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06/05/2022 | FRANCE | N°21/00123

France | France, Cour d'appel de Cayenne, Chambre sociale, 06 mai 2022, 21/00123


COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 1] - [Localité 5]



CHAMBRE SOCIALE





















ARRÊT N°14



N° RG 21/00123 - N° Portalis 4ZAM-V-B7F-4VP





S.A. DOCAPOSTE BPO IS



C/



[M] [Y]









ARRÊT DU 06 MAI 2022





Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAYENNE, décision attaquée en date du 22 Février 2021, enregistrée sous le n° F20/00227


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APPELANT :



S.A. DOCAPOSTE BPO IS

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Sylvie COMPPER-GAUDY, avocat au barreau de GUYANE





INTIME :



Madame [M] [Y]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentant : Me Emile Ombaku TSHEFU, avocat au barreau de...

COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 1] - [Localité 5]

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT N°14

N° RG 21/00123 - N° Portalis 4ZAM-V-B7F-4VP

S.A. DOCAPOSTE BPO IS

C/

[M] [Y]

ARRÊT DU 06 MAI 2022

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAYENNE, décision attaquée en date du 22 Février 2021, enregistrée sous le n° F20/00227

APPELANT :

S.A. DOCAPOSTE BPO IS

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Sylvie COMPPER-GAUDY, avocat au barreau de GUYANE

INTIME :

Madame [M] [Y]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentant : Me Emile Ombaku TSHEFU, avocat au barreau de GUYANE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS:

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mars 2022 en audience publique et mise en délibéré au 06 Mai 2022, en l'absence d'opposition, devant :

Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre

Monsieur Hervé DE GAILLANDE, Conseiller

Mme Corinne BIACHE, Conseillère

qui en ont délibéré.

GREFFIER :

Mme Fanny MILAN, Greffière présente lors des débats et de Marie-France VASSEAUX, Greffière, présente lors du prononcé.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Exposé du litige

La SA Docaposte BPO IS a engagé Mme [M] [Y] par contrat a durée indéterminée et à temps complet du 29 octobre 2019 en qualité d'agent technique.

Le 28 août 2020, Mme [Y] a reçu une convocation à un entretien préalable, et son licenciement pour cause réelle et sérieuse lui a été notifié le 25 septembre 2020.

Suivant demande reçue le 15 décembre 2020, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Cayenne a'n de voir qualifier son licenciement comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse et voir condamner la SA Docaposte BPO IS à lui verser diverses sommes indemnitaires à ce titre.

Par jugement réputé contradictoire du 22 février 2021, le conseil a':

-dit que le licencient de Mme [Y] intervenu le novembre 2019 était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

-condamné la SA Docaposte BPO IS à verser à Mme [Y] les sommes suivantes :

*3.042,50 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse;

*1.521,25 euros à titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

* 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-débouté Mme [Y] du surplus de ses demandes ;

-condamné la SA Docaposte BPO IS aux dépens de l'instance ;

-rappelé que le jugement était assorti de l'exécution provisoire de droit en application de l'article R.l454-28 du code du travail et fixé le salaire de référence à 1.521,25 euros;

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire pour le surplus.

Par déclaration reçue le 19 mars 2021, la SA Docaposte BPO IS a interjeté appel de ce jugement, limité aux chefs de jugement expressément critiqués.

La déclaration d'appel a été signifiée le 03 mai 2021 à Mme [Y].

L'appelante a communiqué ses premières conclusions le 14 juin 2021.

Aux termes de ses conclusions d'appelante et d'intimée incidente n° 2 du 27 août 2021, la société Docaposte BPO IS demande d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Cayenne le 22 février 2021 en ce qu'il a':

-dit que le licenciement de Mme [M] [Y] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-condamné la société Docaposte BPO IS à lui verser les sommes suivantes :

*3.042,50 € à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

*1.521,25 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

*800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

-condamné la société Docaposte BPO IS aux entiers dépens';

-confirmer le jugement pour le surplus';

Et statuant à nouveau :

A titre principal,

-dire et juger que le licenciement de Mme [Y] est bien fondé ;

En conséquence,

-débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire, si la cour jugeait le licenciement de Mme [Y] dénué de cause réelle et sérieuse,

-fixer le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à un mois de salaire brut, soit 1.521,25 euros ;

-débouter Mme [Y] de toutes ses autres demandes ;

En tout état de cause,

-condamner Mme [Y] à la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner Mme [Y] aux entiers dépens

Par conclusions en réplique en date du 18 juin 2021, l'intimée demande de':

-confirmer la décision entreprise et statuant à nouveau,

-condamner l'appelante à lui porter et payer la somme de 3000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner l'appelante en tous les dépens,

-dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par Me Emile O. Tshefu, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile';

Si par extraordinaire, la cour ne faisait pas droit à la demande de la décision entreprise, statuant à nouveau':

-constater que l'intimée a été victime d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-juger que le licenciement de l'intimée est nul,

En conséquence,

-condamner l'employeur à lui verser les sommes suivantes :

*9 127 5 € au titre de l'indemnité de licenciement ,

*9.127,5 € soit 6 mois de salaire au titre de l'indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement;

*1.521,25 €au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

*1.521,25 €au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

-juger que l'exécution est de droit nonobstant appel et caution,

-condamner l'employeur à payer la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile à l'intimée, dont distraction au profit de Me Virginie Fettler dans les conditions de l'article 699 du même code ainsi qu'aux entiers dépens.

La clôture de l'instruction est intervenue le 17 janvier 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, qui seront exposés dans les motifs pour les besoins de la discussion, la cour se réfère aux conclusions sus-visées et à la décision déférée, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

Motifs':

1/ Sur le licenciement' et ses conséquences:

Le conseil a relevé qu'aux termes de la lettre de licenciement du 25 septembre 2020, l'intimée avait été licenciée pour avoir refusé une mutation en Guadeloupe en raison de la fermeture d'un site de production à [Localité 5]'dès lors que l'employeur ne justifiait pas de la perte alléguée du contrat avec le client (EDF).

Il a considéré à titre surabondant que la clause de mobilité figurant au contrat de travail de l'intimée n'était pas licite en raison de son imprécision comme rédigée de manière trop générale, sans définition des lieux d'intervention, les seules limites posées étant celles de «'l'ensemble du territoire français'». Il a interprété ladite clause comme réservant à l'employeur le droit de changer temporairement ou définitivement l'affectation de la salariée, sans aucune contrepartie'.

Il en a déduit que le refus de la mutation était légitime et que le licenciement était dès lors dénué de cause réelle et sérieuse.

Il a alloué à l'intimée, au regard des effectifs de l'entreprise, supérieurs à 11 salariés, des circonstances de la rupture, du montant mensuel brut de rémunération de l'intéressée, de son âge, de son ancienneté supérieure à une année, de sa capacité à trouver un nouvel emploi et des conséquences du licenciement à son égard, la somme de 3 042,50 € correspondant à deux mois de salaire.

La société appelante se prévaut de la licéité de la clause de mobilité du contrat de travail, la Cour de cassation ayant admis qu'elle puisse fixer comme étendue géographique le territoire français.

Elle fait valoir que l'intimée s'appuie sur la zone de mobilité prévue au contrat de travail et omet d'évoquer la clause de mobilité, alors que les deux notions auxquelles il est fait référence ne peuvent être confondues.

Elle tire du refus, sans motif légitime, de la mutation autorisée par la clause de mobilité, l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement de l'intimée.

Elle met en exergue l'absence de convention collective applicable, contrairement à ce que soutient l'intimée qui se prévaut d'une convention collective Syntec.

S'agissant des demandes financières, elle soutient que l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité compensatrice de congés payés ont été payées à l'intimée.

A titre subsidiaire, sur le quantum de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'appelante sollicite la réduction de cette dernière à un mois de salaire, l'intimée ayant retrouvé un emploi aussitôt.

L'intimée met en exergue la violation de la zone géographique du contrat de travail, soit 30 kilomètres à partir du site de production sis à [Localité 5], et l'imprécision de la clause de mobilité, laquelle au surplus a été mise en 'uvre sans justifier des motifs liés à l'activité de l'entreprise.

Elle dénonce la violation de la convention collective nationale du personnel des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil dite Syntec du 1er janvier 1988 en ce qu'aucune prise en charge du changement de résidence ne lui était proposée.

Elle soutient que son refus de mutation ne peut s'analyser comme un acte d'insubordination, et est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Elle sollicite la confirmation du jugement déféré s'agissant du montant de l'indemnité réparant le préjudice résultant du caractère illicite du licenciement.

L'intimée prétend que l'indemnité compensatrice de préavis ne lui a pas été réglée, pas plus que l'indemnité compensatrice de congés payés.

L'article 2 bis du contrat de travail de l'intimée (sa pièce n° 1) prévoit':

«'votre lieu de travail est situé sur le site suivant': ORANGE à [Localité 5].

Madame [Y] [M] exercera ses fonctions dans la zone géographique territoriale suivante': GUYANE

Toutefois, compte tenu de la nature des activités de la Société DOCAPOST BPO IS et des nécessités de son organisation, la Société DOCAPOST BPO IS se réserve le droit, en cas de besoins justifiés, notamment par la fermeture et /ou l'ouverture de sites clients, de changer temporairement ou définitivement l'affectation de Madame [Y] [M] dans tout autre de ses établissements et/ ou sites clients, actuels ou futurs, implantés sur l'ensemble du territoire français et notamment la région Ile de la Réunion.

Avant toute mutation dans la zone géographique précitée, la Société DOCAPOST BPO IS respectera un délai de prévenance suffisant afin de permettre à Madame [M] de rejoindre son affectation.

Ce changement de lieu de travail ne constituant pas une modification de son contrat de travail, Madame [Y] [M] s'engage alors, sous réserve du respect par la société DOCAPOST BPO IS du délai de prévenance, à accepter sans condition la mobilité qui lui sera demandée.

Si les contraintes d'exploitation ne permettent pas une affectation dans cette zone (en raison notamment d'une absence de poste vacant), une autre affectation serait alors envisagée dans une autre zone géographique en ayant toujours le souci de la plus grande proximité possible avec le domicile de Madame [Y] [M].

En tout état de cause, le refus d'accepter une mutation géographique dans ces conditions pourrait entraîner la rupture de son fait du présent contrat'».

Comme le souligne l'appelante, l'affectation de la salariée sur un lieu de travail sis à [Localité 5] ne fait pas interdiction à l'employeur de prévoir une clause de mobilité, dont la validité est soumise à deux conditions': la définition précise d'une zone géographique d'application et l'interdiction faite à l'employeur d'en étendre unilatéralement la portée, conditions que la clause de mobilité qui fait l'objet du litige remplit, le territoire français correspondant à une zone géographique précise.

En revanche, conformément aux dispositions du contrat de travail, la clause de mobilité ne pouvait être invoquée par l'employeur que si celui-ci pouvait effectivement se prévaloir de besoins justifiés .

Or, si l'appelante prétend que les dits besoins résultaient du non-renouvellement d'un contrat la liant à EDF, elle ne verse aux débats pour le démontrer que les conditions particulières d'achat simplifiées du marché n° C1G9C2200 (sa pièce n° 2) à la lecture de laquelle il apparaît que le marché débutait le 1er juin 2019 et était d'une durée de deux années, dont un an ferme et une année en option, sans démontrer par une quelconque pièce que son co-contractant n'a pas entendu renouveler le marché à l'expiration de l'année «'ferme'».

Elle ne justifie pas en conséquence des besoins autorisant l'application de la clause de mobilité, et le licenciement, pour ces motifs, est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

S'agissant du montant de l'indemnisation du préjudice ainsi subi, si l'appelante démontre par sa pièce n° 19 que l'intimée a retrouvé un emploi, la cour n'est pas en mesure de vérifier que celui-ci a été pourvu par elle «'aussitôt'» et précisément avant le mois de mai 2021, étant rappelé que le licenciement est en date du 25 septembre 2020.

Les critères retenus par le conseil pour fixer l'indemnisation à la somme correspondant à deux mois de salaire n'apparaissant pas critiquables, le jugement sera confirmé sur ce point.

2/ Sur les indemnités compensatrices de préavis et de congés payés':

Le conseil a, en application des dispositions de l'article L 1234-1 du code du travail et en considération de l'ancienneté de la salariée, fixé l'indemnité compensatrice de préavis qui lui était due à la somme de 1521,25€.

Il a, à la lecture du bulletin de paie du mois de novembre 2019 faisant état d'une solde de congés payés de 2,08 jours et compte tenu de l'absence de toute autre pièce qui permettrait de déterminer le quantum des congés payés acquis à la date de la rupture du contrat de travail, rejeté la demande au titre de l'indemnité de congés payés.

L'appelante fait valoir qu'elle a réglé à l'intimée son indemnité compensatrice de préavis au mois d'octobre 2020'et que l'indemnité de congés payés a été versée dans le cadre du solde de tout compte.

L'intimée affirme qu'elle n'a pas été remplie de ses droits et sollicite la confirmation du jugement s'agissant de l'indemnité de préavis'; elle soutient également que l'employeur lui reste devoir 25 jours de congés payés.

La cour retient qu'il résulte de l'examen des pièces n° 17 et 18 de l'appelante que les deux indemnités sus-évoquées ont effectivement été réglées.

Le jugement sera donc infirmé.

3/ Sur les dépens et les frais irrépétibles':

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Docaposte BPO IS, qui succombe au principal, aux dépens et à payer à Mme [Y] la somme de 800€ au titre des frais irrépétibles.

L'appelante obtenant partiellement satisfaction en cause d'appel, les dépens d'appel seront partagés par moitié entre les parties.

PAR CES MOTIFS,

La cour, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et mis à la disposition du public par le greffe,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Cayenne en date du 22 février 2021 sauf en ce qu'il a condamné la SA Docaposte BPO IS à verser à Mme [M] [Y] la somme de 1521,25€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis';

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [M] [Y] de sa demande de paiement d'indemnité compensatrice de préavis';

Et y ajoutant,

Dit que les dépens d'appel seront partagés par moitié entre la SA Docaposte BPO IS d'une part et Mme [M] [Y] d'autre part.

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par la Présidente de chambre et le Greffier.

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par la Présidente de chambre et le Greffier.

Le GreffierLa Présidente de chambre

Marie-France VASSEAUXNathalie RAMAGE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Cayenne
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00123
Date de la décision : 06/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-06;21.00123 ?
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