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04/11/2022 | FRANCE | N°21/00353

France | France, Cour d'appel de Cayenne, Chambre sociale, 04 novembre 2022, 21/00353


COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 1]



CHAMBRE SOCIALE





















ARRÊT N°39



N° RG 21/00353 - N° Portalis 4ZAM-V-B7F-6PJ





[X] [V] [K]



C/



S.A. AIR CARAIBES







ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2022



Jugement au fond, origine Conseil de Prud'hommes - formation paritaire de CAYENNE, décision attaquée en date du 16 juillet 2021, enregistrée sous le n° F 20/00022





APPELANT :
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Monsieur [X] [V] [K]

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représenté par Maître Saphia BENHAMIDA, avocat postulant au barreau de GUYANE et par Maître Fatiha BOUGHLAM de l'AFHB AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS





INTIME :



S.A. AIR CARAIBES
...

COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 1]

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT N°39

N° RG 21/00353 - N° Portalis 4ZAM-V-B7F-6PJ

[X] [V] [K]

C/

S.A. AIR CARAIBES

ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2022

Jugement au fond, origine Conseil de Prud'hommes - formation paritaire de CAYENNE, décision attaquée en date du 16 juillet 2021, enregistrée sous le n° F 20/00022

APPELANT :

Monsieur [X] [V] [K]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Maître Saphia BENHAMIDA, avocat postulant au barreau de GUYANE et par Maître Fatiha BOUGHLAM de l'AFHB AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIME :

S.A. AIR CARAIBES

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Maître Patrick LINGIBE, avocat au barreau de GUYANE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 septembre 2022 en audience publique et mise en délibéré au 04 novembre 2022, en l'absence d'opposition, devant :

Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre

M. Hervé DE GAILLANDE, Conseiller

M. Laurent SOCHAS, Conseiller

qui en ont délibéré.

GREFFIER :

Mme Fanny MILAN, Greffier, présente lors des débats et du prononcé

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Exposé du litige :

M. [X] [K] a été embauché par la société Air Caraïbes selon contrat à durée déterminée en date du 28 avril 2016, en qualité d'agent de passage 1, renouvelé les 31 mai, 30 septembre et 20 octobre 2016.

Le 1er mai 2017, M. [K] s'est vu proposer un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de technicien commercial puis, selon avenant en date du 25 octobre 2018, en qualité d'attaché commercial.

Selon lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 février 2019, il a fait l'objet d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Suivant requête datée du 14 février 2020, réceptionnée au greffe le même jour, M. [K] a saisi le conseil des prud'hommes de Cayenne de demandes dirigée contre la société Air Caraïbes.

Par jugement contradictoire du 16 juillet 2021, le conseil a :

-déclaré irrecevable la demande de M. [K] au titre de la requalification des CDD en CDI et de l'indemnité de requali'cation afférente ;

-dit que le licenciement en date du 26 février 2020 procédait d'un licenciement pourvu d'une cause réelle et sérieuse ;

-condamné la SA Air Caraïbes à payer à M. [K] les sommes suivantes :

* 1.361,88 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

* 3.845,30 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 384,53 euros au titre des congés-payés y afférents ;

-dit que ces sommes, indemnitaires, produisaient intérêt au taux légal à compter de la décision ;

-débouté les parties du surplus de ses demandes ;

-condamné la société Air Caraïbes aux entiers dépens de l'instance ;

-rappelé que l'exécution provisoire était de droit dans la limite de 09 mois de salaires et fixé la moyenne des salaires à 1.922,65 euros ;

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire pour l'entier jugement.

Par déclaration reçue le 09 août 2021, M. [K] a interjeté appel de cette décision, limité aux chefs de jugement expressément critiqués.

Invité le 16 septembre 2021 par le greffe de la cour à signifier sa déclaration d'appel à l'intimée défaillante, l'appelant a procédé à cette signification par acte du 23 septembre 2021.

Aux termes de ses premières conclusions du 08 novembre 2021, et dernières du 14 mai 2022, l'appelant demande de :

-le dire recevable et bien fondé en ses demandes fins et conclusions et, y faisant droit ;

-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement en date du 26 février 2020 procédait d'un licenciement pourvu d'une cause réelle et sérieuse, et débouté le salarié de ses demandes :

o de réintégration dans les effectifs de la société Air Caraïbes et de sa demande de paiement des salaires ayant couru depuis son licenciement ;

o de dommages et intérêts pour harcèlement moral et manquement à une obligation de sécurité ;

o de dommages et intérêts pour impartialité de la société Air Caraïbes dans la procédure de licenciement et les conditions vexatoires de la rupture ;

o de délivrance de bulletins de paye, attestation pôle emploi, certificat de travail rectifiés conformes aux demandes;

o d'astreinte, et en ce que les condamnations soient assorties de l'exécution provisoire, avec intérêts de droit au taux légal à la date du dépôt de la requête soit le 14 février 2020 ;

o au titre de l'article 700 du CPC ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

A titre principal,

-dire que son licenciement est nul ;

En conséquence,

-ordonner sa réintégration dans les effectifs de la société Air Caraïbes ;

-condamner cette dernière à payer à M. [K] à titre provisionnel la somme de 47 950,08 € euros au titre des salaires ayant couru depuis son licenciement, ce à parfaire au jour du jugement ;

-condamner, en cas d'impossibilité matérielle de réintégration dûment justifiée par la société Air Caraïbes, celle-ci à payer à l'intéressé, avec intérêts de droit au taux légal à compter de la date de dépôt de la requête :

o 47 950,08 € à titre d'indemnité de licenciement ;

o 60 000 € de dommages intérêts pour harcèlement moral ;

o 150 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement discriminatoire ;

-ordonner la remise au salarié des bulletins de paie et documents sociaux conformes aux condamnations prononcées, sous astreinte de 50€ par jour de retard ;

A tire subsidiaire,

- infirmer le jugement entrepris ;

- dire le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

-condamner la société air Caraïbes à lui payer avec intérêts de droit au taux légal à compter de la date de dépôt de requête, soit le 14 février 2020,

o 47 950,08 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

o 2663,89 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

o 5327,78 € : (2 mois) à titre d'indemnités compensatrice de préavis,

o 532,77 € à titre de congés payés y afférents ;

-condamner la société Air Caraïbes à lui payer la somme de 60.000 € à titre de dommages intérêts pour harcèlement moral,

-ordonner la remise au salarié des bulletins de paie et documents sociaux conformes aux condamnations prononcées, sous astreinte de 50€ par jour de retard ;

En tout état de cause,

-condamner la société Air Caraïbes à lui payer la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts du fait du préjudice subi, distinct de la rupture du contrat de travail, sur le fondement des articles 1240 du code civil et L.1222-1 du code du travail ;

-condamner la société Air Caraïbes à remettre au salarié sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du prononcé du jugement à intervenir un bulletin de paye, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail rectifiés conformes au « jugement » à intervenir ;

-dire que la juridiction de céans se réserve le droit de liquider l'astreinte ainsi prononcée ;

-ordonner que toutes les condamnations susvisées soient assorties de l'exécution provisoire sur le fondement des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile ;

-ordonner que les sommes que la société Air Caraïbes devra verser à M. [K] avec intérêts de droit au taux légal à compter de la date du dépôt de la requête sont, soit du 14 février 2020 ;

-condamner la société Air Caraïbes à payer à M. [K] la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du CPC ;

-condamner la société Air Caraïbes aux entiers dépens.

Par conclusions du 08 février 2022, l'intimée demande de :

-confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Cayenne statuant en matière prud'homale 16 juillet 2021 entre la société Air Caraïbes et M. [X] [K], sauf en ce qu'il a estimé non établi le grief tiré de la mauvaise gestion du dossier du client [G] par M. [K], rejeté la demande de paiement formulée par la société Air Caraïbles en application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné cette dernière aux dépens ;

-dire et juger en tout état de cause que le licenciement de M. [X] [K] n'est pas discriminatoire et repose sur une cause réelle et sérieuse ;

-dire et juger que M. [K] n'a pas subi d'agissement de harcèlement moral de la part de la SA Air Caraïbes ;

-débouter M. [K] de la totalité de ses demandes, fins, moyens et conclusions ;

-condamner M. [K] à payer à la société Air Caraïbes une somme de 6 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner M. [K] en tous les dépens.

La clôture de l'instruction est intervenue le 20 juin 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, qui seront exposés dans les motifs pour les besoins de la discussion, la cour se réfère aux conclusions sus-visées et à la décision déférée, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

Motifs

1/ Sur la nullité du licenciement

1-1 / Sur la nullité pour cause de discrimination

Au visa des articles L 1132-1 et L 1134-1 du code du travail, le conseil a écarté la discrimination alléguée, retenant que le salarié ne rapportait pas la preuve de la connaissance par l'employeur de son état de santé.

Au surplus, il a considéré qu'à la supposer établie, la simple connaissance par l'employeur de la maladie, grave, du salarié, était insuffisante à établir de manière irréfragable l'existence de faits de discrimination.

L'appelant soutient qu'il a fait l'objet d'un licenciement discriminatoire dès lors qu'il avait annoncé spontanément son cancer et que l'employeur avait connaissance des déplacements qu'il devait faire en métropole pour y subir une chimiothérapie, comme en témoignent les rendez-vous médicaux dont il justifie.

Il prétend que le mail de sa supérieure hiérarchique, Mme [B], du 24 juillet 2018 évoquant son absence traduit la connaissance qu'elle avait de son état de santé.

Il fait encore valoir que le report du soutien de son mémoire était motivé par ce même état de santé, et que la demande de sa supérieure, visant à mettre en « standby » ce soutien démontre que la décision de le licencier était prise dès le 05 février 2019.

Il considère enfin qu'à supposer que l'employeur n'ait appris l'état de santé que lors des échanges du 25 janvier 2019, il pouvait encore prononcer toute autre mesure que le licenciement.

L'intimée conteste avoir eu connaissance de l'état de santé du salarié avant son licenciement.

Elle souligne que le salarié n'a évoqué cette connaissance que le 25 janvier 2019, à l'occasion d'un mail adressé après réception de sa convocation à l'entretien préalable, et que les conclusions du médecin du travail préconisant un statut d'invalidité le 25 février 2019, ne lui avaient pas été transmises.

La cour relève que :

-toutes les pièces de nature médicale (pièces de l'appelant n° 16, 17, 21, 22, 26/1) étaient destinées au salarié sans que la preuve de leur transmission à l'employeur ne soit rapportée ;

-le seul mail à l'occasion duquel le salarié évoque son cancer, auprès de Mme [S], en date du 25 janvier 2019 à 20H42, est postérieur à sa convocation à l'entretien préalable ;

-le salarié ne produit aucune pièce corroborant les allégations de ce mail aux termes desquelles il prétend avoir fait part de son état de santé à sa hiérarchie en juin 2018 ;

-le report du soutien du mémoire acté le 21 novembre 2018 a été motivé par des raisons personnelles, sans autre précision ;

-si le mail de M. [W], responsable du centre de formation, en date du 23 janvier 2019 faisant état du second report du soutien évoque quant à lui l'état de santé du salarié, il ne contient guère de précisions quant à cet état de santé et n'était destiné qu'à M. [K].

De fait, aucune pièce ne démontre que l'employeur avait connaissance de l'état de santé précis du salarié avant le 25 janvier 2019 à 20H42, soit alors même qu'il avait déjà convoqué celui-ci à un entretien préalable.

Cette connaissance ne peut en effet se déduire de la seule multiplicité des voyages en métropole dont se prévaut le salarié, ni du fait que sa supérieure hiérarchique ait évoqué, dans un mail du 24 juillet 2018 (pièce de l'intimée n° 8) son absence, sans autre indication quant aux motifs de la dite absence.

La mise en « standby », et non l'annulation, du soutien du mémoire, sollicitée par la supérieure hiérarchique du salarié le 05 février 2019 apparaît par ailleurs comme la suite logique de la convocation à l'entretien préalable, le report, ou non, du soutien, dépendant logiquement de l'issue de cet entretien.

Enfin, l'appelant ne peut utilement faire grief à l'employeur de l'avoir licencié alors qu'il avait eu connaissance de son état de santé le 25 janvier 2019, à l'occasion de la convocation à l'entretien préalable, et qu'il pouvait prendre toute autre mesure, l'état de santé, s'il protège le salarié d'une mesure discriminatoire, ne le mettant pas à l'abri de toute rupture du contrat de travail dès lors que l'employeur peut justifier d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.

La discrimination alléguée n'apparaît donc pas caractérisée.

1-2/ Sur la nullité du licenciement pour harcèlement moral

Au visa des articles L 1152-1 et L 1154-1 du code du travail, le conseil a également écarté le harcèlement moral allégué après avoir relevé que le salarié versait, pour corroborer l'existence des violences psychologiques qu'il disait avoir subies, deux attestations :

-celle de M. [E], du 12 avril 2021, faisant état d'humiliation et d'agressivité, sans toutefois préciser en en quoi consistaient réellement les actes imputés à la supérieure hiérarchique du salarié ;

-une attestation en date du 30 janvier 2021, ne comportant aucune pièce d'identité et difficilement lisible, qui ne témoignait que d'un incident survenu en juillet 2019, donc postérieurement à la procédure de licenciement, ce qui ne permettait pas de rattacher les faits à la période contractuelle.

L'appelant considère que l'attestation de M. [E] est précise quant aux faits de harcèlement dont il a été victime.

Il dénonce le comportement de Mme [L] (Mme [B]) humiliant et dénigrant en ce qu'elle n'avait de cesse de le critiquer de manière infondée et de l'isoler.

L'intimée n'a pas répliqué sur ce point.

A défaut d'élément nouveau, la cour estime que le tribunal a fait une exacte appréciation de la cause ainsi que des droits des parties et a, par de justes motifs qu'elle approuve, écarté tout harcèlement moral qui n'apparaît pas caractérisé à la seule lecture des attestations produites, imprécise quant à la première (pièce n°27/1) qui fait état d'une agressivité sans rapporter les propos tenus, de mépris et d'humiliation, lesquels ne résulteraient que du fait que la supérieure hiérarchique s'est adressée au salarié sans le regarder, et, quant à la seconde (pièce n°24/2), qui ne fait état que de faits postérieurs au licenciement.

Le mail du 24 juillet 2018, adressé par Mme [B] à M. [K], relatif à des dossiers, non traités par ce dernier, et se terminant par une mise en garde, est la seule pièce dans laquelle est formalisé un reproche fait au salarié, lequel ne peut donc se prévaloir d'agissements répétés au sens de l'article L 1152-1 du code du travail.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de nullité du licenciement et des prétentions y afférentes.

2/ Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement 

Reprenant les termes de la lettre de licenciement, le conseil a retenu que :

-le licenciement était motivé par deux griefs : la mauvaise gestion du dossier [M] [G] et l'instauration d'un climat délétère au sein du département commercial ;

-les attestations de M. [G] permettaient de dédouaner le salarié de toute faute concernant la gestion de son dossier;

-les trois attestations unanimes des salariés de la société intimée : M. [U], Mme [F] et M. [D] démontraient l'existence d'une mésentente du salarié avec l'ensemble de ses collègues, et d'une cause réelle et sérieuse de licenciement telle que visée dans la lettre de licenciement.

L'appelant conteste toute malversation ou négligence dans le cadre de la gestion du dossier [G], qu'il impute à son collègue M. [D].

Il dénonce la création de motifs artificiels liés à l'instauration d'un climat délétère, sur la base d'attestations qui sont vagues.

Il soutient que les motifs de licenciement étant inexistants ou imprécis, cette mesure est dépourvue de cause réelle et sérieuse.

L'intimée se prévaut des attestations évoquées supra, démontrant que le salarié était à l'origine de tensions avec ses collègues de travail, qu'il était hermétique à toute remarque ou proposition relative à la qualité de son travail.

Elle fait également grief au salarié d'avoir manqué à ses obligations contractuelles dans la gestion du dossier [G] en effectuant, à la place du client, l'avance des frais d'un report de vol, soulignant au surplus que l'appelant ne justifie pas du versement effectif de la somme correspondant à ces frais.

Le conseil a pu valablement retenir qu'à la lecture des deux attestations de M. [G], il n'était pas démontré que la mauvaise gestion du dossier du même nom était imputable à M. [K] ; qu'en revanche, les attestations produites par l'employeur permettaient de considérer que le salarié était en conflit avec l'ensemble de l'équipe.

Ainsi le premier témoigne : « M. [K] trouvait constamment une excuse pour arriver en retard au travail, ce qui a commencé à exaspérer tous ses collègues (') il est souvent allé au clash avec tous ses collègues directs, (') quand ce n'était pas le cas, il créait la zizanie au sein de l'équipe, de part ses mensonges et ses cancans ».

Mme [F] quant à elle atteste : « Monsieur [K] s'est disputé avec l'ensemble de l'équipe et moi-même. A cause de ces différents conflits, nous passions notre temps à faire des mises au point dans le but de trouver un terrain d'entente et de crever l'abcès.

Il était fainéant, je faisais tous son travail à sa place, nous conduisant à nous disputer. Tous ces détails ont instauré une mauvaise ambiance au travail et détruit une belle cohésion que nous avions avant son arrivée ».

M. [D] enfin fait grief à M. [K] de n'avoir « jamais fait l'effort d'apprendre à manipuler « Altea », outil essentiel à sa fonction, de lui avoir demandé quotidiennement de faire cette partie de travail à sa place ; et indique qu'après une violente dispute relative à un dossier, au cours de laquelle M. [K] l'a « traité de tous les noms », une ambiance délétère s'était installée dans le service.

Toutefois, la cour relève que si la lettre de licenciement vise le climat de tension instauré avec l'équipe, ayant pour conséquence une ambiance dégradée et une perte de cohésion d'équipe, elle met ces dernières en relation avec « les répercussions directes sur les résultats commerciaux et l'organisation du travail » ou encore les « conséquences objectives observables de son comportement et de ses attitudes « sur (vos) performances individuelles et celles de l'équipe ».

Or, force est de relever que l'intimée ne produit aucune pièce étayant les conséquences, ainsi visées, du comportement du salarié sur ses résultats commerciaux et ceux de son équipe.

Faute de démontrer la réalité des dites conséquences du comportement du salarié telles que mentionnées dans la lettre de licenciement, celui-ci ne peut s'analyser comme reposant sur une cause réelle et sérieuse.

3/ Sur les conséquences financières

Le conseil, qui a fixé à la somme de 1 922,65€ la moyenne des trois derniers mois de salaire, n'a alloué au salarié que les sommes de :

-1 361,88€ au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

-3 845,30€ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, et 384,53€au titre des congés payés y afférents.

L'appelant, qui demande à la cour d'écarter le « barème Macron », et d'effectuer in concreto l'analyse du préjudice causé par son licenciement au retard de son âge sollicite le versement des sommes de :

-47 950,80 € correspondant à deux ans de salaire, à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ,

- 2663,89 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 5327,78 € (2 mois) à titre d'indemnités compensatrice de préavis,

- 532,77 € à titre de congés payés y afférents.

L'intimée, à titre subsidiaire, demande à la cour de fixer à 3,5 mois de salaire au plus l'indemnisation allouée.

La cour relève que le calcul de la moyenne des salaires de l'appelante effectué par la juridiction de première instance ne peut être remis en cause en l'absence de toute pièce relative à sa rémunération avant la rupture du contrat de travail.

Les indemnités légales de licenciement, de préavis et de congés payés afférents à ces derniers n'ont donc pas lieu d'être modifiées.

Les allocations au titre d'un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse telles qu'encadrées par l'article L 1235-3 du code du travail, constituent, au regard des éléments de l'espèce, soit l'ancienneté du salarié, son âge au moment du licenciement, et l'absence de toute pièce relative à sa situation professionnelle depuis le mois d'avril 2021, une réparation appropriée du préjudice subi.

Elles seront précisément fixées à la somme de 7 690,60€ correspondant à 4 mois de salaire.

Les sommes précitées, de nature indemnitaire, portent intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

4/ Sur les conditions vexatoires du licenciement

Si l'appelant dénonce l'impartialité de l'intimée dans la procédure de licenciement, les circonstances ayant précédé ce dernier, sa mise à l'écart et ses répercussions sur son état de santé, le désintérêt de sa hiérarchie pour les difficultés rencontrées, caractérisant selon lui une violation de l'obligation de sécurité de résultat, ces griefs, ont été précédemment écartés, ou ne reposent sur aucun élément objectif.

5/ Sur la remise sous astreinte des documents de fin de contrat

L'intimée devra remettre les documents rectifiés au regard de ce qui précède.

Aucune circonstance particulière n'est avancée pour justifier l'astreinte sollicitée.

6/ Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Air Caraïbes aux dépens.

Le sens de la décision et l'équité justifient en revanche son infirmation quant aux frais irrépétibles et la condamnation de cette même société à payer à M. [K] la somme de 2 000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée, qui succombe, supportera la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et mis à disposition par le greffe,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Cayenne en date du 16 juillet 2021 sauf en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [X] [K] procédait d'un licenciement pourvu d'une cause réelle et sérieuse et a débouté celui-ci de ses demandes:

-de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-au titre de la remise des documents de fin de contrat,

-au titre des frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau ,

Dit que le licenciement de M. [X] [K] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Air Caraïbes à payer à M. [X] [K] la somme de 7 690,60€ (sept mille neuf cent soixante euros et soixante centimes) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, somme portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Condamne la société Air Caraïbes à remettre à M. [X] [K] un bulletin de paye, une attestation Pôle emploi et un certificat de travail rectifiés conformes au présent arrêt ;

Dit n'y avoir lieu à assortir cette condamnation d'une mesure d'astreinte ;

Condamne la société Air Caraïbes à payer à M. [X] [K] la somme de 2 000€ (deux mille euros) au titre des frais irrépétibles engagés en première instance, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et y ajoutant,

Condamne la société Air Caraïbes aux dépens d'appel.

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par la Présidente de chambre et le Greffier.

Le Greffier La Présidente de chambre

Fanny MILAN Nathalie RAMAGE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Cayenne
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00353
Date de la décision : 04/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-04;21.00353 ?
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