La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/11/2022 | FRANCE | N°21/00201

France | France, Cour d'appel de Cayenne, Chbre affaires familiales, 14 novembre 2022, 21/00201


COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 2]



Chambre Affaires familiales





















ARRÊT N°163



N° RG 21/00201 - N° Portalis 4ZAM-V-B7F-5OX





[B] [Y]





C/



[W] [M] [I]







ARRÊT DU 14 NOVEMBRE 2022



Jugement au fond, origine Juge aux affaires familiales de CAYENNE, décision attaquée en date du 25 mars 2021, enregistrée sous le n° 20/00726



APPELANT :



Monsie

ur [B] [Y]

[Adresse 23]

[Localité 11]



représenté par Maître Fabienne LANDRY, avocate au barreau de GUYANE





INTIMEE :



Madame [W] [M] [I]

[Adresse 20]

[Localité 10]



représentée par Maître Julie PAGE, avocate au barreau de GUYANE, substituée pa...

COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 2]

Chambre Affaires familiales

ARRÊT N°163

N° RG 21/00201 - N° Portalis 4ZAM-V-B7F-5OX

[B] [Y]

C/

[W] [M] [I]

ARRÊT DU 14 NOVEMBRE 2022

Jugement au fond, origine Juge aux affaires familiales de CAYENNE, décision attaquée en date du 25 mars 2021, enregistrée sous le n° 20/00726

APPELANT :

Monsieur [B] [Y]

[Adresse 23]

[Localité 11]

représenté par Maître Fabienne LANDRY, avocate au barreau de GUYANE

INTIMEE :

Madame [W] [M] [I]

[Adresse 20]

[Localité 10]

représentée par Maître Julie PAGE, avocate au barreau de GUYANE, substituée par Maître Maurice CHOW-CHINE, avocat au barreau de GUYANE lors de l'audience du 12 septembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

En application des dispositions des articles 907 et 786 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 septembre 2022 en chambre du conseil et mise en délibéré au 12 décembre 2022, avancé au 14 novembre 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Mme Aurore BLUM,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Aurore BLUM, Présidente de chambre

Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre

M. Laurent SOCHAS, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER :

Mme Fanny MILAN, Greffier, présente lors des débats et du prononcé

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.

Exposé du litige :

M. [B] [Y] et Mme [W] [I] se mariaient le 28 novembre 1992 à [Localité 13] (72 - Sarthe ), sans contrat de mariage préalable.

De cette union sont issus quatre enfants :

- [H] le 25 juillet 1994 à [Localité 17] ( SARTHE),

- [R] le 11 octobre 1996 à [Localité 14] (République de DJIBOUTI),

- [E] le 29 avril 1997 à [Localité 17] ( SARTHE),

- [S] le 27 juin 2000 à [Localité 19] ( GABON ).

Le 2 février 2015, Mme [W] [I] déposait une requête en divorce sur le fondement de l'article 251 du Code civil.

Le 23 novembre 2016, par ordonnance de non-conciliation, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Cayenne notamment:

- Autorisait les époux à introduire l'instance de divorce,

Sur les mesures provisoires quant à leurs biens :

- Disait que M. [Y] avec l'accord de son conjoint, conservera provisoirement sa résidence dans les lieux ayant servi à la résidence familiale, à titre onéreux, à charge pour ce dernier de régler les frais y afférents (notamment le prêt personnel de 89 euros pour la piscine) pour le compte de la communauté et à charge de récompense lors des opérations de liquidation et partage.

- Donnait acte aux époux de l'accord de M. [Y] pour restituer à son épouse les biens précédés d'une croix dont la liste se trouvait en annexe de l'ordonnance,

- Déboutait Mme [I] de sa demande au titre des autres biens,

- Attribuait à M. [Y] la jouissance à titre gratuit des biens immobiliers situés à [Localité 26] (72 ) et [Localité 27] (72 ) à charge pour lui d'en régler les crédits y afférents pour le compte de la communauté et ce sans faculté de récompense.

Par acte du 31 mai 2017, Mme [W] [I] assignait en divorce sur le fondement de l'article 242 du Code civil.

Par jugement du 25 juillet 2019, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Cayenne notamment :

- Prononçait le divorce des époux sur le fondement de l'article 245 du Code civil,

- Constatait qu'en application de l'article 262-1 du Code civil, le divorce entre les époux prenait effet quant à leurs biens à la date de l'ordonnance de non-conciliation soit le 23 novembre 2016,

- Ordonnait la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux [Y]-[I],

- Désignait pour y procéder, M. le Président de la chambre inter-départementale des Notaires de la Martinique et de la Guyane ou son délégué,

- Disait qu'il appartiendra au notaire désigné de déterminer le montant de l'indemnité d'occupation due par M. [Y] sur le bien situé à [Localité 11] pour la date courant du 23 novembre 2016 à la date où le jugement sera passé en force de chose jugée,

- Disait qu'il appartiendra au notaire de procéder à l'estimation des biens dépendant de la communauté,

- Déboutait Mme [I] de sa demande de licitation du bien situé à [Localité 26],

- Déboutait Mme [I] de sa demande d'attribution préférentielle du bien situé à [Localité 27],

- Attribuait à M. [B] [Y] la jouissance du domicile conjugal situé à [Adresse 23], à titre gratuit à compter du jour où le jugement sera passé en force de chose jugée, à charge pour lui d'en supporter les frais afférents et à charge pour le notaire désigné de calculer l'indemnité d'occupation due par M. [Y] pour la période courant entre la date de l'ordonnance de non-conciliation du 23 novembre 2016, et ce eu égard à la valeur locative du bien,

- Disait que M. [B] [Y] continuera à régler les mensualités de l'ensemble des crédits souscrits par le couple relatifs aux divers biens immobiliers, et ce sans qu'il y ait lieu d'établir un compte entre les parties dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial sauf pour le crédit portant sur le domicile conjugal situé à [Localité 11] qui donnera lieu à récompense lors des opérations de liquidation et partage.

Mme [I] faisait signifier à M. [Y] le jugement le 19 août 2019 par remise à l'étude d'huissier.

Au motif que malgré plusieurs relances de M. [Y] aucune démarche n'avait été entreprise pour vendre le bien de [Localité 26] et [Localité 27], Maître [J] [T], notaire désignée, établissait le 9 mars 2020 une attestation indiquant ne pas être en mesure d'envisager la rédaction d'un acte de liquidation à défaut d'entente des parties.

Par acte du 21 avril 2020, Mme [I] aux fins de voir trancher les difficultés les empêchant de parvenir à la liquidation et au partage de leurs intérêts patrimoniaux assignait M. [B] [Y] au visa de l'article 815-5 du Code civil devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Cayenne, lequel par jugement du 25 mars 2021 sous le bénéfice de l'exécution provisoire notamment:

- Ordonnait la poursuite des opérations de partage et liquidation judiciaire des intérêts patrimoniaux de M. [B] [Y] et Mme [W] [I] conformément aux dispositions des articles 1364 et suivants du Code de procédure civile et selon ce qui avait été jugé par la décision,

- Désignait pour poursuivre les opérations de partage, Maître [J] [T], notaire à [Localité 12],

- Commettait le magistrat coordonnateur du pôle de la famille ou son délégataire pour surveiller les opérations, statuer sur les difficultés et faire rapport au tribunal en cas de désaccords persistants des parties,

- Autorisait le notaire désigné à prendre tous renseignements utiles auprès de la direction générale des finances publiques par l'intermédiaire du fichier national des comptes bancaires et assimilés ( FICOBA ),

- Autorisait Mme [W] [I] à vendre seules les biens immobiliers indivis suivants et à accomplir toutes formalités légales les concernant :

* une maison à usage d'habitation sis [Adresse 3] au prix plancher de 360.000 euros,

* une maison d'habitation sis [Adresse 1], au prix plancher de 30.000 euros

* une maison à usage d'habitation sis [Adresse 23], au prix plancher de 290.000 euros.

- Autorisait la réduction de 10% de ces prix planchers après l'écoulement de délais successifs de quatre mois sans aucune offre d'achat,

- Disait que M. [B] [Y] était redevable à l'égard de l'indivision d'une indemnité d'occupation de 21.600 euros, correspondant à la jouissance onéreuse du domicile entre novembre 2016 et novembre 2019,

- Disait que Mme [W] [I] était en droit de se prévaloir de 50% de cette indemnité d'occupation,

- Ordonnait le retrait du rôle et disait que l'affaire pourrait être rappelée à tout moment à l'audience du juge commis à la diligence de ce dernier, du notaire désigné ou de leurs conseils,

- Condamnait M. [B] [Y] à une indemnité de procédure de 4.000 euros.

- Ordonnait l'emploi des dépens en frais de partage.

Mme [I] faisait signifier à M. [Y] le jugement le 12 avril 2021 par remise à l'étude d'huissier.

Par acte du 10 mai 2021, M. [B] [Y] relevait appel de l'intégralité des chefs du jugement.

Sur saisine de M. [B] [Y] en date du 10 mai 2021, par ordonnance du 8 juillet 2021, la Première Présidente de la Cour d'appel de Cayenne arrêtait l'exécution provisoire attachée au jugement du 25 mars 2021.

Par premières conclusions déposées le 9 août 2021 et dernières du 6 mars 2022 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, M. [B] [Y] conclut à l'infirmation du jugement. Il demande au visa de l'article 1364 du Code civil de :

- Ordonner la poursuite des opérations de partage judiciaire des intérêts patrimoniaux de M. [B] [Y] et Mme [W] [I],

- Désigner pour y procéder la chambre inter-départementale des notaires de la Martinique et de la Guyane ou son délégué,

- Juger qu'il appartiendra au notaire désigné de former la masse partageable supposant de liquider le régime matrimonial, de calculer les récompenses dues et notamment les récompenses dues par la communauté à l'un ou l'autre des indivisaires pour l'apport des fonds propres en communauté,

- Lui allouer une indemnité de procédure de 4.000 euros.

A l'appui de ses prétentions, il fait valoir :

- que le retard pris dans l'issue de la procédure n'est que la conséquence du changement par Mme [I] par cinq fois de son conseil,

- que la jouissance du domicile conjugal lui a été attribuée par ordonnance de non-conciliation à titre gratuit et non comme le prétend Mme [I] à titre onéreux,

- qu'il a assumé la totalité de la charge des dettes du couple et ce bien avant l'abandon par Mme [I] du domicile conjugal,

- qu'aucun projet de liquidation qui recueille l'accord des parties de leurs a été soumis de sorte qu'il est faux de prétendre qu'il y a eu un accord entre eux,

- qu'afin d'éviter toute sous-évaluation des biens, il préférait que les évaluations soient faites à dire d'auxiliaires de justice assermentés et non d'agent immobilier raison de sa résistance dans la mise en oeuvre des évaluations,

- qu'il est faux de prétendre qu'il est pu tenir quelques propos déplacés lors de la médiation pénale alors qu'il était accompagné de son conseil,

- que contrairement à ce que prétend Mme [I], elle n'a nullement été bienveillante en prétendant qu'elle ne s'opposait pas à la demande d'arrêt d'exécution provisoire du jugement déféré alors que, dès le 27 avril 20021, elle ne lui laissait que 15 jours pour quitter l'ancien domicile conjugal, que postérieurement à la saisine en arrêt de l'exécution provisoire, elle faisait procéder dès le 2 juin 2021 à une saisie attribution sur ses comptes bancaires

- qu'il n'a pu faute de projet liquidatif notarié, mener à bien les démarches auprès des établissements bancaires pour concrétiser le partage effectif de la communauté,

- que Mme [I] soutient faussement qu'elle n'avait pas accès aux divers biens indivis depuis 2014 alors qu'il est venu s'installer à cette date en Guyane pour raison professionnelle, qu'elle ne l'a rejoint que plus tard, qu'elle a fermé la maison de [Localité 27] avec ses propres clés, que de même elle a fait procéder au changement des serrures avant le jugement du 25 mars 2021 ( procès-verbal du 11 décembre 2020 ),

- qu'il sollicite l'attribution préférentielle du bien de [Localité 11], et conteste le montant de l'indemnité d'occupation tant qu'aucun projet liquidatif ne sera établi.

Par premières conclusions déposées le 2 novembre 2021 et dernières du 30 mars 2022 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, Mme [W] [I] conclut à la confirmation du jugement sauf à porter l'indemnité d'occupation à la somme de 30.600 euros. Elle demande au visa de l'article 815-5 du Code civil de :

- Autoriser Mme [I] à accomplir toutes formalités et à régulariser les ventes amiables des biens indivis :

* maison à usage d'habitation sis [Adresse 3] au prix plancher de 360.000 euros,

* maison d'habitation sis [Adresse 1], au prix plancher de 30.000 euros

* maison à usage d'habitation sis [Adresse 23], au prix plancher de 290.000 euros.

- Autoriser la réduction de 10% de ces prix planchers après l'écoulement de délais successifs de quatre mois sans aucune offre d'achat,

- Condamner au visa de l'article 815-9 du Code civil M. [Y] au paiement de la somme de 36.600 euros au titre de l'indemnité d'occupation due de novembre 2016 à novembre 2019,

- Renvoyer pour le surplus les parties devant le notaire liquidateur pour procéder au calcul de leurs droits respectifs et au partage des prix de vente,

- Lui allouer une indemnité de procédure de 10.000 euros.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir :

- que le notaire avait réussi à arrêter entre les indivisaires un accord, consistant en la vente du bien de [Localité 26] et de l'immeuble de [Localité 27], l'attribution de celui de [Localité 11] à M. [Y], que toutefois ce dernier s'est opposé à l'intervention d'un agent immobilier,

- qu'elle a renoncé à faire exécuter le jugement déféré en raison des conséquences irréversibles que cela aurait entraîné, de sorte que son comportement est irréprochable,

- que le refus de M. [Y] de mettre en vente les immeubles communs met en péril l'indivision s'agissant de biens qui sont inoccupés depuis désormais 13 ans, que son inertie n'est que la conséquence de l'attribution à titre gratuit de la jouissance de l'ancien domicile conjugal, dans lequel il a intérêt à se maintenir sans avoir à verser la soulte due à Mme [I],

- que M. [Y] qui dispose des clés des autres biens immobiliers ne permet pas à l'agent immobilier de procéder à une estimation,

- qu'il est faux de prétendre qu'il n'aurait plus accès au bien de [Localité 27] alors que Mme [I] n'a fait changer qu'une serrure et celle du portillon afin de permettre l'évaluation du bien, qu'elle n'a plus accès aux biens depuis 2014,

- que le jugement de divorce n'a octroyé à M. [Y] que la jouissance de l'ancien domicile conjugal et non l'attribution préférentielle,

- que M. [Y] qui devait prendre en charge les prêts et les divers frais s'est soustrait à son obligation, qu'elle a dû honorer divers impayés,

- qu'elle se retrouve dans une situation délicate, qu'il convient de l'autoriser à vendre les immeubles,

- que l'indemnité d'occupation mensuelle sur la période de novembre 2016 à novembre 2019 ne saurait être inférieure à 1.700 euros soit une part revenant à M. [Y] de 850 euros.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 avril 2022.

Sur ce, la cour

Sur la demande de vente des immeubles indivis dépendant de la communauté

Mme [I] prétend que M. [Y] a fait preuve d'inertie dans les opérations de liquidations et partage de la communauté notamment s'agissant du sort des immeubles communs.

M. [Y] rappelle pour sa part qu'il n'a été destinataire d'aucun projet de liquidation lui permettant d'avoir une vision sur les masses à partager, qu'il souhaitait que l'évaluation des biens se fasse à dire d'expert foncier.

A cet égard, il convient de rappeler que selon mention au dispositif du jugement de divorce du 25 juillet 2019, il a été jugé s'agissant des immeubles ' qu'il appartiendra au notaire de procéder à l'estimation des biens immobiliers dépendant de la communauté', lequel devait aussi ' former les masses partageables...', de sorte qu'il ne peut être fait aucun reproche à M. [Y] d'avoir attendu qu'une estimation des immeubles soit présentée par le notaire, mais encore qu'il soit proposé aux parties un projet liquidatif de la communauté ayant existé entre eux sur la base de ces évaluations.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il autorise Mme [I] à vendre seule les immeubles.

Sur l'évaluation des immeubles

Trois biens indivis dépendent de la communauté.

Mme [I] sollicite d'être autorisée à vendre les trois immeubles dépendant de l'indivision selon les évaluations du jugement déféré.

À l'exception du bien situé à [Localité 11], ancien domicile conjugal dont la jouissance a été attribuée à M. [Y] et pour lequel il demande l'attribution préférentielle, ce dernier n'indique pas aux termes de ses conclusions le sort qu'il entend réserver à l'immeuble de [Localité 26] et celui de [Localité 27].

Sur l'immeuble situé à [Localité 11] (973 Guyane )

Selon acte notarié dressé le 15 mars 2010 par Maître [V] [G], notaire à [Localité 12] (973 ), M. [B] [Y] et Mme [W] [I] ont acquis moyennant un prix de 10.000 euros un terrain nu, situé [Localité 11] P.K, 19 lieu dit ' [Localité 22]' :

- cadastré AR n° [Cadastre 9],lieu dit ' [Localité 22]' d'une surface de 02ha, 83a, 44 ca.

Sur la valeur de l'immeuble de [Localité 11]

Aux termes de ses conclusions, M. [Y] renouvelle son souhait de se voir attribuer l'immeuble de [Localité 11]. A cet égard, il résulte de l'attestation notariée établie le 9 mars 2020 par Maître [J] [T], que les parties se sont entendues sur l'attribution du bien situé à [Localité 11] à M. [Y] et la vente du bien de [Localité 26] et [Localité 27]. ( piéce n°6 [I] et pièce n°9 [Y] ).

Mme [I] verse un avis de valeur entre 280.000 euros et 308.000 euros en date du 28 octobre 2019 établi par l'agence CAPIFRANCE s'agissant d'une maison dont la surface habitable est dite de 200 m² hors balcon, terrasse, cave, parking avec un étage en comble aménagé. Le standing est dit: normal, le terrain est évalué à 28344 m². L'avis précise que 'ces valeurs sont fondées sur les documents et informations qui ont été communiquées par le propriétaire ou le demandeur' mais encore que ' la valeur est donnée sous réserve de l'examen des titres de propriété, inscription au registre des hypothèques...' (pièce n°20 [I] )

Selon attestation de valeur vénale établie le 9 décembre 2019 par Maître [J] [T], l'immeuble de [Localité 11] peut être évalué entre 140.000 et 150.000 euros s'agissant d'une maison d'habitation d'une surface de 167m² composée d'un séjour, cuisine, 4 chambres dont une suite parentale, salle d'eau, WC, buanderie, à l'étage surface aménageable, terrasse, piscine. (pièce n°20 [Y] ).

La valeur a été estimée à 150.000 euros selon rapport d'expertise établi à la demande de M. [Y] en date du 3 juin 2020 par [K] [D], expert immobilier inscrit sur la liste de la Cour d'appel de Cayenne, lequel indique que le terrain est répertorié comme terrain inondable par la ville de [Localité 11], situé en zone protégée. Il décrit une construction ' âgée d'une dizaine d'année, réalisée dans un environnement technique parfois insuffisant, inachevé'. Il précise : ' la construction est en mauvaise état et réclame des interventions substantielles' comme ' traitement anti-termites, réduction des fissures, reprise éclats de béton, réparation plancher de la mezzanine, reprise distribution, reprise complète couverture, mise en place de faux plafonds, reprise gouttières et descente EP, reprise garde corps, reprise plomberie, reprise pose menuiseries, reprise électricité, traitement infiltrations et étanchéité des murs, peinture générale, reprise plage piscine...'

Il indique encore que le :' secteur retiré et calme, agrément extérieur : piscine, secteur isolé, avec accès en très mauvais état, difficilement carrossable, terrain en zone inondable, protégé, non constructible, maison édifiée sans permis de construire, inachevée, présentant désordres, réclamant travaux substantiels.'

Les photographies illustrant le rapport d'expertise montrent effectivement une maison qui reste à parfaire.

En considération des éléments versés par les parties, l'évaluation produite par Mme [I] qui ne tient pas compte de l'état du bien, dont la surface habitable est erronée, ne peut être retenue.

Sur la base des avis de Maître [T] et de M. [X], il convient de fixer la valeur du bien de [Localité 11] à la somme de 120.000 euros s'agissant d'une maison présentant de nombreux désordres à reprendre, construite sans permis de construire, ce qui la rend difficilement négociable, qui plus est édifiée sur un terrain classé en zone protégée et inondable, ce qui fait perdre au terrain toute valorisation alors qu'au regard de sa sruface, il génére une charge d'entretien importante.

Malgré l'ensemble des réserves, M. [Y] maintien sa demande d'attribution préférentielle à laquelle est par suite fait droit.

Sur l'immeuble situé à [Localité 27] (72 )

Selon acte notarié dressé le 6 février 2004 par Maître [L] [P], notaire à [Localité 24] (72), M. [B] [Y] et Mme [W] [I] ont acquis moyennant un prix de 121.959,00 euros une maison d'habitation située [Adresse 3], avec rez de chaussée et étage ainsi qu'un bâtiment avec hangars comprenant deux écuries, étable, laiterie, l'ensemble cadastré :

- section A n° s[Cadastre 5] : [Adresse 3] d'une surface de 23a, 45a,

- section A n° s [Cadastre 8] : [Localité 16] d'une surface de 02a 38ca,

- section E n° [Cadastre 7] : la pièce du picardier d'une surface de 76a 77ca.

Le tout pour une contenance de 1ha, 02a, 60ca.

Sur la valeur de l'immeuble de [Localité 27]

Mme [I] verse une estimation de valeur à 400.000 euros en date du 23 octobre 2019 de l'agence IMMO SARTHOIS s'agissant d'une propriété de 10 pièces sur 300 m² et deux niveaux, 4 chambres, outre 250 m² de dépendance sur un terrain 9820 m². L'état n'est pas décrit. ( pièce n° 8 [I] ).

M. [Y] produit un avis de valeur notarié au terme duquel Maître [C] [F], notaire à [Adresse 25] (72) évalue à 260.000 euros l'immeuble décrit comme : ' une maison d'habitation (élevée sur trois niveaux + cave), en cours de rénovation, diverses dépendances, cours et terrains). (pièce n°20 [Y] ).

Sur l'immeuble situé à [Localité 26] (72)

Selon acte notarié dressé le 9 novembre 2007 par Maître [Z] [A] [O], notaire à [Localité 21] (72), M. [B] [Y] et Mme [W] [I] ont acquis moyennant un prix de 35.000 euros une maison d'habitation à restaurer située lieu dit ' [Adresse 1], comprenant deux pièces principales avec leur cheminée dont une avec four à pain, écurie, toit à porcs, deux caves à l'arrière.

L'ensemble cadastré :

- Section A, n° [Cadastre 4] '[Localité 15]' d'une surface de 13a, 10ca

- Section A, n° [Cadastre 6] ' [Localité 18]' d'une surface de 20a, 37ca.

Sur la valeur de l'immeuble de [Localité 26]

Mme [I] verse un avis de valeur entre 30.000 et 35.000 euros en date du 23 octobre 2019 de l'agence IMMO SARTHOI s'agissant d'une maison de 70m2. L'état n'est pas décrit.

M. [Y] produit un avis de valeur notarié au terme duquel Maître [C] [F], notaire à [Adresse 25] (72) évalue à 500 euros l'immeuble décrit à l'état de ruine et terrain attenant précisant que l'immeuble se trouve en 'zone en principe inconstructible, comme réservée aux activités agricoles ou forestières' (pièce 20 ).

Selon l'attestation établie le 9 mars 2020, par Maître [T], les parties ont convenu de vendre ces deux derniers immeubles. Les ventes auront donc lieu de gré à gré au mieux disant.

Pour les besoins de l'état de liquidation et de partage provisoire, les valeurs à dire de notaire des biens de [Localité 27] et [Localité 26] seront retenues dans l'attente des valeurs définitives.

Selon ordonnance de non-conciliation du 23 novembre 2016, bien que les parties ont déclaré vivre séparément depuis le 3 octobre 2014, l'ordonnance de non-conciliation fixe au 29 novembre 2016 la date des effets du divorce quant à leurs biens.

Selon attestation du 9 mars 2020, Maître [T] indique avoir évoqué avec les parties les solutions permettant la rédaction de l'acte liquidatif, sauf qu'il n'est pas précisé, hors la question de la vente des immeubles, les points d'accord des parties ou ceux restant à trancher.

Dès lors, il convient de rappeler que les dépenses d'amélioration (travaux ) ou de conservation des biens dont M. [Y] a assumé seul le coût sont à la charge des parties et donc partageables par moitié depuis l'ordonnance de non-conciliation du 23 novembre 2016 comme l'impôt foncier, la taxe d'habitation, les assurances des immeubles, les travaux de conservation (chaudière, toiture,fenêtres...), ou encore les éventuels frais de gardiennage, mais encore les charges diverses autres que celles courantes (eau, électricité, chauffage, entretien courant qui restent à la charge de l'occupant ou du bénéficiaire de la jouissance).

En effet, l'ordonnance de non-conciliation a attribué la jouissance provisoire du domicile conjugal à M. [Y] à charge pour ce dernier d'en régler les frais afférents pour le compte de la communauté. La jouissance gratuite de deux autres immeubles lui était accordée, à charge pour lui d'en régler les crédits pour le compte de la communauté et sans faculté de récompense.

Le jugement de divorce du 25 juin 2019 n'a attribué à M. [Y] que la jouissance gratuite de l'ancien domicile conjugal à charge pour lui d'en supporter les frais, frais qui ne peuvent s'entendre faute de précision que des charges et de l'entretien courants de l'occupant, à l'exclusion de celles d'amélioration ou de conservation qui demeurent communes. Pour les deux autres immeubles aucune jouissance ne lui a été accordée, M [Y] n'a conservé que l'obligation d'assumer le coût des crédits de sorte qu'à compter du jour où le jugement a acquis force de chose jugée ( 19 septembre 2019 )l'ensemble des frais relatif à ces deux biens sont à la charge de la communauté y compris ceux courants.

Enfin, la note d'honoraire en date du 4 juin 2020 de M. [D] (pièce n°22 [Y] ) d'un montant de 800 euros, frais que M. [Y] a dû engager pour l'évaluation du bien en l'absence de réponse à son mail du 26 avril 2020 adressé au notaire liquidateur (pièce n°23 [Y] ) demandant qu'il lui soit transmis l'estimation faite par l'agent immobilier diligentée par le cabinet notarial, devra être comptabilisée en compte de liquidation et partage par moitié entre les parties.

Sur l'indemnité d'occupation de l'immeuble de [Localité 11]

Selon la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004, applicable aux faits de l'espèce, l'article 262-1 du code civil fixe par principe le point de départ des effets du divorce dans les rapports entre époux en ce qui concerne leurs biens, à la date de l'ordonnance de non-conciliation.

Aux termes de l'article 815-9 du Code civil :

' Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L''indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.'

Selon ordonnance de non-conciliation du 23 novembre 2016, l'ancien domicile conjugal a été attribué à titre onéreux à M. [Y], jouissance devenue gratuite par les effets du jugement de divorce du 25 juillet 2019, et ce à compter du jour où le jugement a acquis force de chose jugée c'est à dire lorsque les délais de recours contre la décision sont écoulés.

Sur la durée de l'indemnité d'occupation

Par application de l'article 538 du Code civil, le délai d'appel d'un jugement en matière contentieuse est d'un mois à compter de sa signification qui en l'espèce est intervenue le 19 août 2019, de sorte que le délai d'appel a expiré le 19 septembre 2019, date à laquelle prend dès lors fin l'indemnité d'occupation et non novembre 2019 comme mentionné au jugement déféré, lequel est infirmé sur ce point.

Sur le montant de l'indemnité d'occupation

Mme [I] se prévaut d'une valeur locative fixée à 1.700 euros et vise à cet égard sa pièce n°22 pour justifier du-dit montant, elle demande par suite de dire M. [Y] tenu à la somme de 850 euros mensuelle, or au terme de cette pièce datée du 9 mars 2020 Maître [T] atteste que la valeur locative du bien est de 600 euros.

M. [Y] conteste la valeur de l'indemnité d'occupation retenue laquelle devra venir en tout état de cause en compensation de la soulte qu'il estime due par Mme [I].

Le principe d'une indemnité d'occupation est à ce jour définitif sur la période allant du 23 novembre 2016 au 19 septembre 2019 soit 35 mois.

L'expertise de M. [D] fixe cette valeur entre 600 et 700 euros au regard de 'la localisation très excentrée, des conditions d'accès problématiques, du caractère inachevé de la construction et plus généralement du niveau de prestation'. Auquel doit être rajouté le risque d'inondation relevé dans le rapport.

Une réfraction sur la valeur locative de l'immeuble peut intervenir sachant que, si l'indemnité d'occupation est comparable à un loyer pour autant, elle ne lui est pas assimilable dès lors que l'occupant ne bénéficie pas de la même protection, ce qui est le cas de l'espèce puisque le jugement déféré a pu autoriser la vente de l'ancien domicile conjugal, qu'à ce jour M. [Y] n'est toujours pas reconnu légitime propriétaire de la maison de [Localité 11]. Par suite, cette précarité justifie que la valeur locative soit portée à 500 euros par mois soit 17.500 euros. ( 500 X 35 ), M. [Y] n'en étant redevable en sa qualité d'indivisaire que de la moitié soit 8.750 euros .

Le jugement déféré est par suite infirmé sur ce point.

Il y a lieu de rappeler que l'indemnité d'occupation est due à l'indivision et non à l'indivisaire non occupant, de sorte que Mme [I] qui ne bénéficiait pas d'une condamnation à son profit ne pouvait engager une procédure de recouvrement, aussi l'ensemble des frais relatifs à la saisie-attribution diligentée le 2 juin 2021, qui plus est postérieurement à la saisine en date du 10 mai 2021 de Mme la Première Présidente en arrêt de l'exécution provisoire, resteront à sa charge, en ce compris les frais bancaires induits par l'acte de poursuite qui ont été supportés par M. [Y], que ce dernier pourra faire valoir dans le cadre des opérations de liquidation et partage.

Succombant au principal, Mme [I] est condamnée à une indemnité de procédure de 4.000 euros.

Par ces motifs

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise en disposition au greffe ;

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Attribue préférentiellement à M. [B] [Y] le bien situé [Adresse 23],

Fixe la valeur de l'immeuble situé [Adresse 23] à la somme de 120.000 euros,

Autorise les parties, sauf meilleur accord, à vendre de gré à gré les biens situés:

- [Adresse 3]

[Adresse 1]

Fixe provisoirement la valeur de ces biens, dans l'attente de leur réalisation pour les besoins de l'état liquidatif et de partage restant à parfaire, à la somme de :

- 260.000 euros pour le bien situé à [Localité 27],

- 500 euros pour le bien situé à [Localité 26],

Fixe la valeur locative de l'immeuble situé à [Localité 11] à la somme mensuelle de 500 euros, sur la période de novembre 2016 à septembre 2019 soit 17.500 euros. ( 500 X 35 ),

Fixe dans les comptes de liquidation et de partage à 8.750 euros la somme dont est redevable M. [Y] en sa qualité d'indivisaire occupant,

Dit que les frais d'exécution engagés par Mme [W] [I] en exécution du jugement du 25 mars 2021 resteront à sa charge en ce compris les frais induits par la mesure d'exécution, que M. [B] [Y] est autorisé à faire valoir dans les comptes de liquidation et partage,

Fixe dans les comptes de liquidation et partage à 800 euros la somme dont les indivisaires sont redevables par moitié pour l'établissement à dire d'expert de l'immeuble situé à [Localité 11],

Désigne Maître [J] [T] pour poursuivre les opérations de liquidation et partage des intérêts patrimoniaux des parties,

Dit que la notaire devra établir pour le 1er mars 2023 un état liquidatif et de partage provisoire dans l'attente du sort des biens situés dans la Sarthe qu'il devra déposer au greffe de la Cour d'appel, lequel devra lister les éventuels points de désaccords subsistants entre les parties, dont la Cour pourra se saisir,

Renvoie le dossier à la mise en état du 8 mars 2023 à 08h30,

Dit que dans l'éventualité où les parties seront parvenues à cette date à un accord définitif, la Cour poura constater son déssaisissement,

Condamne Mme [W] [I] à payer à M. [B] [Y] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamne Mme [W] [I] aux entiers dépens et autorise Me Fabienne LANDRY à recouvrer les siens conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par la Présidente de chambre et le Greffier.

Le Greffier La Présidente de chambre

Fanny MILAN Aurore BLUM


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Cayenne
Formation : Chbre affaires familiales
Numéro d'arrêt : 21/00201
Date de la décision : 14/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-14;21.00201 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award