention administrative
M. [K] [T] [L]
né le 29 Août 2004 à [Localité 5]
de nationalité Dominicaine
comparant à l'audience, en présence de Monsieur [S] [Y], interprète en langue espagnole inscrit sur la liste de la Cour d'appel de Cayenne,
assistée de Me Mélanie MASCLAUX, avocat au barreau de la Guyane, commis d'office,
Autorité administrative ayant ordonné le placement en rétention administrative :
Monsieur le Préfet de la région Guyane
Adresse : [Adresse 4]
absent, régulièrement convoqué,
Ministère public :
Monsieur le Procureur général près de la cour d'appel de Cayenne
absent, régulièrement convoqué,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
Un arrêté en date du 29/07/2024 portant obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour a été notifié à Monsieur [K] [T] [L] le 29/07/2024 à 8 heures 46.
Par décision notifiée le même jour à 8 heures 50 à l'intéressé, l'autorité administrative a ordonné le placement de Monsieur [K] [T] [L] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.
Le 31/07/2024 à 8 heures 58, le préfet de la Guyane a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de prolonger la rétention administrative de Monsieur [K] [T] [L].
Le 31/07/2024, Monsieur [K] [T] [L] a contesté son placement en rétention administrative.
Par ordonnance rendue le 01/08/2024 à 10 heures 57, le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de CAYENNE a notamment autorisé la prolongation de sa rétention administrtive pour 28 jours;
M. [K] [T] [L] a interjeté appel de cette décision par courriel du 2 août 2024 à 9 heures 56.
MOTIVATION DE L'APPEL
Les parties ont été convoquées à l'audience du 02 Août 2024 à 14h.
A l'audience, Monsieur [K] [T] [L] a comparu, assisté par son avocat et, ayant été préalablement informé de son droit au silence, il déclare :
'je suis d'accord pour quitter la France mais je ne veux pas me rendre dans mon pays natal car je n'ai plus de famille là-bas et je crains pour ma vie'.
Au départ, je suis venu en France pour me rendre à l'hopital de [6] et un ami m'a emmené avec lui mais il a commis un vol et nous avons été arrêtés tous les deux. J'ai été condamné à un an de prison par le tribunal judiciaire et j'ai été emprisonné 10 mois.
Mons passeport est au Suriname. Je suis en couple au Suriname et ma compagne est enceinte.'
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL
Vu les dispositions des articles L743-21 et R 743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (ci-après CESEDA), 640 et 642 du code de procédure civile,
l'appel a été formé dans les délais légaux.
SUR CE,
SUR L'APPEL DE LA CIMADE
Sur le moyen tiré du défaut de base légale de son placement en rétention administrative
Monsieur [K] [T] [L] expose qu'il n'a jamais été notifié d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français édicté le 28 juillet 2024, comme il est fait référence dans l'arrêté portant placement en rétention administrative, étant donné que le seul document en sa possession est l'arrêté relatif à une OQTF en date du 29 juillet 2024.
Dès lors il estime que la procédure est irrégulière en l'absence de base légale.
Toutefois, il convient de constater que l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français est bien daté du 29 juillet 2024, tel que notifié à l'intéressé, et que la date du 28 juillet 2024 apparaissant dans l'arrêté de placement en rétention administrative doit être considérée comme une erreur matérielle qui ne peut porter grief à Monsieur [K] [T] [L].
C'est donc à juste titre que le premier juge a rejeté ce moyen.
Sur le moyen tiré de la notification iirégulière des arrêtés dont il fait l'objet
Monsieur [K] [T] [L] indique que le procès verbal de notification des arrêtés mentionne deux langues différents de notification, à savoir l'espagnol et le portugais alors que sa langue maternelle est l'espagnol.
Aussi, il considère que ces erreurs ne l'ont pas mis en mesure de comprendre les décisions prises à son encontre et que la procédure est irrégulière.
Néanmoins, comme l'a justement relevé le premier juge, la traduction s'est faite uniquement en espagnol malgré cette erreur matérielle, si bien qu'il n'existe aucun grief permettant de justifier d'une quelconque irrégularité de la procédure.
Ce moyen ne saurait perdurer et sera rejeté.
Sur le moyen tiré du caractère irrégulier de la requête en prolongation
Monsieur [K] [T] [L] explique que sur la requête en prolongation de sa rétention fait état d'une date de naissance au 29 avril 2004 alors qu'il est né le 20 août 2024 (cf conclusions de la CIMADE).
Néanmoins, cette erreur de plume ne saurait entraîner la nullité de la décision, dès lors que les autres documents font état de la véritable date de naissance.
Aussi, il convient de confirmer le rejet de ce moyen.
Sur le défaut de diligence de la part de l'administration
Il résulte de l'article L.741-3 du CESEDA qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet dès le placement en rétention.
Le juge doit en conséquence contrôler le caractère suffisant des diligences de l'administration pour organiser le départ de l'étranger.
En l'espèce l'administration justifie avoir sollicité un laissez-passer le 27 juin 2024 et d'un routing avec un départ de [Localité 3] le 14 août 2024.
Monsieur [K] [T] [L] indique à cet égard que l'administration a fait une erreur sur sa date de naissance lors de la demande de laissez-passer. Néanmoins, il n'existe à ce jour pas de retour du consulat de République Dominicaine en Guadeloupe sur cette demande, si bien qu'il reste encore jusqu'au 14 août 2024, date de son départ, à l'administration la possibilité de demander un nouveau laissez-passer avec la date exacte de naissance de l'intéressé.
Aussi, le moyen sera rejeté.
Sur le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté portant placement en rétetnion
L'article 741-6 du CESEDA dispose que l'arrêté de placement en rétention administrative doit être motivé en fait et en droit. L'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration dispose que la motivation des actes administratifs s'entend d'un écrit comportant l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.
Le premier juge a, à juste titre, relevé que la décision de placement en rétention a été motivé par l'administration en ce qu'elle ne se limite pas à une formule stéréotypée mais reprend des éléments sur la situation personnelle de l'intéressé, sur lesquels l'administration s'est fondée pour prendre sa décision.
Par ailleurs, il n'appartient pas juge de décider du pays de retour de l'intéressé, celui-ci indiquant vouloir retourner au Suriname et non en République Dominicaine.
Il y a lieu de confirmer le rejet de ce moyen.
L'ordonnance du premier juge sera en conséquence confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, de manière réputée contradictoire, en dernier ressort,
Déclarons l'appel recevable ;
Confirmons l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Laissons les dépens à la charge du Trésor public.
RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, l'intéressé peut former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation, [Adresse 2].
LA DIRECTRICE DE GREFFE LA PRESIDENTE
Lysiane DESGREZ Sophie BAUDIS