AFFAIRE : N° RG 20/02709
N° Portalis DBVC-V-B7E-GUOX
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de COUTANCES en date du 25 Novembre 2020 - RG n° 16/00140
COUR D'APPEL DE CAEN
2ème chambre sociale
ARRÊT DU 02 MARS 2023
APPELANT :
Monsieur [W] [O]
[Adresse 2]
Comparant en personne, assisté de Me Lionel HEBERT, avocat au barreau de RENNES
INTIMES :
Etablissement Public POLE EMPLOI
[Adresse 1]
Représenté par Me Ghislain DINTZNER, substitué par Me TREDAN, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5]
[Adresse 6]
Représentée par M. [Y], mandaté
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme CHAUX, Présidente de chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
DEBATS : A l'audience publique du 05 janvier 2023
GREFFIER : Mme GOULARD
ARRÊT prononcé publiquement le 02 mars 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. [O] d'un jugement rendu le 25 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Coutances dans un litige l'opposant à Pôle Emploi, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5].
FAITS et PROCEDURE
M. [W] [O] a été engagé en qualité d'agent à compter du 23 mai 1983 par l'Assedic, devenue Pôle Emploi en 2009 à la suite de la fusion avec l'Agence nationale pour l'emploi.
Il a exercé diverses fonctions en qualité tant de cadre dirigeant au sein des différentes directions régionales qu'en tant qu'inspecteur général à la direction générale.
Il a été en arrêt de travail du 16 août 2012 au 15 janvier 2013.
Par avenant n° 6 à son contrat de travail, il a été promu à compter du 1er février 2013 aux fonctions de directeur général adjoint en charge des opérations de Pôle Emploi [Localité 3], placé sous l'autorité hiérarchique du directeur régional.
A compter du 1er janvier 2014, il a été désigné pour remplacer par intérim, M. [Z] [M], directeur adjoint régional en charge des moyens généraux de la région [Localité 3].
Le 14 avril 2014, M. [O] a été victime d'un infarctus du myocarde, hospitalisé en urgence et placé en arrêt de travail jusqu'au 11 mai 2014.
Cet accident a fait l'objet d'une déclaration d'accident du travail le 27 février 2015 sur demande faite le 23 février 2015 par le salarié.
Par courrier du 9 mai 2014 , Pôle Emploi a transmis à M. [O] la décision le nommant par intérim, aux fonctions de directeur régional de Pôle Emploi [Localité 3] à compter du 1er juin 2014.
Le 13 octobre 2014, il a été victime d'un second infarctus survenu juste avant le décollage de l'avion qui le menait à [Localité 7] pour une réunion professionnelle. Il est redescendu et s'est rendu au CHU de [Localité 4].
Une déclaration d'accident du travail a été établie le 14 octobre 2014.
Son état de santé a été déclaré consolidé le 29 décembre 2015, à la suite du premier infarctus, et à la date du 14 juin 2016 sans séquelles indemnisables pour l'accident du 13 octobre 2014.
Un taux d'incapacité permanente partielle a été fixé et une rente accident du travail lui a été attribuée à compter du 30 décembre 2015.
Ces deux accidents ont été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] (la caisse) au titre de la législation professionnelle, par décisions des 3 novembre 2015 et 3 juin 2016.
Un accord de rupture conventionnelle de son contrat de travail a été établi le 22 janvier 2015 à effet du 15 mars 2015.
Le 1er septembre 2016, M. [O] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de [Localité 5] d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur à l'origine de ses deux accidents du travail.
Par jugement du 25 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Coutances, auquel a été transféré le contentieux de la sécurité sociale à compter du 1er janvier 2019, a :
- débouté M.[O] de son action tendant à la reconnaissance d'une faute inexcusable commise par son employeur, Pôle Emploi, comme étant à l'origine de ses deux accidents du travail des 14 avril 2014 et 13 octobre 2014 et par suite, de toutes ses prétentions subséquentes,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [O] aux dépens,
- rejeté toute autre demande.
Par déclaration du 9 décembre 2020, M. [O] a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses conclusions, reçues au greffe le 28 septembre 2022 et soutenues oralement par son conseil, M. [O] demande à la cour de le recevoir en son recours et le dire bien fondé, d'infirmer le jugement déféré et:
- de débouter Pôle Emploi de l'ensemble de ses demandes,
- de dire que les accidents du travail dont il a été victime alors qu'il était salarié de Pôle Emploi et reconnus en date des 3 novembre 2015 et 3 juin 2016, résultent d'une faute inexcusable de Pôle Emploi,
En conséquence,
- voir ordonner la majoration de la rente à son maximum,
- condamner Pôle Emploi à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des souffrances physiques et morales endurées,
- déclarer le jugement à intervenir commun et opposable à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5],
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- condamner Pôle Emploi à lui verser une indemnité de 8 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Pôle Emploi aux entiers dépens.
Par conclusions reçues au greffe le 21 novembre 2022 et soutenues oralement par son conseil, Pôle Emploi demande à la cour:
- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu le caractère professionnel des accidents de M. [O] des 14 avril et 13 octobre 2014,
- de confirmer qu'aucune faute inexcusable ne peut lui être reprochée et imputée,
- de débouter M. [O] de l'ensemble de ses demandes en tant qu'elles ne sont pas fondées,
A titre subsidiaire,
- de réduire à de plus justes proportions les sommes demandées,
- de condamner M. [O] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner M. [O] aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions reçues au greffe le 30 novembre 2022, soutenues oralement à l'audience par son représentant, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] demande à la cour de :
A titre principal:
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire le jugement devait être infirmé,
Sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et ses conséquences financières:
- prendre acte que la caisse s'en rapporte sur le principe de la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur de M. [O],
Sur la majoration de rente:
- dire que la majoration de rente sera avancée par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5],
Sur l'indemnisation des préjudices:
A titre principal sur ce point: débouter M. [O] de ses demandes d'indemnisation au titre des souffrances endurées,
A titre subsidiaire: réduire à de plus justes proportions le montant des indemnisations sollicitées
Sur l'action récursoire de la caisse:
- dire que les décisions de prise en charge au titre de la législation professionnelle du 3 novembre 2015 et du 3 juin 2016 sont bien fondées,
- faire droit à l'action récursoire de la caisse par application de l'article L 452-3-1 du code de la sécurité sociale,
- dire que dans le cadre de son action récursoire, la caisse récupérera l'intégralité des sommes dont elle est tenue de faire l'avance, majoration de rente et préjudices extrapatrimoniaux limitativement énumérés, auprès de l'employeur dont la faute inexcusable sera reconnue,
- condamner l'employeur aux dépens.
A l'audience, le représentant de la caisse précise qu'il modifie le dispositif de ses conclusions en ce que la caisse demande à récupérer l'intégralité des sommes dont elle est tenue de faire l'avance, majoration de rente et préjudices limitativement énumérés et non limitativement énumérés.
Il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation des moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
SUR CE, LA COUR
- Sur la demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur
- sur le caractère professionnel des accidents
Pôle Emploi conteste le caractère professionnel des infarctus du myocarde subis par M. [O] les 14 avril 2014 et 13 octobre 2014, faisant valoir d'une part, qu'il ne peut être exclu que les deux malaises trouvent leur origine dans une pathologie préexistante, sans lien avec son activité professionnelle au sein de Pôle emploi, qu'il avait antérieurement rencontré des problèmes de santé ayant nécessité le suivi d'un protocole de soins au cours du second semestre de l'année 2012, soit bien avant qu'il occupe les fonctions de directeur régional adjoint de Pôle Emploi [Localité 3].
S'agissant des faits du 14 avril 2014, Pôle Emploi expose n'avoir aucun élément en sa possession permettant d'en vérifier la réalité, cet accident n'ayant été porté à sa connaissance par M. [O] que les 23 et 26 février 2015, que le caractère professionnel a été reconnu par la caisse sur la base d'un courrier électronique que le salarié aurait adressé à 7h47, ce qui ne permet de démontrer ni sa présence sur le lieu de travail ni un lien entre son activité professionnelle et son malaise.
S'agissant du malaise du 13 octobre 2014, Pôle Emploi fait valoir qu'il a eu lieu lors d'un trajet professionnel de [Localité 4] au siège de Pôle Emploi à [Localité 7] et que nonobstant la décision de la caisse, il n'est pas possible de conclure de façon certaine et exclusive que sa cause aurait trait à son activité professionnelle.
Aux termes de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu de ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.
Constitue un accident du travail, un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d'apparition de celle - ci.
L'accident survenu pendant le temps de travail et sur le lieu de travail est ainsi présumé être un accident du travail sauf à l'employeur de rapporter la preuve qu'il a une cause totalement étrangère au travail.
- Sur l'accident du 14 avril 2014
La déclaration d'accident du travail en date du 27 février 2015 est rédigée en ces termes:
'- date 14 avril 2014 à 6 h 45
- lieu de l'accident : bureau de la direction régionale
- circonstances détaillées de l'accident: M. [O] était dans son bureau de la direction régionale de [Localité 4]. Il s'est senti mal et s'est rendu au CHU. Il n'a pas appelé le 15 car il était tôt et les secours n'auraient pas pu accéder au bâtiment. Il a été immédiatement pris en charge'.
M. [O] produit un certificat médical du 14 octobre 2014 rédigé par le chef de service des urgences adultes médico-chirurgicales faisant état de 'sensation de malaise et de palpitations, douleur épaule gauche intermittente, essoufflement à l'effort, asthénie intense'.
Il verse également aux débats un courrier électronique professionnel qu'il a adressé le 14 avril 2014 à 7h 37.
C'est donc par une juste appréciation des éléments qui leur étaient soumis que les premiers juges ont retenu d'une part, que ce courrier permettait de justifier de la présence de M. [O] au travail, cette pièce n'étant contredite par aucun élément, et d'autre part, que le malaise survenu soudainement le 14 avril 2014, soit pendant son temps et sur son lieu de travail, caractérisait l'existence d'un fait accidentel, constitutif de l'accident du travail au sens de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale.
- Sur l'accident du 13 octobre 2014
La déclaration d'accident du travail du 14 octobre 2014 est rédigée en ces termes:
' - date: 13 octobre 2014 à 6 h 50
- lieu de l'accident: aéroport de [Localité 4]
- circonstances: devant se rendre à une réunion à [Localité 7], M. [O] a eu un malaise en montant dans l'avion. Il est redescendu avant le décollage. Il s'est rendu au CHU de [Localité 4]
- nature des lésions: intervention chirurgicale et pose d'un stent
- victime transportée au CHU de [Localité 4]
- accident connu le 13 octobre 2014 par ses préposés'
Il est justifié qu'il a été hospitalisé du 13 octobre 2014 à 7h34 jusqu'au 16 octobre 2014.
Le certificat médical du 13 octobre 2014 établi par le professeur [R] de l'unité de soins intensifs de cardiologie du CHU de [Localité 4] fait état d'une ' déstabilisation de maladie coronaire. (...) Hospitalisation en urgence le 13 octobre 2014".
Un arrêt de travail lui a été prescrit jusqu'au 13 décembre 2014.
A l'instar des premiers juges, la cour constate qu'il n'est pas contesté par l'employeur qu'au moment de l'accident, M. [O] se trouvait en déplacement professionnel , que le sinistre étant survenu au temps et au lieu de travail, la présomption d'imputabilité de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale trouve à s'appliquer.
C'est par de justes motifs, que la cour adopte, que le tribunal a retenu que les deux accidents des 13 avril et 14 octobre 2014 bénéficiaient de la présomption d'imputabilité et que Pôle Emploi échouait à renverser cette présomption en soutenant que M. [O] souffrait en 2012 d'un syndrome dépressif réactionnel dont le lien avec les deux accidents litigieux n'est pas rapporté.
L'employeur ne rapportant pas la preuve que les deux infarctus trouvent leur origine dans une cause totalement étrangère au travail, la présomption d'imputabilité n'est pas renversée.
En conséquence, le caractère professionnel des deux accidents est établi à l'égard de l'employeur.
Le jugement déféré sera donc confirmé à cet égard.
- Sur la faute inexcusable
Le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
Il appartient à la victime de justifier que son employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel exposé son salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour le préserver de ce danger.
La conscience du danger doit être appréciée objectivement par rapport à la connaissance de ses devoirs et obligations que doit avoir un employeur dans son secteur d'activité.
En outre, il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident . Il suffit qu'elle en soit la cause nécessaire pour que la responsabilité soit retenue alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage.
Pour apprécier cette conscience du danger et l'adaptation des mesures prises aux risques encourus, les circonstances de l'accident doivent être établies de façon certaine .
- Sur l'état de santé de M. [O]
Après un arrêt de travail du 16 août 2012 au 15 janvier 2013, M. [O] a quitté son poste à l'inspection générale à [Localité 7] pour prendre celui de directeur régional adjoint au sein de Pôle Emploi [Localité 3].
Cette situation correspondait à ses attentes. En atteste le courrier qu'il a adressé à sa collègue Mme [E] - [F] le 23 janvier 2013: ' Je suis satisfait de mon retour dans le réseau. ( ...) Mon passage à l'IG aura été court et malheureusement écourté par mon problème de santé qui ne m'a pas permis de finaliser le rapport ( ...) Tu as raison, il va falloir que je me préserve. Mon médecin que j'ai revu m'a de nouveau alerté sur le fait que je dois faire attention. ( ...) J'ai la chance de rejoindre un DR qui m'a choisi et nous avons tous les deux une forte envie de collaborer et de faire avancer l'offre de service en [Localité 3].'
Si ce courrier fait état de problèmes de santé, M. [O] ne les impute pas à son activité professionnelle.
Lors de la visite médicale de reprise du 18 mars 2013, il a été déclaré apte à la reprise du travail par le médecin du travail qui mentionnait qu'il serait à revoir dans deux ans.
Le certificat médical établi par le médecin du travail le 10 mars 2015, qui indique que la pathologie est 'fortement susceptible d'être en lien avec le travail' ne peut être retenu au titre de la faute inexcusable puisque par courrier du 7 novembre 2016 adressé à Pôle Emploi, il indique que ce certificat médical ne fait que reprendre les conditions de travail décrites par M. [O] lui - même.
Le médecin du travail n'a donc fait aucune constatation par lui - même de sorte que le lien avec le travail n'est pas démontré par ce certificat.
Par ailleurs, il convient de relever que si M. [O] a usé de la faculté de bénéficier du suivi médical annuel des cadres dirigeants auprès du centre interprofessionnel études et examens médicaux ( CIEM) entre 2002 et 2008, il a cessé d'honorer les rendez vous qui lui avaient été fixés à partir de 2009 et ce jusqu'en 2012.
A cet égard, il convient de souligner que le ' bilan traditionnel ' proposé annuellement aux cadres dirigeants est particulièrement complet en ce qu'il consiste en des examens biologiques, fonctionnels, d'imagerie médicale, de consultation de médecine interne avec notamment évaluation du stress et des troubles du sommeil, consultation de cardiologie ( interrogatoire clinique, électrocardiogramme au repos, test d'aptitude à l'effort ...).
En revanche, il a refait un dernier bilan le 8 octobre 2014, soit 5 jours avant son second infarctus du 14 octobre 2014 et aucun élément du dossier ne démontre qu'il aurait été alerté d'un risque médical quelconque en lien avec son activité professionnelle.
Dès lors, M. [O] ne démontre pas que Pôle Emploi avait connaissance de problèmes de santé en lien avec son activité professionnelle.
- Sur la surcharge de travail
M. [O] fait valoir qu'il a dû remplacer M. [Z] [M], directeur régional adjoint à compter du mois de janvier 2014, que pendant son arrêt de travail du mois de mai 2014, Pôle Emploi lui a annoncé par courrier qu'il allait assurer l'intérim de M. [D] [T], directeur régional à compter du 1er juin 2014, et ce, tout en faisant face au départ du directeur des opérations, M. [C] le 20 juin 2014 et du médiateur régional, M. [K] à la fin du mois de juin 2014; qu'en dépit de ce contexte particulièrement difficile, il a dû assurer ses propres fonctions et s'est trouvé dès lors soumis à une très
forte pression, cumulant les plus hautes fonctions de direction de Pôle Emploi [Localité 3],ce qui induisait une surcharge de travail considérable, sans que lui aient été accordés une assistance et des moyens supplémentaires, sans que l'employeur ne modifie l'organigramme afin de lui permettre de protéger sa santé, et en ne lui accordant pas la totalité de ses congés pour la période estivale.
Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il est établi par les pièces versées aux débats, notamment par le courrier du 9 mai 2014 par lequel Pôle Emploi lui a notifié sa nomination par intérim aux fonctions de directeur régional de Pôle Emploi [Localité 3] à compter du 1er juin 2014, par les attestations de M. [X] [J], chargé de mission, et de M. [A] [I], conseiller à l'emploi , et non contesté par l'employeur, que M. [O] a dû assumer la charge de plusieurs postes pendant une longue période, ce qui a pu être un facteur de stress.
Cependant, M. [O] ne rapporte pas la preuve que l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du risque auquel était exposé son salarié.
En effet, il ne produit aucun élément établissant qu'il aurait alerté son employeur sur le caractère excessif de la charge de travail qu'il allègue aujourd'hui.
Si l'examen de ses demandes de congés établit que sur les 7 jours de congés qu'il avait sollicités pour le mois de juillet 2014 , seuls 4 lui ont été accordés, il ne démontre pas avoir fait part à l'employeur de la nécessité pour lui de prendre plus de congés du fait du surcroît de travail qui auquel il devait faire face.
D'ailleurs , M. [O] a indiqué dans son courrier qu'il a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie le 4 mai 2016, ' comme je l'évoque plus haut, mon expérience m'a préparé à gérer les situations complexes et exceptionnelles. Ma motivation, mon allant, mon goût du challenge me permettent de faire face à ce type de situation transitoire que j'avais déjà rencontrée dans mon passé professionnel. Mais l'accumulation de difficultés, le contexte particulier ont rendu difficile et prégnant l'exercice de mon travail au quotidien (....). Je le répète, j'insiste, le niveau de responsabilités que j'assure depuis une vingtaine d'années m'a préparé et habitué à faire face et régler des situations complexes, en nombre important et avec un niveau de pression rencontré habituellement au niveau de fonctions que je devais assurer.'
Dans ce même courrier, il indique : ' Je postule au poste de DR ( directeur régional ) [Localité 3]; je n'ai pas d'entretien avec la DG pour discuter de ma candidature. Lors d'une réunion mensuelle des DR à [Localité 7], on me dit que compte tenu de mon état de santé , il n'est pas souhaitable que je continue l'intérim au-delà du mois de septembre.'
Il souligne également: ' Mon entourage professionnel me faisait part que mon état de santé les préoccupait . Je n'avais bien évidemment aucune conscience de la situation que je qualifierais aujourd'hui de surmenage que je supportais à l'époque. Rétrospectivement, avec le recul , je me rends compte que j'étais en surrégime et que je n'en pouvais plus. '
Il ressort de l'ensemble de ces éléments, que non seulement il n'établit pas s'être plaint auprès de son employeur de ses conditions de travail mais en outre, il n'a pas hésité à présenter, dans ce contexte, sa candidature au poste de directeur régional.
Dans ces conditions, il ne démontre pas que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté sa demande de reconnaissance de faute inexcusable à l'origine de ses deux accidents du travail des 14 avril 2014 et 13 octobre 2014.
- Sur les demandes accessoires
Le jugement déféré étant confirmé, il le sera également s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.
M. [O] qui succombe supportera les dépens d'appel et sera débouté de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité ne commande pas de faire droit à la demande présentée par Pôle Emploi au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne M. [O] aux dépens d'appel,
Déboute M. [O] et Pôle Emploi de leur demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX