COUR D'APPEL DE CAYENNE
[Adresse 2]
Chambre d' Expropriation
ARRÊT N° 12 /2024
N° RG 22/00315 - N° Portalis 4ZAM-V-B7G-BCD6
LA COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DU CENTRE LITTORAL (CACL) Représentée par l'Etablissement Public Foncier et d'Aménagement de Guyane
C/
[R] [T] [C] décédée le 31/05/2022
Etablissement COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
ARRÊT DU 08 AVRIL 2024
Jugement Au fond, origine Juge de l'expropriation de CAYENNE, décision attaquée en date du 08 Juin 2022, enregistrée sous le n° 21/00023
APPELANT :
LA COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DU CENTRE LITTORAL (CACL) Représentée par l'Etablissement Public Foncier et d'Aménagement de Guyane
La Fabrique Amazonienne, [Adresse 1],
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me MOUSSAULT Michaël, avocat au barreau de Paris et Me Julie PAGE, avocate au barreau de Guyane
INTIMEES :
Madame [R] [T] [C] décédée le 31/05/2022
EHPAD du Centre hospitalier de [Localité 6] ' [Adresse 9]
' [Adresse 4]
[Localité 6]
Non comparante, non représentée
COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
Direction Générale des Finances Publiques de la Guyane
[Adresse 7]
[Localité 6]
Comparant
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
En application des dispositions des articles 937, 939 et 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 mars 2024 en audience publique et mise en délibéré au 08 Avril 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Yann BOUCHARE, Président de chambre.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
M. Yann BOUCHARE, Président de chambre
Mme Eva LIMA, Présidente de chambre
Sophie BAUDIS, Conseillère
qui en ont délibéré.
GREFFIER :
Madame Lysiane DESGREZ, Directrice de greffe, lors des débats et Madame Joséphine DDUNGU, Greffière placée, présente et du prononcé.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par mémoire introductif reçu au greffe le 09 septembre 2021, l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) a saisi le juge de l'expropriation en fixation des indemnités suite à l'expropriation d'une parcelle cadastrée [Cadastre 3], située à [Localité 6] appartenant à Madame [R] [T] [C] d'une superficie de 122 m².
Au sein de cette requête, le prix proposé était de 2 050 € comprenant 1 708 € au titre de l'indemnité principale et 342 € au titre de l'indemnité de remploi. Par ordonnance du 26 janvier 2022, la visite des lieux a été fixée au 29 mars 2022.
Le 16 mars 2022, le commissaire du gouvernement a notifié son mémoire à Madame [C].
Le 29 mars 2022, un transport sur les lieux a été effectué en présence de Maître [X], conseil de l'EPFAG, de l'EPFAG et du commissaire du gouvernement.
Régulièrement avisé, l'expropriée ne s'est pas présentée.
Le transport a permis de relever que la parcelle était entièrement végétalisée, à l'état de friche, avec quelques arbres hauts et qu'une clôture était présente, la séparant de la parcelle voisine.
Au soutien de sa prétention, le demandeur indique que la date de référence doit être fixée au 27 septembre 2019 correspondant à la date de la dernière approbation du PLU conformément aux dispositions de l'article L213-6 et L213-4 du code de l'expropriation. A cette date, le terrain se situerait en zone AU qui serait soumis à des limites de constructibilité en raison du risque d'inondation et de mouvement de terrain. Par ailleurs, l'EPFAG soutient sur le fondement de l'article R311-22 du code de l'expropriation, que le juge de l'expropriation ne saurait, en présence d'une proposition d'évaluation du commissaire du gouvernement supérieure à celle de l'expropriant, dépasser la proposition de l'expropriant, qu'en statuant ainsi il statuerait ultra petita, qu'en l'espèce, la proposition du commissaire du gouvernement est supérieure de sorte que l'indemnité ne saurait dépasser le montant visé par l'expropriant dans ses conclusions.
À titre subsidiaire, l'expropriant conteste les éléments de comparaison produits par le commissaire du gouvernement en indiquant que la parcelle expropriée ne devrait pas être considérée comme constructible.
Selon l'EPFAG, la zone AU serait soumise à de nombreuses restrictions urbanistiques qui le rendrait inconstructible et son raccordement au réseau ne serait pas établi. L'EPFAG propose de se fonder sur une évaluation proche des parcelles situées en zone Naturelle inconstructible, pour une juste indemnisation.
En réplique dans son dernier mémoire, la commissaire au gouvernement, au regard des différents termes de comparaison qu'il communique, de la constructibilité de la parcelle et de sa position géographique, propose un prix pivot de 140 € par m² auquel il conviendrait d'appliquer un abattement de 10% afin de prendre en compte l'aléa inondation.
Le 08 juin 2022 le tribunal a :
CONDAMNÉ l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) à verser à Madame [R] [T] [C] la somme de 5 124 € au titre de l'indemnité principale d'expropriation ;
CONDAMNÉ l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) à verser à Madame [R] [T] [C] la somme de 1 043,40 € au titre de l'indemnité de remploi ;
CONDAMNÉ l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) aux entiers dépens.
Le 8 juillet 2022 l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) a fait appel de cette décision.
L'EPFA GUYANE demande à la Cour d'Appel de CAYENNE de réformer le jugement sus énoncé au motif que le Juge de l'Expropriation a surévalué le montant de l'indemnité de dépossession consécutive à la dépossession de la parcelle cadastrée section [Cadastre 5] d'une superficie de 122 m² située [Adresse 8].
Depuis il a pu être établi que Madame [C] [R] [T] était décédée depuis la première instance et qu'aucun héritier n'était intervenu à l'instance ou l'audience.
EN APPEL :
L'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) a repris en appel ses moyens de première instance.
Le commissaire du gouvernement a soutenu sa proposition de première instance.
Il convient de noter que certains de ces éléments y compris sur l'impossibilité selon le conseil de l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) de suivre les recommandations du commissaire du gouvernement, la présente cour a déjà répondu et sa jurisprudence sera donc confirmée en l'état.
En outre au terme de l'appel il apparaît que cet appel se limite à la sur-évaluation et non pas sur les modalités préexistantes à l'évaluation, le jugement de première instance sera donc repris en tout point sur ces aspects.
L'expropriée ne s'est pas manifesté en appel en raison de son décès.
Le commissaire du gouvernement dans son mémoire du 23 novembre 2022 reçu au greffe le 02 février 2023 et notifié le 16 février 2023 reprenait l'intégralité des éléments du mémoire de première instance éléments qu'il soutenait à l'audience du 11 mars 2024,
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, qui seront exposés dans les motifs pour les besoins de la discussion la cour se réfère aux conclusions sus-visées et à la décision déférée conformément à l'article 455 du Code de Procédure Civile.
À l'audience du 11 mars 2024 les parties étaient informées de la mise en délibéré au 8 avril 2024.
A titre liminaire il convient de constater que l'appel porte principalement sur l'évaluation de l'indemnisation et son montant. Les autres éléments du jugement ne sont pas contestés quant aux principes permettant d'établir l'indemnité principale soit la date de référence, la notion de terrain à bâtir. Ils seront cependant exposés et repris intégralement dans le présent arrêt car ils servent de fondement au calcul de l'indemnité dûe et son montant.
Il a également été entendu que quelque soit le montant de l'indemnité attribuée en l'absence d'héritier connu il serait placé sous séquestre auprès de la caisse de dépôt et consignation, ceci afin d'éviter de retarder l'indemnisation et la réalisatioin du projet en cours.
La problèmatique principale repose sur l'absence de l'exproprié en appel. L'expropriant l'EPFAG soutient sur le fondement de l'article R311-22 du code de l'expropriation, que le juge de l'expropriation ne saurait, en présence d'une proposition d'évaluation du commissaire du gouvernement supérieure à celle de l'expropriant, dépasser la proposition de l'expropriant, qu'en statuant ainsi il statuerait ultra petita, qu'en l'espèce, la proposition du commissaire du gouvernement est supérieure de sorte que l'indemnité ne saurait dépasser le montant visé par l'expropriant dans ses conclusions.
Le commissaire du gouvernement soutient au contraire, qu'il peut même en l'absence de l'expropirié proposer une évaluation supérieure à celle de l'expropriant.
A titre liminaire, sur la possibilité pour le juge de l'expropriation de statuer au-delà de l'offre de l'expropriant en présence d'une évaluation supérieure de la part du commissaire du gouvernement, il faut reprendre, comme lors d'une précédente décision, des textes fondamentaux dans ce domaine.
MOTIFS
Comme il a été énoncéplus haut les moyens de première instance seront repris en raison de leur pertinence et éventuellement complétés pour fixer le cadre de l'évaluation.
- Sur l'indemnité principale
Sur la date de référence :
Selon l'article L322-6 du code de l'expropriation :
« Lorsqu'il s'agit de l'expropriation d'un terrain compris dans un emplacement réservé par un plan local d'urbanisme en application des 1° à 4° de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme, par un document d'urbanisme en tenant lieu, ou par un plan d'occupation des sols en application du 8° de l'article L. 123-1 de ce code dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, le terrain est considéré, pour son évaluation, comme ayant cessé d'être compris dans un emplacement réservé.
La date de référence prévue à l'article L. 322-3 est celle de l'acte le plus récent rendant opposable le plan local d'urbanisme, le document d'urbanisme en tenant lieu ou le plan d'occupation des sols et délimitant la zone dans laquelle est situé l'emplacement réservé. »
Il ressort de l'analyse du commissaire du gouvernement, non contestée par l'expropriant, que la date de référence doit être fixée à la date de la dernière modification du PLU concerné soit le 27 septembre 2019
Conformément aux dispositions de l'article L322-6, la date de référence sera fixée au 27 septembre 2019.
Sur la notion de terrain à bâtir :
Selon les articles L322-3 et L322-4 du code de l'expropriation, la qualification de terrain à bâtir est réservée aux terrains désignés comme constructibles par un document d'urbanisme et effectivement desservis par une voie d'accès, un réseau électrique, un réseau d'eau potable et un réseau d'eau potable dans les cas où les règles relatives à l'urbanisme et à la santé publique l'exigent. L'évaluation de ces conditions doit être effectuée à la date de référence retenue.
Par ailleurs en cas d'emprise partielle, le principe de l'unicité du terrain énonce que la qualité de terrain à bâtir doit être évaluée au regard de l'unité foncière d'origine.
En l'espèce, la date de référence retenue est le 27 septembre 2019, c'est à cette date qu'il faudra donc se positionner pour qualifier la parcelle de terrain à bâtir.
L'unité foncière d'origine se situe intégralement sur une zone AU du PLU c'est-à-dire une zone dite « à urbaniser ». Selon le Plan Local d'Urbanisme tel que relevé par l'expropriant, la zone AU « est concernée par une Orientation d'Aménagement et de Programmation » et il est précisé que « Les constructions et aménagement sont autorisés sous réserve d'être compatible avec l'Orientation d'Aménagement et de Programmation définie pour chaque secteur de la zone AU ».
Or aucun élément présent au dossier ne permet de déterminer la nature des constructions ou aménagement qui serait compatible avec l'orientation d'Aménagement et de Programmation à la date de référence.
Ainsi la première condition de l'article L322-3 du code de l'expropriation n'étant pas réunie, la parcelle expropriée ne saurait être évaluée comme un terrain à bâtir mais au regard de son usage effectif.
Sur les termes de références retenues et l'évaluation de la parcelle :
Selon l'article 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen :
« La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constaté, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ».
Selon l'article 545 du code civil :
« Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité. »
Selon l'article R311-22 du code de l'expropriation :
« Le juge statue dans la limite des prétentions des parties, telles qu'elles résultent de leurs mémoires et des conclusions du commissaire du Gouvernement si celui-ci propose une évaluation inférieure à celle de l'expropriant. Si le défendeur n'a pas notifié son mémoire en réponse au demandeur dans le délai de six semaines prévu à l'article R. 311-11, il est réputé s'en tenir à ses offres, s'il s'agit de l'expropriant, et à sa réponse aux offres, s'il s'agit de l'exproprié. Si l'exproprié s'est abstenu de répondre aux offres de l'administration et de produire un mémoire en réponse, le juge fixe l'indemnité d'après les éléments dont il dispose. »
Au regard de ces dispositions éclairées par l'arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme Yvon c. France du 24 avril 2003 à l'origine de la réforme du rôle du commissaire du gouvernement dans la procédure d'expropriation, il doit être considéré comme une partie pleine et entière à la procédure.
Ainsi l'article R311-22 du code de l'expropriation entend rappeler le principe déjà énoncé à l'article 4 du code de procédure civile et le limite en présence d'une évaluation inférieure proposée par le commissaire du gouvernement. Dans cette situation, le juge de l'expropriation ne saurait aller en deçà de cette proposition.
Au regard de l'objectif d'une juste indemnisation, cette disposition ne saurait entraîner a contrario l'impossibilité pour le juge d'outrepasser la proposition de l'expropriant en présence d'une proposition supérieure du commissaire du gouvernement.
En effet, cela reviendrait à donner la possibilité à l'expropriant de fixer par lui-même le montant maximal de l'indemnisation en l'absence d'offre de l'exproprié sans aucune possibilité de contrôle.
Or le rôle du commissaire du gouvernement, dépositaire d'une expertise particulière en matière foncière, disposant en outre d'un accès facilité à des bases de données utiles à l'évaluation, est précisément d'éclairer la décision judiciaire par rapport à l'objectif d'une juste indemnisation. La défaillance de l'exproprié à la procédure ne saurait rendre cet éclairage moins utile au débat.
Enfin, le troisième alinéa de l'article R311-22 du code de l'expropriation prévoit précisément cette situation. La qualité de partie du commissaire au gouvernement implique que son mémoire fait nécessairement partie des éléments dont dispose le juge de l'expropriation pour statuer sans contradiction aucune avec le premier aliéna précité.
En conséquence, le juge de l'expropriation ne saurait être tenu par l'offre de l'expropriant en présence d'une évaluation supérieure d'une autre partie à savoir, le commissaire du gouvernement qui au demeurant doit bien être considéré comme une partie à l'instance et ne saurait subir un régime différent en cas d'absence de l'exproprié à l'instance et de texte précisant les conséquences de cette absence sur le litige.
Le principe de la possiblilité de proposer une évaluation supérieure à celle de l'expropriant ayant été tranchée il convient de savoir quelle solution reprendre dans le cas de l'espèce.
Sur l'évaluation stricto sensu
L'article L322-2 du code de l'expropriation dispose que :
« Les biens sont estimés à la date de la décision de la première instance (') Quelle que soit la nature des biens, il ne peut être tenu compte, même lorsqu'ils sont constatés par des actes de vente, des changements de valeur subis depuis cette date de référence, s'ils ont été provoqués par l'annonce des travaux ou opérations dont la déclaration d'utilité publique est demandée, par la perspective de modifications des règles d'utilisation des sols ou par la réalisation dans les trois années précédant l'enquête publique de travaux publics dans l'agglomération où est situé l'immeuble. »
L'article L322-3 du code de l'expropriation rappelle que :
« Les terrains qui, à la date de référence indiquée au premier alinéa, ne répondent pas à ces conditions sont évalués en fonction de leur seul usage effectif, conformément à l'article L. 322-2. »
Enfin, selon l'article L322-8 du code de l'expropriation :
« Sous réserve de l'article L. 322-9, le juge tient compte, des accords intervenus entre l'expropriant et les divers titulaires de droits à l'intérieur du périmètre des opérations faisant l'objet d'une déclaration d'utilité publique et les prend pour base lorsqu'ils ont été conclus avec au moins la moitié des propriétaires intéressés et portent sur les deux tiers au moins des superficies concernées ou lorsqu'ils ont été conclus avec les deux tiers au moins des propriétaires et portent sur la moitié au moins des superficies concernées. Le juge tient compte des accords intervenus à l'intérieur des zones d'aménagement différé et des périmètres provisoires. Sous la même réserve, il tient également compte, dans l'évaluation des indemnités allouées aux propriétaires, commerçants, industriels et artisans, de la valeur résultant des évaluations administratives rendues définitives en vertu des lois fiscales ou des déclarations faites par les contribuables avant l'ouverture de l'enquête. »
Concernant l'usage effectif de la parcelle expropriée à la date de référence, il y a lieu de considérer que cette parcelle avait un usage de friche non entretenue.
Il doit tout de même être relevé au stade de son évaluation, que la parcelle se situe au c'ur de l'agglomération de [Localité 6] dans une zone où les besoins en immobilier s'accroissent de sorte que la situation privilégiée de l'emprise expropriée doit être prise en considération.
Or le prix de 14 € par m² proposé par l'expropriant correspond à des ventes de parcelles situées en zone N soit strictement inconstructible. En effet, par rapport au tableau joint par l'EPFAG ce prix correspond aux références n°4 et n°5 (parcelle de 7800 et de 8002 m² en zone N). Leur qualification juridique de zone Naturelle, leur contenance bien plus étendue, et leur localisation géographique, ne peuvent permettre de la même façon de les considérer comme des termes de comparaison.
Les trois termes de comparaison communiqués par le commissaire du gouvernement se fondent eux, sur des terrains situés en zone UC soit avec une constructibilité étendue. Un prix pivot de 140 € par m² est proposé.
Ainsi pour prendre en compte à la fois tant la situation juridique du bien situé en zone AU avec une constructibilité potentiellement limitée, que sa situation privilégiée au regard de sa localisation, il y a lieu à partir du prix pivot proposé par le commissaire du gouvernement et de fixer un abattement de 70% et de confirmer en cela la décision de première instance,
soit un prix de :
140 x 0.3 x 122 m² = 5 124 €
En conséquence, l'EPFAG sera condamné à verser aux héritiers de Madame [R] [T] [C] la somme de 5 124 € au titre de l'indemnité principale.
- Sur l'indemnité de remploi :
L'indemnité de remploi est destinée à couvrir les frais qui seraient exposés par les expropriés pour acquérir un bien similaire dont sont déduits les éventuels avantages fiscaux dont ils pourraient aussi bénéficier selon la définition de l'article R.322-5 du code de l'expropriation. Elle est calculée sur la base de l'indemnité principale. Elle est due même en l'absence effective de remploi.
En l'espèce le montant de l'indemnité principale est de 5 124 € et conformément aux usages habituels, l'indemnité de remploi doit être calculée de la façon suivante : 20% pour la fraction inférieure ou égale à 5 000 €, 15% pour la fraction comprise entre 5 001 et 15 000 € et 10% pour le surplus.
Le montant de l'indemnité de remploi doit donc être fixé à 1 043,40 €.
En conséquence, l'EPFAG sera condamné à verser aux héritiers de Madame [R] [T] [C] la somme de 1 043,40 € au titre de l'indemnité de remploi.
- Sur les demandes accessoires :
En application de l'article L312-1 du code de l'expropriation, l'EPFAG supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
Par Arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, la cour statuant après en avoir délibéré par mise à disposition au greffe :
CONFIRME la décision du 8 juin 2022 dans toutes ses dispositions ainsi :
CONDAMNE l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) à verser aux héritiers de Madame [R] [T] [C] la somme de 5 124 € au titre de l'indemnité principale d'expropriation ;
CONDAMNE l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) à verser aux héritiers de Madame [R] [T] [C] la somme de 1 043,40 € au titre de l'indemnité de remploi ;
DIT que ces sommes seront mises sous séquestre auprès de la caisse de dépôt et de consignation jusqu'à ce que les héritiers interviennent ou que sa sucession soit délarée vacante et ne revienne à l'État.
CONDAMNE l'établissement public foncier et d'aménagement de la Guyane (EPFAG) aux entiers dépens.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président de chambre et le Greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE DE L'EXPROPRIATION
Joséphine DDUNGU Yann BOUCHARE