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04/06/2024 | FRANCE | N°21/00553

France | France, Cour d'appel de Cayenne, Chambre sociale, 04 juin 2024, 21/00553


COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 2]



Chambre Sociale





















ARRÊT N° 13 /2024



N° RG 21/00553 - N° Portalis 4ZAM-V-B7F-75I





[M] [H]





C/



S.A.R.L. LINKEXPERTISES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité.













ARRÊT DU 04 JUIN 2024





Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Form

ation paritaire de cayenne, décision attaquée en date du 08 Novembre 2021, enregistrée sous le n° 20/00018





APPELANT :



Monsieur [M] [H]

[Adresse 1]

[Localité 5]



Représenté par Me Cendra JARRY, avocate au barreau de Guyane









INTIMEE :



S.A.R...

COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 2]

Chambre Sociale

ARRÊT N° 13 /2024

N° RG 21/00553 - N° Portalis 4ZAM-V-B7F-75I

[M] [H]

C/

S.A.R.L. LINKEXPERTISES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité.

ARRÊT DU 04 JUIN 2024

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de cayenne, décision attaquée en date du 08 Novembre 2021, enregistrée sous le n° 20/00018

APPELANT :

Monsieur [M] [H]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Cendra JARRY, avocate au barreau de Guyane

INTIMEE :

S.A.R.L. LINKEXPERTISES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité.

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Maurice CHOW-CHINE, avocat au barreau de Guyane

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

En application des dispositions des articles 907 et 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 décembre 2023 en audience publique et mise en délibéré au 05 mars 2024 prorogé au 04 Juin 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

M. Yann BOUCHARE, Président de chambre

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. Yann BOUCHARE, Président de chambre

Mme Sophie BAUDIS, Conseillère

Mme Patricia GOILLOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

GREFFIER :

Madame Jessika PAQUIN, Greffière placée, présente lors des débats et Madame Joséphine DDUNGU, Greffière placée, présente lors du prononcé.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur [M] [H] a été embauché par la société LINKEXPERTISES selon contrat de travail à durée indéterminée en date du 31 juillet 2018, en qualité de responsable du pôle comptable.

Selon lettre recommandée avec accusé de réception date du 3 décembre 2019, Monsieur [M] [H] a pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur.

Suivant requête en date du 5 février 2020, enregistrée au greffe le même jour,Monsieur [M] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Cayenne d'une demande dirigée contre la société LINKEXPERTISES.

Les parties ont été convoquées à l'audience pour que l'affaire puisse être retenue et plaidée le 6 septembre 2021.

Au terme de ses conclusions en date du 11 avril 2021 enregistrées au greffe le 6 septembre 2021 et soutenu oralement à l'audience Monsieur [M] [H] demandait au conseil des prud'hommes de :

. Dire et juger que Monsieur [M] [H] est bien fondé dans son action,

. Constater les retenues abusives sur le salaire d'octobre 2019 et novembre 2019,

. Constater les nombreux manquements de la société LINKEXPERTISES,

. Dire et juger que la prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur du 3 décembre 2019 emporte les conséquences d'un licenciement abusif.

En conséquence de :

condamner la société au paiement des sommes suivantes :

. Rappel de salaire à compter du 1er avril 2018 au 31 juillet 2018 : 14.280 € bruts,

. Indemnité de congés payés afférents 1428 € bruts ,

. Rappel de salaire à compter du 1er octobre 2019 à décembre 2019: 10'386,28 € bruts,

. Indemnité de congés payés afférents 1038,63 € bruts,

. Indemnité légale de licenciement 1480,55 €

. Indemnité de préavis 10'710 €,

. Indemnité de congés payés afférents 1071 €,

. Indemnité de licenciement abusif 7140 €

. Notes de frais 3265,14 €,

. Indemnité pour travail dissimulé 21'420 €.

. remise des bulletins de salaire sous astreinte de 100 € par jour de retard,

. Article 700 du code de procédure civile de 1000 €,

. Fixer le salaire mensuel à la somme de 3570 € bruts,

. Ordonner sous astreinte de 100 € par jour de retard la remise des bulletins de salaire d'avril 2018 à juillet 2018,

. Débouter la société LINKEXPERTISE de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles,

. Condamner la société LINKEXPERTISES aux entiers dépens.

En défense la société LINKEXPERTISES au terme de ses conclusions en date du 30 octobre 2020 enregistrées le 6 septembre 2021 et soutenues oralement à l'audience demandait :

. À titre principal de :

. Constater que les manquements évoqués par Monsieur [M] [H] au soutien de sa demande de prise d'acte de la rupture du contrat de travail ne sont pas établis.

À titre subsidiaire de :

. Constater que les manquements invoqués par Monsieur [M] [H] ne peuvent être considérés comme suffisamment graves de nature à justifier l'impossibilité de poursuivre le contrat de travail.

. Débouter Monsieur [M] [H] de sa demande de requalification de prise d'acte de la rupture du contrat travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

. Débouter Monsieur [M] [H] de l'intégralité de ses demandes pécuniaires.

À titre reconventionnel :

. Constater que Monsieur [M] [H] a quitté brusquement son poste de travail et n'a plus jamais réintégré l'entreprise.

. Dire et juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail du requérant doit s'analyser en une démission.

. Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 10'710 € au titre de l'indemnité de préavis démission .

. Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 9753,92 € au titre du trop-perçu sur rémunération.

. Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 27'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la prise d'acte abusive de son contrat de travail.

. Enjoindre à Monsieur [M] [H] de restituer les documents suivants :

. Les originaux de lettre de mission du mandat remis par la société DÉLICES MARINE

. Les documents comptables de l'année 2019 remis par son nouvel employeur, la société PHOÉNIX SUN.

. L'intégralité des documents et informations communiquées par Madame [P].

. Condamner Monsieur [M] [H] à payer la somme de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

. Condamner Monsieur [M] [H] aux entiers dépens.

Par décision en date du 8 novembre 2021 le conseil des prud'hommes décidait de :

Fixer le montant du salaire mensuel brut de référence de Monsieur [M] [H] à la somme de 3.570 euros bruts ;

Dire que la lettre de prise d'acte envoyée par Monsieur [M] [H] à la société

LINKEXPERTISES le 3 décembre 2019 est équivoque et s'analyse en prise d'acte ;

Et dit que la prise d'acte doit être requalifiée en démission ;

En conséquence a :

Débouté Monsieur [M] [H] de sa demande de rappel de salaire sur la période d'avril à juillet 2018 inclus, outre sa demande de congés payés y afférents ;

Débouté Monsieur [M] [H] de sa demande de rappel de salaire sur la période d'octobre à décembre 2019 inclus et des congés payés y afférents ;

Débouté Monsieur [M] [H] de sa demande d'indemnité légale de licenciement et des

conséquences financières subséquentes ;

Débouté Monsieur [M] [H] de sa demande d'indemnité pour licenciement abusif, outre sa demande de remboursement de ses notes de frais ;

Débouté Monsieur [M] [H] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé et de sa demande de remise des bulletins de salaire ;

Condamné Monsieur [M] [H] à payer à la société LINKEXPERTISES la somme de

-10.710 euros à titre d'indemnité de préavis ;

Condamné Monsieur [M] [H] à payer à la société LINKEXPERTISES la somme de

9.753,90 euros à titre de remboursement de salaire indument perçus ;

Condamné Monsieur [M] [H] à payer à la société LINKEXPERTISES la somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail en date du 31

juillet 2018 ;

Condamné [M] [H] à remettre à la société LINKEXPERTISES les lettres originales de mission de la société DELICES MARINE ainsi que tous documents et informations remises par Madame [V] [P].

Condamné Monsieur [M] [H] aux entiers dépens

Condamné Monsieur [M] [H] à payer à la société LINKEXPERTISES la somme de 2.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Rappelé que l'execution provisoire est de droit pour les salaires et leurs accessoires à concurrence de 9 mois,

Ordonné l'execution provisoire pour l'entier jugement.

Le 08 Décembre 2021 retranscrit le 15 Décembre 2021 Monsieur [M] [H] interjetait appel de cette décision correspondant à l'entier dispositif.

Le 23 février 2021 la société LINKEXPERTISES se constituait,

Les premières conclusions étaient déposées le 15 février 2022. Par ordonnance de référé du 25 novembre 2022 la première présidente de la cour d'appel de Cayenne disait irrecevable la demande d'arrêt de l'exécution provisoire de Monsieur [M] [H].

Par conclusions d'incident du 7 mai 2022 la société LINKEXPERTISES au visa de l'article 524 alinéas 1 et 2 du code de procédure civile concluait faute d'exécution de la décision à la radiation de l'affaire et à la condamnation de Monsieur [M] [H] à une indemnité procédure de 1000 € .

Par conclusions d'incident du 7 juin 2022 Monsieur [M] [H] concluait au débouté de la demande et sollicitait une indemnité de procédure de 2000 € .

Le conseiller de la mise en état par ordonnance du 10 mai 2023 déboutait la société de sa demande de radiation de l'affaire.

Par dernières conclusions d'appel récapitulatives et responsives d'appelant et d'intimé en date du 26 septembre 2022 reprises à l'audience l'appelant demande à la cour de :

Recevoir son appel et d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil des prud'hommes de Cayenne du 8 novembre 2021.

Et de statuer à nouveau pour :

. Constater que la société LINKEXPERTISES a procédé à des retenues abusives sur le salaire d'octobre 2019 et novembre 2019 de Monsieur [M] [H] ,

. Déclarer que la société LINKEXPERTISES s'est rendue auteure de nombreux manquements,

. Ordonner que la prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur du 3 décembre 2019 emporte les conséquences d'un licenciement abusif.

En conséquence de :

Condamner la société au paiement des sommes suivantes :

. Rappel de salaire à compter du 1er avril 2018 au 31 juillet 2018: 14.280 € bruts,

. Indemnité de congés payés afférents 1428 € bruts ,

. Rappel de salaire à compter du 1er octobre 2019 à décembre 2019 10'386,28 € bruts,

. Indemnité de congés payés afférents 1038,63 € bruts,

. Indemnité légale de licenciement 1481,55 €

. Indemnité de préavis 10'710 €,

. Indemnité de congés payés afférents 1071 €,

. Indemnité de licenciement abusif 7140 €

. Notes de frais 3265,14 €,

. Indemnité pour travail dissimulé 21'420 €.

. remise des bulletins de salaire sous astreinte de 100 € par jour de retard,

. Article 700 du code de procédure civile de 5 000 €,

. Fixer le salaire mensuel à la somme de 3570 € bruts,

. Débouter la société LINKEXPERTISE de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles

Par dernières conclusions d'appel incident de l'intimé en date du 3 octobre 2023 et reprises pour l'audience, l'intimé demande :

. À titre principal de :

. Constater que les manquements évoqués par Monsieur [M] [H] au soutien de sa demande de prise d'acte de la rupture du contrat de travail ne sont pas établis.

À titre subsidiaire :

. Constater que les manquements invoqués par Monsieur [M] [H] ne peuvent être considérés comme suffisamment graves de nature à justifier l'impossibilité de poursuivre le contrat de travail.

. Débouter Monsieur [M] [H] de sa demande de requalification de prise d'acte de la rupture du contrat travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

. Débouter Monsieur [M] [H] de l'intégralité de ses demandes pécuniaires.

À titre reconventionnel :

. Constater que Monsieur [M] [H] a quitté brusquement son poste de travail et n'a plus jamais réintégré l'entreprise.

. Dire et juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail du requérant doit s'analyser en une démission.

. Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 10'710 € au titre de l'indemnité de préavis démission .

. Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 9753,92 € au titre du trop-perçu sur rémunération.

. Enjoindre à Monsieur [M] [H] de restituer les documents suivants :

. Les originaux de lettre de mission du mandat remis par la société DÉLICES MARINE

. L'intégralité des documents et informations communiquées par Madame [P].

En conséquence :

Confirmer le jugement entrepris.

Sur l'appel incident :

. Infirmer le jugement entrepris, en ce que le préjudice de la société résultant de la rupture abusive du contrat de travail de Monsieur [M] [H] n'a pas été correctement évalué.

. Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société de sa demande tendant à voir enjoint à Monsieur [M] [H] de restituer les documents comptables de l'année 2019 remis par la société PHOÉNIX SUN.

. Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas condamné Monsieur [M] [H] à payer à la société LINKEXPERTISES la somme de 5.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En conséquence et statuant à nouveau de :

Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 25'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la prise d'acte abusive de son contrat de travail.

Enjoindre à Monsieur [M] [H] de restituer les documents comptables de l'année 2019 remis par la société PHOÉNIX SUN.

Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 5'000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

À titre infiniment subsidiaire :

Confirmer le jugement dans toutes ses dispositions.

En tout état de cause :

Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 8'000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner Monsieur [M] [H] aux entiers dépens.

A l'audience du 5 décembre 2023, il a été indiqué aux parties que la décision serait rendue le 05 mars 2024 à cette date le délibéré a été prorogé au 04 juin 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, qui seront exposés dans les motifs pour les besoins de la discussion, la cour se réfère aux conclusions sus-visées et à la décision déférée, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

La problématique de la prise d'acte :

L'appelante reproche l'absence d'analyse des motifs invoqués au titre de la prise d'acte devant le conseil des prud'hommes ainsi selon elle le conseil n'a pas analysé l'intégralité des manquements invoqués au motif que la prise d'acte ne faisait référence qu'au mois d'octobre 2019 ce qui ne permettrait pas d'invoquer les retenues intégrales du salaire de novembre 2019 au titre de la prise d'acte. Elle considère cependant au visa des décisions de la Cour de cassation que l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à l'employeur ne fixe pas les limites du litige et qu'ainsi le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqué devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionné dans cet écrit.

Il convient donc d'analyser cette prise d'acte, il est d'une jurisprudence constante qu'il appartient au juge saisi d'une demande de requalification de la prise d'acte en licenciement aux torts exclusifs de l'employeur de se prononcer sur ses effets, mais qu'il incombe au salarié d'établir les faits allégués à l'encontre de son employeur.

Il faut également préciser qu'en cas de doute ou si les faits ne sont pas justifiés que cette prise d'acte produit alors les effets d'une démission.

A titre liminaire et en raison de leur pertinence les moyens de première instance seront repris et complétés si nécessaire.

Il ressort de l'analyse des pièces du dossier que contrairement à ce qui a pu être évoqué concernant l'absence de paiement de l'intégralité des salaires sur les mois d'avril à juillet 2018 et de délivrance des bulletins de paye afférents comme énoncé au terme de sa lettre de prise d'acte. Il apparaît que sur cette période Monsieur [M] [H] n'était pas salarié de l'entreprise, il ressort des pièces du dossier et notamment une lettre de mission en date du 29 mars 2018 à en-tête de la société PRODIGOS que Monsieur [M] [H] intervenait en qualité de gérant de cette société pour prendre en charge un certain nombre de prestations comptables à sous-traiter au profit de la société LINKEXPERTISES.

Il ressort un paiement à hauteur de 4000 € pour ces prestations. Il ne ressort pas à ce stade de la procédure que la société ne pouvait imposer aucune contrainte à Monsieur [M] [H] dans le cadre de cette prestation la société n'a jamais donné d'ordres, de directives, durant cette période ni n'a été en mesure de sanctionner d'éventuels manquements, éléments pourtant essentiels dans le cadre des relations salarié/employeur en contrat de travail.

En outre les pièces démontrent que c'est par un contrat à durée indéterminée en date du 31 juillet 2018 que Monsieur [M] [H] a été engagé comme salarié de la société en qualité de responsable du pôle comptable à compter du 1er août 2018, il n'apparaît donc pas qu'il y ait de problématiques concernant la période d'avril à juillet 2018 pour ce qui est des salaires et en conséquence les bulletins de paye y afférent. Monsieur [M] [H] sera donc débouté sur ce point.

Pour ce qui est de la nature de la relation salariée employeur d'août 2018 à juillet 2019. Monsieur [M] [H] est donc salarié de l'entreprise LINKEXPERTISES là aussi il ressort des pièces en procédure que la notion d'un forfait de 217 jours pendant une année est une erreur manifeste et ne correspond pas à la réalité appliquée comme il a été démontré en première instance.

D'autre part il a été mis en place au sein du cabinet une modulation du temps de travail conformément à l'article 8.2.2 de la convention collective applicable. Il est fait référence au fait que la durée hebdomadaire est fixée à 35 heures sur l'année de référence qui s'étend du 1er avril au 31 mars que cette durée peut varier entre les limites de 32 heures au minimum et 48 heures au maximum.

Ainsi il ressort que la rémunération mensuelle brute était lissée et fixée à la somme de 3570 € sur l'ensemble de l'année soit pour 35 heures par semaine et 151,67 heures par mois, comme indiqué dans les fiches de paye, il convient de faire remarquer que l'appelant dans ses demandes sollicite de fixer le salaire mensuel à la somme de 3570 € bruts, ce qui correspond au calcul fait par l'employeur et aux explications données en cause d'appel.

En ce qui concerne l'absence de salaire notamment pour les mois d'octobre et novembre 2019 il faut faire remarquer que l'employeur explique n'avoir fait qu'appliquer les conséquences de la convention collective de « cabinet d'experts-comptables » applicable dans l'entreprise raison pour laquelle l'entreprise à la fin de la période de modulation est ternue d'opérer une régularisation du salaire en fonction de la durée annuelle effectivement travaillée par le salarié.

L'employeur explique donc que le salarié devait à la fois justifier de ce nombre d'heures effectuées, que celui-ci justifiait et renseignait ses heures de travail chaque semaine ce qui n'a jamais été contesté.

Ainsi sur la période d'octobre et de novembre 2019 la société a procédé à une régularisation de la rémunération en fonction du temps de travail effectif accompli, il convient de préciser qu'à la réception de la lettre de prise d'acte de rupture de contrat de travail l'employeur à opéré une régularisation sur la période allant du 1er novembre au 3 décembre 2019.

Il ressort des décomptes de l'employeur que Monsieur [M] [H] a effectivement travaillé durant 1656,20 heures, alors même que son employeur lui avait rémunéré 1934, 21 heures de travail il s'en déduisait donc un solde négatif de 278,01 heures indûment payées et a donc fait apparaître un trop-perçu d'un montant de 6443,53 €.

Cet élément n'apparaît pas comme étant contesté par le salarié, et s'explique selon l'employeur par l'usage par le salarié de congés sans solde et qu'il aurait rarement respecté la durée minimale de travail fixé à 32 heures par semaine ce que l'employeur justifie également par l'absence de travail suite à des retours négatif des clients concernant l'activité de l'intéressé et produit à l'appui des conclusions. Il faut également là aussi noter que l'appelant ayant reçu son bulletin de paye d'octobre 2019 en novembre 2019 après régularisation du trop-perçu que cet état de fait n'a pas été contesté par Monsieur [M] [H] qui a pourtant envoyé un mail le 17 novembre 2019 où il a fait une demande concernant le bulletin de salaire du mois de juin 2019 et sans pour autant contester cet élément qui n'a été repris et développé qu'en cause d'appel seule la mention faite sans développement dans la lettre de prise d'acte de la rupture du contrat de travail reprend cet élément.

Ainsi il a été repondu contrairement à l'argumentaire de l'appelant sur l'absence de salaire des mois d'octobre et novembre 2019.

Il ressort également des pièces au dossier qu'il n'existe pas dans la convention collective nationale d'experts-comptables et des commissaires aux comptes du 9 décembre 1974 de limitation des sommes pouvant être soumises au remboursement en raison d'un trop-perçu.

Il apparaît également que Monsieur [M] [H] pouvait avoir connaissance du fait qu'il y aurait un trop-perçu en sa défaveur puisqu'il remplissait régulièrement les heures travaillées il a également pris acte de la rupture de contrat de travail alors même qu'il a pu être établi qu'il avait conclu un contrat à durée indéterminée avec la société PHOÉNIX SUN.

À l'aune de ces éléments il apparaît bien que la prise d'acte ne peut être considérée comme pouvant être requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'inexistence des manquements allégués par le demandeur ne peut être contestée, si bien qu'il n'existait aucun empêchement rendant impossible le maintien de la relation contractuelle à la date du 3 décembre 2019 il convient donc de l'en débouter et de considérer que cette prise d'acte doit s'analyser en une démission.

Sur un éventuel travail dissimulé :

Contrairement à ce qui est énoncé par l'appelant il ressort des éléments de discussion qui précèdent qu'en ce qui concerne la période d'avril à juillet 2018 Monsieur [M] [H] n'a pas été en situation de travail dissimulé mais en réalité est intervenu en qualité de prestataire de services sur cette période avant d'être embauché à sa demande en contrat à durée indéterminée à partir du 1er août 2018. Ainsi il ressort des pièces du dossier et de la lettre de mission en date du 29 mars 2018 à en-tête de la société PRODIGOS que Monsieur [M] [H] intervienait en qualité de gérant de cette société pour prendre en charge un certain nombre de prestations comptables à sous-traiter au profit de la société LINKEXPERTISES.

En conséquence de quoi les demandes de ce chef seront donc rejetées.

Le principe de ce que la prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur s'analyse après requalification en démission qu'il y a lieu de débouter Monsieur [M] [H] de ses demandes et de confirmer la décision de première instance dans toutes ses dispositions.

En ce qui concerne les autres chefs contestés en appel que sont l'indemnité de préavis, le remboursement de salaire et les dommages et intérêts pour rupture abusive. Il ressort des éléments au dossier et après reconnaissance de la nature de la prise d'acte en démission que

Monsieur [M] [H] suite à la modulation annuelle se trouve être débiteur correspondant à un solde de 278,01 heures de travail correspondant à la somme de 9.753,90 € au titre des trop perçus de salaire.

La prise d'acte de Monsieur [M] [H] ayant été reconnue comme étant abusive il y a lieu de confirmer sa condamnation pécuniaire à ce titre, qu'il n'a pas effectué son préavis et que c'est à juste titre que l'employeur peut en demander réparation sachant également qu'il a été démontré que durant cette période Monsieur [M] [H] s'était déjà engagé auprès d'un autre employeur. Pour ces raisons la décision de première instance sera confirmée pour ces demandes.

Sur l'appel incident ou l'intimé sollicite de :

Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 25'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la prise d'acte abusive de son contrat de travail.

Enjoindre à Monsieur [M] [H] de restituer les documents comptables de l'année 2019 remis par la société PHOÉNIX SUN.

Condamner Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 5'000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur l'évaluation des dommages et intérêts il apparaît comme l'a souligné le conseil des prud'hommes en première instance que l'origine de la rupture doit être imputée à Monsieur [M] [H], qu'alors qu'il faisait part d'une prise d'acte il s'était déjà engagé avec un nouvel employeur qu'il savait qu'il était débiteur d'un surplus conséquent de salaire raison pour laquelle il a pu s'engager auprès d'un autre employeur et faire cette lettre de prise d'acte à laquelle il convient de se référer tel que repris en première instance. Et qu'en outre, soit en raison de son incompétence ou de son manque de travail, a pu nuire à son employeur et qu'en conséquence il convient de réévaluer ce poste de préjudice.

En ce qui concerne la restitution de documents même s'il a été fourni un échange de mails entre l'employeur et la société PHOENIX SUN qui établit une relation de travail l'absence de réponse de ladite société quant aux pièces manquantes ne permettent pas à la cour d'établir les pièces manquantes comme l'étant réellement ce d'autant plus que le bilan final a été réalisé pour la société.

Raison pour laquelle cette demande sera rejetée.

Eu égard aux circonstances de la procédure l'article 700 sera réévalué.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie ».

En l'espèce, monsieur [M] [H], partie perdante, supportera les entiers dépens de l'instance.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, « dans toutes les instances le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée; Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation ».

En l'espèce, il serait inéquitable de laisser à la charge de la société LINKEXPERTISES les frais exposés il convient donc de condamner la partie succombante, Monsieur [M] [H], au versement de la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement du 08 novembre 2021 dans toutes ses dispositions.

Sauf en ce qui concerne le montant au titre de la rupture abusive

et statuant à nouveau,

REJETTE l'ensemble des demandes des parties pour le surplus.

Y ajoutant,

CONDAMNE Monsieur [M] [H] à payer à la société la somme de 12'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la prise d'acte abusive de son contrat de travail.

CONDAMNE Monsieur [M] [H] au versement de la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE Monsieur [M] [H] aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par le Président de chambre et le Greffier placé et placé en rang de minute.

Le Greffier Le Président de chambre

Joséphine DDUNGU Yann Boucharé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Cayenne
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00553
Date de la décision : 04/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-04;21.00553 ?
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