COUR D'APPEL DE CAYENNE
Chambre Premier Président
REQUETE EN INDEMNISATION
A RAISON D'UNE DETENTION PROVISOIRE
ORDONNANCE N° :
N° RG 22/00061 - N° Portalis 4ZAM-V-B7G-BAQT
AFFAIRE : [J] [L] / AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT, LE PROCUREUR GENERAL
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Décision rendue par mise à disposition ce jour
27 Avril 2023
ENTRE :
M. [J] [L]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Mustapha KHITER, avocat au barreau de GUYANE, non comparant, non représenté
ET :
M. AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représenté par Me Elisabeth EWSTIFEIEFF, avocate au barreau de GUYANE
M. LE PROCUREUR GENERAL
Près la Cour d'Appel
[Adresse 1]
[Localité 4]
absent lors de l'audience du 26 janvier 2023
Nous , Aurore BLUM, faisant fonction de Première présidente de la Cour d'Appel de CAYENNE, assistée de Fanny MILAN, greffière présente lors des débats et de Johanna ALFRED, greffière présente lors du prononcé, après avoir entendu les conseils des parties en leurs conclusions et observations à l'audience du 26 Janvier 2023, après avoir indiqué qu'une ordonnance serait rendue le 23 Février 2023, prorogée au 23 Mars 2023, puis au 27 Avril 2023, avons statué comme suit:
Exposé des faits
Monsieur [L] [J] a été incarcéré du 30 avril 2021 au 21 mai 2021, pour des faits de transport, détention, acquisition de produits stupéfiants, détention d'armes et refus de remettre aux autorités judiciaires ou de mettre en 'uvre la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie, commis en état de récidive légale, le 26 avril 2021 et le 30 avril 2021.
Il a été partiellement relaxé par jugement du Tribunal correctionnel de Cayenne en date du 21 mai 2021 uniquement des chefs de transport, détention, acquisition de produits stupéfiants, détention non autorisée d'arme, munition ou de leurs éléments de catégorie B.
Par arrêt de la Cour d'appel de Cayenne du 23 septembre 2021, cette décision a été confirmée en toutes ses dispositions.
Il a donc déposé le 8 février 2022 une requête auprès du Premier président de la cour d'appel de Guyane, en vue d'être indemnisé de sa détention provisoire, en application de l'article 149 du code de procédure pénale.
Il sollicite l'allocation de la somme de quinze mille quatre cents euros (15 400 euros) en réparation de son préjudice moral, la somme de six mille six-cents euros (6 600 euros) en réparation de sa perte de chance de percevoir un salaire, la somme de mille cinq-cents euros (1 500 euros) au titre des frais liés aux contentieux sur la liberté, outre une indemnité de procédure de deux mille euros (2 000 euros).
L'agent judiciaire du Trésor conclut le 15 avril 2022 à l'irrecevabilité de la demande en ce que la condamnation prononcée était inférieure à la détention provisoire maximale autorisée ; qu'en vertu de l'article 434-15-2 du code pénal la peine encourue pour le délit de refus de remettre une convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie est de trois ans d'emprisonnement et de 270 000 € d'amende, alors que la détention provisoire de Monsieur [L] la durée moins d'un mois.
Le ministère public conclut par avis du 15 novembre 2022 à l'irrecevabilité de la requête au motif que la détention provisoire effectuée est inférieure au maximum de la peine encourue pour les faits pour lesquels Monsieur [L] a été condamné en vertu de l'article 434-15-2 du code pénal.
À l'audience des débats du 26 janvier 2023, les parties ont développé leurs écritures.
Elles ont été informées, par avis de prorogation de délibéré en date du 23 février 2023 et du 23 mars 2023 que la décision serait rendue le 27 avril 2023, par mise à disposition au greffe.
SUR CE,
Sur la recevabilité
Au regard des dispositions des articles 149-1, 149-2, 142-10 et R.26 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire et d'un ARSE au cours d'une procédure qui s'est terminée à son égard, par une décision de non-lieu, relaxe ou d'acquittement devenue définitive, a droit, à sa demande, à la réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette privation de liberté.
Il lui appartient, dans les six mois de cette décision, de saisir le premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle celle-ci a été prononcée, par une requête, signée de sa main ou d'un mandataire, remise contre récépissé ou par lettre recommandée avec accusé de réception au greffe de la cour d'appel. Cette requête doit contenir l'exposé des faits, le montant de la réparation demandée et toutes indications utiles prévues à l'article R 26 du même code, le délai de six mois ne courant à compter de la décision définitive que si la personne a été avisée de son droit à demander réparation ainsi que des dispositions des articles 149-1, 149-2 et 149-3 du code de procédure pénale.
En l'espèce, la décision de relaxe dont a bénéficié Monsieur [L] [J] le 21 mai 2021 est devenue définitive à compter du 23 septembre 2021, date de l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Cayenne.
La requête formée le 8 février 2022 est donc recevable.
Sur l'indemnisation
Monsieur [J] [L], qui a été incarcéré du 30 avril 2021 au 21 mai 2021 a subi une durée totale de détention provisoire indemnisable de vingt-deux jours (22 jours).
Or, il est constant que lorsqu'un demandeur, placé en détention provisoire du chef de plusieurs infractions, n'a bénéficié que d'une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement partiel, il convient de contrôler la compatibilité entre les infractions qui ont donné lieu à condamnation et la détention provisoire subie.
Dans ce cas, si la durée de la détention provisoire effectuée par le demandeur est inférieure ou égale à la durée maximale de détention provisoire prévue pour l'infraction ayant donné lieu à condamnation, la personne concernée n'a pas droit à réparation.
Le délit de refus de remettre une convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie est puni de trois ans d'emprisonnement et de 270 000 € d'amende.
En vertu de l'article 145-1 du code de procédure pénale, en matière correctionnelle, la durée maximale de la détention provisoire est de quatre mois et peut être prolongée pour une durée de quatre mois supplémentaires.
En l'espèce, la détention provisoire effectuée par Monsieur [L] ayant duré 22 jours, elle est inférieure à la détention provisoire maximale prévue pour l'infraction ayant donné lieu à condamnation.
En considération de l'ensemble de ces éléments, il ne peut être fait droit à la demande de réparation de Monsieur [L].
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande d'indemnité de procédure.
Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public.
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement et en premier ressort, en audience publique,
Déclarons la requête recevable,
Déclarons que la détention provisoire d'une durée de vingt-deux jours (22 jours) effectuée par Monsieur [J] [L] n'ouvre pas droit à réparation,
Dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure.
Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.
La présente ordonnance ayant été signée par la présidente et la greffière, est placée au rang des minutes de la cour.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
Johanna ALFRED Aurore BLUM