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02/02/2023 | FRANCE | N°20/01420

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale section 3, 02 février 2023, 20/01420


AFFAIRE : N° RG 20/01420

N° Portalis DBVC-V-B7E-GSAO

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ALENCON en date du 14 Octobre 2011 - RG n° 21100011











COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 3

ARRÊT DU 02 FEVRIER 2023





APPELANTE :



S.A. [22]

[Adresse 16]

[Localité 2]



Représentée par Me Hubert GUYOMARD, avocat au barreau d'ALENCONr>




INTIMEES :



URSSAF DE NORMANDIE venant aux droits de l'URSSAF de Basse-Normandie

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau d'ALENCON



COMMUNAUTE URBAINE D'[Localité ...

AFFAIRE : N° RG 20/01420

N° Portalis DBVC-V-B7E-GSAO

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ALENCON en date du 14 Octobre 2011 - RG n° 21100011

COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 3

ARRÊT DU 02 FEVRIER 2023

APPELANTE :

S.A. [22]

[Adresse 16]

[Localité 2]

Représentée par Me Hubert GUYOMARD, avocat au barreau d'ALENCON

INTIMEES :

URSSAF DE NORMANDIE venant aux droits de l'URSSAF de Basse-Normandie

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau d'ALENCON

COMMUNAUTE URBAINE D'[Localité 2]

[Adresse 13]

[Localité 2]

Non comparante ni représentée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme CHAUX, Présidente de chambre,

M. LE BOURVELLEC, Conseiller,

M. GANCE, Conseiller,

DEBATS : A l'audience publique du 17 novembre 2022

GREFFIER : Mme GOULARD

ARRÊT prononcé publiquement le 02 février 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la société [22] d'un jugement rendu le 14 octobre 2011 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Orne dans un litige l'opposant à l'Urssaf de l'Orne en présence de la communauté urbaine d'[Localité 2], intervenant volontairement à l'instance.

FAITS et PROCEDURE

Par délibération du 18 décembre 2008, la communauté urbaine d'[Localité 2] a étendu son périmètre géographique des transports urbains à compter du 1er septembre 2009 à neuf nouvelles communes dont la [Localité 10].

Le 31 mars 2010, la société [22] ( la société) , située sur la commune de [Localité 14], a reçu un courrier de l'Urssaf de l'Orne lui indiquant qu'elle était redevable à compter du 1er septembre 2009 du versement transport appelé ' taxe transport' prévu par l'article L 2333-64 du code général des collectivités territoriales.

A cette fin, l'Urssaf lui a notifié plusieurs mises en demeure:

- du 18 mai 2010 d'un montant de 6311 euros au titre des mois de janvier, février et mars 2010,

- du 15 juin 2010 en paiement de la somme de 3664 euros pour les mois d'avril et mai 2010,

- du 27 juillet 2010 pour règlement de 3409 euros pour le mois de juin 2010,

- du 27 août 2010 d'un montant de 8313 euros pour l'année 2009 (de septembre à décembre 2009) .

Le 24 juin 2010, la société a saisi la commission de recours amiable pour contester le bien fondé de ces mises en demeure.

Par décision du 30 septembre 2010, la commission a :

Sur la mise en recouvrement du versement transport à compter du 1er septembre 2009:

- considéré que l'Urssaf a fait une juste application des textes,

- confirmé la validité des mises en demeure du 18 mai 2010, 15 juin 2010, 27 juillet 2010 et 27 août 2010,

Sur l'application des majorations de retard :

- décidé d'annuler les majorations de retard de 572 euros au titre de la mise en demeure du 27 août 2010 et de 346 euros au titre de la mise en demeure du 18 mai 2010.

Le 12 janvier 2011, la société a contesté cette décision devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Orne.

Par jugement du 14 octobre 2011, ce tribunal a :

- déclaré la société [22] irrecevable à contester la mise en demeure du 28 septembre 2010,

- déclaré la société [22] irrecevable à soulever l'irrégularité formelle des mises en demeure des 18 mai 2010, 15 juin 2010, 27 juillet 2010, et 27 août 2010,

¿ débouté la société [22] de sa fin de non recevoir tirée de la rétroactivité du versement transport,

- débouté la société de son recours et déclaré les mises en demeure contestées bien fondées pour les sommes suivantes:

¿ 18 mai 2010 pour les mois de janvier, février et mars 2010 : 5 965 euros,

¿ 15 juin 2010, pour les mois d'avril et mai 2010 : 3 664 euros

¿ 27 juillet 2010 pour le mois de juin 2010 : 3 235 euros

¿ 27 août 2010 pour l'année 2009 : 7 741 euros

- condamné la société au paiement desdites sommes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- rappelé que la procédure est gratuite et sans frais en application de l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale.

Par déclaration du 16 novembre 2011, la société a interjeté appel de ce jugement.

L'affaire a été radiée par ordonnances des 5 septembre 2013, 4 février 2016 et 6 septembre 2018.

Le 7 août 2020, la société a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle des affaires en cours.

Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 7 août 2020 et soutenues oralement à l'audience par son conseil, la société demande à la cour de la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes,

Y faire droit et en conséquence,

- de réformer le jugement déféré,

- d'exclure de la base de calcul des cotisations certaines catégories de salariés dont celles des travailleurs itinérants qui n'exercent pas à titre principal leur activité dans la zone d'application du versement transport de septembre 2009 à juin 2010,

- d'ordonner à l'Urssaf de Basse-Normandie de lui adresser un décompte modifié en conséquence,

- d'ordonner à l'Urssaf de Basse-Normandie de produire un tableau rectificatif de la contribution ' versement transport' dont figure ( sic) les sommes à rembourser à la société [22] et assortir le remboursement des intérêts au taux légal à compter de la date du versement soit le 4 novembre 2011,

- de condamner l'Urssaf de Basse- Normandie à lui verser:

* le trop - perçu assorti des intérêts au taux légal à compter de la date du versement, soit le 4 novembre 2011, au titre du versement transport pour la période du 1er septembre 2009 au 30 juin 2010,

* la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de supporter les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Guyomard, avocat aux offres de droit.

Par conclusions reçues au greffe le 27 avril 2022, l'Urssaf de Normandie venant aux droits de l'Urssaf de Basse -Normandie demande à la cour de:

- confirmer le jugement déféré,

Y ajoutant,

- rejeter les contestations et demandes de la société [22],

- condamner la société [22] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par courrier du 6 juin 2022, la communauté urbaine d'[Localité 2], par la voie de son conseil, a informé la cour qu'elle ne se ferait pas représenter devant la cour et qu'elle ne prendrait pas d'écritures dans la mesure où aucune demande n'est formée à son encontre.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

SUR CE, LA COUR

Suivant les dispositions de l'article L 2333-64 du code des collectivités territoriales, le versement transport est dû par toute personne physique ou morale qui emploie plus de neuf salariés dont le lieu de travail est situé dans le périmètre de transport urbain.

Le versement transport est une contribution locale à la charge des employeurs, recouvrée par l'Urssaf puis reversée aux autorités organisatrices de transport.

Devant la cour, la société remet en cause l'intégration dans l'assiette de calcul de cette taxe, des salaires versés à des salariés dont l'activité s'exerce ,selon elle, hors de la zone de périmètre de transport.

Il n'est pas contesté que le 'versement transport' est dû pour tout salarié dont le lieu de travail effectif est situé dans le périmètre de transport.

Le critère d'assujettissement à ce versement n'est pas le lieu d'implantation de l'entreprise mais le lieu effectif de travail des salariés conformément aux dispositions de l'article D 2333-87 du code général des collectivités territoriales ( dans sa version antérieure au décret 2017-858), en sorte qu'un salarié ne peut être pris en compte pour l'assujettissement de son employeur au versement transport que si son lieu effectif de travail, à l'exclusion de l'établissement auquel il est rattaché, se situe dans le périmètre où est institué ce versement.

Il appartient à l'employeur de démontrer que les salariés, qu'il entend exclure de l'effectif, exercent leur activité pendant la majeure partie de leur temps de travail en dehors du champ territorial du versement transport.

Par l'effet d'une délibération du 18 décembre 2008 de la communauté urbaine d'[Localité 2] et de deux arrêtés préfectoraux du 25 août 2009, le périmètre des transports urbains dont s'agit comprend l'ensemble des communes de la communauté urbaine d'[Localité 2] et a été étendu au territoire des communes de [Localité 17], [Localité 12], [Localité 18], [Localité 14], [Localité 5], [Localité 8], [Localité 7], [Localité 23], [Localité 24] à compter du 1er septembre 2009.

Il convient donc d'examiner la contestation de la société en distinguant les différentes catégories de salariés.

1) Les commerciaux

Les bulletins de salaire de septembre 2009 et juin 2010 de M. [X] [C], attaché commercial, embauché par contrat de travail du 1er septembre 1998, mentionnent qu'il est domicilié en Seine et Marne à [Localité 4].

M. [U] [D] a été embauché à compter du 1er novembre 2001 en qualité d'agent commercial ainsi qu'en justifie son contrat de travail.

Ses bulletins de salaire de septembre 2009 et juin 2010 indiquent qu'il est domicilié à [Localité 21] .Par deux attestations du 26 avril 2017 et 24 février 2020, il relate être attaché au siège social de la société [22] mais sans y avoir de bureau, être la majorité de son temps en déplacement ou sur les différents sites de la société, sa fonction consistant à prospecter et à visiter les clients dont il a la gestion.

M. [K] [R], engagé à compter du 26 février 2001 en tant que directeur commercial, ainsi qu'il ressort de son contrat de travail, atteste par écrits des 25 avril 2017 et 21 février 2020 qu'il est rattaché administrativement au siège de la société à [Localité 14], mais qu'il n'y dispose d'aucun bureau, qu'il exerce son travail soit depuis son domicile, soit dans le cadre de déplacements en clientèle ou sur différents sites du groupe [25] , sa fonction consistant à prospecter et à visiter la clientèle .

Ses bulletins de salaire de septembre 2009 et juin 2010 indiquent qu'il est domicilié à [Localité 6].

Le contrat de travail de M. [M] [A] , versé aux débats, établit qu'il a été embauché en tant que responsable commercial à compter du 4 septembre 2000.

Ses bulletins de salaire de septembre 2009 et juin 2010 mentionnent qu'il est domicilié à [Localité 15] en Mayenne. Il atteste que son travail consiste à visiter un ensemble de clients et des sièges sociaux, qu'il est en permanence en déplacement clientèle ou sur certains sites.

M. [E] [O], directeur des ventes, expose , par écrit du 27 avril 2017, que sa fonction consiste à prospecter et à gérer les grandes enseignes de la distribution française, qu'il est régulièrement en déplacement en clientèle ou sur différents sites notamment en région parisienne ou sur la métropole lilloise. Ses bulletins de salaire de septembre 2009 et juin 2010 mentionnent un domicile à [Localité 6].

M. [Z] [B], commercial des grossistes, est domicilié à [Localité 9] ainsi qu'en attestent ses bulletins de salaire de novembre 2009 et juin 2010.

Force est de constater que les bulletins de salaire et les attestations de ces salariés ne sont pas corroborés par des éléments objectifs permettant de vérifier leurs secteurs géographiques d'activité. En effet, les contrats de travail produits ne mentionnent aucun secteur géographique qui leur serait attribué. En outre, les intéressés ne produisent aucune pièce tels que tickets de péage et / ou relevés de frais professionnels de nature à établir que leur lieu de travail effectif se situe en dehors du périmètre du versement transport.

Il n'y a donc pas lieu d'exclure les salaires de ces commerciaux de l'assiette du versement transport pour la période du 1er septembre 2009 au 30 juin 2010.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

2) Les experts groupe

Il est établi au vu des pièces produites que M. [G] [I], responsable centre de gestion, est domicilié à [Localité 20].

M. [Y] [U], alors co- gérant de la société [19], atteste que M. [I] arrivait tous les matins à [Localité 11] ( 95) vers 8h15 et qu'il en repartait vers 17h30 / 18 heures, qu'il effectuait des heures de travail normales au bureau de [Localité 11].

Ainsi, il est démontré que sur la période examinée, septembre 2009 à juin 2010, le lieu de travail effectif de M. [I] se trouvait dans le Val d'Oise, en dehors du périmètre du versement transport.

Il convient donc, par voie d'infirmation, d'exclure ses rémunérations, pour cette période , de l'assiette du versement transport.

3) Les chauffeurs routiers

L'Urssaf renonce à tout redressement les concernant, au regard d'un précédent arrêt rendu par la présente cour le 9 mai 2019.

Il convient donc d'exclure les rémunérations de trois chauffeurs routiers, M. [L] [T] , M. [V] [N] et M. [W] [F] sur la période du 1er septembre 2009 au 30 juin 2010, de l'assiette du versement transport.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

4) Les mécaniciens détachés

La société fait valoir que M. [S] [P] et M. [H] [J], en leur qualité de mécaniciens détachés, travaillent plus de la moitié de leur temps en dehors de la communauté urbaine d'[Localité 2].

La mention de l'attribution d'une prime d'éloignement sur leurs bulletins de salaire ne suffit pas à démontrer la réalité de cette situation.

En outre, si leurs passeports, versés aux débats, portent mention de visas qui leur ont été accordés, aucun ne l'a été sur la période litigieuse comprise entre septembre 2009 et juin 2010.

Il convient donc, par voie de confirmation, de maintenir les salaires qui leur ont été versés au cours de la période du 1er septembre 2009 au 30 juin 200 dans l'assiette de calcul du versement transport.

En conséquence, il convient de réformer le jugement déféré et d'annuler les mises en demeure où le 'versement transport ' a été calculé sur les salaires de M. [I], de M. [L] [T], M. [V] [N] et M. [W] [F] sur la période du 1er septembre 2009 au 30 juin 2010 et de les valider pour le surplus et de confirmer le jugement déféré dans cette mesure.

Il sera sursis à statuer sur le montant de la condamnation à intervenir, à charge pour l'Urssaf d'établir un calcul rectifié des sommes dues.

L'affaire sera donc renvoyée à l'audience du 22 mai 2023 à 14 heures .

Les dépens et les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront donc réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Réforme partiellement le jugement déféré,

Annule les mises en demeure où le 'versement transport ' a été calculé sur les salaires de M. [I], de M [L] [T], M. [V] [N] et M. [W] [F] sur la période du 1er septembre 2009 au 30 juin 2010,

Les valide pour le surplus et confirme le jugement déféré dans cette mesure,

Sursoit à statuer sur le montant de la condamnation à intervenir,

Dit que l'Urssaf de Normandie, venant aux droits de l'Urssaf de Basse Normandie, doit établir un calcul rectifié des sommes dues,

Renvoie les parties à l'audience du lundi 22 mai 2023 à 14 heures, Salle Malesherbes - 3ème étage, Cour d'appel, Place Gambetta,

Dit que la notification du présent arrêt valant convocation régulière des parties à l'audience,

Réserve les dépens et les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. GOULARD C. CHAUX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale section 3
Numéro d'arrêt : 20/01420
Date de la décision : 02/02/2023
Sens de l'arrêt : Renvoi

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;20.01420 ?
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