AFFAIRE : N° RG 22/02672
N° Portalis DBVC-V-B7G-HCWC
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de COUTANCES en date du 20 Septembre 2022 RG n° 20/00101
COUR D'APPEL DE CAEN
1ère chambre sociale
ARRÊT DU 28 MARS 2024
APPELANT :
Monsieur [C] [YZ]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Hélène HAM, avocat au barreau de COUTANCES
INTIME :
S.A.S. ADEQUAT 135 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme DELAHAYE, Présidente de Chambre,
Mme PONCET, Conseiller,
Mme VINOT, Conseiller, rédacteur
DÉBATS : A l'audience publique du 25 janvier 2024
GREFFIER : Mme GUIBERT
ARRÊT prononcé publiquement, contradictoirement, le 28 mars 2024 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, présidente, et Mme GOULARD, greffier
M. [YZ] a été embauché à compter du 6 janvier 2014 en qualité de responsable d'agence par la société Adéquat 060 (qui exerce une activité dans le domaine du travail temporaire) pour exercer ses fonctions à l'agence de [Localité 5], en attendant l'ouverture de l'agence de [Localité 7].
Suivant avenant du 1er avril 2014 M. [YZ] a été transféré à la société Adéquat 135.
Suivant avenant du 1er avril 2019, M. [YZ] s'est vu confier à compter de cette date les fonctions de responsable inter-agences pour exercer sa responsabilité sur les agences de [Localité 7], [Localité 6] et [Localité 8].
Après avoir été convoqué le 21 novembre 2019 à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement devant se dérouler le 4 décembre et mis à pied à titre conservatoire, M. [YZ] a été licencié pour faute grave le 10 décembre 2019.
Le 28 septembre 2020, M. [YZ] a saisi le conseil de prud'hommes de Coutances aux fins d'obtenir un rappel de salaire pour RTT, de contester le licenciement et d'obtenir des indemnités et dommages et intérêts afférents.
Par jugement du 20 septembre 2022, le conseil de prud'hommes de Coutances a :
- dit que les demandes sont irrecevables
- dit que le licenciement repose sur une faute grave
- débouté M. [YZ] de l'intégralité de ses demandes
- débouté la société Adéquat 135 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- dit que chaque partie gardera à sa charge les frais qu'elle a exposés
- mis les dépens à la charge du demandeur.
M. [YZ] a interjeté appel de ce jugement, en celles de ses dispositions ayant dit ses demandes irrecevables, dit que le licenciement repose sur une faute grave et l'ayant débouté de ses demandes .
Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions du 23 mai 2023 pour l'appelant et du 18 juillet 2023 pour l'intimée.
M. [YZ] demande à la cour de :
- réformer le jugement en celles de ses dispositions ayant dit ses demandes irrecevables, dit que le licenciement repose sur une faute grave et l'ayant débouté de ses demandes
- condamner la société Adéquat 135 à lui payer les sommes de :
- 14 241,15 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires
- 1 424,12 euros à titre de congés payés afférents
- 4 604,91 euros à titre de dommages et intérêts
- 2 215,40 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied
- 221,54 euros à titre de congés payés afférents
- 13 814,73 euros à titre d'indemnité de préavis
- 1 381,47 euros à titre de congés payés afférents
- 7 103,08 euros à titre d'indemnité de licenciement
- 32 250 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- ordonner à l'employeur de remettre sous astreinte les bulletins de paie, une attestation pôle emploi et un certificat de travail
- débouter la société Adéquat 135 de ses demandes.
La société Adéquat 135 demande à la cour de :
- confirmer le jugement
- y ajoutant, condamner M. [YZ] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- à titre subsidiaire juger que toute demande de rappel de salaire antérieure au 28 septembre 2017 est irrecevable et que toute demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution du contrat de travail antérieure au 28 septembre 2018 est irrecevable
- à titre plus subsidiaire, limiter les indemnités de rupture aux sommes de 12 820,65 euros à titre d'indemnité de préavis, 128,20 euros à titre de congés payés afférents et 6 321,28 euros au titre de l'indemnité de licenciement
- à titre infiniment subsidiaire limiter à 12 820,65 euros les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 10 janvier 2024.
SUR CE
1) Sur la demande de rappel de salaire au titre des demi-journées de RTT non prises
M. [YZ] fait valoir les stipulations de son contrat de travail pour soutenir qu'alors qu'il avait un horaire de travail de 40 heures et devait bénéficier d'une demi-journée de repos hebdomadaire fixée par l'employeur, il n'a jamais bénéficié de ces demi-journées de sorte qu'il est fondé à réclamer le salaire correspondant à ces 5 heures supplémentaires effectuées chaque semaine pour la période de septembre 2017 à décembre 2019.
La société Adéquat 135 procède à une lecture différente du contrat et soutient que M. [YZ] confond amplitude horaire et durée du travail, organisait comme il le voulait son temps de travail utilisant à sa guise sa demi-journée théoriquement fixe, qu'il ne travaillait que 35 heures et que le dispositif RTT ne s'applique pas.
Le contrat de travail stipulait que M. [YZ] percevrait une 'rémunération fixe mensuelle brute' de 2 700 euros, que 'ladite rémunération fixée au contrat est convenue compte tenu de la nature des fonctions et responsabilités qui sont confiées à M. [YZ] et restera indépendante du temps qu'il consacre de fait à l'exercice de ses fonctions. Horaires de travail : du lundi au vendredi 8h/12h-14h/18h. Étant précisé que l'horaire hebdomadaire est de 35 h et que le temps affecté à la réduction du temps de travail se matérialisera par une demi-journée de repos hebdomadaire déterminée selon les besoins de l'agence et un quart d'heure de pause par jour complet de travail effectif'.
L'avenant du 1er avril 2019 fixait la 'rémunération fixe mensuelle brute forfaitaire' à 3 200 euros et stipulait : 'les horaires de M. [YZ] sont les suivants : du lundi au vendredi 8h/12h-14h/18h. Étant précisé que l'horaire hebdomadaire est de 35 h et que le temps affecté à la réduction du temps de travail se matérialisera par une demi-journée de repos hebdomadaire déterminée selon les besoins de l'agence et un quart d'heure de pause par jour complet de travail effectif. La demi-journée de repos hebdomadaire une fois déterminée est fixe et ne peut être travaillée ou modifiée sans l'accord exprès du responsable hiérarchique dans le respect des procédures de l'entreprise. M. [YZ] pourra être amené uniquement à la demande de son responsable à effectuer des heures supplémentaires'.
Les bulletins de salaire font mention du montant de salaire visé au contrat pour un nombre d'heures de 151,67.
Contrairement à ce que soutient l'employeur il n'est pas question d'amplitude mais bien d'horaires dans les stipulations contractuelles, le bénéfice d'une demi-journée par semaine de repos étant clairement stipulé de même que le cadre dans lequel il est donné à savoir celui de la réduction du temps de travail, demi-journée déterminée 'selon les besoins de l'agence' puis à compter du 1er avril 2019 'fixée par l'employeur', ce dont il se déduit qu'au moins à partir de cette date il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a fixé une demi journée et a mis le salarié en mesure de la prendre et qu'il en est de même pour la période antérieure dès lors que la demi-journée était déterminée selon les besoins de l'agence, étant encore relevé que dès lors que le salarié qualifie les heures réclamées d'heures supplémentaires et indique avoir effectué chaque jour les horaires 8-12h et 14-18h donc 40 heures par semaine il apporte des éléments précis permettant à l'employeur de répondre, ce qu'il ne fait pas, aucun élément n'étant avancé de nature à justifier des horaires réellement effectués et de l'effectivité de la demi-journée de repos.
En effet, à cet égard, les deux attestations que l'employeur produit n'apportent pas cette justification dès lors que Mme [S] indique que 'les RTT ont toujours été pris y compris par M. [YZ]. Quand occasionnellement il ne les prenait pas il les rattrapait quand çà l'arrangeait' et que Mme [L] indique que 'la règle a toujours été de prendre ses RTT. [C] [YZ] les prenait aussi quand il en avait envie ou quand il avait besoin. Il déplaçait ses RTT sans que la direction le sache', soit procèdent à des affirmations générales qui ne caractérisent pas un décompte précis des jours de RTT ni des horaires précis de travail.
En conséquence il sera fait droit à la demande de rappel de salaire, recevable dans son intégralité au regard de la date de saisine et du point de départ courant de la date d'exigibilité de la créance.
Le salarié demande en sus des dommages et intérêts pour perte de revenus et de pouvoir d'achat et fatigue ce d'autant qu'il effectuait bien plus que 40 heures mais il sera relevé que la perte de revenus est réparée par l'octroi de la somme et que le salarié ne donne aucun élément précis sur l'accomplissement d'heures supplémentaires au delà de 40 h, de sorte qu'il sera débouté de la demande de dommages et intérêts.
2) Sur le licenciement
La lettre de licenciement 'pour faute grave' énonce plusieurs catégories de griefs dont l'ensemble est selon l'employeur inacceptable, griefs qui seront successivement examinés.
- Propos à caractère sexiste
La lettre expose que le 7 octobre 2019 alors que M. [YZ] était au restaurant avec son équipe il a pris l'assiette d'une collaboratrice pour y dessiner des parties génitales et a interpellé la serveuse pour qu'elle regarde, que l'assistante administrative de [Localité 7] a confié que par exemple si elle souhaitait s'absenter M. [YZ] lui répondait 'tu poses ta journée pour baiser avec ton mec', qu'en outre il lui a dit alors qu'il se trouvait derrière elle : 'pousse ton petit cul parce que je vais t'enfourcher' ou 'ne reste pas comme çà ou je vais te la mettre', qu'à l'agence de [Localité 8] il a dit en voyant sortir une intérimaire 'moi je préférerais me taper [B]' ou a dit à la chargée d'affaires : '[U], tu peux t'absenter un quart d'heure que je m'occupe de [B]', que d'autres collaboratrices ont signalé des réflexions à leur retour de visite commerciale telles que 'vous avez fait quoi ' Baiser '', que le 14 novembre 2019 lors d'une réunion à [Localité 5] il s'est exclamé 'calmez-vous les filles, je n'ai qu'une bitte', que le 18 novembre 2019 à la chargée d'affaires qui a dit qu'elle avait droit à deux questions aujourd'hui il a dit : 'non, tu as droit à une question et une pipe !', que ce même jour, il a dit à une stagiaire qui avait posé son téléphone à côté du sien : 'que je ne me trompe pas de téléphone sinon je risque de tomber sur la bite de ton mec', ces propos étant parfois tenus devant les salariés intérimaires.
La société Adéquat 135 verse aux débats plusieurs courriels reçus.
Le 22 novembre 2019 Mme [E] directrice régionale déclare à M. [GV] directeur général faire suite à leur échange du 18 et les points qui l'ont fortement choquée, à savoir l'attitude familière de M. [YZ] avec les jeunes filles en agence, les entretiens individuels avec les chargées d'affaires de [Localité 8] et [Localité 7] qui lui ont paru très déstabilisées et épuisées, le 21 novembre Mme [I], responsable d'agence [Localité 6] déclare alerter sur une situation qui prend de l'ampleur puisqu'elle assiste à des remontées au quotidien qui laissent place à de vraies souffrances, citant des confidences reçues antérieurement et M. [ZV] responsable régional écrit le 22 novembre faire suite à son alerte du début de la semaine et confirmer que la situation avec M. [YZ] est ingérable, déclarant avoir constaté lui-même un fait gênant le 7 octobre et avoir été alerté d'une série d'incidents par Mme [I] de sorte qu'il est établi, contrairement à ce que soutient M. [YZ], que des alertes ont été émises antérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement.
S'il est constant que par la pièce 15 (courriel du 21 novembre) Mme [I] rapporte des propos non directement entendus de même que M. [ZV] par la pièce 16 (courriel de M. [ZV] du 22 novembre), sont par ailleurs versées au débats les courriels de Mme [G] et de Mme [T] qui évoquent au moins en partie des faits personnellement constatés et six attestations de salariées (Mme [S], Mme [A], Mme [XW], Mme [MN], Mme [W], Mme [D]) dont il importe peu qu'elles aient été établies postérieurement au licenciement qui évoquent toutes des faits personnellement constatés.
À cet égard, et pour répondre aux objections de M. [YZ] il sera relevé que Mme [G] ne fait pas preuve d'un 'ressenti subjectif' mais cite expressément un propos précis tenu par M. [YZ] à son intention que l'attestation de 16 pages de Mme [I] ne contredit pas.
S'agissant de l'attestation de Mme [I] que M. [YZ] produit comme établissant les conditions dans lesquelles son licenciement aurait été orchestré, les extraits que ce dernier en cite ne sont pas, de par leur généralité et leur imprécision, de nature à contredire les témoignages outre qu'à supposer que Mme [I] ait subi des pressions elle n'atteste pas de pressions précises exercées sur les témoins, qu'en effet elle procède aux affirmations suivantes : 'tout ce qui a été dit au sujet de [C] pour le licencier est faux, je ne l'ai pas entendu avoir un propos déplacé vers [F] [G]', 'nous avons tous été malmenés, oppressés pour monter un licenciement et nous faire démisionner', 'M. [ZV] m'a dit de mettre telle ou telle chose sur un mail... il m'a manipulée pour conduire l'équipe de [Localité 7] et cumuler du négatif sur [C]...', 'je n'avais que de bons échos au sujet de [C]... les griefs obscènes dont fait l'objet [C] [YZ] sont faux', 'je repense toutes les semaines à la pression qui a été exercée sur [F] [G], la voir vomir était choquant ...'ce sans indiquer qu'il s'agissait d'une pression pour témoigner ni sans caractériser les pressions prétendues, et étant encore relevé que ce témoignage de Mme [I] est contredit par les témoignages de Mme [S] et de Mme [T] qui attestent que Mme [I] était tout aussi choquée qu'elles du comportement de M. [YZ] et leur a demandé d'attester.
Le fait que Mme [M] , conseillère formation, atteste de l'enthousiasme manifesté devant elle par Mme [T] de collaborer avec M. [YZ] qui avait des compétences et un retour d'expérience, du fait que Mme [T] aurait été promue et qu'elle se posait la question d'un chantage orchestré pour licencier un collaborateur qui ne se laissait pas faire ne remet pas en cause, par ses termes généraux, les constatations précises de Mme [T] , pas plus que ne les remettent en cause l'attestation de M. [HJ] sur le fait que Mme [T] n'était pas organisée, était très familière avec des échanges douteux.
Quant au fait que les collaboratrices ayant attesté n'aient pas auparavant déposé de plainte ou alerté ou fait valoir un droit de retrait il n'invalide pas leur témoignage, pas plus que ne l'invalident les témoignages de collaboratrices ayant travaillé dans d'autres entreprises avec M. [YZ] et qui énoncent n'avoir jamais eu à se plaindre ni à constater de propos sexistes, déplacés ou équivoques de la part de M. [YZ], soulignant cela étant un 'humour familier ou potache qui était le sien' et 'pouvait être mal interprété', 'les bonnes petites blagues' et le fait que les collaboratrices n'étaient pas 'les dernières à rire'.
Les témoins susvisés rapportent, dans les termes exacts visés dans la lettre de licenciement, des propos de M. [YZ] tenus à leur égard outre les propos suivants entendus par elles 'j'espère que tu vas sucer ton mec pour la saint Valentin et que tu vas être gentille, baisez bien', 'alors les filles vous avez bien baisé pour la saint Valentin' 'vous serez gentilles avec vos mecs vous les sucerez bien', 'ce qui m'a le plus marqué c'est le déjeuner où M. [YZ] a désigné les filles avec son doigt en disant moi je couche avec toi lundi, toi je te prends mardi etc..', 'j'ai vu [C] [YZ] dessiner un sexe dans l'assiette d'une collaboratrice', 'arrête de maigrir on ne voit plus que tes seins' .
Ainsi, sans qu'il y ait lieu d'examiner le procès-verbal d'huissier dressé le 9 novembre 2020 pour constater les sites consultés par le salarié pendant le temps de travail et les contestations émises à son sujet dès lors qu'aucun fait y afférent n'est visé dans la lettre de licenciement, il y a lieu de considérer comme entièrement établis les faits visés dans la lettre de licenciement, le fait que le recadrage contenu dans l'entretien d'évaluation 2017-2018 n'ait pas visé ce type de comportement étant inopérant.
- Le management
La lettre de licenciement expose que malgré les demandes de se ressaisir lors de l'entretien d'évaluation 2017-2018, des difficultés ont été rapportées : M. [YZ] ne répond pas aux questions de ses collaboratrices sur la gestion des dossiers les renvoyant sur le chargé de recrutement de [Localité 7] qui subit une pression considérable, M. [YZ] fait preuve d'une attitude négative et oppressante, se met en avant, valorise uniquement ses actions, critique et dévalorise leurs démarches, qu'il prend un ton moqueur avec la chargée d'affaires de [Localité 7], qu'il impose à la chargée d'affaires de [Localité 8] une pression qu'elle qualifie de vrai cauchemar, que ses collaboratrices ont peur de l'attitude qu'il pourrait adopter si elles n'allaient pas dans son sens, qu'il essaye de récupérer des clients auprès des collaboratrices qui ont déjà effectué des démarches commerciales, qu'il adopte une attitude sans gêne chez les clients.
La lettre de licenciement ne donne à tous ces égards pas d'exemples plus précis.
S'agissant de l'entretien d'évaluation 2017-2018 il convient de relever que face à la remarque de sa supérieure 'Nous comptons sur [C] pour qu'il se ressaisisse tant sur sa motivation que sur l'ambiance qu'il doit créer autour de lui, retrouver une positive attitude dans son ensemble. Son rôle est de redynamiser ses équipes non de les démotiver' M. [YZ] avait opposé n'être pas d'accord avec ces propos, lesquels n'étaient pas étayés non plus d'exemples précis et que par la suite M. [YZ] a bénéficié d'une promotion de responsable inter-agences.
Pour preuve des problèmes de management, la société Adéquat fait référence aux témoignages des salariés susvisés dont il convient de constater qu'ils s'expriment soit par des généralités, soit sans avoir constaté de faits directement.
Ainsi, Mme [I] rapporte principalement des confidences reçues de collègues et non des faits personnellement constatés, le seul fait personnellement constaté ayant trait à l'accueil qu'il lui aurait fait en févier 2019 en lui disant qu'il ne la formerait pas.
Mme [G] indique que M. [YZ] est sans gêne ou lui répond 'demande à [J]' ou 'attends je vais demander à [J] pour être sûr de ne pas te dire de bêtises' quand elle lui pose des questions.
Mme [T] indique que M. [YZ] est devenu inexistant, exécrable et détestable mais ne cite que trois faits à savoir qu'il lui disait qu'elle avait le siège pour l'aider quand elle avait des interrogations, qu'il disait 'et bien moi j'ai replacé 5 gars' si on lui parlait d'une baisse et enfin que deux clients lui auraient indiqué que ce n'était pas la peine de revenir avec lui, ajoutant qu'elle n'a pas la même approche ni la même façon de fidéliser un client, témoignage duquel il ne résulte pas précisément de quoi se seraient plaints les clients, qu'elle était l'interrogation précise qu'il n'aurait pas satisfaite.
Mme [S] atteste qu'elle n'a pas eu d'accompagnement terrain ni d'aide pour la prospection, n'avait pas le droit de visiter les prospects grands comptes ni les industries et était limitée à une clientèle de PME et à certains secteurs, sans que ce témoignage soit accompagné de quelques éléments que ce soit sur les attributions contractuelles de cette salariée.
Mme [A] atteste que M. [YZ] ne l'a 'pas forcément aidée pour l'obtention de son BTS et ne s'est pas préoccupé de savoir si en 3 jours elle avait le temps de faire le travail demandé' sans être plus précise.
Mme [D] fait état d'échanges avec '[X] et [U]' en qui elle 'a toute confiance' sans avoir par elle-même constaté des comportements de M. [YZ].
De ce qui vient d'être exposé il résulte que ne sont évoqués que des éléments insuffisamment circonstanciés et précis pour établir un comportement fautif.
- Gestion administrative des agences
La lettre de licenciement fait mention de déclarations d'accident du travail tardives (réception du certificat de soins de M. [K] le 24 octobre et déclaration le 14 novembre, accident de M. [P] ayant eu lieu le 27 juin et déclaré le 14 novembre), de l'absence de visites médicales sur postes à risques (délégations de M. [O], M. [H], M. [R], M. [V]), de DUE tardives (déclarations de M. [N], de M. [Y] et de M. [Z]).
M. [YZ] verse aux débats les fiches de poste des assistant administratif, responsable d'agence et chargé d'affaires pour soutenir que cette gestion administrative ressortait de leur domaine d'attribution et ne lui incombait pas à lui personnellement.
Ce point n'est pas véritablement contesté par la société Adéquat qui soutient qu'il incombe à M. [YZ] de s'assurer du respect des procédures, de veiller à fournir le support nécessaire et de fournir toute assistance nécessaire.
Or, elle n'apporte pas d'éléments établissant une défaillance fautive de M. [YZ] dans la gestion des dossiers en question, les seules pièces produites n'actant que les dates de déclarations litigieuses ou d'une absence de visite médicale sans établir une négligence précise personnelle de M. [YZ] dans le suivi.
De ce qui vient d'être exposé il résulte que seuls sont établis les propos sexistes que la circonstance qu'ils aient été tenus de façon répétée et récurrente à l'égard de collaboratrices par leur supérieur hiérarchique doté d'expérience rendent particulièrement fautifs, ce qui justifie le prononcé d'une mesure de licenciement, l'observation du salarié, non contestée, suivant laquelle il n'aurait pas été remplacé dans son poste ne mettant pas à néant la réalité des propos à caractère sexiste reprochés qui constituent en eux-mêmes un motif de licenciement, sans toutefois empêcher la poursuite du contrat pendant le temps du préavis, étant de surcroît rappelé que sur les trois griefs visés pour fonder une faute grave deux ne sont pas établis.
Ceci ouvre droit au paiement du salaire pendant la mise à pied, d'une indemnité de préavis pour le montant réclamé dès lors que le salaire qui aurait dû être perçu s'établit effectivement au montant avancé par le salarié correspondant à la moyenne des trois derniers mois travaillés avant la mise à pied, outre à une indemnité de licenciement calculée sur la base des 12 derniers mois de salaire et d'une ancienneté de 5 ans et 11 mois soit une somme de 6 448,71 euros.
La remise des documents demandés sera ordonnée sans qu'il y ait lieu de l'assortir d'une astreinte en l'absence d'allégation de circonstances le justifiant.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement entrepris.
Et statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Adequat 135 à payer à M. [YZ] les sommes de :
- 14 241,15 euros à titre de rappel de salaire
- 1 424,12 euros à titre de congés payés afférents
- 2 215,40 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied
- 221,54 euros à titre de congés payés afférents
- 13 814,73 euros à titre d'indemnité de préavis
- 1 381,47 euros à titre de congés payés afférents
- 6 448,71 euros à titre d'indemnité de licenciement
- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne la société Adequat 135 à remettre à M. [YZ], dans le délai de deux mois de la signification du présent arrêt, un bulletin de salaire par année, une attestation Pôle emploi, un certificat de travail conformes au présent arrêt.
Déboute M. [YZ] du surplus de ses demandes.
Condamne la société Adequat 135 aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD L. DELAHAYE