COUR D'APPEL DE CAYENNE
[Adresse 1]
Chbre Affaires familiales
ARRÊT N°
N° RG 22/00258 - N° Portalis 4ZAM-V-B7G-BB2R
[G] [Y]
C/
[T] [I]
ARRÊT DU 26 JUIN 2023
Arrêt Au fond, origine Juge aux affaires familiales de Cayenne, décision attaquée en date du 06 Mai 2022, enregistrée sous le n°
APPELANTE :
Madame [G] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Alicia D'ENNETIERES, avocate au barreau de GUYANE
INTIME :
Monsieur [T] [I]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 5]
représenté par Me Julie PAGE, avocate au barreau de GUYANE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
En application des dispositions des articles 907 et 786 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 mars 2023 en audience en chambre du conseil et mise en délibéré au 12 juin 2023 prorogé au 26 juin 2023, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Mme Aurore BLUM, Présidente de chambre
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Mme Aurore BLUM, Présidente de chambre
M. Yann BOUCHARE, Président de chambre
M. Laurent SOCHAS, Conseiller
qui en ont délibéré.
GREFFIER :
Madame Johanna ALFRED, Greffière, présente lors des débats et du prononcé
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE :
Monsieur [T] [I] et Mme [G] [Y] se sont mariés le 18 octobre 2003 à [Localité 5] ( Guyane ) sans contrat de mariage préalable.
De cette union sont nées :
- [M] le 6 décembre 2000 à [Localité 3] ( Guyane )
- [V] le 6 avril 2002 à [Localité 5] ( Guyane )
Par requête du 19 novembre 2020, M. [I] a saisi le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Cayenne d'une demande en divorce.
Par ordonnance de non-conciliation du 6 mai 2022, le juge aux affaires familiales notamment :
- Autorisait les époux à introduire l'instance en divorce.
Sur les mesures provisoires :
- Constatait la résidence séparée des époux,
-Attribuait la jouissance du domicile conjugal à titre gratuit à l'épouse,
- Fixait la pension au titre du devoir de secours due à l'épouse à la somme de :
- 2.500 euros par mois jusqu'au mois de décembre 2022 inclus,
- 800 euros par mois à compter du mois de janvier 2023,
- Fixait la provision pour avance de frais à la charge de l'époux à la somme de 3500 euros.
Par acte du 6 juin 2022, Mme [G] [Y] relevait appel de l'ordonnance.
Selon avis du 8 juin 2022, l'affaire était fixée à bref délai conformément aux articles 905, 905-1et 905-2 du Code de procédure civile.
Dans les 10 jours de la notification de l'avis à bref délai, l'appelante signifiait le 17 juin 2022 la déclaration d'appel et le 8 juillet 2022 ses conclusions .
Le 20 juin 2022, M. [T] [I] se constituait.
Dans le mois de l'avis à bref délai, l'appelante déposait ses premières conclusions le 11 juillet 2022. Par dernières conclusions du 22 février 2023 elle conclut à l'infirmation de l'ordonnance et demande de lui allouer une pension titre du devoir de secours d'un montant de 4500 € jusqu'en décembre 2022 inclus et 1200 € à compter de janvier 2023.
A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir :
- que le domicile conjugal qui lui a été attribué, a été vendu le 23 mars 2022, de sorte qu'elle a dû prendre un bien en location moyennant un loyer de 650 € par mois,
- que si elle est bien propriétaire de biens au Brésil, ils ne génèrent pas de revenus locatifs,
- que la pension au titre du devoir de secours n'est pas seulement un minimum vital mais aussi un maintien de son niveau de vie antérieur,
- qu'elle est sans emploi et sans revenu alors que Monsieur [I] perçoit un revenu moyen de 15'000 €,
- qu'il ne peut être sérieusement prétendu que l'obligation au titre du devoir de secours serait compensée par la prise en charge des frais liés aux enfants,
- que la perception de la somme relative à la vente du domicile commun ne vient pas rétablir une égalité de situation,
- qu'elle a été victime d'un accident la circulation Brésil conduisant à des soins et frais très importants.
Par dernières conclusions déposées le 8 mars 2023, M. [I] conclut à l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a fixé une pension alimentaire au titre devoir et qu'elle a accordé une provision de 3500 € au titre des frais d'instance.
A titre subsidiaire, il demande à ce que la pension prenne fin au mois de décembre 2022.
A titre très subsidiaire, il demande de confirmer l'ordonnance de non-conciliation à hauteur de 2500 € jusqu'en décembre 2022 puis 500 € à compter cette date.
A l'appui de ses prétentions, il fait valoir :
- que contrairement à ce qui est soutenu, la pension au titre du devoir de secours n'a pas été fixée en considération de la gratuité de l'occupation du logement, mais de la situation respective des époux et celle de sa fin de détachement en Guyane à compter de janvier 2023,
- que la situation de Madame [Y] est confortable et ne justifie nullement d'une quelconque pension alimentaire,
- qu'elle a perçu 150'000 € sur le prix de vente du bien commun, qu'elle dispose donc d'un capital conséquent,
- qu'elle n'a nul besoin de pension au titre du devoir de secours sachant qu'elle ne produit aucun élément sur sa situation financière,
- que si Madame [Y] dit payer un loyer de 650 € elle ne dit rien sur l'allocation logement qu'elle est susceptible de percevoir,
- que si sa situation financière a pu être importante, elle a pris fin au 31 décembre 2022,
- qu'il assume en outre seul les frais relatifs aux enfants communs auxquels la mère ne contribue pas.
Sur ce, la Cour
Sur la pension au titre du devoir de secours
Aux termes de l'ordonnance de non-conciliation, le premier juge a estimé que "la gratuité de l'occupation du logement conjugal constitue cependant un avantage réel qui ne peut se justifier qu'au titre du devoir de secours, en fonction des charges ressources des parties".
De sorte que le premier juge a bien pris en compte la gratuité du logement pour évaluer la pension à montant de 2500 € jusqu'au mois de décembre 2022 inclus.
Le bien a été vendu le 23 mars 2022 de sorte que Madame [Y] a perçu de cette vente la somme de 150'000 €.
Les parties à hauteur de Cour ne s'opposent plus que sur le montant des la pension au titre du devoir de secours et celle sur la provision pour frais d'instance.
Il convient dès lors d'examiner les ressources et charges des parties.
Monsieur [I] : technicien détaché en Guyane jusqu'en décembre 2022 pour le groupe Ariagroup ( Allemagne).
- Ressources :
- 4.413,80 euros : revenus janvier 2023 comprenant une prime annuelle de compensation de l'inflation de 1.500 euros. M. [I] évalue son salaire à la somme de 3.400 € nets mensuels.
- Charges :
- 800 euros : loyer hors charges (bail d'habitation )
- non renseigné : impôts sur les revenus
- outre les charges du quotidien communes à tous
M. [I] justifie de la prise en charge financière de ses deux filles:
- [M] qui vit à [Localité 7], il justifie de la prise du montant du loyer (520 euros ) outre les frais d'alimentation et de vie courante qu'il évalue à 1012 € par mois.
- [V] qui vit à [Localité 8], il justifie la prise en charge du montant du loyer (430 euros ) outre les frais d'alimentation et de vie courante qu'il évalue à 920 € par mois.
Mme [Y] : sans emploi
- Ressources :
- sans revenus
Madame [Y] à la charge de la gérance des biens qui se situent au Brésil.
- Charges :
- 650 euros : loyer
- non renseigné : impôts sur les revenus
- outre les charges du quotidien communes à tous
Les parties sont propriétaires de plusieurs biens immobiliers:
- un appartement en Allemagne
- une maison à [Localité 9] au Brésil
- un appartement à [Localité 4] au Brésil
Madame [Y] prétend que les biens au Brésil ne génèrent aucun revenu locatif.
Si la situation de Monsieur [I] a pu avant qu'il ne quitte la Guyane en décembre 2022 être confortable, désormais revenu en Allemagne ses revenus sont bien plus modestes ce d'autant qu'il a à sa charge ses deux filles qui vivent en toutes deux dans le sud de la France.
Madame [Y] n'est pas démunie pour avoir perçu sur la vente du bien commun la somme de 150'000 €, aussi la pension au titre du devoir de secours restera fixée à la somme de 2500 € jusqu'en décembre 2022, date à partir de laquelle elle est supprimée. De même il n'y a pas lieu de faire droit à la demande au titre de la provision pour frais d'instance.
L'ordonnance est donc infirmée en ce sens.
Succombant au principal Mme [Y] supportera les dépens de l'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe :
CONFIRME l'ordonnance déférée en ce qu'elle a fixé une pension au titre devoir de secours d'un montant de 2500 € au bénéfice de Madame [Y] jusqu'en décembre 2022,
INFIRME l'ordonnance déférée sur la pension titre du devoir de secours à compter du mois de janvier 2023 et sur la provision pour frais d'instance.
Statuant à nouveau
DEBOUTE Madame [Y] de sa demande de pension au titre du devoir de secours à compter de janvier 2023,
DEBOUTE Madame [Y] de sa demande de provision pour frais d'instance,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
CONDAMNE [G] [Y] aux entiers dépens d'appel et autorise [T] [I] à recouvrer les siens conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par la Présidente de chambre et le Greffier.
Le Greffier La Présidente de chambre
Johanna ALFRED Aurore BLUM