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17/06/2024 | FRANCE | N°23/00355

France | France, Cour d'appel de Cayenne, Chambre civile, 17 juin 2024, 23/00355


COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 1]



Chambre Civile





















ARRÊT N° 77 /2024



N° RG 23/00355 - N° Portalis 4ZAM-V-B7H-BG3H





S.A. CREATIS





C/



[U] [W]









ARRÊT DU 17 JUIN 2024





Jugement au fond, du juge des contentieux de la protection de CAYENNE, décision attaquée en date du 03 Février 2023, enregistrée sous le n° 22/00909





APPELANTE

:



S.A. CREATIS

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par Me Muriel-Thérèse PREVOT, avocate au barreau de GUYANE





INTIME :



Monsieur [U] [W]

[Adresse 5]

[Localité 4]



Non comparant, ni représenté





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



En ap...

COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 1]

Chambre Civile

ARRÊT N° 77 /2024

N° RG 23/00355 - N° Portalis 4ZAM-V-B7H-BG3H

S.A. CREATIS

C/

[U] [W]

ARRÊT DU 17 JUIN 2024

Jugement au fond, du juge des contentieux de la protection de CAYENNE, décision attaquée en date du 03 Février 2023, enregistrée sous le n° 22/00909

APPELANTE :

S.A. CREATIS

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Muriel-Thérèse PREVOT, avocate au barreau de GUYANE

INTIME :

Monsieur [U] [W]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Non comparant, ni représenté

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

En application des dispositions des articles 907 et 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 mrs 2024 en audience publique et mise en délibéré au 17 juin 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Madame Aurore BLUM, Présidente de chambre

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Aurore BLUM, Présidente de chambre

Monsieur Laurent SOCHAS, Président de chambre

Mme Patricia GOILLOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

GREFFIER :

Madame Lysiane DESGREZ, Directrice de greffe, présente lors des débats et Madame Joséphine DDUNGU, Greffière placée, lors du prononcé.

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant offre préalable acceptée le 22 février 2016, la SA CREATIS a consenti à Monsieur [U] [W], un prêt personnel de 31 200€ au taux annuel de 5,62%, remboursable en 120 mensualités de 340,46€ hors assurance.

La SA CREATIS a adressé à Monsieur [W] une lettre recommandée avec accusé de réception le 11 février 2022 portant mise en demeure d'avoir à régler la somme de 2 236,44€ dans un délai de 30 jours et indiqué qu'à défaut de règlement de cette somme, la déchéance du terme serait prononcée. La SA CREATIS date le premier incident au mois de juin 2021.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 avril 2022, la SA CREATIS a notifié à Monsieur [W] la déchéance du terme du prêt.

Par exploit d'huissier du 27 octobre 2022, la SA CREATIS a fait citer Monsieur [W] devant le juge du contentieux de la protection de Cayenne, aux fins de voir sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- condamner l'emprunteur à lui payer la somme de 18 676,38€ portant intérêt conventionnel au taux de 5,62% à compter du 21 avril 2022, ou à titre subsidiaire à compter de l'assignation et jusqu'à complet paiement,

- ordonner la capitalisation annuelle des intérêts,

- à titre subsidiaire, prononcer la résolution judiciaire du contrat et condamner l'emprunteur au paiement de la somme de 18 676,38€ portant intérêt conventionnel au taux de 5,62% à compter du jugement,

- condamner les mêmes à lui payer la somme de 800 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par jugement dont appel du 3 février 2023, le juge du contentieux de la protection a :

- déclaré recevable l'action,

- constaté que la déchéance du terme a été notifiée le 21 avril 2022,

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

- débouté la SA CREATIS de sa demande de capitalisation,

- condamné Monsieur [W] à payer à la SA CREATIS la somme de 8 836,23€, sans intérêts,

- débouté l'établissement de crédit de ses demandes au titre de l'article 700 du CPC,

- condamné Monsieur [W] aux dépens,

- débouté les parties sur le surplus des demandes,

- prononcé l'exécution provisoire de la décision.

Par déclaration reçue le 27 juillet 2023, l'établissement de crédit a interjeté appel de ce jugement.

Le 13 septembre 2023, avis était donné à l'appelant d'avoir à signifier la déclaration d'appel, en l'absence de constitution de l'intimé dans le mois de la transmission de la déclaration d'appel qui lui a été faite par le greffe, lequel y procédait le 3 octobre 2023.

Bien que régulièrement cité à personne, Monsieur [W] [U] ne s'est pas constitué et n'a pas conclu.

En l'état de ses premières et dernières conclusions du 27 septembre 2023, la Banque demande à la Cour de :

-réformer la décision en toutes ses dispositions,

-condamner Monsieur [W] à payer la somme de 18 676,38 € avec intérêt au taux contractuel de 5,62 % à compter du jour de la mise en demeure du 21 avril 2022,

- à titre infiniment subsidiaire, si la cour confirmait la déchéance du droit aux intérêts contractuels, condamner Monsieur [W] à payer la somme de 8 836,23 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, sans suppression de la majoration de cinq points,

-condamner conjointement Monsieur [W] à supporter le paiement de la somme de 1 200 € au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 février 2024.

Sur ce la Cour,

Sur la vérification de la solvabilité

Aux termes de l'article L. 311-9 en vigueur au moment du contrat, devenu l'article L. 312-16 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur et consulte le ficher prévu à l'article L. 333-4 du code de la consommation devenu l'article L. 751-1 du même code, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5 devenu l'article L. 751-6.

L'alinéa 2 de l'article L. 333-5 devenu l'article L. 751-6 indique qu'un arrêté du ministre chargé de l'économie, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et du comité consultatif du secteur financier, détermine les modalités selon lesquelles les établissements et organismes mentionnés au deuxième alinéa du I de l'article L. 333-4 devenu l'alinéa premier de l'article L. 751-2 peuvent justifier qu'ils ont consulté le fichier, notamment en application de l'article L. 311-9 devenu l'article L. 312-16.

En vertu de l'article 13, I ancien de l'arrêté du 26 octobre 2010 auquel renvoient les articles précités, intitulé « Modalités de justification des consultations et conservation des données » : « En application de l'article L. 333-5 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu'ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes ['] doivent, [avant toute décision effective d'octroyer un crédit], conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable. Ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l'intégrité des informations ainsi collectées. Constitue un support durable tout instrument permettant aux établissements et organismes mentionnés à l'article 1er de stocker les informations constitutives de ces preuves, d'une manière telle que ces informations puissent être consultées ultérieurement pendant une période adaptée à leur finalité et reproduites à l'identique ».

En l'espèce, la SA CREATIS verse aux débats, en pièce 6, un document intitulé « preuve de la consultation de FICP », attestant de la dénomination de l'établissement de crédit, de la clé BDF reprenant la date de naissance et les premières lettres du nom patronymique de l'emprunteur, du motif et du résultat de la consultation.

En revanche, il convient de relever que conformément à l'article L.311-13 du code de la consommation alors en vigueur, le prêteur a la faculté, après la présentation de l'offre préalable de crédit à l'emprunteur, de refuser ou de donner son agrément au crédit qui a été offert, dans le délai de sept jours après la signature. Ce n'est qu'à compter de la survenance de cet agrément que le contrat accepté par l'emprunteur devient parfait.

Dès lors, la consultation du FICP ne peut être considérée comme tardive et équivaloir à une absence de consultation, qu'une fois ce délai écoulé.

Au cas d'espèce, cette consultation est intervenue le 10 mars 2016, soit plus de sept jours après l'acceptation de l'offre du 22 février 2016.

De sorte que l'appelante n'a pas satisfait à son obligation de vérification de la solvabilité du débiteur avant la conclusion du contrat de prêt.

Sans qu'il soit besoin d'examiner plus avant la question du bordereau de rétractation, l'absence de production de celui-ci entraînant la même sanction en vertu de l'article L.341-4 du code de la consommation, il y a lieu de prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la SA CREATIS.

D'où il suit que le jugement doit être confirmé de ce chef.

Sur la créance de l'établissement de crédit

Par application de l'ancien article L. 311-48, alinéa 2 du code de la consommation, devenu l'article L. 341-2 du même code, le prêteur qui n'a pas respecté les obligations fixées par l'article L. 311-9 devenu l'article L. 312-16 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

L'alinéa 3 du même texte prévoit que, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts dans les conditions de l'article L. 311-9 ancien, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Le même texte précise que les sommes perçues au titre des intérêts sont imputées sur le capital restant dû lorsque, comme en l'espèce, elles ne sont pas restituées.

S'agissant du compte entre les parties, la SA CREATIS est fondée à se voir appliquer le taux légal à sa créance pour les mensualités régulièrement payées avant la déchéance du terme ; qu'à compter de cette dernière les intérêts au taux contractuel dont elle a été déchue viendront s'imputer sur le capital restant dû ainsi que les éventuels paiements effectués par le débiteur à compter de la dite déchéance du terme, la somme restant due au terme de ces déductions produisant intérêt au taux légal en application de l'article 1153 devenu article 1231-6 du code civil.

A la lecture du contrat, du tableau d'amortissement et du décompte de la créance, Monsieur [W] reste redevable envers la banque de la somme de 8 726,03€, à savoir :

14 875,77€ (capital restant dû suivant l'échéancier au 21 avril 2022) ' 8 018,98 € (sommes des intérêts contractuels dont le prêteur est déchu) = 6 856,79 €.

À ce montant, doit s'ajouter la part de capital amorti des mensualités non payées (7 échéances d'un montant de 340,46€ chacune du 31 octobre 2021 au 30 avril 2022 pour un montant total de 2 413,52€ suivant le décompte produit) : à savoir 6 856,79 + 1 869,24 = 8 726,03 €.

En conséquence, Monsieur [W] sera condamné à payer la somme de 8 726,03 €, produisant intérêt au taux légal à compter de la déchéance du terme du 21 avril 2022.

Le même sera également condamné au paiement de l'indemnité légale de 1 338,99 euros produisant intérêt au taux légal à compter de la déchéance du terme.

Sur le taux légal majoré

Par application L 312-22 du Code de la consommation issu de la loi du 26 juillet 1993, applicable aux prêts conclus jusqu'au 1 juillet 2016, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, ainsi que le paiement des intérêts échus. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. Dès lors aucune indemnité ni coût autres que ceux visés au-dit article ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur en cas de défaillance.

En conséquence, le SA CREATIS est déboutée de sa demande de majoration du taux légal.

Sur les demandes accessoires

Succombant, Monsieur [W] supportera les entiers dépens.

Le même sera condamné à payer une indemnité de procédure de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS 

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire, mise à disposition au greffe :

INFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la SA CREATIS,

Statuant à nouveau,

PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la SA CREATIS en raison de la non consultation du FICP avant la conclusion du contrat de prêt,

CONDAMNE Monsieur [W] [U] à payer à la SA CREATIS la somme de 8 726,03 €, produisant intérêt au taux légal à compter du 21 avril 2022,

CONDAMNE Monsieur [W] [U] à payer à la SA CREATIS la somme de 1 338,99 € au titre de l'indemnité légale, produisant intérêt au taux légal à compter du 21 avril 2022,

DÉBOUTE la SA CREATIS de sa demande de majoration de l'intérêt au taux légal,

CONDAMNE Monsieur [W] [U] à payer une indemnité de procédure d'un montant de 800 € en application de l'article 700 du CPC,

CONDAMNE Monsieur [W] [U] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par la Présidente de chambre et la Greffière.

La Greffière La Présidente de chambre

Joséphine DDUNGU Aurore BLUM


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Cayenne
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/00355
Date de la décision : 17/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-17;23.00355 ?
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