La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/01/2023 | FRANCE | N°21/02411

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre sociale, 19 janvier 2023, 21/02411


AFFAIRE : N° RG 21/02411

N° Portalis DBVC-V-B7F-G2E5

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 22 Juillet 2021 - RG n° F 20/00196







COUR D'APPEL DE CAEN

1ère chambre sociale

ARRET DU 19 JANVIER 2023



APPELANTE :



S.A.S. [Localité 1] POIDS LOURDS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]>


Représentée par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN, substitué par Me QUIGUER, avocat au barreau de RENNES





INTIMEES :



Madame [R] [P]

[Adresse 3]



Madame [F] [P...

AFFAIRE : N° RG 21/02411

N° Portalis DBVC-V-B7F-G2E5

 Code Aff. :

ARRET N°

C.P

ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAEN en date du 22 Juillet 2021 - RG n° F 20/00196

COUR D'APPEL DE CAEN

1ère chambre sociale

ARRET DU 19 JANVIER 2023

APPELANTE :

S.A.S. [Localité 1] POIDS LOURDS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

Représentée par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN, substitué par Me QUIGUER, avocat au barreau de RENNES

INTIMEES :

Madame [R] [P]

[Adresse 3]

Madame [F] [P]

[Adresse 3]

Madame [S] [C] veuve [P]

[Adresse 3]

Représentées par Me FAUTRAT de la AARPI BFL, avocats au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience publique du 14 novembre 2022, tenue par Mme VINOT, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme ALAIN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme DELAHAYE, Présidente de Chambre,

Mme PONCET, Conseiller,

Mme VINOT, Conseiller, rédacteur

ARRET prononcé publiquement contradictoirement le 19 janvier 2023 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme DELAHAYE, présidente, et Mme ALAIN, greffier

M. [P] a été embauché à compter du 3 octobre 2016 en qualité de conseiller des ventes véhicules industriels par la société [Localité 1] poids lourds.

Le 10 juillet 2018, il a mis fin à ses jours sur son lieu de travail.

Le 13 mai 2020 Mme [C] et Mmes [R] [R] et [F] [P], ses ayants-droit ont saisi le conseil de prud'hommes de Caen ès qualités aux fins d'obtenir paiement d'un rappel de commissions, d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires, d'une indemnité pour repos compensateurs non pris et d'une demande de remboursement de frais.

Par jugement du 22 juillet 2021, le conseil de prud'hommes de Caen a :

- condamné la société [Localité 1] poids lourds à payer à Mmes [C] et [P] les sommes de :

- 37 000 euros à titre de rappel de commissions

- 3 700 euros à titre de congés payés afférents

- 5 000 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires

- 500 euros à titre de congés payés afférents

- 1 800 euros à titre de rappel de repos compensateur

- 180 euros à titre de congés payés afférents

- 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- débouté la société [Localité 1] poids lourds de sa demande d'irrecevabilité de la demande additionnelle concernant les repos compensateurs

- débouté les ayants droit de M. [P] de leur demande de remboursement de frais

- débouté la société [Localité 1] poids lourds de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné la société [Localité 1] poids lourds aux dépens.

La société [Localité 1] poids lourds a interjeté appel de ce jugement, en celles de ses dispositions la condamnant au paiement des sommes susvisées et la déboutant de ses demandes.

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions du 9 novembre 2022 pour l'appelante et du 7 novembre 2022 pour les intimés.

La société [Localité 1] poids lourds demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de remboursement de frais

- réformer le jugement pour le surplus

- débouter les ayants droit [P] de toutes leurs demandes

- condamner les ayants droit de M. [P] au remboursement de la somme de 6 480 euros

- à titre subsidiaire juger que les commissions étant prévues congés payés inclus aucune indemnité de congés payés n'est due, juger que le salaire de base permettant le calcul du taux horaire est de 4 199,50 euros

- condamner les ayants droit de M. [P] à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mmes [C] et [P] demandent à la cour de :

- réformer le jugement

- condamner la société [Localité 1] poids lourds à lui payer les sommes de :

- 42 772 euros à titre de rappel de commissions

- 46 127,46 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires

- 4612,74 euros à titre de congés payés afférents

- 16 332,11 euros au titre des repos compensateurs non pris

- 1 633,21 euros à titre de congés payés afférents

- 451,63 euros au titre du remboursement de frais

- 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 9 novembre 2022.

SUR CE

1) Sur le rappel de commissions

Le contrat de travail stipulait que M. [P] percevrait une commission pour chaque véhicule industriel neuf vendu et payé selon le plan de rémunération applicable au jour de la signature du contrat et dont M. [P] a pris connaissance et que toute modification du plan de rémunération devrait être portée à la connaissance du salarié deux mois avant sa mise en application.

Il stipulait en outre : 'les commissions s'entendent congés payés inclus et M. [P] devra soumettre à la direction en l'occurrence M. [J] le prix de vente des véhicules ainsi que l'identité de la clientèle et ce pour accord. L'acceptation de prise de commandes doit être soumise à l'agrément de la direction.'.

Le plan de rémunération des commerciaux 2016 signé de M. [P] mentionnait le montant de la commission brute pour les véhicules industriels (LF 250 euros, CF 382 euros, XF 382 euros), montant brut attribué par conditions cumulatives : bon de commande conforme, livraison assurée par le vendeur et paiement reçu.

Il indiquait en outre : 'Dans le cas de vente multiples chez un même client ou un même groupe, les commissions seront définis par la direction en fonction de la marge'.

Les ayants droit de M. [P] présentent en pièce 9 un document intitulé Ventes [Localité 4] poids lourds faisant mention d'un nombre de 144 véhicules vendus par M. [P] et, sur la base d'une commission de 382 euros, exposent que la somme de 55 008 euros était donc due dont à déduire la somme de 12 236 euros déjà reçue.

Cette pièce 9 se présente comme un tableau dactylographié sur lequel sont portés des chiffres de 'DAF/vendeur' par mois (soit 131 au total pour les mois de janvier à mai 2018 dont 120 en avril) et y ont été rajoutées des mentions manuscrites portant sur 13 ventes à des dates non précisées.

Pour les mentions dactylographiées seul un chiffre est porté et non l'identité des clients.

Suivant les explications de l'employeur le chiffre de 120 en avril correspond à une vente [K], soit une vente multiple.

À cet égard l'employeur soutient que des échanges avaient eu lieu entre M. [P] et la direction sur le montant de la commission [K] qui serait due de 180 euros et que M. [P] n'a d'ailleurs émis aucune contestation à réception des avances de ce montant, que de surcroît le bon de commande n'était pas conforme, que les camions livrés en juillet 2018 n'étaient pas conformes à la commande du client qui a refusé de prendre livraison en l'état, que de gros travaux ont dû être réalisés engendrant une perte financière et que si la vente a certes été réalisée elle l'a été après modifications et que ceci a généré des coûts très importants et impacté la marge de sorte que non seulement aucune commission ne reste due mais qu'encore les avances doivent être restituées.

Cependant, d'une part, aucune justification n'est apportée sur l'origine des erreurs techniques ayant engendré la nécessité de travaux de reprise et spécialement sur la responsabilité qu'aurait eue M. [P] dans ces erreurs, seuls étant produits les témoignages de l'inspecteur du travail (chargé d'une enquête à la suite du suicide il n'avait pas mission de se prononcer sur ce point et ne fait qu'évoquer la découverte de non-confomités, une solution vite trouvée pour y remédier, un coût pour l'entreprise non autrement précisé et évoque par ailleurs un circuit de validation de commande collectif en lien avec la direction), du directeur du constructeur (qui évoque des modifications de commandes sans mettre en cause M. [P]) et de M. [K] (qui précise ne pas savoir pourquoi il y avait des erreurs).

D'autre part, il n'est pas contesté que les livraisons sont finalement intervenues et que le paiement a été reçu.

De plus, alors que sont évoqués des échanges avec M. [P] pour convenir d'une commission réduite, il n'en est pas justifié, pas plus que d'éléments émanant de la direction de nature à expliquer la définition d'une commission moindre notamment en considération d'éléments chiffrés relatifs à la marge.

L'employeur a présenté quant à lui un tableau dans ses conclusions qui n'appelle pas d'observations des ayants droit de M. [P].

Par recoupement avec le tableau du salarié que n'étayent pas d'autres éléments concernant le nombre de ventes et l'identité des clients, seront retenues comme établies 3 ventes en janvier, 5 ventes en février, 120 ventes en avril et 2 ventes en mai, soit 130 ventes pour un montant unitaire de 382 euros, soit une somme due à titre de commissions de 49 660 euros dont à déduire les commissions reçues pour un montant total de 15 028 euros suivant les mentions des bulletins de salaire soit un solde dû de 34 632 euros sans qu'il y ait lieu à congés payés afférents en l'application des stipulations du contrat de travail.

2) Sur les heures supplémentaires

Les ayants droit de M. [P] soutiennent que ce dernier a effectué de nombreuses heures supplémentaires qui ne lui ont jamais été réglées, qu'il arrivait sur son lieu de travail à 7h30 et terminait systématiquement son emploi après 19h.

Ils présentent un tableau indiquant pour chaque jour travaillé une heure de début et une heure de fin d'activité matin et après-midi chaque jour (soit 7h30-12h30 et 14h-19h).

Ce tableau permet à l'employeur de répondre et, à cet égard, ce dernier fait exactement valoir par des explications non contestées en réplique que le tableau a été établi dans des conclusions responsives trois ans après le décès par les ayants-droit eux-mêmes et non par le salarié et, de surcroît, non pas suivant les indications de ce dernier ou des éléments laissés par lui mais suivant le témoignage de Mme [C] lors de l'enquête CPAM indiquant que son mari partait à 6h45 et ne rentrait pas le soir avant 19h30-20h et la déclaration faite par M. [B], collègue, aux services de police 'Il aimait son métier et ne regardait pas les heures. On arrivait souvent le matin en même temps. J'arrive entre 6h30 et 7h. [L] arrivait souvent juste après moi', témoignages qui ne peuvent renseigner sur les horaires accomplis puisque la compagne du salarié n'atteste que de ses heures de départ et retour au domicile

lesquelles ne correspondent pas nécessairement au temps de travail et que M. [B] n'atteste que d'une heure d'arrivée non systématique qui ne peut valoir pour tous les jours de la semaine (et a fortiori ne peut établir l'horaire de travail) ce d'autant que le salarié était commercial, amené à se déplacer et à avoir des horaires variables (et sur ce point, tout en présentant des horaires invariables, les ayants droit indiquent dans leurs conclusions que le temps de M. [P] était 'particulièrement variable').

Dès lors, en l'état des explications et éléments de chacune des parties, l'absence de crédibilité et de réalité des horaires allégués (à savoir que les horaires indiqués ne correspondent pas à des horaires ayant été présentés par le salarié comme étant précisément et réellement les siens et ne peuvent l'être) est avérée et la réclamation n'est donc pas fondée.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

3) Sur le repos compensateur

La demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires n'étant pas fondée cette demande ne l'est pas davantage.

4) Sur la demande de remboursement de frais

Les ayants droit de M. [P] versent aux débats une facture de la société BSPL établie à l'ordre de la société [Localité 4] poids lourds.

Ils se bornent à déclarer contester la motivation du conseil de prudhommes (qui a exposé que la réparation avait été faite dans un autre garage que celui mis à disposition des salariés de la société [Localité 1] poids lourds) sans même indiquer à quoi correspond cette facture et en quoi elle aurait dû être prise en charge par la société [Localité 1] poids lourd.

Le jugement ne pourra qu'être confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement entrepris sauf en celles de ses dispositions ayant débouté les ayants droit de M. [P] de leur demande de remboursement de frais, débouté la société [Localité 1] poids lourds de ses demandes et condamné celle-ci aux dépens.

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Condamne la société [Localité 1] poids lourds à payer aux ayants droit de M. [P] les sommes de :

- 34 632 euros à titre de rappel de commissions

- 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Déboute les ayants droit de M. [P] de leurs demandes à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires et de repos compensateur.

Condamne la société [Localité 1] poids lourds aux dépens de l'instance d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

M. ALAIN L. DELAHAYE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/02411
Date de la décision : 19/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-19;21.02411 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award